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1.2 Physique d’une goutte d’eau

1.2.4 Influence de la rugosité

L’angle de contact est modifié par la rugosité de surface. D’une manière générale, la texturation d’une surface hydrophile la rendra encore plus hydrophile et celle d’une surface hydrophobe plus hydrophobe. Dans ce dernier cas, deux modèles permettent de décrire les variations des angles de contact.

Modèle de Wenzel

La mouillabilité des surfaces hétérogènes a été étudiée par Wenzel en 1936 [32]. Dans ce modèle, la goutte épouse la rugosité et il faut considérer une surface physiquement hétérogène mais chimiquement homogène. La surface est caractérisée par une rugosité notée r (facteur de rugosité). Ce dernier représente le rapport de la surface réelle du matériau sur la surface apparente, c’est-à-dire sa projection sur un plan. De fait, le facteur de rugosité r est toujours supérieur à 1.

FIGURE1.9 – Une goutte de liquide sur une surface rugueuse dans l’état Wenzel. L’angle de Wenzel est donné par les Equations 1.4 et 1.5 en considérant le déplacement d x schématisé en encart.

Nous pouvons ainsi obtenir la relation entre l’angle de contact de Wenzel,θW et l’angle de

Youngθ. Pour cela, il faut mettre en équation la variation d’énergie de surface (dE) lors d’un déplacement (d x) de la ligne de contact, voir Figure 1.9 :

d E = (γSL− γSV)r d x + γLVcosθWd x (1.4)

Ensuite, il suffit de considérer cette équation à l’équilibre, c’est-à-dire quand d E est nul. Nous en déduisons alors l’expression de l’angle de Wenzel en fonction de l’angle de Youngθ et du

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facteur de rugosité r :

cosθW = r cosθ (1.5)

Cela correspond aussi au fait queθ représente l’angle de contact d’une surface lisse alors que

θW représente celui de la même surface (avec une chimie de surface identique) mais avec une

rugosité r .

Ainsi, l’état de Wenzel accentue les propriétés de mouillabilité des matériaux puisque le facteur de rugosité est, par définition, supérieur à 1. En effet, si une surface lisse a initialement un angle de contactθ supérieur à 90° alors la rugosité fera augmenter cet angle et inversement pour un angle de contact initial inférieur à 90°. Ces différentes configurations et évolutions ont été étudiées par Nosonovsky et Bhushan [33] et sont représentées sur la Figure 1.10.

FIGURE1.10 – Évolution de l’angle de contact en fonction de la rugosité à partir d’un angle initialθ0. Une surface hydrophobe le devient davantage lorsqu’elle est rugosifiée. De même, une surface hydrophile le devient davantage lorsque sa rugosité augmente.

Nous avons précisé que dans le modèle de Wenzel, le liquide épouse les rugosités de surface et pénètre donc en les cavités du solide. L’angle de recul prend alors des valeurs très faibles car le liquide reste piégé dans les hétérogénéités de surface. La conséquence directe de ce phénomène est une hystérésis élevée qui augmente encore avec la rugosité : c’est le premier domaine de la courbe de l’expérience de Dettre et Johnson, voir Figure 1.8. Ainsi on pourra facilement attribuer l’état de Wenzel à une goutte dont l’hystérésis de l’angle de contact est élevée avec un angle d’avancée grand et un angle de recul petit. Comme l’a souligné Quéré [34], ce modèle comporte certaines limites, notamment la possibilité d’obtenir des surfaces complètement sèches (θW = 180°) dans le cas d’une rugosité élevée, ce qui n’a jamais

Modèle de Cassie-Baxter

Dans l’état de Cassie-Baxter [35], présenté en 1944, il faut considérer que le liquide ne remplit pas toutes les cavités et aspérités de surface du solide, voir Figure 1.11. Cette configuration a aussi été généralisée aux hétérogénéités chimiques, le cas des matériaux poreux initialement considéré étant alors un cas particulier. Dans cet état, le liquide repose sur les sommets des aspérités du solide, c’est-à-dire sur la fraction de solide fSLet sur la fraction d’air fLV = (1 –

fSL).

FIGURE1.11 – Représentation schématique de l’état de mouillage de Cassie-Baxter sur une surface rugueuse.

Par conséquent, et de la même manière que pour l’état de Wenzel, nous pouvons considérer un déplacement d x et obtenir l’expression de la variation d’énergie de surface en fonction de l’angle de contact dans l’état Cassie-Baxter :

d E = fSL(γSL− γSV)d x + fLV(γSL− γSV)d x + γLVcosθC Bd x (1.6)

Ce qui donne à l’équilibre, quand d E = 0, et en remplaçant les différences de tensions superfi- cielles par leurs expressions respectives obtenues à partir de l’équation de Young :

cosθC B= fSLcosθ + fLVcosθLV (1.7)

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fLV = (1– fSL), nous obtenons finalement :

cosθC B= fSLcosθ − (1 − fSL) (1.8)

En considérant le facteur de rugosité de la partie solide en contact avec le liquide, nous obtenons :

cosθC B= r fSLcosθ − (1 − fSL) (1.9)

Cette relation prévoit, tout comme celle de Wenzel, une augmentation de l’angle de contact par rapport à l’angle de Young. Mais cette fois, il est impossible queθC Batteigne 180° à cause

de la fraction de solide qui soutient la goutte sur la surface, ce qui est physiquement plus réaliste.

Lorsque l’angle de contact approche 180°, nous sommes en présence d’un état superhydro- phobe où le liquide repose uniquement sur les sommets des aspérités. Donc, l’état Cassie- Baxter résulte en une diminution forte de l’interaction entre le solide et le liquide et la consé- quence directe est une hystérésis très faible. De nouveau, si nous faisons le parallèle avec l’expérience de Dettre et Johnson, cet état Cassie-Baxter se situe dans le deuxième domaine de la courbe avec des angles d’avancée et de recul très élevés, voir Figure 1.8.