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Mécanismes de mobilisation périphérique des PACs : rôle du VEGF et du SDF-

Chapitre 5. Les facteurs de risque cardiovasculaire

6.2. La vasculogenèse et le rôle des cellules pro-angiogéniques (PACs)

6.2.3. Mécanismes de mobilisation périphérique des PACs : rôle du VEGF et du SDF-

En condition physiologique les PACs sont en état de quiescence, localisés dans la moelle osseuse et formant une niche. Ils sont retenus dans la moelle osseuse par adhésion aux cellules stromales via des intégrines (Lapidot, Dar, and Kollet 2005; Lapidot and Petit 2002). Lors d’une

condition ischémique, les PACs sont mobilisées vers la circulation périphérique par divers mécanismes qui inhibent leur rétention locale. Cette mobilisation est une étape initiale cruciale pour leur rôle dans la néovascularisation. Toutefois, les mécanismes précis sont encore mal compris. Au cours des dernières années, plusieurs molécules et conditions qui modulent la mobilisation des PACs ont été identifiées (figure 28 et 29). Les différentes études suggèrent que les deux principaux facteurs stimulant la mobilisation des PACs sont le VEGF et le SDF-1 (Herrmann, Verrier, and Alini 2015). L’importance du VEGF dans la mobilisation des PACs a été confirmée dans plusieurs études animales et humaines. Par exemple, il a été démontré que le VEGF augmente significativement la mobilisation et le nombre de PACs dans la circulation périphérique, améliorant ainsi la néovascularisation (Asahara, Takahashi, et al. 1999). Également, le VEGF stimule l’expression du G-CSF (granulocyte colony-stimulating factor) qui est impliqué dans la libération des PACs de la moelle osseuse (Bautz et al. 2000; Powell et al. 2005). Une autre fonction importante du VEGF est médiée par son interaction avec son récepteur VEGFR2 qui est présent sur les PACs. L’activation du VEGFR2 stimule la voie de signalisation PI3K/AKT/eNOS et entraine la production de NO (Cheng, Jiang, et al. 2013). Comme il a été décrit à la section précédente, le NO permet l’activation de la MMP-9 favorisant ainsi le relargage de sKitL et stimulant la mobilisation des PACs (Tilling, Chowienczyk, and Clapp 2009). Le SDF-1 (stromal cell-derived factor-1) joue également un rôle clé dans la régulation de la mobilisation des PACs. En plus d’induire leur libération de la moelle osseuse, le SDF-1 stimule l’adhésion et la migration des PACs vers les sites ischémiques. L’expression du SDF-1 est augmentée en condition d’ischémie et lors de l’inflammation (Ceradini et al. 2004; Tilling, Chowienczyk, and Clapp 2009). L’interaction du SDF-1 au récepteur CXCR4, présent à la surface des PACs, active des cascades de signalisations intracellulaires impliquées dans la mobilisation, le recrutement et l’intégration des PACs aux sites ischémiques (Askari et al. 2003; Tilling, Chowienczyk, and Clapp 2009). Le mécanisme de mobilisation NO/MMP-9/KitL dépendant est illustré à la figure 29.

Figure 29. La mobilisation des PACs. Différents facteurs vont affecter positivement (rectangle blanc) ou négativement (rectangle gris) la mobilisation des PACs (image de gauche). Principal mécanisme permettant la libération des PACs de la moelle osseuse (image de droite). Les PACs sont retenues dans la moelle osseuse aux cellules stromal par des intégrines. Le NO stimule la libération des PACs dans un mécanisme dépendant de la MMP-9 qui agit en clivant le KitL membranaire (mKitL) à la surface des PACs générant ensuite le KitL soluble (sKitL). Le sKitL active ensuite le récepteur c-Kit à la surface des PACs stimulant leurs mobilisations. Figure adaptée de : (Li et al. 2012; Werner and Nickenig 2006)

6.2.4. Recrutement des PACs aux tissus ischémiques : migration, adhésion et

invasion

Les PACs mobilisées en circulation devront être recrutées, puis migrer et adhérer aux structures vasculaires afin de contribuer à la néovascularisation. L’attraction et la migration des PACs sont principalement médiées par des chiomiokines. Ces petites molécules agissent en

créant des gradients de concentration élevés dans les zones ischémiques, permettant ainsi l’attraction des PACs à des endroits spécifiques. Les chimiokines sont une famille de cytokines capable d’attirer des cellules vers des sites précis. Le SDF-1 est la plus puissante chimiokine impliquée dans la migration des PACs. En effet, la formation d’un gradient de concentration élevé de SDF-1 en périphérie des sites ischémiques permet aux PACs de migrer vers ces sites (Ceradini et al. 2004). Le récepteur CXCR4 est le récepteur prédominant du SDF-1 et est exprimé sélectivement par les ECs et les PACs (Gupta et al. 1998; Ceradini et al. 2004). Plusieurs études ont démontré que le niveau de SDF-1 est augmenté dans les tissus ischémiques, agissant ainsi comme un signal de recrutement pour les PACs (Lapidot 2001; Kucia et al. 2005; Peplow 2014). Une autre fonction importante du SDF-1 dans la migration des PACs est l’activation de la voie PI3K/AKT/eNOS et la génération du NO (Zheng et al. 2007). Également, d’autres molécules comme l’IL-6, le MCP-1 et les facteurs de croissance VEGF et G-CSF stimulent la migration des PACs vers les sites ischémiques (Rennert et al. 2012; Fan et al. 2008).

Une fois arrivées aux régions ischémiques, les PACs doivent adhérer et pénétrer la monocouche endothéliale. Le processus implique un roulement des PACs sur l’endothélium, leurs adhésions et une transmigration à travers l’endothélium pour atteindre le tissu ischémique. Le roulement des PACs est assuré par des sélectines (E-sélectine et P-sélectines) exprimées à la surface des ECs. Les sélectines forment des liaisons de faible affinité avec le PSGL-1 (P-selectin glycoprotein ligan-1) présent sur les PACs (Nishiwaki et al. 2007; Oh et al. 2007). L’arrêt du roulement et l’adhésion ferme des PACs à l’endothélium seront ensuite médiés par des intégrines exprimées par les PACs. Les intégrines vont former des liaisons de forte affinité avec des molécules d’adhésions présentent sur la surface des ECs (VCAM-1 et I-CAM-1). Parmi les interactions les plus importantes entre les sous-unités d’intégrines et les récepteurs endothéliaux, nous retrouvons la sous-unité d’intégrine Beta-2 (b2). La sous-unité b2 est exprimée par les PACs et possède une forte affinité pour ICAM-1 exprimée par les ECs. En effet, il a été documenté que la b2 favorise l’adhésion des PACs aux ECs lors d’une ischémie via ICAM-1 (Caiado and Dias 2012). Parmi les autres mécanismes permettant l’adhésion des PACs, nous retrouvons l’interaction de l’intégrine alpha-4Beta-1 liant VCAM-1 et la fibronectine de la membrane endothéliale (Jin et al. 2006). Une fois adhérées, les PACs vont migrer et pénétrer à

des ECs (Muller 2015). Les PACs ayant traversé l’endothélium vont migrer dans la MEC interstitielle pour atteindre les structures d’injures ou ischémiques. L’invasion des PACs dans l’espace interstitiel est médiée par différentes MMPs qui vont décomposer et remodeler les composantes de la MEC et de la membrane basale permettant le passage des PACs jusqu’à leurs destinations finales (Caiado and Dias 2012). Les principales MMPs impliquées dans l’invasion des PACs sont la MMP-9 et la MMP2 (Balaji et al. 2013; Muller 2015). Finalement, les PACs arrivées aux sites de névascularisation vont exercer leurs fonctions par incorporation directe des néovaisseux (rare) ou plus souvent par actions paracrines (Caiado and Dias 2012).

6.2.5. Contribution des PACs à la néovascularisation post-ischémique et

potentiel thérapeutique pour les maladies cardiovasculaires

Les ECs matures possèdent une capacité de prolifération limitée et ne peuvent à elles seules assurer une néovascularisation de grande envergure en réponse à une ischémie sévère (Jujo, Ii, and Losordo 2008). Il est maintenant connu que les PACs participent activement aux processus de régénération vasculaire en jouant un rôle de support qui permet à l’organisme de faire face à différentes conditions. Suite à une ischémie, les PACs participent principalement de façon indirecte à la néovascularisation (Asahara, Masuda, et al. 1999b; Jujo, Ii, and Losordo 2008). En effet, les PACs participent à la néovascularisation en sécrétant divers facteurs cytoprotecteurs et pro-angiogéniques (Jujo, Ii, and Losordo 2008). De plus, il a été démontré que les PACs qui migrent vers les tissus ischémiques n’intègrent pas toujours les structures vasculaires et peuvent rester dans l’espace interstitiel et sécréter diverses molécules (VEGF, HGF, ANG-1, SDF-1, IGF-1 et le NO) stimulant l’angiogenèse des ECs à proximité (Hoeben et al. 2004a; Urbich et al. 2005). Les fonctions des PACs dans la néovascularisation sont illustrées à la figure 28.

L’efficacité de divers traitements basés sur l’administration de PACs pour stimuler la néovascularisation post-ischémique a été démontrée dans de nombreuses études pré-cliniques. En effet, dans divers modèles animaux ischémiques, une transplantation de PACs cultivées ex vivo permet d’augmenter significativement la densité capillaire et le débit sanguin dans les tissus présentant une néovascularisation insuffisante (Asahara, Kawamoto, and Masuda 2011). Collectivement, plusieurs autres études in vivo ont confirmé qu’une approche thérapeutique

basée sur l’expansion ex vivo de PACs pré-conditionnées est bénéfique pour stimuler la néovascularisation. Par exemple, une administration systémique de PACs stimulées par divers agents angiogéniques, permet d’améliorer la néovascularisation et la régénération des tissus ischémiques cardiaques, cérébraux et des membres inférieurs (Asahara, Kawamoto, and Masuda 2011). Historiquement, la première transplantation de PACs dans un contexte de néovascularisation a été reportée au début des années 2000 par Kalka et ses collègues. Le groupe a transplanté des PACs provenant de la moelle osseuse humaine chez la souris avec une ischémique de la patte. Les résultats obtenus suggéraient pour la première fois que l’administration exogène de PACs pouvait améliorer la néovascularisation post-ischémique (Kalka et al. 2000). Plusieurs essais cliniques tentent maintenant d’évaluer les effets thérapeutiques des PACs observés chez l’animal, mais aussi par la par transplantation systémique et locale chez l’humain de différents sous-types de cellules ayant des actions bénéfiques sur la réparation tissulaires. Avant 2012, une douzaine d’études cliniques impliquant une transplantation de divers sous-types de PACs (différents marqueurs cellulaires associés aux PACs) dérivées de la moelle osseuse chez des patients atteints de diverses pathologies cardiovasculaires avaient été publiées (Caiado and Dias 2012). Collectivement, ces différentes études ont démontré des effets bénéfiques. Par exemple, une étude de 121 patients présentant une ischémie cardiaque chronique a démontré de bons résultats. En effet, une réduction de différents marqueurs plasmatiques associés à l’insuffisance cardiaque et une réduction de la mortalité globale a été observée chez les patients transplantés avec des PACs injectées de façon intracoronarienne (Assmus et al. 2007). D’autres études chez des patients atteints d’infarctus du myocarde ont démontré des effets bénéfiques par l’utilisation de PACs. Dans l’ensemble, une diminution de la taille de l’infarctus et une augmentation de la fraction d’éjection du ventricule gauche ont été observées (Schachinger et al. 2004; Katritsis et al. 2005; Erbs et al. 2005). Également, une étude de 167 patients atteints d’angine réfractaire a démontré qu’une injection intracardiaque de cellules circulantes CD34 positif augmente la tolérance des patients à l’exercice (Losordo et al. 2011). Finalement, une injection intramusculaire de cellules circulantes CD34 et CD133 positif augmente la perfusion aux tissus ischémique chez des patients présentant une ischémie critique des membres inférieurs (Lara-Hernandez et al. 2010). Malgré ces succès, les études sur l’application thérapeutique des PACs comportent certaines

types variées de PACs, voie de livraison utilisée, dose, fréquence et biodistribution). Toutes ces variables rendent difficiles les comparaisons entre les différentes études (Napoli et al. 2011). Par contre, les différentes études suggèrent que l’injection locale intramusculaire est potentiellement supérieure à l’injection systémique. En effet, une meilleure biodistribution et un taux de survie supérieur des PACs ont été observés (Muller-Ehmsen et al. 2006; Aicher, Brenner, et al. 2003). Finalement, l’historique médical des patients est une variable importante associée à la limitation du succès de transplantation autologue de PACs. En fait, la plupart des patients ayant recours à ce type de transplantation sont des patients présentant des facteurs de risques cardiovasculaires (vieillissement, diabète, hypercholestérolémie et tabagisme) qui pourraient inhiber l’activité fonctionnelle des PACs (Asahara, Kawamoto, and Masuda 2011). Dans cette optique, le préconditionnement de PACs ex vivo afin de stimuler leur nombre et leur activité fonctionnelle devient un axe de recherche prometteur Collectivement, malgré les résultats bénéfiques obtenus par la thérapie cellulaire sur la néovascularisation, les effets cliniques et les mécanismes associés à la thérapie par les PACs n’est pas encore totalement clairs et requiert une poursuite de la recherche avec des essaies cliniques contrôlées de grande envergure.