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CHAPITRE 3 : LES CELLULES NATURAL KILLER

3.5. Fonctions effectrices des cellules NK

3.5.1. Mécanismes de cytotoxicité

Les cellules NK comme les lymphocytes T cytotoxiques, lysent leurs cibles principalement via la sécrétion de granules lytiques contenant de la perforine et des granzymes (Kagi et al. 1994).

3.5.1.1. Formation de la synapse immunologique

La destruction d’une cellule cible par une cellule NK nécessite l’établissement d’une synapse immunologique activatrice (ou aNKIS pour activating NK cell immunological synapse) entre les deux cellules, comparable en de nombreux points à celle établie par les lymphocytes T cytotoxiques (Orange 2008; Topham et al. 2009). Ce phénomène permet la reconnaissance de la cible, la polarisation de la cellule NK puis la sécrétion des granules lytiques conduisant à l’élimination de la cellule cible. Il a été montré que le déroulement de la synapse immunologique NK est formé de trois phases : une phase d’initiation, une phase effectrice puis une phase terminale (Orange 2008). Lors de la phase d’initiation, la cellule NK rencontre sa cible. Plusieurs facteurs d’adhésion comme le LFA-1 et le CD11b vont former un anneau dénommé pSMAC (peripheral supramolecular activation cluster), et délivrer les premiers signaux activateurs à la cellule NK. L’anneau ainsi formé délimite le cSMAC (central SMAC), contenant d’autres récepteurs activateurs, et permettant d’amplifier l’activation de la cellule NK. Durant la phase effectrice, la réorganisation du cytosquelette de la cellule NK

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provoque l’accumulation d’actine-F dans le pSMAC, et permet l’agrégation de radeaux lipidiques, zone de la membrane plasmique capable d’inclure ou d’exclure spécifiquement des molécules au niveau de l’aNKIS (Taner et al. 2004). Ces radeaux lipidiques permettent la concentration des récepteurs activateurs et l’exclusion des inhibiteurs de la synapse formée. Pendant la phase effectrice, les granules lytiques se rassemblent au niveau de la synapse néo- formée. Cette polarisation nécessite la migration des granules le long des microtubules vers le MTOC (microtubule-organizing center), structure d’ancrage de l’ensemble des microtubules cellulaires, qui va être polarisé vers l’aNKIS. Les granules lytiques, ainsi concentrés au niveau du cSMAC, vont alors fusionner avec la membrane plasmique pour libérer leur contenu. Finalement, la phase terminale constitue la fin de l’interaction entre les deux cellules. La cellule NK diminue progressivement l’expression de ses récepteurs et autres molécules d’adhésion pour se dissocier de sa cible et retrouver une autre.

3.5.1.2. Granules lytiques et modes d’action

Les granules lytiques constituent les acteurs majeurs de la cytotoxicité des cellules NK. Contrairement aux lymphocytes T, dans lesquels ils ne sont produits qu’après rencontre avec un antigène et une activation de la cellule, ces granules sont constitutivement présents dans la cellule NK (Colucci et al. 2003). L’interaction entre les cellules NK et leurs cellules cibles est accompagnée d’une polarisation du cytosquelette d’actine, de l’appareil de Golgi et des microtubules des cellules NK au niveau de la zone de contact avec les cellules cibles. Celle-ci est suivie de la libération de granules cytotoxiques qui contiennent différents types de molécules : la perforine, les granzymes et la granulysine (chez l’homme), dont la finalité est d’induire l’apoptose des cellules à éliminer.

i. La perforine : elle a été initialement purifiée dans les lymphocytes T cytotoxiques en

1985 (Podack et al. 1985). Sa structure cristallographique a récemment été décrite (Law et al. 2010). Elle forme des pores dans la membrane plasmique de la cellule cible, permettant le passage des granzymes et de la granulysine (Bolitho et al. 2007). L’importance de la perforine dans la fonction cytotoxique des lymphocytes T et des cellules NK est soulignée par les tableaux cliniques gravissimes présentés par les patients atteints d’un déficit génétique en perforine (souffrant de lymphohistiocytose familiale de type 2) (Voskoboinik et al. 2010).

ii. Les granzymes : les cellules NK humaines et murines expriment les granzymes A, B, K

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granzymes constituent une famille de sérines protéases induisant la mort des cellules cibles, de façon dépendante ou indépendante des caspases (Cullen et al. 2008). Les granzymes A et B sont les plus abondantes et les plus étudiées dans les cellules NK chez l’homme et chez la souris. L’utilisation d’inhibiteurs de ces deux granzymes a montré que la granzyme B est l’effecteur majeur de la lyse des cellules cibles par les cellules NK (Mahrus et al. 2005). La granzyme A induit la mort cellulaire de façon indépendante de caspases, selon un processus relativement lent, alors que la granzyme B utilise les caspases pour éliminer les cibles. Elle induit rapidement l’apoptose via deux mécanismes. Elle peut activer directement la caspase 3 mais aussi la caspase 7, ou peut induire la perméabilité mitochondriale et cliver Bid, une molécule de la famille

Bcl2, qui via le cytochrome C et la caspase 9 aboutira également à l’activation de la

caspase 3. Concernant la granzyme H, des résultats contradictoires ont été obtenus concernant sa façon à induire l’apoptose (Fellows et al. 2007; Hou et al. 2008). Comme la granzyme A, la granzyme K induit la mort cellulaire indépendamment des caspases (MacDonald et al. 1999). La voie de mort cellulaire induite par la granzyme M est controversée dans la littérature. D’une part il a été montré qu’elle est capable d’induire une mort cellulaire rapide et indépendante des caspases laquelle ressemblait à une mort autophagique (Kelly et al. 2004), d’autre part, la granzyme M humaine recombinante issue de levures conduit à une mort cellulaire dépendante des caspases (Lu et al. 2006; Hua et al. 2007).

iii. La granulysine: Il s’agit d’une petite protéine cationique apparentée aux saposines. Elle

induit l’apoptose de la cellule cible en interagissant avec les lipides de la membrane mitochondriale de la cellule cible en induisant des dommages membranaires (Latinovic- Golic et al. 2007). Elle peut également induire l’activation de la caspase 3 (Kaspar et al. 2001). Il a été montré une synergie entre la granulysine et la perforine dans l’induction de l’apoptose (Walch et al. 2007). Alors que de fortes concentrations de granulysine sont nécessaires pour sa fonction cytotoxique (10-10µM) (Kaspar et al. 2001; Zhang et al. 2009), de plus faibles concentrations de granulysine (pic à 10nM) attirent les monocytes, les cellules T mémoires (CD4+ et CD8+), les cellules NK et les mDC (stimulation avec du TNF-α) (Deng et al. 2005). Outre son effet chimioattractant, elle induit une augmentation deux taux d’ARNm de cytokines (IL-1, IL-6, IL-10 et IFN-α) et de chimiokines (CCL2, CCL3, CCL5 et CCL7) dans les cellules monocytaires U937. Une production de CCL2 et CCL5 est observée après stimulation de monocytes et de cellules U739 avec la granulysine (1nMà 10µM) (Deng et al. 2005).

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En plus de la sécrétion de granules lytiques (phénomène majeur de la lyse induite par les cellules NK), les cellules NK peuvent également induire la mort des cellules cibles via l’activation de récepteurs de mort à la surface de celles-ci. Elles utilisent notamment les voies Fas/Fas-L (Arase et al. 1995) et TRAIL-R/TRAIL (TNF-related apoptosis inducing ligand) (Kayagaki et al. 1999). L’expression Fas-L et de TRAIL est constitutive sur les cellules NK, et peut être augmentée après activation par l’IFN-γ ou de l’IL-15 (Zamai et al. 1998; Smyth et al. 2001; Takeda et al. 2001).