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Les lecteurs auront facilement remarqué combien je me suis tenu, dans le cours de ce livre, loin de tout ce qui, de près ou de loin, pouvait paraître flatter la curiosité même la moins exigeante.

Dès le début, ils ont vu, qu'animé par le seul intérêt de l'Église et l'unique besoin de la

réparation de mes erreurs, j'avais évité de signaler les occultistes par un nom ou par des indices trop apparents. C'est surtout quand il s'agit d'une femme et d'une femme aimable, bonne et remarquable à plus d'un titre, que je dois demeurer fidèle à cette loi de convenance et d'égards que je me suis imposée. J'ai le plus grand respect pour la personne honorée de Lady X... J'ai la plus entière admiration pour sa science hors ligne, son érudition profonde et son intelligence.

Elle a été longtemps pour moi une envoyée supérieure des Puissances que je nommais Célestes.

Je conserve le plus reconnaissant des souvenirs pour l'accueil qu'elle a daigné me faire. Si la nécessité de combattre l'erreur que j'ai enfin reconnue, me force à mettre en scène, sans la nommer d'ailleurs, cette haute dame occultiste, chef d'école et auteur de plusieurs œuvres philosophiques éminentes, je le ferai, je l'espère, de manière à ne manquer ni aux égards qui lui sont dus, ni aux délicatesses d'une conscience qui se croit de bonne foi dans la vérité et qui se rendra à la vérité, dès que Dieu lui aura fait la grâce de la lui faire connaître. Pénétrez

maintenant avec moi dans un royal hôtel de l'une dos plus belles avenues de Paris. L'aspect extérieur vous aura frappé tout d'abord par sa ressemblance historique avec Holyrood.

Traversez la salle des gardes où veillent les hommes d'armes admirablement reproduits ; gravissez ce riche et monumental escalier bordé de Chefs-d’œuvre ; entrez dans cette

bibliothèque dont les rayons ploient sous les livres les plus savants et les plus rares ; saluez en passant, dans ce discret et religieux oratoire, la vivante et glorieuse image de Marie Stuart ; arrêtez-vous dans cette merveille qu'on appelle la salle du trône, et saluez enfin la noble hôtesse de ce palais, assise au fond de cette vaste chambre, digne d'être habitée par une reine. Vous êtes en présence d'une grande dame dont le visage respire à la fois la bienveillance et la grâce. Vous êtes devant Lady X.., duchesse espagnole et pairesse d'Écosse, alliée à une maison royale

éteinte et représentant en France la haute théosophie renouvelée par Mme Blavatsky. Je ne chercherai pas à décrire la princière opulence de cette demeure où l'on vit au sein des études les plus ardues, où l'on marche au milieu d'objets d'une grande valeur artistique, dont plusieurs ont appartenu à Marie Stuart. Je vous ferai remarquer seulement ce plafond singulier où des cercles d'anges lumineux gravitent et tourbillonnent autour d'une étoile centrale. Ces cercles figurent la doctrine et les croyances de Milady. On le nomme le cercle de l'Etoile. Lady X... est sous la direction des esprits de ce cercle et c'est d'eux qu'elle croit avoir reçu sa mission d'enseignement sur la terre. Elle croit, comme tous les spirites, aux réincarnations. Elle croit à un moi supérieur immortel qui se dégage peu à peu du moi inférieur. Et chez elle, ce moi supérieur, n'est autre que celui de Marie Stuart elle-même. Lady X.... est favorisée de visions. Elle se meut au milieu

de prodiges dont plusieurs m'ont été manifestés. Cette femme qui est pleine de bon sens, de sagesse et de bonté, a des preuves palpables, continuelles, évidentes de l'existence des êtres surnaturels. Pour elle, ce sont des anges de clarté. Nous savons nous, catholiques, que Lucifer revêt souvent ces apparences de lumière ; et comme Lady X... est tout l'opposé d'une âme vulgaire, Lucifer la prend dans ses pièges par les moyens qu'il sait employer, quand il veut séduire les natures d'élite. Lady X... a raconté elle-même, dans une brochure devenue très rare et très recherchée, l'apparition de Marie Stuart dans les ruines de la chapelle d'Holyrood. L'esprit qui avait revêtu la forme de la Reine-Martyre, entretint longuement la voyante et lui indiqua sa mission. Depuis lors, la grande dame devint apôtre et l'on ne compte déjà plus les livres qu'elle a publiés sur la théosophie. Cette Théosophie a un organe : l'Aurore, qui pousse à une

rénovation religieuse et sociale. Plusieurs prêtres, dont l'un prend le nom de l'Abbé de l'Etoile, écrivent dans cette revue. Le chanoine Roca y a tenu la plume. La directrice donne des

conférences ésotériques dans son magnifique salon. On a pu entendre avec douleur, un abbé, s'y faire l'apologiste du spiritisme bien spécial qui est en honneur chez Lady X... Il faut que ces ecclésiastiques aient une théologie bien courte, ou une foi bien mince dans la divinité et, dans l'autorité de l'Église dont ils se disent les ministres. Lady X... doit à l'esprit qui la hante, des avertissements singuliers. Je n'en citerai qu'un seul. « Une nuit je rentrais d'une soirée, et

comme je venais d'éteindre la lampe, prête à m'endormir, je m'entendis appeler par une voix très douce, qui augmentait de force vers la fin et qui me disait : Marie ! Marie ! lève-toi, je t'en conjure. Je croyais rêver, mais je vis clairement, au pied du lit, Marie Stuart qui me montrait la porte de la chambre où dormait mon mari. Je me levai et obéis machinalement. Quel ne fut pas mon étonnement en voyant brûler les rideaux du lit de mon mari ! Il avait oublié d'éteindre la bougie, et, un instant de plus, il mourait brûlé et asphyxié ! »

Dans la réunion d'occultistes que préside Lady X..., les communications n'ont rien de commun avec les banales et ridicules dictées que les médiums obtiennent dans leurs séances ordinaires.

Elles sont d'un ordre élevé et ont généralement pour objet un but de propagande et de diffusion de la doctrine régénératrice. Dans l'une d'elles, les esprits disaient : « Nous avons cherché les moyens qui devaient réaliser notre propagande en faveur des GRANDES VÉRITÉS. Ces vérités sont écrites dans nos cœurs, mais cela ne suffit pas ; il faut que nos convictions passent dans l'esprit des autres. Mais parmi nous, tous les esprits ne sont pas d'accord sur les moyens. Avant tout, réunissez-vous en groupe, vous qui devez répandre la lumière divine. Mettez vous d'accord sur tous les points. Choisissez ces points de doctrine. La grande difficulté est de réunir douze personnes pensant et agissant comme vous. Attendez-vous à la persécution. La moindre qui puisse vous arriver, c'est le martyre du sarcasme ». Marie Stuart et Jeanne d'Arc se dirent les auteurs de cette communication. Lady X..., reçut sur l'origine du mal, une explication de Marie Stuart elle-même. « Et le mal est le résultat de la limitation de l'esprit par la matière, car l'esprit est Dieu et Dieu est bon. C'est pourquoi en limitant Dieu, la matière limite le bien. Cette

limitation est, essentielle à la création. S'il ne se projette dans l'être, Dieu demeure inactif et en puissance, solitaire et non manifesté ; conséquemment il demeure inconnu, sans culte, sans amour et sans action. S'il crée, il se heurte à la limite, et cette limite comporte l'idée du non-bien. Ce contraste favorise la conception de Dieu en nous et sa manifestation. Les ténèbres de l'ombre de Dieu correspondent intensivement avec l'éclat de la lumière de Dieu. La matière n'est point mauvaise par elle-même. Au contraire, elle vient, de Dieu et est de l'Esprit, dont Dieu est lui-même. Elle est esprit par la force de la divine substance, mais esprit, soumis aux conditions

et aux limites qui l'extériorisent et le rendent connaissable. L'esprit seul est Dieu, seul est bon.

La matière est apparue, l'esprit est limité, elle est donc cause du mal, puisque le mal limite le bien. Ce n'est point parce que la matière est en elle-même le mal, que l'âme qui descend dans cette matière est déchue ; c'est pourquoi la matière est une chose interdite à l'âme. Le mal constitue ainsi une désobéissance. C'est seulement en demeurant substance spirituelle, dérivée de la Mère divine, que l'âme peut subsister en tant qu'âme avec toutes les puissances qui

constituent l'être d'une âme. En abandonnant ces conditions et en descendant dans la matière, elle subit les limitations qui sont l'apanage de cette matière. C'est par l'âme, sa moitié féminine, par l'âme seule, que l'homme apprend la volonté divine et obtient, son salut. Et la clarté avec laquelle l'âme apprend cette volonté, la discerne, la transmet, constitue sa pureté. En notre monde, la pureté est l'essence de toutes religions. C'est la pureté qui est le gardien de la Bible et des Bibles. La pureté est le moyen de parvenir au salut. Les cœurs purs verront Dieu. Avec une âme pure, l'homme habite l'Eden et voit Dieu. Avec une âme impure il est livré à la solitude du désert. Salut et damnation sont les deux pôles de la gravitation spirituelle. L'homme va en avant ou bien il recule. C'est en retrouvant la virginité qu'il devient immaculé. L'âme étant immaculée conçoit le Christ et l'enfante. » De là à dire que le Christ historique n'est qu'un symbole du Christ intérieur ; de là à dire que l'âme immaculée est figurée par la Vierge-Marie, immaculée dans sa Conception, et qu'elle enfante le véritable Christ, le Christ spirituel et divin, il n'y a pas loin, et de fait, cela est dit et professé par la haute et savante théosophie de Lady X. Non, jamais Lucifer n'a mieux revêtu l'apparence et la figure de l'Ange de la Clarté. Jamais plus dangereuse séduction n'a été offerte aux esprits délicats, aux âmes hautaines, aux natures raffinées. Le Seigneur s'évanouit avec sa chair, avec sa personne divine, avec son humanité sainte, dans un mythe orgueilleux et subtil. La Sainte Vierge n'est plus qu'un symbole raréfié de métaphysique, et la pauvre créature pécheresse devient Dieu, en produisant Dieu. L'esprit qui impose à Lady X.., de telles pensées et de telles conceptions, ouvre à nos regards des abîmes de vertige et de superbe, on tournoie et mugit encore le cri du Dragon terrassé par l'Archange : « Je monterai jusqu'aux étoiles, et je m'assiérai sur le trône du Dieu vivant ». Lady X..., nous confirme elle-même cette doctrine dans un passage qu'il faut citer presque en entier, parce qu'il rend très clairement la pensée qui dirige toute son œuvre : « Certainement, Jésus-Christ a été un personnage historique, comme Gautama-Boudha l'a été aussi. Mais le Christ sur lequel le

christianisme se fonde et qui nous est révélé par les évangiles, est un Principe éternel, qui n'a ni commencement, ni fin, ainsi que saint Jean le dit expressément dans les premiers mots de son Évangile qui sont lus à la fin de la célébration de la messe. Et ce Principe est le même que celui qui est appelé par les Bouddhistes « le Bouddhi » ; par les Brahmanes « Vishnou » ; par les philosophes grecs « le Logos » et par les Prophètes hébreux « Adonaï » . En un mot, dans toutes les religions ce Principe tient, la place de la Seconde Personne de la Trinité Divine. Notre

Seigneur Jésus a été choisi pour être la manifestation humaine de ce Principe et nous est, par conséquent, présenté comme un exemple de l'homme parfait, ou plutôt de la Divinité dans l'homme, à laquelle nous pouvons tous aspirer et que nous pouvons atteindre en suivant son exemple et en menant la vie qu'il a menée. Car n'a-t-il pas dit : « Soyez parfaits comme votre père qui est dans les cieux est parfait ? » , proclamant par ces mots la divinité latente dont nous avons hérité de notre source divine. Car si le corps de l'homme a été fait de la poussière de la terre comme celui des animaux inférieurs, son âme est une émanation directe de son Créateur, le Tout-Puissant, qui souffla en lui une âme vivante, c'est-à-dire une partie de Lui-même. »

Lady X. est plus explicite encore clans un autre passage que je cite également : « Il y a dans la Gnose trois choses qui, lorsque le sens intérieur est développé, disparaissent immédiatement du sens de la lettre ou de la parole : ce qui relève du temps, ce qui relève du lieu et ce qui relève des personnes. « D'après cette règle de la véritable GNOSE, ce qui est impliqué dans le terme de Incarnation est un événement dont la nature est purement spirituelle, et qui est en puissance dans tous les hommes et se passe perpétuellement à toutes les époques, puisqu'il a lieu dans tout homme régénéré, étant à la fois la cause et l'effet de sa régénération. « Le Christ (en Jésus-Christ et en nous tous ses frères) est la contrepartie, la manifestation correspondant en chair du vrai Christ, l'ADONAI, qui est la substance. Par exemple, l'arc-en-ciel est UN, quoiqu'il existe des arcs-en-ciel à l'infini, car tous sont la manifestation d'une même vérité, d'un même principe, inhérent à la nature de la lumière. De même le Christ est UN Principe quelle que soit la

multiplicité des personnalités qui, selon l'expression de saint Paul, arrivent « à revêtir le Christ

», parce que chaque apparence n'est qu'une nouvelle manifestation du même principe qui subsiste éternellement dans la nature Divine, et, par conséquent, qui subsiste dans chaque âme spirituelle, c'est-à-dire dans chaque âme capable de polariser la Divinité (ce qui est l'immaculée conception). Une fois qu'il a réalisé en lui cette image divine, l'homme a atteint le « Christ », il est devenu le Christ (fils de Dieu), le Christ étant la manifestation en chair de l'Adonaï en substance. » Et encore « Il est donc évident que nous ne devons pas confondre NOTRE

Seigneur avec LE Seigneur, ni le Christ dans l'homme avec Adonaï le Seigneur des cieux, celui qui donne la vie. Adonaï est le Christ macrocosmique. L'équivalent Hindou d'Adonaï est

Brahma ; celui qui manifeste Brahm, la Divinité Suprême, ou l'Être pur. Pour comprendre la nature de Brahma, nous pouvons nous représenter l'immensité de l'espace traversée par une vibration sonore, simple et homogène, qui agit comme énergie vivifiante et met en mouvement chaque molécule de l'éther. Ceci est représenté dans tourtes les langues par la voyelle A, qui a la préséance sur toutes les autres. C'est ce qui est appelé « la parole », le « verbe » ; il est double en ce qu'il a besoin de la voix pour s'exprimer. C'est le « Logos » de saint Jean. La Parole était au commencement, la Parole était avec Dieu, et cette Parole était Dieu. » Telle est la

signification de la création, car sans ce mouvement imprimé aux molécules au repos, il n'y aurait pas eu d'univers visible. En sorte que c'est de cette expiration de la « parole » , que

dépend l'évolution du visible, émergeant de l'invisible. » Le talent de Lady X., sa parfaite bonne foi, la distinction de son esprit, lui méritaient les honneurs de cette triple citation, dans un livre où je cherche à réparer le mal que de pareilles doctrines, que j'ai partagées et que j'ai propagées, ont fait et font encore à tant d'âmes sincères et noblement douées. Plus la forme et le fond d'un enseignement sont sélects et de grande allure, plus aussi ils sont dangereux. Plus l'erreur s'élève et plus elle est à craindre. Plus l'Ange rebelle se vêt de splendeur et plus il est rebelle. Je

voudrais ardemment que la haute personnalité de lady X. consentît, ne fût-ce qu'un instant, à incliner sa science et sa pensée devant la Croix, devant l'humanité souffrante du Seigneur ; je voudrais qu'elle daignât se souvenir de l'humilité, de la simplicité de ces douze pêcheurs galiléens qui en croyant et en prêchant ce qu'ils avaient vu, entendu et touché de leurs mains, ont arraché le monde aux ténèbres du paganisme et de la philosophie altière des Alexandrins. Je voudrais que regardant, non plus cette colombe Luciférienne qu'elle a vu dans une vision

fallacieuse, planer au-dessus du dais royal de Marie-Stuart, mais cette colombe de simple

candeur et de sainte humilité qui figure le Saint-Esprit, elle reconnût avec tant de grands esprits et tant de grandes âmes, avec Augustin, avec Thérèse, avec Bossuet, avec Lacordaire avec

Chateaubriand, avec Pascal, avec Marie Stuart elle-même, qu'elle aime tant, que le salut et la voie qui mène au salut sont renfermés dans ce seul mot qui est si court et qui dit tant : Je crois ! Credo !

XV