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D’AUGUSTE À TRAJAN

P. LONGIDIENVS F AD ONVS

PROPERAT 142

Néron, ensuite, accorda toutes ces dispositions aux Latins Juniens qui détenaient une fortune de 200 000 sesterces et qui s’étaient fait bâtir une maison à Rome. Cette mesure nous permet de rappeler que le statut inférieur des Juniens était très contraignant, notamment en matière d’héritage : lors du décès des affranchis Juniens, leur patron, ou le descendant de celui-ci, était, en effet, leur héritier direct car les Juniens étaient privés du droit de legs.

Par conséquent, la décision prise ici par Néron venait soulager ces riches affranchis de statut Junien qui ne possédait pas encore le ius Quiritium, car celui-ci incluait le droit de propriété. Grâce à cela, ils pouvaient désormais transmettre leurs biens personnels à leurs descendants et accéder à des situations plus favorables pour l’avenir.

142 CIL, XI, 139 : « Publius Longidienus, fils de Publius, de la tribu Camilla, constructeur de bateaux, a

réalisé ceci de son vivant pour Longidiena Stactinis, affranchie de Publius // Publius Longidienus Rufius, affranchi de Publius, Publius Longidienus Piladespotus, affranchi de Publius, ont fait cette dépense pour leur patron // Publius Longidienus, fils de Publius, se hâte à sa tâche. ». Annexe I, I.7, p. 343

La dernière mesure envers les affranchis Juniens sera prise par l’Empereur Trajan qui accorda le droit de citoyenneté romaine aux pistores, qui exploitaient une boulangerie à Rome et l’avaient gérée pendant au moins trois ans.

A ce point de notre étude, dont l’objectif est de comprendre grâce à quels moyens les affranchis ont pu exercer leur influence ou assouvir leurs ambitions au sein de la société romaine hiérarchisée, il faut remarquer que ces mesures successives prises par les Empereurs obéissaient à des impératifs politiques. Elles concernaient, en effet, des catégories bien précises d’affranchis qui avaient chacune œuvré, à un moment donné de l’Empire, pour le bien de Rome et avaient contribué à l’améliorer, tant pour sa démographie, sa sécurité, sa subsistance ou son prestige. Les motivations des dirigeants apparaissaient donc très réfléchies et orientées vers l’essor économique de Rome mais les conséquences en seront tout aussi bénéfiques pour la classe des affranchis.

II. 1. 3 : Les fonctions réservées aux affranchis :

Parallèlement aux lois établies au cours du règne des Julio-Claudiens, nous allons prendre aussi en considération que des postes avaient été créés, sur lesquels les recrutements se firent prioritairement parmi les affranchis. L’intention des Empereurs, et en particulier celle d’Auguste, qui entama cette nouvelle politique, était d’ouvrir les institutions romaines à toutes les classes sociales composant la population de Rome, dans l’objectif de rééquilibrer les pouvoirs, aux dépens parfois du Sénat, très puissant jusqu’alors.

a) les cohortes de vigiles :

Les hommes recrutés dans ces unités exerçaient en priorité leur service au cours de la nuit, dans les rues de Rome, car une surveillance accrue était devenue nécessaire en raison de la fréquence des incendies dans la ville. Suite à l’un d’eux qui s’était déclaré sur le Forum, en 7 av. J. -C, Auguste avait décidé de créer une première brigade, celle des uicorum magistri, chargés de surveiller les différents quartiers de la Cité et d’assurer une police des rues. Ces hommes étaient placés sous les ordres du préfet des vigiles, appartenant à l’ordre équestre, et secondé par le sous-préfet des vigiles. Chaque cohorte était dirigée par un tribun et chaque centurie, par un centurion :

πειδή τε τ χρόν Ἐ ῷ ῳ τούτω πολλαὸ τ ς πόλεως πὺριὸ ῆ διεφθάρη, ἄνδρας τε ξελευθέρους πταχ ἐ ῇ προὸς ταὸς πικοὺρίας α τ ς ἐ ὐ ῆ κατελέξατο, καιὸ ρχοντα ππέα α το ς προσέταξενἄ ὐ ῖ . (…) Καταμαθωὸν γαὸρ κ τ ς πείρας καιὸ χρησιμωτάτην καιὸ ἐ ῆ ναγκαιοτάτην τηὸν παρ´ α τ ν βοήθειαν ο σαν τήρησεν ἀ ὐ ῶ ὖ ἐ α τούς. ὐ Καιὲ ε σιὲ καιὲ ν ν ο νυκτοφύλακεςἰ ο τοι διόν τινα ὗ ἴ τρόπον ο κ κ τ ν πελευθέρων τι μόνον λλαὲ καιὲ κ τ νὐ ἐ ῶ ἀ λλων στρατευόμενοι , καιὸ τείχη τε ν τ πόλει χοὺσι ἐ ῇ ἔ καιὸ μισθοὸν κ το δημοσίοὺ φέροὺσιν. ἐ ῦ 143

143 Dion Cassius, Histoire romaine, LV, 20 : « Dans ce même temps, une grande partie de la ville ayant été détruite par le feu, il établit en sept endroits des postes d’affranchis destinés à porter secours, et mit à leur tête un chevalier, (…) l’utilité et la nécessité de leurs services, que l’expérience lui fit apprécier, le déterminèrent à les maintenir. Aujourd’hui, ces vigiles, soumis à un régime particulier, ne sont plus seulement composés d’affranchis, ce sont des fonctionnaires pris également dans les autres classes ; ils ont leurs cohortes à Rome et reçoivent un traitement de l’Etat. »

Dion Cassius fait, dans ce passage de son ouvrage sur l’Histoire romaine, un commentaire parallèle sur la place qu’occupaient ces vigiles à son époque, c’est-à-dire vers 200 ap. J. -C., sous le règne de Septime Sévère. Durant le règne de cet Empereur, les affranchis avaient, en effet, perdu en importance au sein des administrations, et étaient remplacés de plus en plus par des chevaliers, ce que nous confirme l’intervention de Dion Cassius.

A l’époque d’Auguste, les magistrats haut placés, étaient recrutés parmi les chevaliers ce qui permet de comprendre la raison pour laquelle ils avaient une escorte de deux licteurs lorsqu’ils patrouillaient. Ce sont donc eux qui avaient sous leurs ordres ce groupe d’esclaves affranchis : Ο δεὲ δηὲ στενωποιὲ ἱ ἐπιμελητ ν τινων κ το δήμοὺ,ῶ ἐ ῦ ο ς καιὸὓ στενωπάρχοὺς καλο μεν, (...) ῦ ἥ τε δουλεία το ς γορανόμοιςἡ ῖ ἀ τ ν μπιμπραμένων νεκα σὺνο σα πετράπη, καίτοι καιὸ ῶ ἐ ἕ ῦ ἐ κείνων καιὸ τ ν δημάρχων τ ν τε στρατηγ ν π σαν τηὸν ἐ ῶ ῶ ῶ ᾶ πόλιν, δεκατέσσαρα μέρη νεμηθε σαν, κλήρ προσταχθέντων. ῖ ῳ καιὸ ν ν γίγνεται Ὃ ῦ . 144

Soucieux d’appliquer concrètement l’esprit de sa politique, Auguste recruta pour ce poste des habitants issus des quartiers de Rome : les affranchis furent choisis en priorité car, ainsi, ils trouvaient l’occasion de manifester leur loyauté envers l’Empereur, de qui ils dépendaient directement : πεμελήθη μεὸν ο ν Σεβαστοὸς Κα σαρ τ ν τοιούτων Ἐ ὖ ὁ ῖ ῶ λαττωμάτων τ ς πόλεως, προὸς μεὸν ταὸς μπρήσεις σὺντάξας ἐ ῆ ἐ στρατιωτικοὸν κ τ ν πελευθερ νἐ ῶ ἀ ῶ τ ν τοὸ βοηθ σον, προὸςῶ ῆ

144 Dion Cassius, Histoire romaine, LV, 8 : « Les quartiers de Rome eurent des curateurs pris parmi le peuple, que maintenant nous appelons intendants des routes. (…) Le corps d’esclaves qui était confié aux édiles pour

éteindre les incendies fut mis sous leurs ordres, bien que les édiles, les tribuns du peuple et les préteurs eussent dans leurs attributions celle des quatorze régions de la ville, que le sort leur attribuait. Ceci se voit encore aujourd’hui. »

δεὸ ταὸς σὺμπτώσεις ταὸ ψη τ ν καιν ν ο κοδομημάτων ὕ ῶ ῶ ἰ καθελών, καιὸ κωλύσας ξαίρειν ποδ ν βδομήκοντα τοὸ προὸςἐ ῶ ἑ τα ς δο ς τα ς δημοσίαις.ῖ ὁ ῖ ῖ 145

En 3 ap. J. -C., c’est la maison d’Auguste et le temple de Cybèle, situés sur le Palatin, qui furent la proie des flammes. Pour aider à la reconstruction de la maison de l’Empereur, des vétérans et des décurions, entre autres, se cotisèrent, selon les ressources de chacun, ce qui toucha certainement Auguste mais il ne préleva finalement qu’une faible partie de cette somme qui lui avait été offerte :

In restitutionem Palatinae domus incendio absumptae ueterani,

decuriae, tribus atque etiam singillatim e cetero genere hominum libentes ac pro facultate quisque pecunias contulerunt, delibante tantum modo eo summarum aceruos neque quoquam plus denario auferente. 146

C’est surtout parmi les soldats de terrain, que nous trouvons les individus ayant le statut d’affranchi. Très hiérarchisée, la répartition des grades allait des aides de camp, les cornicularii praefecti, affectés, auprès du préfet à des postes élevés, jusqu’à ceux à qui étaient confiées des missions plus techniques ou subalternes, comme celle du carcerarius qui détenait les criminels arrêtés pendant la nuit.

Parmi les vigiles, ceux qui relevaient de la catégorie des Latins Juniens pouvaient, grâce à la promulgation de la lex Visellia, accéder à la citoyenneté romaine au bout de six ans de service ; le délai fut réduit plus tard à trois ans. Leur statut d’anciens esclaves leur permettait de ne pas être considérés comme des soldats de l’armée elle-même, ce qui les rendait plus proches de la population. Par ailleurs, lors des interventions de secours, le peuple aidait parfois aux opérations et côtoyait donc facilement ces hommes.

145 Strabon, Géographie, V, 3, 7 : « L’Empereur César Auguste a bien cherché dans l’intérêt de la ville à porter remède aux graves inconvénients dont nous venons de parler : il a par exemple, pour diminuer les ravages des incendies, organisé militairement une compagnie d’affranchis chargés de porter les secours nécessaires en pareils cas et il défendit qu’à l’avenir les maisons bâties sur la voie publique eussent plus de 70 pieds de hauteur.»

146 Suétone, Auguste, LVII, 4 : « Lors de la réparation de sa demeure du Palatin, détruite par un incendie, les vétérans, les décuries, les tribus et même ceux qui parmi les hommes, issus de classe sociale quelconque, étaient volontaires, lui apportèrent de l’argent selon leurs moyens, mais, de ces tas de pièces, il ne préleva pas plus d’un denier à quiconque en avait apporté. »

D’un point de vue lexical, un large vocabulaire servait à distinguer les différentes tâches des soldats des vigiles, comme les inscriptions suivantes vont nous l’illustrer :

D.M

AELI AVG. LIB. ARGANTHONIS ATHENAEVS FIRMVS CORNICV