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Lois d’évolution de la géométrie des glaciers vues par les hydrologuesles hydrologues

modèles hydrologiques

8.3. Lois d’évolution de la géométrie des glaciers vues par les hydrologuesles hydrologues

Nous l’avons dit, les modules de glace ont été crées dans un premier temps afin de pouvoir pallier les lacunes du module de neige sur la simulation du débit. Pourtant, dans une perspective de modélisation pluri-annuelle, un modèle hydrologique ne doit pas juste reproduire les débits observés mais aussi reproduire la dynamique de fonte et l’évolution du stock glaciaire (Konz et

Seibert, 2010). Avec les retraits enregistrés par les glaciers, la contribution glaciaire à la fonte est susceptible d’évoluer d’une année à l’autre et il est possible qu’un comportement de fonte comme celui illustrée enfigure 8.3 apparaisse.

Figure 8.3. – Projection de la quantité de fonte d’un glacier. D’après Rees and Collins, 2006.

Ce comportement basse-fréquence de la dynamique de fonte est une signature du fait qu’un glacier n’est pas en équilibre avec le climat et traduit le fait que la zone d’ablation du glacier, i.e. la surface d’exposition préférentielle à la fonte, augmente plus vite que le retrait du glacier. De plus, en contexte de modélisation pluri-annuelle du débit, un problème structurel du module de neige apparaît : à très haute altitude, le module de neige génère un excès d’accumulation. En conséquence, une partie du stock nival généré n’est jamais remobilisé à l’écoulement hydro-logique.

Afin de pallier l’excédent d’accumulation à très haute altitude généré par le module de neige, et dans la perspective de reproduire la dynamique de fonte estivale pluri-annuelle, une dynamique de recherche s’est orienté vers une représentation plus « dynamique » des glaciers dans les modèles hydrologiques. L’évolution de la géométrie des glaciers n’a été prise en compte que récemment par certaines études. Ces études figurent dans le tableau 8.1 répertoriant tous les modèles hydrologiques utilisant conjointement un module de glace :

Tableau 8.1. – Liste des modèles hydrologiques utilisant un module de glace

Nom du modèle Publications Echelle d’espace Echelle de temps Evolution de la géométrie des glaciers Module de fonte

FEST-WB Boscarello et al.,2014 Mécaniste (500 m) Horaire non degrés-jour

HBV Hagg et al., 2007 Akhtar et al., 2008 Stahl et al., 2008 Shahgedanova et al., 2009 Hagg et al., 2011 Gao et al., 2012 Jost et al., 2012

Systémique Journalier oui degrés-jour

GERM Huss et al., 2008b Huss et al.,2010 Farinotti et al., 2012 Gabbi et al., 2012 Huss et al.,2014

Mécaniste (25 m) Journalier oui degrés-jour

GSM-SOCONT Schaefli et al., 2007 Systémique Journalier oui degrés-jour

ITGG-2.0 Juen et al.,2007 Systémique Mensuel non bilan d’énergie

J-2000 Nepal et al.,2014 Systémique Journalier non degrés-jour

PREVAH Koboltschnig et al., 2007

Koboltschnig et al., 2008 Systémique Horaire non bilan d’énergie

PROMET Prasch et al., 2013 Mécaniste (1 km) Horaire non degrés-jour

SNOWMOD Singh et al., 2006 Systémique Journalier non degrés-jour

TOPKAPI Finger et al., 2012

Pellicciotti et al., 2012 Mécaniste (250 m) Journalier non bilan d’énergie

SRM Immerzeel et al., 2010

Nolin et al., 2010 Systémique Journalier non degrés-jour

TAC Konz et al.,2007 Mécaniste (200 m) Journalier non degrés-jour

UBC Watershed Loukas et Vasiliades,2014 Systémique Horaire non degrés-jour

WASIM-ETH Klok et al., 2001

Verbunt et al.,2003 Mécaniste (100 m) Horaire non bilan d’énergie

WATFLOOD Comeau et al., 2009 Systémique Journalier non degrés-jour

? Rees et Collins,2006 Systémique Annuel oui degrés-jour

L’objectif de modélisation diffère d’un modèle hydrologique à l’autre et a conditionné la confi-guration spatio-temporelle des modèles hydrologiques du tableau et de leur module de glace en particulier. Par exemple, on comprend que la structure d’un module de glace pour la pro-duction hydro-électrique va différer d’un module de glace pour la prédiction des crues éclairs de printemps par exemple (notons la popularité du modèle degrés-jour !). Mais dès lors que l’utilisation du modèle se veut durable (typiquement pour évaluer l’impact climatique), l’évo-lution de la géométrie du glacier doit être prise en compte. C’est le cas du module de glace des modèles GERM, GSM-SOCONT et de deux modules expérimentaux, que nous décrivons très brièvement ci-après.

Rees et Collins (2006) proposent d’intégrer l’évolution de la géométrie du stock glaciaire en découpant le glacier en bandes d’altitude dont la quantité de glace par bande est prescrite et sur laquelle un modèle de fonte degrés-jour est appliquée. La fonction de transfert correspond à la redistribution de l’accumulation neigeuse (simulée par un module de neige) uniformément sur les différentes bandes glaciaires à la fin de chaque année. Cette formulation est intéressante car elle permet de simuler le comportement illustré en figure8.3.

Huss et al.(2010) proposent un modèle degrés-jour couplé à une paramétrisation de l’évolution du profil d’un glacier selon une loi polynomiale empirique. Les paramètres empiriques de la loi sont calibrés sur l’évolution mesurée de certaines épaisseurs de la ligne d’écoulement principal et sur la position du front. Le bilan de masse découle ensuite des variations de l’évolution du profil intégré à l’échelle du glacier. A chaque pas de temps annuel, la géométrie du glacier se réactualise alors en fonction de cette loi. Cette approche est intéressante puisqu’elle rend possible la validation du module de glace sur une variable autre que le bilan de masse local et surtout beaucoup plus disponible en chroniques temporelles et par glacier : la longueur de front. Les profils de glaciers en revanche le sont moins.

Schaefli et al. (2007) proposent un modèle degrés-jour par bandes d’altitudes, couplé à une contrainte géométrique étant que l’accumulation-area ratio (AAR) (Eq. 7.11, Meier et Post,

1962) du glacier est constant. Cette contrainte sert de loi de transfert et consiste alors à re-distribuer l’accumulation en excès de telle manière à ce que l’AAR soit conservé. De la même manière, les lois géométriques telles que la relation surface-volume (Eq.7.10,Bahr et al.,1997), ont été utilisées à ces fins (Stahl et al., 2008).

Immerzeel et al.(2012b) proposent un modèle degrés-jour distribué couplé à une loi de transfert à base physique, basée sur la loi de glissement basal d’un glacier « plastique parfait » (Weertman,

1957). La composante de glissement basal peut parfois s’ajouter à la déformation interne lorsque l’interface entre le glacier et le lit rocheux est lubrifié par un film d’eau. Cette loi nécessite de prescrire l’épaisseur de glace et impose une discrétisation maillée du stock glaciaire. Néanmoins, la loi physique utilisée n’est pas représentative de l’écoulement visco-plastique des glaciers.

Les modules de glace utilisant une loi géométrique de transfert présentent deux limitations principales :

Les lois géométriques utilisées sont issues de propriétés empiriques établies sur un large échantillon de glaciers à un instant donné et l’incertitude associée est importante. Par exemple, la détermination du volume glaciaire par la loi d’échelle est associée à un écart-type relatif significatif de 12.7% (Farinotti et al., 2009). Surtout, si le comportement des lois n’est pas remis en cause, leur non-stationnarité n’est pas garanti. En d’autres termes, il n’est pas garanti que l’AAR soit le même dans 10, 20 ou 30 ans. Adhikari et Marshall, 2012 étudient la non-stationnarité de la loi surface-volume, et trouvent une évolution significative des coefficients de la loi dans un climat différent.

Aussi, les lois géométriques engendrent un problème de discrétisation du stock glaciaire. Une loi d’évolution glaciaire a été construite sur un glacier et s’applique en conséquence à un glacier, et non à un stock glaciaire. Par exemple, comme le souligne Jóhannesson

(2009), le volume de la loi d’échelle doit être obtenu en fonction de la distribution des aires glaciaires, et non de l’aire totale du stock glaciaire.

8.4. Lois d’évolution de la géométrie des glaciers vues par