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Localisation génomique et transfert de gènes du locus botulique

1.5 Neurotoxines et complexes botuliques : organisation des protéines

1.5.3 Diversité génétique des souches de Clostridium neurotoxinogènes

1.5.3.2 Localisation génomique et transfert de gènes du locus botulique

Le génome de la souche Hall de type A comprend un chromosome d’environ 3,9 Mb et un plasmide de 16 kb, avec un pourcentage de GC de 28,2 et 26,8 respectivement.

Le locus botulique est situé sur différents éléments du génome selon les espèces et les souches de Clostridium neurotoxinogènes (cf. Tab. 3) :

 Sur le chromosome pour les types A, B, E et F  Sur un phage pour les types C et D

 Sur un plasmide pour le type G (et certaines souches de type A et B)

Des plasmides ou des bactériophages sont parfois détectés chez les types A, B, E et F, mais ne sont en général pas associés à la toxicité. Cependant, il a été récemment montré que chez deux souches de C. botulinum de type A, Loch Maree et 657Ba, les gènes codant les BoNTs étaient localisés sur de grands plasmides (Marshall et al., 2007). Le fait que ces gènes soient situés sur des éléments extrachromosomiques a d’importantes implications sur l’évolution de la neurotoxinogenèse chez les Clostridium, notamment sur l’origine, l’expression et la mobilité latérale des bonts.

Il a été clairement montré que pour les types C et D les gènes bonts étaient portés par des bactériophages. En effet, les souches curées de leurs phages ne produisent plus de BoNT/C ou /D, mais continuent à produire la toxine C2. Elles peuvent être à nouveau converties en

souches toxigéniques de type C ou D par réinfection avec des phages obtenus à partir de souches toxigéniques. Les similarités et les combinaisons de gènes observées entre les différents bonts suggèrent une dérive et un transfert des gènes à partir d’un ancêtre commun. Les souches bivalentes produisant deux types de BoNTs ainsi que les souches possédant un gène bont silencieux indiquent un transfert latéral de gène. De plus, des dérivés non toxigéniques ont été isolés dans certains toxinotypes comme C. botulinum B (Yamakawa et

al., 1997), démontrant une instabilité des éléments génomiques porteurs des gènes bonts. La

génétique des Clostridium reste mal connue et l’on suppose que ces transferts ont eu lieu par l’intermédiaire d’éléments mobiles (Minton, 1995).

Les plasmides

Les gènes bont/G et tent ont été localisés sur des plamides de grande taille chez C. tetani et C.

argentinense (Finn et al., 1984; Eklund et al., 1988).

Leur transfert peut être réalisé par la mobilisation des plasmides correspondants. La conjugaison et la mobilisation de grands plasmides ont été observées chez des Clostridium comme C. perfringens (Brefort et al., 1977) mais seuls des variants non toxigéniques (sans plasmide) de C. tetani et C. argentinense ont été obtenus. Le séquençage de la souche Hall de type A a mis en évidence la présence d’un plasmide de petite taille, pBOT3502, contenant des séquences codant notamment pour un système de biosynthèse et de transport dédié à la production d’une bactériocine qui pourrait constituer un avantage compétitif à la souche. De plus, la découverte récente de souches de C. botulinum de type A et B portant les gènes des neurotoxines sur des plasmides de grande taille apporte de nouvelles perspectives pour la caractérisation de l’acquisition et de la production des BoNTs (Marshall et al., 2007).

Bactériophages

Le transfert des gènes des BoNT/C et /D se fait par l’intermédiaire des bactériophages au sein du groupe III des Clostridium neurotoxinogènes (Eklund et al., 1971 ; Eklund and Poysky, 1974; Eklund et al., 1974 ). La présence de bactériophages libres dans le cytoplasme bactérien témoigne d’une relation pseudolysogénique entre phage et hôte. Ainsi, des variants curés des bactériophages peuvent être obtenus de manière efficace en utilisant des réactifs tels l’acridine orange et les rayons ultraviolets. Dans les conditions de culture au laboratoire, une partie plus ou moins importante des bactéries, selon les conditions de température ou de salinité, est lysée et libère ses bactériophages dans le milieu . De même, les bactéries présentes dans le sol ou le tractus gastro-intestinal des animaux libèrent des bactériophages qui peuvent alors réinfecter d’autres bactéries. Ces cycles de lysogénie et réinfection expliquent l’existence de variants non toxigéniques ou producteurs de faible quantité de toxine.

Récemment, le séquençage et l’analyse moléculaire du phage de conversion de C. botulinum en type C1 (Sakaguchi et al., 2005) ont révélé qu’il contient bien les gènes codant pour BoNT/C1 et l’exoenzyme C3. De plus, il se trouve sous la forme d’un prophage circulaire

dans la bactérie lysogène et ne s’intègre pas dans le chromosome de l’hôte, ce qui explique l’instabilité de la lysogénie des phages portant les BoNTs.

Par ailleurs, un gène lyc a été identifié chez C. botulinum A et F à proximité des gènes des BoNTs. Les gènes lyc/A et lyc/C sont apparentés à des gènes de bactériophages codant pour des enzymes lytiques chez Lactobacillus et Streptococcus pneumoniae (Henderson et al., 1997). Les enzymes lytiques sont généralement impliquées dans le cycle de réplication des bactériophages et la proximité des gènes lyc et bont suggère qu’ils pourraient provenir d’un prophage intégré. Par ailleurs, deux prophages ont été identifiés dans la souche Hall, mais n’ont pas été détectés dans d’autres souches testées (Sebaihia et al., 2007).

Transposons

Des éléments transposables ont été identifiés chez C. botulinum C et D. Un fragment de 21,5 kb, présent dans plusieurs bactériophages isolés de souches de type C et D, est responsable de la propagation du gène codant pour l’exoezyme C3. D’autres éléments analogues pourraient

expliquer la localisation différente du locus botulique et les transferts entre les sérotypes. Le séquençage de la souche Hall a révélé la présence de trois transposases en 3’ du locus botulique et d’une transposase en 5’. Cette association aurait pu permettre le transfert latéral du locus entier, mais il n’est pas prouvé qu’il ait été transposé en bloc.

Les souches de C. butyricum toxinogènes ont probablement acquis le gène codant pour BoNT/E présent sur le chromosome à partir de C. botulinum E (Poulet et al., 1992) par un mécanisme apparenté à la transduction (Zhou et al., 1993) non élucidé.

Enfin, des réarrangements par recombinaison semblent avoir eu lieu entre les gènes du locus botulique des différents sérotypes, par exemple entre les types C et D (Moriishi et al., 1996), ou au sein d’un même sérotype comme cela a été découvert pour le sous-type A2 décrit par Hill (Hill et al., 2007).

Les localisations diverses des gènes des BoNTs et des ANTPS, la possibilité pour diverses espèces de Clostridium de produire des BoNTs, l’existence de souches produisant plusieurs types ou des hybrides de BoNTs, et la présence de variants non toxinogènes suggèrent fortement une origine ancestrale commune des gènes codant pour les BoNTs. Cependant, les mécanismes de transfert de gènes chez les Clostridium restent méconnus.

C. botulinum A1 et B

C. botulinum C et D

C. botulinum A2 et F

C. botulinum E et C. butyricum

C. argentinense (type G)

Fig. 10 Schéma de l’organisation des locus botuliques pour les différents types de C.

botulinum.

ha70 ha17 ha34 botR/A ntnh bont/A1 et B

ha70 ha17 ha33

botR/C ntnh bont/C et D

ha70 ha17 botR/G ntnh bont/G

botR/A ntnh bont/A2 et F orfX1 orfX3 orfX2 p47 ntnh bont/E orfX1 orfX3 orfX2 p47