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2.1. Principe et fonctionnement du TAG-AMS

2.1.3. Développement analytique

2.1.3.3. Limites de l’instrument

En dépit de son fort potentiel analytique, le TAG-AMS est encore un prototype et a donc nécessité un important travail de développement et d’optimisation en collaboration constante avec Aerodyne Resarch Inc., Aerosol Dymanics Inc., et UC Berkeley. Le TAG est un instrument complexe qui nécessite la gestion de nombreux flux gazeux et liquides avec un timing et des débits très précis, ainsi que la gestion des températures (chauffage et refroidissement) pour de nombreux éléments (CTD, trap, colonne) là encore avec un timing très précis. L’ensemble devant fonctionner de manière totalement automatique, l’électronique et le pilotage informatique sont, dès lors, des points cruciaux nécessaires au bon fonctionnement de l’ensemble. De nombreux problèmes ont été rencontrés à ce niveau-là ainsi qu’entre le couplage TAG-AMS, et ont necessité un important travail d’optimisation qui s’est étalé sur deux années. Nous présentons ici quelques uns des facteurs limitants du TAG et de son couplage avec l’AMS. Certains aspects doivent encore être optimisés.

Aspects limitant propres au TAG

FIGURE 2.13 – Illustration de la problématique des points froids sur le TAG. Chromatogrammes d’une série d’alcanes linéaires (à 5 µM) vus par le TAG-AMS (en haut) et par une GC/MS (Thermo Trace GC 2000- Polaris Q à trappe d’ions). Pour chaque alcane est précisée la hauteur relative du pic

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Le système TAG dans sa configuration actuelle est extrêmement sensible aux points froids. Pour rappel, les lignes en inox depuis la cellule de collecte jusqu’à la source d’ionisation doivent être maintenues à 300 °C. Or les résistances chauffantes et le matériau isolant qui recouvre les lignes ne suffisent pas à maintenir une température constante en tous points de la ligne, en particulier près des points de connexion entre les différents modules. Généralement, pour mieux distribuer la chaleur à ces points particuliers du système, des pièces d’aluminium en contact direct avec les résistances chauffantes sont ajustées autour des lignes (Figure 2.14). Néanmoins, il reste extrêmement difficile d’analyser les composés avec les masses molaires les plus hautes, typiquement moins volatils. Pour illustrer cette problématique, la FIGURE

2.13 présente le chromatogramme pour une série d’alcanes linéaires C14 à C36 analysés par le TAG-AMS et par GC/MS. Les composés avec des temps de rétention supérieurs à celui du C28

ne sont généralement plus quantifiables et/ou détectables. C’est le cas par exemple des hopanes ou des PAHs soufrés, marqueurs des émissions par le véhiculaire et l’industrie.

FIGURE 2.15 – Reproduction à partir de standards des effets d’une matrice très concentrée sur la forme des pics des chromatogrammes. En haut, la forme de pics souhaitée avec (a) le signal de l’acide adipique-d10 à 20 ng dans une matrice à faible concentration (10 – 20 ng), et (c) le signal des isomères galactosan, mannosan, lévoglucosan à 20 ng. En bas la forme des pics dans le cas d’un tag-along effect ou d’un broadening effect avec (b) le signal de l’acide adipique-d10 à 20 ng dans une matrice à forte concentration (250 - 500 ng) et (d) le signal des isomères galactosan, mannosan, lévoglucosan à 500 ng.

FIGURE 2.14 – Photo prise de la pièce d’aluminium incurvée qui conduit la chaleur autour de la ligne entre le trap et la valveless valve.

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Un autre aspect limitant du TAG est l’impossibilité pour l’opérateur de contrôler la quantité injectée sur la colonne selon le principe du split/splitless opéré sur les instruments de chromatographie classiques. Ici l’ensemble de la matière collectée est injectée en tête de colonne. En conséquence, on peut observer dans le cas de matrices très concentrées un élargissement à la base du pic des composés concentrés (broadening), ou des composés élués à leur proximité (tag along et/ou displacement). Pour illustrer, ces effets sont reproduits en laboratoire à partir de standards (Figure 2.15). Une conséquence directe de ces effets est une mauvaise intégration du signal et donc une mauvaise quantification. La seule solution actuellement est d’optimiser la durée de prélèvement en construisant des séquences de mesures dynamiques, c’est-à-dire réduire ou augmenter les temps de prélèvement en fonction des concentrations de l’aérosol organique observées dans le milieu de mesure. Cela nécessite néanmoins une connaissance à priori du milieu. On détermine une concentration acceptable maximale par composé aux alentours de 0.15 moles.

Enfin, comme tous les instruments basés sur le principe de la thermo-désorption, il existe un risque potentiel d’effet mémoire ou carry-over en anglais et de dégradation thermique des composés. Le carry-over est le transfert d’une fraction de la matière collectée durant un run sur le run suivant. Une stratégie pour évaluer le carry-over est de programmer une deuxième séquence de thermo-désorption et de séparation chromatographique à l’issue d’une première injection de standard. Des tests réalisés sur une série de standards (voir les composés du Tableau 2.3) à des niveaux de concentration compris entre 0.025 et 0.25 moles ont montré un carry-over inférieur à 2 %. Au regard d’une possible dégradation des analytes, aucune preuve de dégradation n’a été mise en évidence même si Williams et al. (2015) montrent que la dégradation de composés nitrés et sulfatés organiques et inorganiques par le TAG est possible. Ici, nous limitons la température de thermo-désorption à 280 °C (voir annexe 2).

Problèmes spécifiquement liés à l’analyse AMS

L’installation du quadripôle sur l’AMS diminue considérablement les performances de ce dernier. L’efficacité d’ionisation10 (IE) de l’AMS est de 2.78× 10-8 lorsqu’il est connecté avec le TAG (avec un flux d’hélium de 10 psi). Cela représente 90 % de diminution par rapport à la valeur habituellement déterminée pour le système AMS en fonctionnement normal (optimal) (IE ≈ 2× 10-7). En outre, la connexion TAG-AMS accroit le risque d’endommager les pompes turbo-moléculaires de l’AMS. L’arrivée de l’hélium (et de l’air par les micro-fuites) en continu dans le système AMS a pour conséquence d’augmenter le courant des pompes, et à long terme diminuer leur temps de vie. Une comparaison entre le courant des pompes tel qu’il doit être en conditions normales d’utilisation et lorsque le TAG est connecté est présenté dans le Tableau 2.4.

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TABLEAU 2.4 – Courant des pompes turbo-moléculaires (mAmp) du HR-ToF-AMS avec et sans le TAG.

La ligne de transfert entre les deux instruments est aussi cause de contaminations, clairement visibles sur les spectres de masse AMS (Figure 2.16). L’élément cadmium a été identifié. Il est présent en infime quantité sur les parois internes de la ligne de transfert. On notera aussi sur ce spectre de masse la présence des m/z 207 et 281 relatifs au phénomène de column bleeding de la colonne de chromatographie

FIGURE 2.16 – Spectre de masse du bruit de fond de l’organique total de l’HR-ToF-MS. Dans les zones orange sont précisées les contaminations dues à la ligne de transfert (m/z 110 – 115) et au column bleeding (m/z 207, 281).

Enfin, il convient de préciser que le couplage entre les deux instruments est de manière générale extrêmement ambitieux. Il a nécessité de très nombreuses tentatives pour limiter au maximum les fuites auxquelles l’HR-ToF-AMS est extrêmement sensible.

Pompe Turbo AMS seul He Flow : 10 psiTAG-AMS

P2 441 441

P3 308 339

P4 162 199

P5 179 275

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2.2. Expériences en chambre de simulation