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CADRE THÉORIQUE, ÉTAT DE RECHERCHES ET

2.4 Apports de la présente étude

2.5.3 Limites des corpus

Les linguistes ont souvent collecté des corpus ouverts, qu’ils modifient au gré de l’avancement de leur travail, sans délimiter à l’avance un objet de recherche pré-déterminé, parce qu’ils sont certains de découvrir des phénomènes nouveaux, impossibles à prévoir au départ. Effectivement, malgré tous les moyens mentionnés plus haut, nous ne sommes pas en mesure de garantir une enquête sociolinguistique exhaustive envisageant toutes les variables de manière quantifiée. En l’absence de telles données, des observations notées sur le vif par l’auteure et des anecdotes rapportées par d’autres chercheurs sont parfois utilisés pour illustrer certains cas de figure. Ces exemples font référence aux moments appropriés pour étayer l’analyse qui suivra.

La prise en compte de la situation de production des corpus oblige aussi à nous interroger sur la façon de les interpréter, sur le procédé de conclure des résultats ainsi que sur leur validation. Effectivement, les résultats à produire relèvent parfois d’un choix. Ce choix provient du côté de l’analyste aussi bien que de la part des enquêtés : lors de l’établissement des corpus et surtout des questionnaires, nous avons déjà des hypothèses à prouver, tandis que

les interactants sont peu ou prou influencés par le fait de l’enquête sur leur réponse, soit leur

image à donner. D’une autre part, dans le cas d’analyses assistées par des outils, le mode de visualisation des résultats est particulièrement important car il peut influencer directement le mode d’interprétation. Lors de l’opération de la collecte de données et pendant leurs analyses, nous essayons de neutraliser ces éléments « bruit ».

CADRE THÉORIQUE, ÉTAT DE RECHERCHES ET MÉTHODOLOGIE AU XXIE SIÈCLE

94 Les résultats qui se présentent sous forme de données quantitatives n’ont pas de valeur absolue, puisque notre enquête ne touche pas toutes les couches sociales et toutes les régions en France. En réalité, la multiplicité des variables est telle qu’aucune étude ne peut les prendre toutes en compte, et c’est par le croisement des résultats que l’on peut espérer s’approcher autant que possible de la réalité des pratiques langagières.

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CHAPITRE III

LES EMPLOIS APPELLATIFS DE MADEMOISELLE ET SON PARADIGME ÉNONCIATIF EN FRANÇAIS CONTEMPORAIN

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L’analyse du premier chapitre nous a démontré les sens historiques de mademoiselle à

travers les définitions données par des dictionnaires. Nous pouvons emprunter l’idée de Rosier et Paveau à propos du purisme de la langue française qui tient au « discours normatif qui évalue, généralement négativement, les emplois de la langue et recourt aux outils

tels la grammaire et les dictionnaires […] ».114 En d’autres termes, il s’agit de ce qui doit se

dire.115

En effet, à l’époque contemporaine, les normes du français ne se fondent plus sur l’usage langagier des élites. Elles deviennent très influencées par l’opinion de l’Académie Française qui a pour mission de « fixer la langue française, de lui donner des règles, de la rendre pure et

compréhensible par tous ».116 Cette mission se traduit a priori par la rédaction de deux

catégories d’ouvrage principales : le dictionnaire et la grammaire. Le mot mademoiselle est

défini, selon différents dictionnaires de référence, comme un « titre donné aux jeunes filles ou

aux femmes célibataires. »117

Dans cette partie, nous nous intéresserons au discours descriptif, à savoir comment le mot

mademoiselle est défini dans la société contemporaine française et surtout à dégager dans

114 Laurence Rosier & Marie Anne Paveau, La langue française. Passions et polémiques, Paris, Vuibert, 2008, p.52.

115Ibid.

116http://www.academie-francaise.fr/linstitution/les-missions

117Le Petit Larousse illustré, Paris, Larousse, 2010.

LES EMPLOIS CONTEMPORAINS DE MADEMOISELLE

98 quelles mesures les sens contemporains du mot s’appliquent dans les emplois contextualisés,

c’est-à-dire ce qui se dit. 118 Pour ce faire, nous étudierons les emplois de l’appellatif

mademoiselle dans diverses situations communicationnelles.

Jusqu’à présent, nous parlons toujours d’emploi et non d’usage. Effectivement, la notion

d’emploi porte sur le plan discursif et celle d’usage se positionne davantage au niveau dénominatif. Beaucoup d’emplois ne sont pas dénominatifs : ils servent souvent à pointer des

réalités dont ils ne sont pas encore étiquetés par des noms. Par rapport à l’usage qui n’est en

réalité qu’une abstraction jamais totalement matérialisée dans la pratique, l’emploi est plus

concrétisé sur plusieurs dimensions : à un moment donné, à travers la médiation d’un certain nombre de membres de la communauté linguistique, et dans une zone géographique

déterminée. Nous optons ainsi pour les emplois du mot quand il s’agit d’énonciations

discursives et parlons des usages du mot quand ils proviennent des dictionnaires ou des sens

communs.

Comme nous l’avons mentionné plus haut, en raison de son statut linguistique, les emplois de mademoiselle peut être traités en deux catégories : les emplois normatifs, à savoir les emplois contrôlés qui comprennent d’un côté ce que les interrogés se font croire de leur

pratique langagière, d’un autre côté ce à quoi ils s’attendent comme normes d’usage, et les

emplois libres, soit les emplois non contrôlés, qui, comme son nom l’indique, représentent les

usages réellement pratiqués par les gens dans les interactions verbales. L’étude du premier type d’emplois se base principalement sur les données des questionnaires et des entretiens,

tandis que les emplois libres se trouvent a priori dans les corpus des paroles enregistrées et

des forums de discussion en ligne. Le présent chapitre commence par une étude sur des

emplois normatifs de l’appellatif mademoiselle et de ceux jouant un rôle rapprochant, qui se

traduit par l’analyse des résultats des questionnaires.

118 L. Rosier & M. A. Paveau, p.52.

LES EMPLOIS APPELLATIFS DE MADEMOISELLE ET SON PARADIGME ÉNONCIATIF EN FRANÇAIS CONTEMPORAIN

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