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Dans le cadre de nos trois études, la quantification de la méthylation de l’ADN a été effectuée suite à l’extraction de l’ADN de trois tissus différents: nous avons isolé l’ADN à partir de l’artère fémorale, du muscle squelettique et des leucocytes circulants. Cependant, les tissus étudiés sont composés d’une multitude de types cellulaires différenciés: l’artère fémorale est constituée d’un mélange de cellules endothéliales, de VSCM et des fibroblastes. Le muscle gastrocnémien et soléaire contiennent majoritairement des cellules musculaires squelettiques et également des cellules vasculaires composant les capillaires sanguins irrigant le muscle. Les leucocytes circulants sont composés d’une grande variété de cellules immunitaires telles que les neutrophiles, éosinophiles, basophiles, lymphocytes et monocytes. Ainsi, bien que les résultats obtenus soient spécifiques des tissus étudiés, ils ne tiennent pas compte des sous-populations cellulaires. Ceci représente une limite, puisque la régulation épigénétique pour un même gène peut varier d’un type cellulaire à un autre, la méthylation de l’ADN étant un mécanisme de régulation spécifique au type cellulaire. En effet, le profil de méthylation des gènes exprimés dans les cellules endothéliales est différent comparativement à des cellules où ces gènes ne sont pas exprimés (Shirodkar et al. 2013): c’est le cas pour le gène NOS3 codant pour la eNOS qui est exprimée dans les cellules endothéliales, dont la région promotrice est hypométhylée dans les cellules endothéliales vasculaires alors qu’elle est hyperméthylée dans des VSMC qui n’expriment pas la eNOS (Chan et al. 2004). Une différence de régulation épigénétique a également été observée dans nos études: dans le cas de Sod2 par exemple, bien que sa méthylation soit détectable à la fois dans l’artère fémorale dans la première étude et dans le muscle squelettique dans la deuxième étude, des changements de méthylation n’ont été détectés que dans l’artère fémorale. Il faut cependant préciser que les conditions expérimentales n’étaient pas les mêmes entre les deux études: Sod2 est hypométhylé avec l’âge dans l’artère fémorale alors que la méthylation de ce gène ne varie pas dans le muscle squelettique, ni avec la dyslipidémie, ni avec l’exercice. Une autre limite provenant de l’hétérogénéité des types cellulaires est que même étant à l’intérieur d’un même tissu, les différents types cellulaires peuvent être exposés à différents stimuli et conséquemment manifester une réponse épigénétique différente. Ceci est particulièrement vrai dans le cadre de la deuxième étude: l’échantillon de muscle extrait contient un mélange de cellules musculaires squelettiques et de cellules vasculaires. Les cellules musculaires sont principalement exposées à la production de

radicaux libres provenant de l’abondance de mitochondries, particulièrement suite à une hausse de la demande métabolique déclenchée durant l’exercice physique. Parallèlement, les cellules vasculaires et particulièrement les cellules endothéliales sont quant à elles en contact avec la circulation sanguine et exposées, d’une part, à une panoplie de facteurs circulants impliqués dans la réponse inflammatoire et la régulation de l’homéostasie vasculaire dont l’équilibre est perturbé avec la dyslipidémie sévère et d’autre part, des stimuli physiques causés par le flux sanguin tels que les contraintes de cisaillement. Le stress environnemental se manifeste par différents messagers moléculaires pouvant agir de manière compartimentée et donc, la réponse épigénétique peut varier en fonction du type cellulaire étudié. De plus, à l’intérieur d’un même type cellulaire, une fraction des cellules pourrait inclure des cellules sénescentes ou apoptotiques, diversifiant encore davantage le profil épigénétique. L’hétérogénéité des types cellulaires à l’intérieur d’un même tissu fait donc en sorte que la réponse épigénétique quantifiée face au contexte environnemental représente la moyenne des changements de méthylation provenant de l’ensemble des cellules, tous types cellulaires confondus. Une approche de quantification de l’ADN à partir d’une seule cellule pourrait résoudre ce problème (Kantlehner et al. 2011). Pour l’étude de la méthylation de l’ADN extrait à partir du sang, il serait pertinent d’ajuster le signal épigénétique global avec les variations de sous-populations de cellules leucocytaires présentes, à l’aide de modèles bio-informatiques (Zhong et al. 2016), normalisant ainsi le signal épigénétique global par rapport à la composition des leukocytes. Conséquemment, l’étude des mécanismes épigénétiques dans les cellules en culture permet de mettre en évidence des vois signalétiques potentielles, mais pas forcément réelles compte tenu du stress que représente la mise en culture des cellules.

L’approche expérimentale pour la quantification de la méthylation de l’ADN utilisée dans nos études nécessite une conversion de l’ADN au bisulfite (Ehrich et al. 2005). Brièvement, cette réaction chimique déamine les cytosines non-méthylées de l’ADN, laissant intact les cytosines méthylées, générant des résidus uraciles eux-mêmes remplacés par des résidus thymines lors de l’amplification du brin d’ADN. Cependant, toute approche d’analyse dépendante de la conversion de l’ADN au bisulfite pour différencier les cytosines méthylées des cytosines non-méthylées ne permet pas de discerner les groupements hydroxyméthyles (Nestor et al. 2010). Bien que la fonction des groupements 5hmC ne soit pas bien caractérisée, le 5hmC représente néanmoins une étape dans la déméthylation des 5mC et des différences fonctionnelles importantes pourraient

exister entre les 5mC des 5hmC. Notre approche expérimentale ne permet pas de distinguer ces deux groupements et la quantification de la méthylation de l’ADN est en réalité la somme des 5mC et des 5hmC. Il est tout de même important de noter que la réponse cumulative serait majoritairement dépendante des 5mC puisque l’abondance des 5hmC est relativement limitée comparativement aux 5mC, représentant au plus 30% des 5mC dans le cerveau de la souris adulte (Lister et al. 2013) et peut même être indétectable dans divers types cellulaires humains (Nestor et al. 2012). Néanmoins, de nouvelles approches expérimentales permettant la quantification spécifique des 5hmC ont récemment été développées (Plongthongkum et al. 2014).

L’essai in vitro de méthylation a permis d’attribuer des conséquences fonctionnelles aux modifications épigénétiques observée, c’est-à-dire de prédire une diminution d’expression en lien avec une hyperméthylation de l’ADN. Cependant, une limite majeure de cette technique réside dans la séquence insérée dans le plasmide. En effet, la séquence insérée correspondant à la région d’intérêt du gène peut contenir plusieurs sites CpG avoisinant le site d’intérêt. Par conséquent, l’effet de la méthylation sur l’activité transcriptionnelle est le produit de la méthylation de plusieurs CpG et non uniquement du CpG ciblé. Dans l’étude 3, il a été possible de générer une séquence assez courte pour ne contenir que le CpG d’intérêt. Cette limitation s’applique surtout aux études 1 et 2 puisqu’il n’a pas été possible de générer une séquence assez courte pour simultanément isoler le CpG désiré en préservant une activité transcriptionnelle.