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(Gallaire 85) Chez les humains, la limitation des capacités cognitives rend d'autant plus nécessaire l'élaboration et l'utilisation de représentations schématiques et

hiérarchisées des objets, pour guider l'activité du sujet (Hoc 92). L'activité est

l'actualisation d'une interaction entre un sujet et une tâche. Les activités d'exécution qui

correspondent à l'application de règles ou au déclenchement d'automatismes s'opposent

ainsi aux activités de résolution de problème. Un problème est la représentation qu'un

système cognitif construit à partir d'une tâche sans disposer immédiatement d'une

procédure pour atteindre le but recherché.

7 Jean-Pierre DESCLEESformule quatre façons de penser l'analogie entre cerveaux et machines

informatiques, 1/ substituabilité des organes physiques: cerveaux et machines informatiques sont comparables, seul le support matériel differe, les organes sont substituables et les processus de traitement de l'information sont semblables; 2/ analogie fonctionnelle fondée sur la compétence, il y a substituabilité de la compétence : le cerveau est une machine de Turing ; 3/ analogie fonctionnelle fondée sur les performances: le cerveau fonctionne comme une machine centralisée de type Von Neumann; 4/ analogie entre les stratégies computationnelles: le cerveau utilise des processus de compilation des représentations externes, hautement structurées, vers des représentations internes, compatIbles avec la structure des processeurs et des supports physiques des représentations traitées (Architecture, Représentations cognitives et langage naturel in VERGNAUD(ed) Les sciences cognitives en débat, Editions du CNRS, 1991, 121-147)

La compréhension du problème correspond

à

la construction de la représentation. Elle se fait par étapes progressives, par restructuration. Elle fait appel à des mécanismes perceptifs,

à

la mémoire, aux mécanismes de traitement du langage en interaction / itération avec la résolution. La construction de la procédure correspond à l'élaboration d'une solution ou résolution. Un plan est alors une représentation qui permet une exécution efficace de la procédure de résolution. La résolution de problèmes consiste donc

à

trouver les opérations adéquates soit par comportement essais/erreurs soit par analyse fins/moyens, par un travail

à

rebours pour trouver les opérations adéquates. Cette approche met en évidence le rôle des stratégies heuristiques et non algorithrniques, comme dans le cas du jeu d'échecs où des règles hiérarchisées et simples permettent de limiter le nombre d'alternatives à envisager de plusieurs milliers à quelques dizaines.

Les principales caractéristiques des plans sont la formalisation et la schématisation (Hoc 92). La schématisation permet l'accroissement des capacités de mémorisation avec l'expérience, dans un domaine de tâche donné, par modification des unités de représentations. Pour la formalisation les principaux travaux sont :

- les travaux de Minsky sur les cadres (!rames) utilisés pour la reconnaissance de formes;

- les travaux de Schank & Abelson sur la compréhension d'histoires drôles : celle-ci se fait par inférence sur les buts poursuivis par les acteurs, selon des scénarii, ou scripts, qui codent une situation avec des variables

à

particulariser ;

- les travaux de Schank sur les MOPS (Memory Organization Packets) : le Mops est une structure plus générale et schématique que le script qui stocke les scénarii au moment de leur mise en œuvre et qui les regroupe ;

- les travaux de Bobrow & Norman sur les schémas qui sont des structures relationnelles entre variables, pas entièrement spécifiées, appliquées selon des indices du contexte, qui renvoient sur des procédures et sont en relation les uns avec les autres selon différentes dimensions : analogie, métaphore, généralisation, particularisation ;

- les travaux de Soloway sur les programmeurs expérimentés qui révèlent la possibilité d'organisation en réseaux hiérarchiques, des schémas généraux à ceux plus spécifiques.

l'approche analytique, ils réduisent la charge mentale. Ils permettent une économie de stockage en mémoire, d'où une meilleure performance liée non pas à un accroissement des capacités de stockage mais plutôt

à

l'existence d'unités de représentations plus adéquates, ils permettent aussi une économie de traitement par élévation du niveau de contrôle de l'activité.

Ces recherches connaissent "des développements importants actuellement, grâce à l'opérationnalisation de la notion de schéma comme structure de base de la connaissance, susceptible de formaliser les hypothèses complexes du sujet dans de nombreux domaines" (Hoc 92). Le développement de la psychologie cognitive a ainsi conduit

à

formaliser fortement la cognition dans ses structures et ses procédures. En retour, certains psychologues réagissent et proposent des modèles alternatifs8 au modèle du Traitement de l'Information (Still & Costal 91). Dans le même ouvrage, Shanon (91) renvoie dos

à

dos béhaviorisme et cognitivisme pour leur incapacité

à

articuler l'activité interne du sujet avec sa relation au monde extérieur. Il souligne la difficulté pour la psychologie

à

asseoir sa scientificité parce qu'elle traite des "états internes" non observables et qu'elle aborde la question du sens. Le modèle du traitement de l'information et le cognitivisme lui sont alors un havre de scientificité.

Ainsi, pour A. Tête (90) les "psychologues sont actuellement mis en jeu sinon en cause

quant à la spécificité de notre discipline, à sa scientificité, à sa situation dans le corps des connaissances "objectives"". En effet, "que depuis une vingtaine d'années la psychologie scientifique revendique le titre de cognitiviste n'a pas suffi à conforter son image dans le monde exigeant de la recherche ... ce fut du moins le cas tout le temps que la psychologie est restée sous tutelle cognitiviste : ni Shannon, ni Newell, ni Simon, ni Chomsky, ni Turing ne sont des psychologues, ce sont eux pourtant qui ont inspiré dès les années soixante les travaux des psychologues en même temps qu'il rendaient de moins en moins confortable le béhaviorisme orthodoxe".

8nous renvoyons ici le lecteur à la présentation par Benny SHANON de neuf cadres conceptuels alternatifs au cognitivisme ou représentationnalisme en psychologie (in Alan STILL & Alan COSTALL, Against cognitivism : alternatives foundations for cognitive psych%gy, Harvester Wheatsheaf, 1991, p.237 -262)

Le développement du cognitivisme a conduit

à

une hégémonie des règles universelles :

"dès lors qu'un sujet parle, connaît, apprend, c'est du discours grammatical, des formes logico-mathématiques, de programme informatisé dont il sera question" (Tête 90). Ce

cadre théorique trop fort a provoqué en réaction, dans les années 70, une promotion du sémantique et, conjointement, un reflux des formalismes. Aujourd'hui "il paraît donc

important de considérer la compréhension dans des situations les plus proches possibles des situations naturelles de communication afin de bénéficier du contexte le plus riche possible" (J. Pynte cité par Tête 90). Ceci pose la question de la

représentativité des études de laboratoire quant aux situations quotidiennes.

Pour D. Vellard (94) l'observation des pratiques mathématiques que l'on peut rencontrer dans la vie quotidienne met l'accent sur le rôle de la connaissance implicite et du contexte local dans la résolution de problèmes. Celle-ci l'a conduite, suite à la découverte de la complexité des calculs effectués du fait du système de numération utilisé dans un milieu traditionnel africain,

à

jeter un doute sur la pertinence des modèles cognitifs classiques en matière de résolution de problème, de transfert de connaissances et d'apprentissage qui font l'impasse sur trois questions essentielles, les questions du sens, de la motivation et du contexte.

Une autre évolution importante est le retour du contexte, mais non plus comme constitué d'objets mais de sujets en interaction. Ce concept d'interaction a rencontré une forte audience. La corrélation "ne s'applique plus seulement au couple béhavioriste

Stimulus - Réponse, elle porte davantage sur des relations interindividuelles dont on ne cherche plus à savoir qui stimule et qui répond. L'intérêt n'est plus de suivre le cheminement de l'information entre un émetteur et un récepteur ni de prévoir la réponse. L'interaction ne désigne pas l'origine alternative de la causalité .. cette notion s'est dialectisée. Tout se passe comme si elle traduisait la volonté méthodologique (et théorique) de substituer à l'exclusion béhavioriste du stimulus et de la réponse une sorte d'inclusion de l'organisme dans le milieu et du milieu dans l'organisme." (Tête 90).

Le concept d'interaction a été introduit dans les années 30 par les travaux de Gardiner en philosophie, par Schütz en sociologie, par G.H. Mead, Vygotsky et Piaget en psychologie (Trognon 91). Il correspond alors

à

une critique du subjectivisme. Ainsi pour G.R. Mead c'est la relation à l'autre qui est constitutive de l'indîvidualité. Dans les années 50, il a été développé en psychologie sociale expérimentale par les travaux de BaIes sur les groupes restreints et en psychologie clinique par les travaux de l'école de Palo Alto (Mucchieli 91, Fischer 90).

L'interaction désigne à la fois une classe d'objets et la propriété qu'ils réalisent. Ainsi on appelle interaction

à

la fois l'action accomplie au moyen de l'émission d'un message et une séquence d'actions. Mais ce qui est vraiment propre

à

l'interaction c'est la

''propriété

de détermination réciproque réalisée par les objets précédents".

Il s'agit alors de

comprendre l'engrenage des actions des partenaires. L'interaction peut se faire entre deux personnes en présence physique, c'est la thèse de Goffman ou plus généralement être produite par tout message même le monologue. Ainsi Trognon emprunte la définition de l'interaction comme

"une action dont le but est réalisé par la réaction du

partenaire, cette réaction étant elle-même une action

fI.

Au minimum, l'interaction est considérée comme la matrice des cognitions, comme le "bain" dont émergent les cognitions chez Mead, Vygotsky ou le "jeune" Piaget. Pour sa part

"la version forte de la thèse interactionniste impose que l'émergence des cognitions

s'accomplisse dans le cours de l'interaction"

(Trognon 91). Ainsi l'interaction est un

processus où les significations sont

à

la fois transmises mais aussi élaborées en cours de route.

"Elles résultent de la confrontation et de la négociation de perspectives

différentes, perspectives qui engagent la personne entière des interactants. C'est dire

qu'elles ne sont pas seulement d'ordre cognitif mais aussi d'ordre social, affectif,

émotionnel."

(Marc & Picard 91).

Les effets de contexte ne sont alors plus considérés comme des nuisances pour l'expérimentation. Dans cette nouvelle approche, la situation est contextuelle non par elle-même mais par les sujets qui s'y comportent.

Alors le sujet ne peut pas être confondu avec le système neurologique qui régit son

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