cadres institutionnels, au fil des interactions et des conversations. Ce travail de
construction s'ancre donc dans des dynamiques tant sociales qu'organisationnelles, son
analyse doit prendre en compte les effets des participations sociales multiples des
acteurs de l'entreprise sur la formation de la stratégie. La formalisation de la stratégie
correspond pour sa part, à l'écriture du texte. Le texte est le discours officiel tel qu'il est
affiché sur les supports de communication interne et externe qu'utilisent l'organisation.
Le texte intervient dans la formation de la stratégie, il fournit des sujets de conversation
stratégique.
En retour, il est important de noter que les concepts de la sociologie de la structuration
introduits par l'approche "critique" de la stratégie, peuvent nous aider à penser le
paradoxe de la représentation sociale dont on a vu qu'elle est tout à la fois (trop)
individuelle ou (trop) collective. Nous avons déjà remarqué que le cadre théorique des
représentations sociales, s'il intègre le rôle des interactions et des communications à
la fois dans la production et la reproduction des représentations, est critiqué pour sa
conception du collectif. Pour les tenants de l'analyse du discours (potter & Wetherell
87), les méthodes utilisées font apparaître un consensus fictif, en aplanissant les
différences entre les réponses des individus. Pour les sociologues, c'est une approche qui
reste psychologique et fait un mauvais usage de la sociologie3 (parker 87) : elle ne fait
qu'individualiser le concept de représentations collectives de Durkheim. A l'inverse, pour les tenants de la cognition, ce cadre théorique s'éloigne d'une conception véritablement mentale des représentations et repose sur des hypothèses psychologiques non testées, tout comme il ne prend pas en compte les avancées des sciences cognitives (Jahoda 88). Deux concepts viennent nous aider
à
penser le rapport entre l'individuel et le collectif. C'est d'abord le cas du concept de dualité du structurel développé par Giddens (84) et repris par Rouleau (92, 96). Pour Giddens, les structures sociales n'existent pas, seuls les systèmes sociaux, ensembles de relations régulières, existent. Ces systèmes sociaux sont structurés et structurants pour les interactions entre individus. Ils fournissent ainsi un ensemble de règles et de ressources, les règles d'interprétation (schéma) et d'évaluation (normes) définissent les processus sociaux de signification et de légitimation, l'utilisation des ressources permet la domination (Becker 96). C'est ensuite le concept de règle, en particulier tel qu'il est développé par Reynaud (89). Pour Reynaud, la règle entretient avec les groupes, la même relation décriée que les représentations sociales."La contrainte qu'exerce une règle sur un individu est
étroitement
liée
avec
l'appartenance
àune
collectivité
qu'elle
lui procure.
Réciproquement, la régulation fonde et constitue un acteur collectif',
(p.64)"Ce qui
assure la stabilité des règles, ce qui permet leur maintien, ce n'est pas
àproprement
parler leur poids ou leur inertie (...) ce sont les stratégies des acteurs qui les utilisent et
les construisent",
(p.63). La notion de règle ainsi définie (régularité, contrainte, propreà
un groupe social) nous invite
à
penser la représentation sociale comme une structure, comme une règle ...3PARKER, 1. (1987) Social representations, social psychology (mis )use of sociology, Journal for the Theory of Social Behavior, 17, p.447-469
Comme nous venons de le voir tout au long de cette section, la place qu'occupe les représentations dans la formation de la stratégie et les définitions supposées pertinentes des représentatio~ ne peuvent faire l'économie d'une triple définition de l'individu, de l'organisation et de l'environnement. Il y a interdépendance entre les paradigmes de la. stratégie et les cadres théoriques pertinents pour l'analyse des représentations. Lire les représentations avec les lunettes de la théorie des représentations sociales, c'est adopter une définition particulière de l'individu comme acteur social compétent mais aussi du lien social et donc de l'entreprise et du marché. Cette définition n'est évidemment pas celle de l'homo oeconomicus. Le projet d'adaptation de la théorie des représentations sociales
à
l'analyse des discours stratégiques est compatible avec l'approche rénovée de la stratégie (Martinet 88) et avec la forme critique du discours sur la stratégie (Rouleau & Séguin 95). En retour ces deux écoles de la stratégie en ce qu'elles envisagent la stratégie comme liéeà
l'action d'individus socialement compétents, dotés de représentations et de marges de manoeuvre requièrent,à
nos yeux, l'étude des représentations pour envisager la formation des stratégies. Il y a donc interdépendance entre représentation et stratégie au niveau des options théoriques que sont les définitions de l'individu, de l'organisation et de la société mais aussi au niveau des projets. Il y a adéquation de l'objet et de la méthode lorsque l'étude des représentations sociales rencontre les modèles rénové ou critique de la stratégie. En d'autres termes, il y a méconnaissance de la stratégie par la cartographie cognitive.DE LA COGNITION A LA REPRESENTATION EN MANAGEMENT STRA TEGIOUE
CHA P' 1T R E 1
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C H A P 1 T R E2
point de départ, cartes cognitives et approches cognitivesj
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revue des approches en psychologie cognitive et en
psychologie sociale
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en quoi les "représentations soCiales" nous permettent-
elles de dépasser les limitations actuelles
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Synthèse d'un cadre ""'" théorique pour l'étude desreprésentations revue des travaux en MOC critiques : flou ~ théorique et articulations INTERDEPENDANCE