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Lien entre métabolisme lipidique, APOLs et ZIKV

Nous avons discuté dans l’introduction du rôle des APOL1 et 3 dans le métabolisme lipidique et notamment dans la régulation de la production du phospholipide PI(4)P. Cette régulation passe par l’interaction indirecte des APOLs avec la kinase PI4KB (Uzureau et al., 2020). Nous avons donc cherché à déterminer si l’impact des APOLs lors de l’infection, notamment par ZIKV, pouvait être lié à ce rôle physiologique. En effet, il a été montré que, pour certains virus, le PI(4)P est indispensable à la mise en place d’une réplication efficace via la formation de membranes qui servent de plateformes à la production d’ARN (Hsu et al., 2010 ; Arita et al., 2011 ; Berger et al., 2011).

1. Localisation cellulaire des APOLs

Dans un premier temps, nous avons voulu déterminer où sont localisés les APOLs pour vérifier si une interaction, même indirecte, avec la PI4KB était possible. Pour se faire, en l’absence d’anticorps spécifique des APOLs validés pour les expériences d’immunofluorescence, nous avons généré des plasmides permettant l’expression d’APOL3 ou APOL1 fusionnée avec la GFP. Cette technique nous permet de localiser facilement ces protéines par fluorescence. Nous avons donc transfecté les cellules HMC3 avec les différentes constructions et visualisé différents compartiments cellulaires par immunofluorescence, en utilisant des marqueurs appropriés. Ainsi, la localisation des APOL-GFP a été étudiée dans des cellules dont le noyau, les endosomes précoces ou tardifs et l’appareil de Golgi ont été marqués. APOL1-GFP et APOL3-GFP semble localisées dans l’appareil de Golgi mais pas dans les endosomes (Annexes, Figure 44). En effet, nous observons une co-localisation du marquage GFP avec la protéine GM130 connue pour résider dans le Cis-Golgi (Figure 35A). Ces analyses par immunofluorescence nous permettent donc d’affirmer qu’APOL1 comme APOL3 se trouvent à l’appareil de Golgi. Il a été montré que la kinase PI4KB se trouvait également au niveau de l’appareil de Golgi (Daboussi et al., 2017). Dans un second temps nous avons donc comparé la localisation des APOL-GFP avec celle de la kinase par immunofluorescence. Nous pouvons voir sur la figure 35B que le marquage GFP semble là encore co-localiser avec le marquage de la kinase. L’hypothèse que les APOLs interagissent avec la PI4KB pour réguler la production de PI(4)P et ainsi influencer la réplication de certains virus semble donc plausible. Il est à noter que cette expérience a été réalisée dans des conditions de surexpression de version taggées des APOLs. Il est donc possible que la localisation ne soit pas représentative d’une situation plus physiologique. De plus, lors de la surexpression d’APOL1-GFP, nous pouvons observer la formation de structures en forme de vesicules que nous n’avons pu identifier (Figure 35A, flèches blanches).

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2. Rôle des phospholipides PI(4)P lors de l’infection par ZIKV

Pour valider ou non le rôle de la PI4KB et du PI(4)P lors de l’infection par ZIKV, nous avons réalisé l’infection des HMC3 en présence ou non d’un inhibiteur bien caractérisé de la kinase (Rutaganira et al., 2016). Cette molécule permet l’inhibition de l’activité de la PI4KB et ainsi induit une diminution de l’expression du PI(4)P.

Pour nous assurer de l’efficacité de cet inhibiteur nous avons traité avec différentes concentrations les cellules pendant 24 h puis nous les avons fixées et analysées par immunofluorescence pour la détection de PI(4)P. Ainsi nous pouvons voir qu’un traitement à 10 nM permet une diminution de la

Figure 35. Localisation cellulaire des APOLs. Les HMC-3 sont transfectées avec des constructions GFP-APOL3 et APOL1-GFP. Vingt heures post-transfection, les cellules sont fixées et marquées par des anticorps dirigés, soit contre GM130 (A) soit la PIK4B (B). Le carré blanc correspond à la zone d’agrandissement représentée sur la droite de la figure. Les flèches blanches indiquent des structures en forme de tores formées lors de la surexpression d’APOL1. A B GM130 APOL1-GFP Agrandissement Assemblage APOL1-GFP GFP-APOL3 PI4KB GFP-APOL3 GM130 PI4KB Agrandissement Assemblage

Résultat – partie II ǀ 93 présence de PI(4)P. Cette diminution est dose dépendante avec une très forte baisse du marquage PI(4)P lorsque l’inhibiteur est utilisé à 160 nM (Figure 36A). Par ailleurs, nous n’avons observé aucune mort cellulaire après le traitement.

Une fois l’inhibiteur validé, nous avons infecté les HMC3 avec ZIKV. Puis, juste après infection, nous les avons traitées pendant 36 h avec différentes doses d’inhibiteur. Le pourcentage de cellules infectées a, par la suite, été déterminé par cytométrie en flux (Figure 36B). Pour cette expérience nous avons également infecté les cellules avec le virus coxackie B3 (CVB3). En effet, il a été montré que ce virus utilise les lipides PI(4)P pour sa réplication et qu’un inhibiteur ciblant PI4KB pouvait induire une forte diminution de l’infection (Hsu et al., 2010). Cette condition nous sert donc ici de contrôle positif. Nous avons également infecté les cellules avec WNV. Une étude montre que ce flavivirus n’est pas sensible à un traitement par un inhibiteur de la PI4KB, nous nous en sommes donc servi comme d’un contrôle négatif (Martin-Acebes et al., 2011). Nous pouvons voir sur la figure 36B que l’inhibiteur inhibe comme attendu l’infection des HMC3 par CVB3. De plus, cette inhibition est dépendante de la dose d’inhibiteur utilisée. Pour WNV, aucune diminution d’infection n’est visible. De même, l’infection par ZIKV n’est pas impactée par le traitement.

Figure 36. Rôle des PI4P dans l’infection par ZIKV. (A) Les HMC-3 sont traitées avec différentes concentrations d’inhibiteur de PI4KB. Un contrôle avec traitement DMSO est réalisé. Les cellules sont fixées et analysées par immunofluorescence après marquage du PI(4)P (vert). (B) Les HMC-3 sont infectées par CVB3 (MOI 50), ZIKV (MOI 0,05) ou WNV (MOI 0,02). L’inoculum est retiré et remplacé par l’inhibiteur de la PI4KB à différentes concentrations. Le pourcentage de cellules infectées est déterminé 38 h post-infection par cytométrie en flux. Chaque point de cette figure représente une expérience indépendante. Les analyses statistiques ont été effectuées par test de Dunnett (* p<0,05 ; ** p<0,001).

A

B

10nM

Résultat – partie II ǀ 94 Les résultats obtenus ici ne sont pas surprenant. Effectivement, il avait été mis en évidence que les PI(4)P ne sont pas important pour la réplication de WNV ou celle du virus Usutu (Marin-Acebes et al. 2011). Ces virus appartenant au genre Flavivirus, il était très probable que cette observation soit également vraie pour ZIKV. Cependant aucune étude ne l’avait encore démontré.

Ces expériences suggèrent que le rôle pro-viral des APOL1 et 3 n’est pas lié à leur interaction avec la PI4KB ni le PI(4)P dans les cellules microgliales. Nous avons donc exploré d’autres pistes afin de comprendre comment les APOLs modulaient la réplication de plusieurs virus à ARN.

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