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1.5 Gyromètre-accéléromètre du SYRTE

2.1.1 Les transitions Raman

Le calcul des transitions Raman est détaillé dans plusieurs réferences, par exemple [Moler 1992]. Nous rappelons ici les points clefs de ces développements qui nous seront utiles pour la suite.

Système physique

FIG. 2.1 : Schéma des niveaux d’énergie interne du sytème atomique à trois niveaux. Les deux niveaux a et b sont couplés par une transition à deux photons par l’intermédiaire du niveau excité e.

Le système étudié est représenté sur la figure 2.1, il s’agit d’un système atomique à trois niveaux en interaction avec deux lasers de pulsation ω1 et ω2. On considère deux niveaux stables |ai et |bi, dans notre cas il s’agit des deux états hyperfins du niveau fondamental de l’atome de césium |6S1/2, F = 3, mF = 0i et |6S1/2, F = 4, mF = 0i séparés par l’in-tervalle d’énergie ~ωSHF. Ces deux niveaux sont couplés à l’état excité |6P3/2i de largeur

naturelle Γ ' 2π.5 MHz. Dans les calculs qui suivent, on notera |ei l’état excité. Ces transi-tions optiques, correspondent à la raie D2 de l’atome de césium dont la longueur d’onde λ est proche de 852 nm. L’hamiltonien de ce système atomique s’écrit :

Hat = pˆ

2

2M + ~ωa|aiha| + ~ωb|bihb| + ~ωe|eihe| (2.1) Les états propres de l’hamiltonien externe 2Mpˆ2 sont les ondes planes de de Broglie |~pi. Les états de base de l’atome s’écrivent alors sous la forme d’un produit tensoriel de l’état interne |βi et de l’état externe |pi : |β, pi = |βi ⊗ |pi où β = (a,b ou e).

L’atome interagit avec deux ondes lasers monochromatiques de fréquences ω1, ω2 et de vecteurs d’onde ~k1, ~k2. Les polarisations et les amplitudes des champs électriques sont notées ~1,2 et E1,2. Par ailleurs, on suppose pour ce calcul, que les cols des faisceaux lasers (waist) sont suffisamment grands pour écrire le champ électrique sous la forme d’une onde plane :

~ E(~ˆr, t) = 1 2  ~1E1ei~k1.~ˆr e−i(ω1t+φ1) + ~2E2ei~k2.~rˆ e−i(ω2t+φ2) + c.c. (2.2)

Le couplage de l’atome avec le champ laser est décrit dans l’approximation dipolaire élec-trique, par l’hamiltonien d’interaction Hint. L’émission spontanée est supposée négligeable pour ce calcul. En faisant l’approximation des ondes tournantes, Hints’écrit :

Hint = −(dea+deb) · ~E(~ˆr, t) + h.c. = |eiha| + |eihb|· −~Ω1je

2 e i~k1.ˆ~re−i(ω1t+φ1)+−~Ω2je 2 e i~k2.ˆ~re−i(ω2t+φ2)  + h.c. (2.3)

où nous avons introduit la pulsation de Rabi Ωlje en fonction des éléments de matrice du moment dipolaire dej :

~Ωlje= hj|dej · ~El|ei (2.4) L’opérateur e±ikl~ˆr

dans l’expression de Hintest un opérateur de translation de l’impulsion, tel que : e±i~kl~ˆr

|~p i = |~p ± ~~kl i. Par conséquent, en partant d’un état d’impulsion donné |a, ~p i, il existe une famille d’états, d’impulsion différente, couplés. Pour notre calcul nous considérerons les couplages représentés sur la figure 2.2. Il s’agit du couplage à un photon, induit par chacun des deux lasers, entre l’état |a, ~p i et les niveaux intermédiaires |e, ~p + ~~k1i et |e, ~p + ~~k2i ; et du couplage entre le niveau |b, ~p + ~(~k1 − ~k2)i et les états |e, ~p + ~~k1i et |e, ~p + ~(~k1− ~k2+ ~k1)i. On utilisera les notations suivantes pour repérer ces différents états :

– |a, ~pi

– |b, ~p + ~(~k1− ~k2)i ≡ |b, ~p + ~~keffi – |e, ~p + ~~k1i ≡ |e1i

– |e, ~p + ~~k2i ≡ |e2i

– |e, ~p + ~(~k1 − ~k2+ ~k1)i ≡ |e3i

La fonction d’onde atomique, peut être décrite à l’instant t, dans la représentation d’in-teraction par rapport à Hat, par une combinaison linéaire des états propres de l’hamiltonien atomique Hat :

|Ψ(t)i = γa(t) exp−i(ωa+ 2Mp2 )t|a, ~pi + γb(t) exp−i ωb+(~p+~~keff)2

2M t|b, ~p + ~~keffi

e1(t) exp−i ωe+(~p+~~k1)2

2M t|e1i

e2(t) exp−i ωe+(~p+~~k2)2

2M t|e2i

e3(t) exp−i ωe+(~p+~(~keff+~k1))2

2M t|e3i

(2.5)

FIG. 2.2 : On représente sur ce schéma les niveaux d’énergie interne du sytème atomique. En plus des trois niveaux internes, le couplage des atomes avec les lasers, induit une famille d’états d’impulsions différentes.

Par ailleurs, les désaccords des lasers par rapport aux niveaux excités (figure 2.2) sont définis par : ∆ = ω1− (ωe− ωa) ∆2ae = ω2− (ωe+ p + ~~k~ 2 2 2M − ωa) ' ∆ − ωSHF1be = ω1− (ωe+ p + ~(~k~ 1+ ~keff)2 2M − ωb) ' ∆ + ωSHF δ = (ω1− ω2) − (ωb− ωa) (2.6)

Evolution des deux niveaux effectifs

L’évolution de la fontion d’onde est régie par l’équation de Schrödinger qui permet d’ob-tenir un système d’équations différentielles linéaires pour les coefficients γα:

                                  

˙γa= −2i1aeei∆te1γe1+ Ω2aeei∆2aete2γe2

˙γb = −2i1beei∆1beteiφ1γe3+ Ω2beei(∆−δ)teiφ2γe1

˙γe1 = −2i1aee−i∆1aete−iφ1γa+ Ω2bee−i(∆−δ)te−iφ2γb

˙γe2 = −i

22aee−i∆2aete−iφ2γa ˙γe3 = −2i1bee−i∆1bete−iφ1γb

(2.7)

Pour calculer l’évolution des deux niveaux fondamentaux utilisé dans l’interféromètre, on utilise une approximation1 appelée élimination adiabatique, qui consiste à supposer les échelles de temps d’évolution des états excités |ei beaucoup plus courtes que celles des états fondamentaux. Nous pouvons donc calculer l’évolution des coefficients γe, en considérant γa et γb constants (γe suit adiabatiquement les coefficients γa et γb) dans les trois dernières équations du système 2.7 :

1Le système d’équations 2.7 peut être résolu de manière exacte lorsque la différence de fréquence entre les deux lasers Raman est telle que δ = (ω1− ω2) − ωSHF = 0 [Brewer 1975], c’est-à-dire lorsque la transion à deux photons est résonante. Néanmoins du fait de la dispersion en impulsion du nuage d’atomes il apparaît une dispersion en δ via le désaccord Doppler, dont il faut tenir compte lors de l’analyse des séparatrices atomiques.

γe1 = 1ae 2∆ γae −i(∆t+φ1)+ 2be 2(∆ − δ)γbe −i((∆−δ)t+φ2) γe2 = 2ae 2∆2aeγae −i(∆2aet+φ2) γe3 = 1be 2∆1aeγbe −i(∆1bet+φ1) (2.8)

L’élimination des amplitudes γe des niveaux intermédiaires conduit à des équations cou-plées pour les amplitudes γaet γbdes deux niveaux fondamentaux. Afin de mettre en évidence l’évolution d’un système à deux niveaux dans un champ externe effectif, on introduit les no-tations suivantes : ωeff = ω1− ω2 (2.9) ~keff = ~k1− ~k2 (2.10) φeff = φ1− φ2 (2.11) Ωeff = 1ae2be 4∆ (2.12)DLa = |Ω1ae|2 4∆ + |Ω2ae|2 4(∆ − ωSHF) (2.13)DLb = |Ω1be|2 4(∆ + ωSHF) + |Ω2be|2 4∆ (2.14)

Ainsi, en remplaçant les amplitudes γe (équation 2.8), dans les deux premières équations de 2.7, l’évolution des coefficients γa et γb se ramène effectivement à un système de deux équations différentielles couplées, qui s’écrit avec les notations précédentes :

    

˙γa = −iΩDLa γa− ieiδteeffeffγb

˙

γb = −iΩDLb γb− ie−iδte−iφeffeffγa

(2.15)

Le système d’équations obtenu est analogue à celui décrivant l’évolution d’un atome à deux niveaux [Ramsey 1950] {|a, ~p i, |b, ~p + ~keffi} en interaction avec une onde électro-magnétique effective de pulsation ωeff, de vecteur d’onde ~keff et de phase effective φeff. Le

couplage effectif à deux photons entre ces états est caractérisé par la pulsation de Rabi effec-tive Ωeff et le désaccord δ de l’onde effective par rapport à la résonance atomique vaut :

δ = ωeff− (ωSHF +p · ~k~ eff M +

~keff2

2M ) (2.16)

Dans cette expression le premier terme en keff est le déplacement Doppler et le second le déplacement lié à l’énergie de recul à deux photons.

La pulsation ΩDLj correspond à un déplacement du niveau j dû au couplage non résonant entre les niveaux j et e induit par le laser l. On définit le déplacement lumineux différentiel δDL, qui correspond à la modification de la condition de résonance Raman induite par ces déplacements lumineux :

δDL = ΩDLb − ΩDL

a (2.17)

Le sytème d’équation 2.15 indique que les fréquences caractéristiques d’évolution des amplitudes γa et γb sont de l’ordre de Ωeff et ΩDLj . Avec les paramètres habituels de l’expé-rience ces fréquences sont de l’ordre de 50 kHz. Par ailleurs, les équations 2.8 montrent que les fréquences caractéristiques d’évolution des amplitudes des états intermédiaires, γesont de l’ordre de ∆, qui vaut typiquement 500 MHz dans notre expérience. Les conditions d’élimi-nation adiabatique sont donc satisfaites dans notre expérience.

La pulsation de Rabi généralisée est définie par :

r = q

2

eff+ (δ − δDL)2 (2.18)

Ceci permet d’introduire : cos Θ = δ

DL− δ

r et sin Θ = −eff

r

Avec ces notations, l’évolution de la fonction d’onde atomique pendant l’impulsion laser de durée τ est donnée par :

                         γa(t0+ τ ) = eiτ2(δ−(ΩDL a +ΩDL b )) n i cos Θ sin( 2 ) + cos( 2 ) γa(t0) + i sin Θ sin( 2 )ei(δt0+φeff) γb(t0)o γb(t0+ τ ) = eiτ2[−δ−(ΩDL a +ΩDL

b )] n −i cos Θ sin(Ωrτ

2 ) + cos(

2 ) γb(t0) +

i sin Θ sin(

2 )e−i(δt0+φeff) γa(t0)o

Les équations d’évolution 2.19 peuvent être réécrites sous une forme matricielle en intro-duisant la matrice de transfert d’une impulsion Raman S(τ, φ, Ωeff, t0) tel que :

|ψ(t0+ τ )i = S(τ, φ, Ωeff, t0)|ψ(t0)i (2.20)

Avec les équations 2.19 la matrice de transfert s’écrit :

S(τ, φ, Ωeff, t0) = e−i(ΩDLa +ΩDL b )τ2

  

−i cos Θ sin(Ωrτ

2 ) + cos(

2 ) e−iδτ

2e−iω −i sin Θ sin(Ωrτ

2 )e−i(δt0+φeff)

−i sin Θ sin(Ωrτ

2 )ei(δt0+φeff)eτ2e−iω i cos Θ sin(

2 ) + cos( 2 ) eτ2e−iω    (2.21)

Compensation des déplacements lumineux

Pour un certain rapport d’intensité entre les deux faisceaux lasers, le déplacement lumi-neux différentiel peut être annulé. Pour faire apparaître la pulsation de Rabi Ωlde la raie D2 associée au laser l, proportionnelle au module du champ électrique |El|, on utilise les forces de transition entre les niveaux j et e tel que fje|Ωl|2 = |Ωlje|2. Avec cette notation, le déplacement lumineux différentiel 2.13 se réécrit :

δDL = ΩDL b − ΩDL a = fbe|Ω1|2 4(∆ + ωSHF) + fbe|Ω2|2 4∆ − fae|Ω1| 2 4∆ − fae|Ω2| 2 4(∆ − ωSHF) (2.22)

Nous déduisons de l’expression 2.22 une valeur du rapport d’intensité entre les deux lasers Raman pour que le déplacement lumineux différentiel s’annule :

I2 I1 = fbe 4(∆ + ωSHF)− c1be 4∆ fae 4(∆ − ωSHF)− fbe 4∆ (2.23)

Nous verrons par la suite que le déplacement lumineux différentiel peut conduire à des biais importants sur nos mesures de rotation et d’accélération. L’équation 2.23 montre cepen-dant, qu’il est possible d’annuler cet effet quel que soit le désaccord ∆. En pratique, le bon rapport de puissance entre les faisceaux lasers est déterminé expérimentalement.

Cas particuliers des impulsions π/2 et π

Pour décrire l’interféromètre atomique, il est intéressant de se limiter au cas particulier où la condition de résonance est vérifiée et où les déplacements lumineux différentiels sont compensés. Dans ces conditions Ωr = |Ωeff| et donc cos Θ = 0 et sin Θ = 1.

En choisissant |Ωeff|τ = π

2 la matrice d’évolution de cette impulsion dite "π/2" s’écrit :

Sπ/2eff) = e −i(ΩDL a +ΩDL b )τ2 √ 2

e−iω −ie−i(δt0+φeff)e−iω

−iei(δt0+φeff)e−iω e−iω

!

(2.24)

Cette interaction π2 crée une superposition cohérente équiprobable entre les deux états hyperfins d’impulsions différentes |a, ~p i et |b, ~p+~~keffi, ce qui permet de réaliser l’équivalent d’une séparatrice 50/50 pour la fonction d’onde atomique |Ψi (cf figure 2.3). Pour la raie D2 du césium Vrecul = 3,5 mm.s−1 et dans notre expérience la vitesse longitudinale des atomes vaut V0 = 300 mm.s−1, la séparation angulaire θsep ' 2Vrecul

V0 est alors de l’ordre de 20 mrad.

FIG. 2.3 : Equivalent atomique d’une séparatrice pour onde de matière. La séparatrice est réalisée grâce à l’échange d’impulsions entre les lasers et l’onde de de Broglie lors d’une transition Raman stimulée contre-propageante.

Lorsque |Ωeff|τ = π l’impulsion est dite "impulsion π" et la matrice de transfert corres-pondante s’écrit :

Sπeff) = e−i(ΩDLa +ΩDL

b )τ2 0 −ie−i(δt0+φeff)e−iω

−iei(δt0+φeff)e−iω 0

!

(2.25)

L’impulsion π crée un transfert cohérent entre les deux niveaux hyperfins et correspond du point de vue des trajectoires à échanger les directions. On parle alors d’équivalent de miroir pour les ondes atomiques.

Probabilité de transition et sélection en vitesse

La condition de résonance (2.16) d’une transition Raman, dépend de la vitesse de l’atome par l’intermédiaire du désaccord Doppler. Ainsi, lorsque l’atome a une vitesse ~v parallèle au vecteur d’onde ~keff, les faisceaux Raman ne sont plus à résonance avec la transition atomique, on parle alors de transition sélective en vitesse.

Cette sélectivité en vitesse est reliée à la durée τ de l’impulsion Raman. En effet, la durée de vie des états |a, ~p i et |b, ~p + ~~keffi étant très longue, la largeur spectrale de la transition Raman est déterminée par la largeur spectrale de l’onde Raman effective. Ainsi, plus la du-rée de l’impulsion est grande plus le spectre est étroit, et donc moins il y a de classes de vitesse résonantes. Pour une impulsion π, la largeur à mi-hauteur de la transition en Hz vaut

Ωeff

= 1

τ. La distribution en vitesse dans un nuage d’atome implique que toutes les classes de vitesse ne sont pas résonantes en même temps, ce qui limite l’efficacité des transitions Raman. Par conséquent, la probabilité de transition Raman mesurée reflète la distribution en vitesse du nuage. La largeur à mi-hauteur de la probabilité de transition s’exprime en fonction des désaccords Doppler associés aux classes de vitesse du nuage d’atomes :

∆v = 1

keff(2.26)

Cette sélectivité en vitesse empêche de réaliser parfaitement des transitions π et π/2 pour l’ensemble des atomes. Nous verrons au chapitre 4 que cet effet limite le contraste de l’inter-féromètre. Par conséquent, il convient de réduire la dispersion en vitesse des nuages d’atomes et d’utiliser des lasers de puissance suffisante. Dans les conditions habituelles de l’expérience, la température du nuage d’atomes froids est de ∼ 1 µK, la puissance laser de 400 mW et le désaccord entre les lasers et la transition à un photon de ∆ ∼ 400 MHz. Avec ces paramètres la durée d’une impulsion π vaut τ ≈ 15 µs soit une sélectivité en vitesse de l’ordre de ∆v = 4,5 mm.s−1∼ 1, 3 Vrecul.

Avantages techniques

Nous avons vu que les transitions Raman sont sensibles à la différence de fréquence (ω1− ω2), ainsi, la condition de résonance ne dépend pas, de façon critique, de la fréquence absolue des deux faisceaux lasers (cf. équation 2.16). Par conséquent, les contraintes sur la largeur de raie des lasers Raman sont moins importantes2. Cette propriété présente un avantage évident pour la réalisation expérimentale des séparatrices lumineuses.

De plus, les transitions Raman associent aux états atomiques externes un niveau d’énergie "interne" permettant d’utiliser des techniques standards de détection par fluorescence pour mesurer les populations en sortie de l’interféromètre [Bordé 1989]. C’est pourquoi, parmi les nombreuses techniques utilisées pour réaliser des séparatrices pour les ondes atomiques (réseaux de mécanique [Carnal 1991] ou lumineux [Rasel 1995]), les transitions Raman sont aujourd’hui utilisées dans de nombreux interféromètres atomiques destinés aux mesures de grande sensibilité.