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Les sources littéraires

Dans le document Le dialogue d'Athanase et Zachée - RERO DOC (Page 183-200)

Patrick Andrist

D. Les sources l’intertexte simple

VIII. Les sources littéraires

1. AZ 1-13 et le Dialogus Timothei et Aquilae cpp. 1 et 4-7

Les chapitres 1 à 13 d’AZ présentent diverses ressemblances formelles avec les chapitres 1 et 4 à 7 du Dialogus Timothei et Aquilae1033. Nous envisageons ici les deux recensions de ce texte, dans leur rapport avec AZ moins que dans les différences qu’elles peuvent présenter entre elles :

la recensio longior (TA), cpp. 1 et 4-7, éd. R. G. ROBERTSON, pp. i-ii, vi-xiv ;

la recensio brevior (TA-bv), cpp. 2, 7-8.5 et 9.40-10, éd. L. LAHEY, pp. 107-108, 130-132. 1.a - Les citations scripturaires

Tout d’abord, les versets utilisés sont souvent les mêmes et ils apparaissent souvent dans le même ordre :

AZ Versets TA TA-bv Remarques

1.2 Deut. 6.4

1.6 (2.6-7) Dans les trois textes, c’est le premier verset attribué à l’un des protagonistes, en l’occurrence au juif.

Dans AZ, le verset est cité de façon détachée ; dans TA, il peut être lu de façon indépendante, ou comme un verset collé à Is. 44.6 ; dans TA-bv, c’est un centon plus complexe de Deut. 6.4, Ps. 80.11, Is. 44.6, et Ex. 3.61034.

Dans AZ et TA, le texte du verset est assez proche (cf. ci- dessous, p. 186), alors que la comparaison avec le centon de TA-bv n’est pas possible.

1.3 Is. 44.6 1.6 (2.6-7) Deuxième verset utilisé par les deux dialogi, mais TA n’en donne que la fin, avec une variante mineure (cf. ci-

dessous, p. 187). 1.3 Ps.

80.9-11

(5.10- 11)

(2.6-7) La troisième citation de Zachée est le Ps. 80.9-11, dont on reconnaît une partie dans le centon de TA-bv, mais qui n’apparaît pas dans TA à cet endroit. Cependant, en TA 5.10-11, Aquila utilise les 3 références de Zachée (y compris le Ps. 80.9-11), dans un centon qui n’est pas sans lien avec celui de TA-bv en 2.6-7, mais en prenant une autre partie du Ps. 80.9-11.

- Ex 3.6 1.7 (2.6-7) Dans TA, Aquila cite Ex 3.6 (= Ex. 3.15), qui est utilisé dans le centon de TA-bv, mais pas dans AZ.

1.3 Gen. 1.26

4.12-24 7.2-8, (9.40-42)

Dans les trois cas, Gen. 1.26 est le premier argument du chrétien, mais Timothée l’aborde après avoir cité Gen. 1.1, et après avoir discuté des livres bibliques qu’ils utiliseraient. Dans les trois cas, le juif avance l’objection traditionnelle que Dieu parlait aux anges. Mais dans AZ il propose d’abord celle qu’il se parlait à lui-même (cf. ci-dessous, p. 259).

Athanase continue avec le Ps. 103.24 alors qu’Aquila cite le Ps. 101.26 et Iob 38.7.

1033 Sur cette question, L. LAHEY, The Dialogue…, pp. 75-80.

8.1 Ps. 32.6 4.23 8.2, 10.6 AZ et TA donnent une interprétation trinitaire de ce verset (cf. ci-dessous, pp. 189, 344).

TA-bv ne l’interprète pas en 8.2, mais lui donne une interprétation binitaire en 10.6.

9.1 Gen. 1.26

4.24 9.41 Dans les trois textes, le chrétien tire argument que la Genèse ne dit pas « à mon image ».

Cependant, Aquila l’insère dans une question, à propos de l’interprétation juive que Dieu parlait aux anges, alors qu’Athanase en fait un argument en faveur de l’existence d’une autre personne divine1035.

AZ intercale deux versets d’Athanase en faveur du monothéisme : Is. 45.22 et Is. 26.13.

13.2 Prou. 8.27-31

5.5 8.3, 10.4 Le texte est retravaillé dans AZ et TA de façon différente (cf. ci-dessous, p. 193) ; le texte de TA-bv correspond

grosso modo à celui de TA, qui insère notamment le titre

christologique « Conseiller », globalement absent d’AZ, qui cite ce verset à propos du titre « Puissance ». Dans TA-bv 8.3, l’amplitude du texte est différente.

AZ, TA et TA-bv 10.4 attribuent le texte à Salomon, alors que TA-bv 8.3 l’attribue à Job.

A partir de ce point, les textes exploitent la panoplie scripturaire antijudaïque traditionnelle dans un ordre sensiblement différent. Répétons quand même quelques points :

. en TA 5.10-11, Aquila cite les trois versets de Zachée en AZ 1, mais d’abord Deut. 6.4 (certains manuscrits contiennent la variante d’AZ, cf. ci-dessous), Ps. 80.10, Is. 44.6 (cf. ci-dessous, p. 256) ;

. nous verrons qu’il est tout à fait habituel de commencer des dialogi de polémique antijudaïque par une discussion sur le Dieu unique (cf. ci-dessus, p. 308). Il est par contre intéressant qu’entre AZ, TA et TA-bv nous trouvions une liste relativement longue de citations parallèles.

1.b - Autres rapprochements

Nous relevons ensuite des expressions ou des propositions relativement proches d’un point de vue formel (l’identité de l’interlocuteur est signalée par l’initiale de son nom) :

1035 Dans sa polémique contre les ariens et contre les sabelliens, Epiphane tire aussi argument du fait que

Dieu ne dit ni « que je fasse », ni « à mon image », Epiph., Panar. 65.8.7-8, 75.6.9-11 (pp. 11-12, 347, GCS Epiph. 3) ; Ancor. §§28-29.1 (pp. 36-37, GCS Epiph. 1). Ces passages mériteraient une analyse plus poussée.

AZ 1.1, Z : … tÁj grafÁj pantacoà legoÚshj ›na enai qeÒn:

TA 1.6, A : kaˆ g¦r aƒ qea„ grafa„ did£skousin ¹m©j ›na qeÕn mÒnon proskune‹n (cf. TA-bv 2.5)

TA 1.8, A : … kaˆ ¡paxaplîj pantacoà ›na qeÕn proskune‹n …

AZ 1.5, Z : deÚteron d Óti kaˆ qeÕn lšgete tÕn cristÒn, kaˆ paqhtÕn aÙtÕn, kaˆ ™k gunaikÕj ¢koÚontej oÙk a„scÚnesqe. (AZ 22.1, Z : Blasfhme‹j ¥nqrwpe lšgwn t¾n sof…an toà qeoà e„j m»tran ¢nqrèpou e„selhluqšnai … 2 ™n p£sV tÍ m»trv

gunaikÒj ¹ sof…a pl£ttei kaˆ ¡gi£zei toÝj ¢nqrèpouj … )

TA 5.16, A : Pîj oÙk a„scÚnesqe lšgontej aÙtÕn qeÒn, e„selqÒnta e„j m»tran

gunaikÕj kaˆ gennhqšnta ;

TA 7.5, A : … di¦ t… ™n m»trv gunaikÕj e„sÁlqen kaˆ ™genn»qh :

Ces deux versets sont tirés d’une partie absente de TA-bv.

AZ 3.1, A : BoÚloma… se ¢pÕ tÁj prèthj b…blou ÐdhgÁsai, kaˆ oÛtwj ™fexÁj ™pˆ t¦j ¥llaj ¢gage‹n.

TA 4.4, T : BoÚloma… se ™k tÁj prèthj b…blou kathchqšnta, oÛtwj ™pˆ t¦j loip¦j ™panelqe‹n.

Absent de TA-bv. A propos de Gen. 1.26,

AZ 3.3, A : t…ni lšgeij aÙtÕ tÕn qeÕn e„rhkšnai

AZ 4.4, A : t…ni œlege… AZ 5.2, A : “Olwj œlegš tini…

TA 4.13a, T : t…ni oân œlege… TA 4.14, T : t…ni œlegen ; TA-bv 7.2-3, 9.42.

AZ 4.1, Z : ’Hn g¦r tÒte Ð cristÒj, Ð ™pˆ Ka…saroj AÙgoÚstou gennhqe…j ;

cf. TA 4.25, A : OÙk oân tù uƒJ œlegen, ¢ll' oÙdšpw periÁn tÒte.

TA-bv 10.1 (cf. aussi TA 31.3) Le parallélisme est assez faible. AZ 5.1, Z : 'Egë lšgw Óti oÙk œstin Ð

cristÕj ú œlegen…

AZ 6.1, Z : To‹j ¢ggšloij œlegen.

TA 4.14, A : la Bible ne parle pas du Fils lors de la création (cf. TA-bv 7.8)

(TA 4.25, A : OÙk oân tù uƒù œlegen…) TA 4.20, A : …to‹j ¢ggšloij aÙtoà œlegen. TA-bv 7.9.

(AZ 7.4, Athanase : M¾ speàde.) (TA 3.6, T : tu ne peux pas comprendre maintenant)

AZ 9, A : Hmetšran d e„rhkèj, kaˆ toà ¢koÚontoj t¾n ØpÒstasin œdeixen: oÙ g¦r epe kat' e„kÒna kaˆ Ðmo…wsin ™m»n, ¢ll¦

kat' e„kÒna kaˆ Ðmo…wsin ¹metšran.

TA 4.24 : kaˆ e„ to‹j ¢ggšloij œlegen Ð qeÕj poi»swmen ¥nqrwpon t… oÙk epen ‘poi»sate ¥nqrwpon kat' e„kÒna ™m»n TA-bv 9.41.

Plusieurs de ces expressions sont assez courantes et pourraient s’expliquer par la similitude de la matière. Tel n’est cependant pas le cas d’AZ 3.1 // TA 4.4. En outre, le fait que ce passage est absent de TA-bv donne l’impression que TA-bv est ici secondaire ; nous y reviendrons (cf. ci-dessous, p. 279).

Entre AZ et TA, nous remarquons aussi de nombreuses différences :

. les objections du juif sont souvent différentes ; elles sont globalement plus nombreuses dans AZ ;

. dans TA, l’accusation de bithéisme est seulement implicite (dans ce passage) ;

. dans TA 5.7-18, qui contient plusieurs rapprochements avec AZ (mêmes versets que Zachée, oÙk a„scÚnesqe…, cf. ci-dessus), il faut tout de même noter que :

Aquila ne se limite pas à la naissance et à la souffrance ; il trouve inconvenantes à Dieu toutes les activités humaines de Jésus, telles qu’elles sont présentées dans les Evangiles ;

on ne peut pas déduire grand chose de la présence commune d’une tournure courante comme oÙk a„scÚnesqe ¢koÚontej / lšgontej , d’autant plus que les expressions paqhtÕn et ™k gunaikÕj ne se trouvent ici que dans AZ ;

1036

. enfin, bien que les listes de versets soient très proches, elles ne sont pas identiques (cf. ci-dessus).

De façon moins formelle, nous relevons, entre AZ et TA, les points communs suivants : . le mouvement de l’introduction : un juif qui attaque les chrétiens sur la question du

Dieu unique, puis un chrétien qui lui propose d’en discuter. Cependant, la mise en scène, inexistante chez AZ, est assez élaborée dans TA ;

. une volonté certaine de méthode, dont nous avons déjà beaucoup parlé pour AZ (cf. ci-dessus, p. 112, sqq.). Pour TA, nous relevons, par exemple :

TA 3.1-25, TA-bv 6.1-6 : les interlocuteurs commencent par faire la liste des livres bibliques dont ils vont se servir ;

TA 4.4 : BoÚloma… se ™k tÁj prèthj b…blou kathchqšnta, oÛtwj ™pˆ t¦j loip¦j ™panelqe‹n (cf. ci-dessus) ;

TA 7.3 : Timothée dit qu’il va répondre kat¦ t£xin (cette expression, intervient plus loin dans TA-bv, par exemple en 13.1.

Nous constatons que les rapprochements mis en lumière ici correspondent aux critères sévères que nous nous étions fixés pour reconnaître l’existence d’une parenté littéraire entre deux textes, en l’occurrence la présence de rapprochements verbaux et une relativement longue liste de citations scripturaires apparaissant presque dans le même ordre. Nous concluons donc à l’existence d’un lien littéraire entre AZ et TA. De quel nature est-il ? Le fait que les rapprochements probants, comme nous le constaterons (cf. ci- dessous, p. 274), sont concentrés dans des parties assez limitées rend l’hypothèse qu’ils dépendent d’une source commune plus probable que celle que l’un des deux textes utilise l’autre. Pour des raisons mnémotechniques nous appellons « TAZ » cette source, sur laquelle nous aurons plusieurs fois l’occasion de revenir.

Nous remarquons cependant que, si elle est absente du Dialogue contre Tryphon, qui se déroule au gré des questions de Tryphon et des digressions de Justin, cette volonté apparente de méthode se retrouve aussi dans divers autres textes antijudaïques, par exemple chez Tertullien ou dans l’Anon. Decl.

1.c - L’exemple de l’alphabet

Un autre rapprochement entre AZ 1-13 et TA 4-7 est le motif de l’élève qui doit commencer à apprendre l’alpha avant d’apprendre le bêta. Il est possible de l’attribuer à la source TAZ.

AZ 13.61037 TA 5.1

Athan. : 'E¦n m¾ m£qV tij t¦ stoice‹a, sullab¦j ¢nagnînai oÙ dÚnatai. 'An£gkh oân se stoiceiwqÁnai kaˆ oÛtwj noÁsai t¦ legÒmena kaˆ shmainÒmena di¦ tîn

stoice…wn

Timot. : P©j tij e„sercÒmenoj e„j t¾n scol¾n tîn gramm£twn, prîton t¾n dÚnamin toà ¥lfa manq£nei, kaˆ tÒte toà bÁta t¾n proswnum…an ¢koÚei : 2 kaˆ sÝ

oân prîton m£qe…

Nous avons en TA l’exemplification avec « alpha » et « bêta » de ce qu’en AZ Athanase dit de façon plus générale. Il faut cependant remarquer que ce motif (absent de TA-bv), n’est pas propre à ces deux œuvres.

D’un côté, certains chrétiens ont très tôt raconté un épisode de la vie de Jésus, qui, enfant, enseigna à son précepteur le sens des lettres et lui expliqua que rien ne sert d’enseigner bêta s’il ne connaît pas alpha.

Cet épisode se trouve deux fois dans l’Euangelium Thomae de infantia Saluatoris (recension A : §6, p. 145, §14, p. 153 – recension B : §7, p. 160 – recension latine, §6, p. 71, éd. C. TISCHENDORF), datant probablement du IIème siècle . Ce passage semble

connu d’Irénée (Adu. haer. 1.20.1, p. 289, SC 264, conservé en grec par Epiphane), qui en dénonce la fausseté. Une autre attestation de l’épisode se trouve dans l’Epistula

apostolorum1039 §4 (= §15, p. 190, éd. L. GUERRIER), elle aussi du IIème siècle.

1038

Dans la première occurrence (§6 ou §7 selon les recensions, cf. ci-dessus) Jésus dit à

son professeur… qui s’appelle Zachée ! (§6.3, p. 145, éd. C. TISCHENDORF, cf.

S. VOICU, Verso…, p. 76) : sÝ tÕ ¥lfa m¾ e„dëj kat¦ fÚsin, tÕ bÁta pîj ¥llouj

did£skeij ; Ùpokrit£, prîton eˆ odaj d…daxon tÕ ¥lfa kaˆ tÒte soi

pisteÚsomen perˆ toà bÁta.

D’une part nous ne trouvons aucun rapprochement verbal entre ce passage et AZ. D’autre part, le sens en est passablement différent : alors qu’en AZ, l’exemple est périphérique et sert seulement de comparaison, dans l’apocryphe la légende est au centre du récit à cet endroit, evient une seconde fois au chapitre 14, et sert à mettre en évidence la supériorité de l’élève Jésus sur son professeur (§6.4).

Les mêmes remarques sont valables pour la seconde occurrence de la même histoire, avec un autre professeur (§14.2, p. 153, éd. C. TISCHENDORF, cf. S. VOICU, Verso…,

p. 87). Il vaut la peine de la lire en regard de TA :

Euang. Thom. inf. §14.2 TA 5.1 … e„p moi

toà ¥lfa t¾n dÚnamin, k¢gë soi ™rî t¾n toà bÁta.

p©j tij e„sercÒmenoj e„j t¾n scol¾n tîn gramm£twn, prîton t¾n dÚnamin toà ¥lfa manq£nei, kaˆ tÒte toà bÁta t¾n proswnum…an ¢koÚei

Non seulement l’expression t¾n dÚnamin toà ¥lfa se retrouve dans les deux textes, mais la phrase suit le même mouvement : « tu dis l’alpha, je dirai le bêta ». En outre l’expression « dÚnamij toà ¥lfa » ne semble pas se trouver ailleurs dans la littérature ancienne.

1037 Pour les différences du texte arménien à cet endroit, voir les notes critiques ci-dessus.

1038 Sur ce texte, C. MORESCHINI…, Storia…, v. 1, pp. 227-229.

1039 CANT 22, éd. principale, en éthiopien, L. GUERRIER, PO 9, 1912, pp. 177-232. Sur ce texte,

D’un autre côté, l’enseignement de l’alphabet comme élément de comparaison se trouve

chez Théodoret, Haereticarum fabularum compendium1040 5.17 (PG 83, 509A)1041 : Kaˆ

kaq£per Ð grammatist¾j, toÝj mn tÁj maq»sewj ¢rcomšnouj, tîn stoice…wn did£skei toÝj caraktÁraj, to‹j d taàta memaqhkÒsi tîn sullabîn prosfšrei t¦j sumplok£j, ¥llouj d t¾n tîn Ñnom£twn ™kpaideÚwn sunq»khn, kaˆ ˜tšrouj t¾n tÁj ¢nagnèsewj ¡rmon…an, oÙk ™nant…ouj nÒmouj didaskal…aj e„sfšrei, ¢ll¦ sÚmmetra ta‹j ¹lik…aij prosfšrei paideÚmata: oÛtwj Ð despÒthj cristÕj ˜k£stV gene´ toÝj ¡rmod…ouj œdwke nÒmouj.

Sur la base de ces deux éléments, quelles conclusions pouvons-nous tirer ? Proposons-en quelques-unes, en commençant par les plus sûres.

. Il n’y a pas de liens probants entre AZ et l’Euang. Thom. inf., puisque les termes utilisés et l’usage de l’exemple sont différents.

. Il est difficile d’attribuer au hasard le retour de l’expression et du mouvement de la phrase en TA et l’Euang. Thom. inf.

. Il est également difficile d’attribuer au hasard le retour de l’exemple de l’alphabet en TA et AZ, d’autant plus qu’il se trouve dans des chapitres reconnus par ailleurs comme utilisant une source commune.

. Il est donc raisonnable de supposer que la source TAZ contenait ici l’exemple de l’alphabet.

. Nous nous trouvons maintenant devant plusieurs possibilités :

- hypothèse 1 : la source TAZ ne contient pas de texte proche de TA, qui insère ici, peut-être par réminiscence, la phrase proche de l’Euang. Thom. inf. Ce n’est pas impossible, mais il est peu convaincant de postuler deux sources différentes pour le même passage de TA ;

- hypothèse 2 : la source TAZ contient un texte proche de TA, et doit donc plus ou moins directement être mis en relation littéraire avec l’Euang. Thom. inf. : nous expliquerions de cette manière les liens entre ce texte et TA et supposerions un travail de correction d’AZ, du reste bien approprié.

Comment alors expliquer le retour de Zachée en AZ ? Etait-ce aussi un personnage de la source TAZ ? Le fait que cette source soit utilisée au début d’AZ ne rend pas impossible cette hypothèse. Nous verrons cependant (cf. ci-dessous, pp. 253 sqq.) que le choix de Zachée s’explique facilement par la valeur symbolique de ce personnage, qui pourrait aussi expliquer le choix de Zachée dans l’Euang. Thom. inf.

1040 CPG 6223, PG 83, 336-556.

1041 Sur une origine possible de ce motif dans la littérature sapientiale orientale, B. Mc NEIL, Jesus and the

2. AZ 1-20 et l’Anonymus Declerck cp. 2

Dans ces passages, nous trouvons une liste de versets assez proches d’AZ et de l’Anonymus Declerck (Anon. Decl.), présentés parfois dans le même ordre :

AZ Anon. Decl (Dec.). versets communs Remarques 1.2-3 2.24a-26 Deut. 6.4 et Is. 44.6b = Deut. 32.39b

Dans les deux cas, ces versets sont cités par le juif, au début de la discussion. Dans l’Anon. Decl. ils sont immédiatement répétés par le chrétien.

Dans l’Anon. Decl. seul l’essentiel des versets est cité, de sorte qu’ils ne peuvent pas être utilisés pour une comparaison des variantes.

Nous avons également trouvé ces versets ci-dessus dans TA. 1.4 La troisième citation de Zachée est le Ps. 80.9-11 ; l’Anon. Decl.

n’en utilise pas de troisième et ne cite pas ailleurs ce verset. 2.27-55 L’Anon. Decl. place ici une discussion, présente plus bas

chez AZ (§20), sur l’« unité » qui peut s’entendre dans les Ecritures aussi de plusieurs corps.

3-12 2.60a-66 Gen. 1.26 Dans les deux cas, comme en TA, ce verset constitue le premier argument « de fond » du chrétien, auquel l’Anon.

Decl. adjoint immédiatement Gen. 11.7. AZ 12.2 utilise aussi

Gen. 3.22, absent de l’Anon. Decl. Dans les deux cas, le juif avance d’abord que Dieu parlait à lui-même, puis qu’il parlait aux anges (cf. l’Anon. Decl. 2.120 ; ci-dessous, p. 259).

Cependant, chez AZ le chrétien réfute très brièvement la première affirmation du juif, alors que dans l’Anon. Decl. c’est le chrétien qui avance, pour le réfuter en longueur, l’argument du pluriel de majesté, qu’il attribue à son interlocuteur. Enfin AZ introduit ici le concept de la Sagesse, et cite le Ps. 103.24 (jamais utilisé dans l’Anon. Decl.). 8.1--11.3 2.141 Ps 32.6 Les deux auteurs donnent une interprétation trinitaire de ce

passage.

14.2 2.156-179 Gen. 18.1 Athanase ne tire pas argument de ce verset.

14-18 Gen. 19.24-25 est un argument important d’AZ (cf. ci-dessus p. 156), contrairement à l’Anon. Decl., qui le mentionnera brièvement plus bas (§3.215-218), en des termes du reste qui rappellent AZ (cf. ci-dessous).

20 Gen. 2.24

et Ex. 15.1 (= 15.21)

AZ cite deux cas où les Ecritures désignent au singulier une pluralité de corps. Ces deux versets sont aussi cités dans l’Anon. Decl. (§2.27-55, cf. ci-dessus), outre plusieurs autres, dans une discussion plus détaillée.

L’utilisation commune d’Ex. 15.1 est d’autant plus inté- ressante qu’elle est assez rare dans les textes de polémique antijudaïque (cf. ci-dessous).

Ce qui nous frappe, c’est l’absence de rapprochements verbaux intéressants entre ces deux textes. Il semble donc simplement que l’Anon. Decl. puise librement dans des matériaux traditionnels, alors qu’AZ dépend peut-être ici aussi de la source TAZ, qui a influencé ses treize premiers chapitres.

3. AZ 1.2 et Deut. 6.4

La citation de Deut. 6.4 a été légèrement raccourcie, suivant une habitude de notre auteur, comme nous le constaterons. Cependant, considérée de façon isolée, cette référence biblique se trouve plusieurs fois sous cette forme. Voici quelques pièces du dossier :

Dans une première série de citations, bibliques ou proches de la Bible, le terme Seigneur, ou Dieu, est répété.

bb.1 (= LXX / éd.)

'/Akoue 'Isra»l, kÚrioj Ð qeÒj ¹mîn, kÚrioj eŒj ™st…n

LXX / ed. ; VL / nnl. ; Marc 12.29 / ed. (certains manuscrits omettent ™st…n cf. bb.2 et bb.4).

bb.2 (= TM)

Ecoute Israël ! Le Seigneur notre Dieu [est] le Seigneur un. TM

bb.3

'/Akoue 'Isra»l, kÚrioj Ð qeÒj sou kÚrioj eŒj ™st…n:

LXX / 3761042 ; VL / nnl. ; TA 1.6 / E ; TA 5.10 / mai (pp. ii, x, éd. R. G. ROBERTSON) ;

Anon. Decl. 2.271 (p. 19, CCSG 30) ; Anast., Disp. 1 (PG 89, 1208A) ; Iren., Adu. haer.

2.2 (p. 400, SC 100) ; Theodoret, Quaest. in Octat., Deut. quaest. II / ed. (p. 233, éd. N. FERNANDEZ MARCOS).

L’expression kÚrioj Ð qeÒj sou est bien attestée dans le Deutéronome en général (1.31, 2.7, 4.19…), en particulier dans la suite immédiate du texte (Deut. 6.5).

bb.4

'/Akoue 'Isra»l, kÚrioj Ð qeÒj sou kÚrioj eŒj: LXX / 318 ; cf. TM, et bb.1 / Marc 12.29.

bb.5

Audi Israël, quia1043 Dominus Deus tuus, Deus unus est.

VL / nnl.

C’est un exemple plus rare où c’est le terme Dieu qui est répété.

Dans une deuxième série d’exemples, il n’y a pas de répétition du terme Seigneur ou Dieu. bb.6

'/Akoue 'Isra»l, kÚrioj Ð qeÒj ¹mîn eŒj ™st…n:

LXX / 75, 458 (ces manuscrits appartiennent au groupe n, qui est pour le Deut. la tradition la plus utilisée par Jean Chrysostome et par Théodoret1044).

1042 Sur la façon dont ces dossiers scripturaires sont présentés, cf. ci-dessus p. Erreur ! Signet non défini..

1043 quia : om. VL / nnl.

1044 J. W. WEVERS, Text History of the Greek Deuteronomy, Abh. der Akad. der Wissen. in Gött., philol.-hist.

bb.7 (= AZ)

'/Akoue 'Isra»l, kÚrioj Ð qeÒj sou eŒj ™st…n:

AZ 1.2 ; certains manuscrits des versions Aeth. Bo. Pal. et Sa. ; AZ 1.2 ; TA 1.6 / mai ; TA 5.10 / O (M) (pp. ii, x, éd. R. G. ROBERTSON) ; Tertul., Scorpiace1045 2.3 (p. 68, éd. A. Bernardelli) ; Hilaire, De Trinitate1046 4.8 (pp. 22-24, SC 448) ; Theodoret, Quaest. in

Octat. Deut. quaest. II / nnl. (p. 233, éd. N. FERNANDEZ MARCOS)

Le texte biblique a été condensé. La situation serait celle de notre bb.6, si ce n’était la deuxième personne du sigulier.

var.1

kÚrioj Ð qeÒj eŒj ™st…n:

Athan., Orat. c. gent. 6.14 (p. 66, SC 18*)

Le texte biblique a été encore davantage condensé, au point d’être réduit à ses éléments essentiels.

Avec Athanase, TA, et les traductions en langues égyptiennes, nous constatons que l’absence de la répétition du terme Seigneur (ou Dieu) est fréquente en Egypte, et s’accorde donc bien à une localisation d’AZ dans cette région. Mais elle se trouve aussi à plusieurs autres endroits, notamment à Antioche, et ne constitue donc pas une preuve de

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