• Aucun résultat trouvé

Les remèdes traditionnels antipaludiques

BIOLOGIQUE DIAGNOSTIC

2. Médicaments antipaludéens :

2.1.1. Les remèdes traditionnels antipaludiques

Depuis longtemps, dans le cadre du traitement du paludisme et de la recherche de nouvelles molécules antipaludiques, les chercheurs se tournent vers les remèdes traditionnels utilisés par les populations qui vivent en zone d’endémie.

Deux antipaludéens majeurs (quinine, artémisinine et dérivés) prescrits à l’heure actuelle sont issus de plantes médicinales, traditionnellement employées dans leur pays d’origine contre les fièvres et le paludisme; il s’agit de l’écorce d’un arbre originaire des flancs de la cordillère andine (Cinchona calisaya et autres espèces de Cinchona) et d’une herbacée originaire de Chine, Artemisia annua. La recherche de nouvelles molécules antipaludiques se fait donc encore en partie au sein de la biodiversité végétale, en se servant de l’ethnopharmacologie comme outil de travail. Cette approche permet de sélectionner les espèces les plus intéressantes pour leur activité antiplasmodiale potentielle. De plus, étant donné que le paludisme est un fléau qui touche les pays du sud, dans lesquels la population a des difficultés d’accès aux soins de santé, l’étude des remèdes traditionnels antipaludiques

123

(RTA) employés par la population est primordiale. En effet, une validation d’usage traditionnel peut déboucher sur une recommandation d’usage pour un traitement alternatif ou complémentaire [180].

2.1.1.1. Les alcaloïdes de Quinquina :

De nombreux traitements ont été mis sur le marché s'inspirant bien souvent des traitements connus depuis bien longtemps dans la médecine traditionnelle. Certaines de ces connaissances ancestrales ont donné lieu à des médicaments très connus tels que la quinine, un alcaloïde extrait de l’écorce d’un petit arbre tropical, originaire d'Equateur, le Quinquina ou Chincona officinalis L., appartenant à la famille des Rubiaceae [181].

Lors de son cycle de développement, le Plasmodium dégrade l’hémoglobine en ferriprotoporphirine membranaire (FP). Une fois liée aux protéines de la liaison parasitaire, cette FP forme l’hémozoine. La quinine entre en compétition avec les protéines de liaison, conduisant à la formation d’un complexe lytique membranaire, puis à une perméabilité de la membrane parasitophore et à la mort du parasite. La quinine possède une activité schizonticide très importante, sur tous les Plasmodium sp. En revanche, son action sur les gamétocytes est faible et nulle sur les formes intra-hépatiques [76, 182].

Pharmacocinétique :

- rapidement absorbée, - demi-vie = 5h

- élimination rénale en 24h sous forme hydroxylée en position 2

- Administré par VO sous forme de chlorhydrate ou sulfate (0,5 à1g/j), aussi par VIV et VIM [179].

Effets indésirables :

- Allergie ;

124

- Anémie hémolytique surtout chez les sujets déficitaires en glucose 6 phosphates déshydrogénase [179].

Malheureusement, de nombreuses formes de résistances sont apparues et la quinine a été presque totalement abandonnée aujourd'hui au profit de l'artémisinine.

2.1.1.2. L’artémisinine et ses dérivés : (Artemisia annua, Artemisia absinthium)

Le genre Artemisia regroupe un grand nombre d'espèces dont la culture a permis notamment la production d'épices (A.dracunculus), de liqueurs comme l'absinthe (A.absinthium), de répulsifs (A.vulgaris), et d'un antipaludéen à l'importance contemporaine considérable, Artemisia annua ou armoise annuelle. C’est une plante originaire des régions tempérées de Chine d’où elle s'est propagée au sud de la Sibérie, au Vietnam et au nord de l'Inde. Hors d'Asie, cette plante a été introduite et pousse à l'état sauvage dans de nombreux pays d'Europe (Hongrie, Bulgarie, Roumanie), aux USA et en Argentine. En France, elle pousse d'août à octobre dans le sud de la France (Var, Hérault, Gard, Isère) et en région parisienne dans les terrains vagues, les chemins et les bords de route [58]. Sa culture expérimentale fait qu'elle s'étend aujourd'hui à l'Australie, au Brésil, au Kenya, à l'Ouganda et à la Tanzanie, à Madagascar, et même en Finlande pour ce qui est de son extension plus au nord. C’est une plante annuelle herbacée de la famille des Asteraceae (Compositae), de 30 à 150 centimètres de hauteur, pouvant cependant parfois atteindre 250 centimètres dans des conditions optimales de culture, glabre et très odorante, qui fleurit en Chine d'août à octobre [183].

Un des extraits provenant de la plante absinthe (Artemisia absinthium) s'est montré prometteur chez des souris. S'inspirant d'un document ancien, le Docteur Tu qui est primée pour "ses découvertes concernant une nouvelle thérapie contre le paludisme" a modifié le processus d'extraction de cette substance pour la rendre plus efficace avant d'isoler, au début des années 70, l'ingrédient actif de l'absinthe à savoir l'artémisinine le traitement le plus efficace et sûr contre le paludisme [184].

125

A B

Figure 33: Photos du genre Artemisia. A: Artemisia annua. B: Artemisia absinthium

Sa découverte se fait en 1967, quand les chercheurs militaires chinois ont tourné vers la solution qui leur semble la plus simple : chercher dans les remèdes de la médecine traditionnelle, un composé pouvant être scientifiquement attesté efficace contre la variété endémique de la malaria. Ils se sont naturellement tournés vers les régions les moins touchées par le paludisme, et ont découvert l’armoise annuelle : en effet, il apparaît que dès les premiers symptômes du paludisme, les locaux en faisaient une décoction efficace, et surtout sans effets secondaires notoires. C’est en 1972 qu’un chercheur chinois, essayant d’extraire la substance active de l’armoise, réussit à isoler l’artémisinine [185].

Plusieurs composés sont commercialisés dans le monde : artémisine, artéméther et artésunate. Ce sont certainement les composés les plus actifs, ils agissent par alkylation des produits de dégradation de l’hémoglobine synthétisés par le parasite, conduisant in situ à la formation des radicaux libres toxiques. Seules les associations sont recommandées par l’OMS, afin de limiter les acquisitions de résistance.

En France, une autorisation de mise sur le marche existe depuis 2007 pour l’association artéméther + luméfantrine (Riamet®) [76, 186].

126