• Aucun résultat trouvé

Liste des abréviations

5. Les peptidyl-ARNt hydrolases

5.3 Les peptidyl-ARNt hydrolases chez les eucaryotes

5.3.1 Localisation intracellulaire des PTH1 et PTH2 eucaryotes

Chez les eucaryotes, il existe fréquemment plusieurs gènes homologues à ceux des PTH bactériennes ou archéennes. Ainsi, la levure Saccharomyces

cerevisiae possède un homologue de la PTH bactérienne (PTH1) et un homologue

de la PTH archéenne (PTH2), tous deux capables de complémenter une souche d’E. coli déficiente en PTH. Il est bien sûr envisageable que l’une de ces PTH soit mitochondriale et l’autre cytoplasmique, mais il n’est pas sûr que ce soit le cas. Ainsi, l’inactivation du gène codant la PTH1 ralentit fortement la croissance de la levure dans des conditions où une activité mitochondriale est nécessaire (Fromant

et al., 2003). De plus, la caractérisation systématique du protéome mitochondrial

de S. cerevisiae indique que PTH1 en fait partie (Sickmann et al., 2003 ; Steinmetz et al., 2002). On peut aussi remarquer que dans la levure

Schizosaccharomyces pombe qui possède, elle aussi, un homologue de PTH1 et

un homologue de PTH2, l'homologue de PTH1 possède une extension N- terminale suggérant un motif d'adressage mitochondrial. Quant à la PTH2, elle possède chez les eucaryotes une extension N-terminale, absente chez les archées, qui pourrait être une séquence d'adressage (Rosas-Sandoval et al., 2002). De plus, elle a été retrouvée dans le protéome mitochondrial de S. cerevisiae (Sickmann et

al., 2003). Il se pourrait donc que la PTH1 et la PTH2 soient toutes les deux

mitochondriales.

5.3.2 Autres fonctions des homologues de PTH1 et PTH2 chez les

eucaryotes

La redondance de protéines possédant une activité PTH chez les eucaryotes s’explique peut-être par le fait que certaines de ces enzymes interviennent dans des processus très différents de l’hydrolyse des peptidyl-ARNt.

Ainsi, chez l’homme, la protéine Bit1 (Bcl2-inhibitor of transcription), est homologue à la PTH2 archéenne. In vitro, cette protéine est capable d’hydrolyser le diacétyl-lysyl-ARNtLys avec une bonne efficacité catalytique (kcat/Km = 5,9 μM-1

s-1) (De Pereda et al., 2004). La protéine Bit1 possède un domaine d’adressage

mitochondrial à son extrémité N-terminale. Effectivement, des expériences de microscopie confocale sur des cellules exprimant une protéine de fusion entre Bit1 et la GFP (green fluorescent protein) indiquent que Bit1 est mitochondriale. Mais cette protéine est localisée dans l’espace intermembranaire (Jan et al., 2004), c'est-à-dire dans un compartiment où on ne s’attend pas à avoir de production de peptidyl-ARNt.

En fait, la protéine Bit1 semble jouer un rôle dans l’apoptose quand elle est libérée dans le cytoplasme. Elle forme alors un complexe pro-apoptotique avec le

Introduction : 5. Les peptidyl-ARNt hydrolases

__________________________________________________________________

112

régulateur transcriptionnel AES (Amino-terminal Enhancer of Split), qui est un membre de la famille des facteurs de transcription Groucho. Par un mécanisme non encore complètement élucidé (Jan et al., 2004 ; Kairouz-Wahbe et al., 2008), ce complexe déclenche alors la mort cellulaire par une voie indépendante de celle des caspases. Actuellement aucun indice ne permet d’imaginer un lien entre l’activité PTH de Bit1 et son rôle dans l’apoptose (Kairouz-Wahbe et al., 2008), ce qui fait que Bit1 est considérée comme une protéine multi-fonctionnelle (moonlighting protein en anglais, du verbe to moonlight : avoir un second métier, travailler au noir). On ignore cependant quand l'activité peptidyl-ARNt hydrolase de Bit1 pourrait être utile à la cellule.

Chez les plantes, il existe fréquemment plusieurs homologues de pth1 et de

pth2 dans le même organisme (4 homologues de pth1 et 3 homologues de pth2

chez Arabidopsis thaliana). Certains de ces homologues pourraient posséder d’autres fonctions que l'hydrolyse de peptidyl-ARNt. C’est le cas par exemple de la protéine CRS2 du maïs (Chloroplast RNA Splicing 2), homologue aux PTH bactériennes, qui intervient dans l’épissage de certains introns chloroplastiques. CRS2 possède 50% d’identité avec la PTH d’E. coli. Néanmoins, elle ne semble pas avoir d’activité peptidyl-ARNt hydrolase, puisqu’elle ne peut pas complémenter une souche d’E. coli déficiente en PTH (Jenkins and Barkan, 2001),sans que l’on sache exactement pourquoi. Les structures des deux enzymes sont en effet très proches, notamment au niveau du site actif, où la plupart des résidus importants pour l’activité de la PTH d’E. coli (N10, Y15, T18, R19, H20, N21, M67, N68, D93, H113, N114) sont conservés dans CRS2 et positionnés de manière identique. Une différence existe au niveau de la pince K105-R133 qui, chez E. coli, interagit avec le phosphate 5’-terminal des ARNt, et qui est absente dans CRS2. A la place de la lysine 105, on trouve une glutamine dans CRS2 et, à la place de l’arginine 133, on trouve une sérine. Cependant, il ne semble pas que ces substitutions expliquent la différence de spécificité des deux enzymes. En effet, ni CRS2 sauvage, ni le double mutant Q105K-S133R, ne complémente une souche d’E. coli pthts alors qu’une PTH d’E. coli portant les deux mutations K105Q et R133S complémente cette souche. Cette différence ne semble donc pas responsable de la perte de fonction de CRS2 envers le recyclage des peptidyl- ARNt.

Dans les chloroplastes du maïs, la protéine CRS2 s’associe à la protéine CAF1 (CRS2-associated factor 1) ou à la protéine CAF2, et cette association est indispensable pour que l’activité d’épissage de CRS2 puisse s’exercer (Ostheimer

et al., 2003). Il est donc possible que CRS2 possède une activité PTH uniquement

lorsque les complexes CRS2-CAF1 ou CRS2-CAF2 se forment. Pour tester cette hypothèse, une expérience a été réalisée afin de déterminer si la co-expression des protéines CRS2 et CAF2 chez E. coli permettait de complémenter une mutation

pthts. Aucune complémentation n’a été observée, mais ce résultat n’est pas

vraiment concluant dans la mesure où, dans cette expérience, la production de la protéine CAF2 chez E. coli n’a pas pu être mise en évidence (Ostheimer et al., 2003).

Introduction : 5. Les peptidyl-ARNt hydrolases

__________________________________________________________________

113