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Les patrimoines séparés dans l’exécution forcée en Suisse

a) Common law

Originaire des pays de common law, le trust repose sur un droit de propriété complexe et qui peut se révéler déconcertant pour un juriste de droit civil. Cette complexité se doit essentiellement à l’existence de deux corps de règles distinctes qui régissent la propriété foncière, celles de la common law et celles de l’equity. Au grand dam de la doctrine anglo-saxone, la doctrine civiliste décrit souvent le régime de propriété sur lequel repose le trust anglo-saxon comme pouvant se “dédoubler” ou encore se “démembrer” afin de mettre en évidence « un droit de propriété absolu divisé en deux sous-ensembles »2 alors qu’il devrait plutôt se comprendre « comme un cumul de droits divers (interests) aménagés entre le trustee et les bénéficiaires »3. Les pays civilistes connaissent également des possibilités de démembrement du droit de propriété mais de façon plus restreinte puisque nos droits réels sont soumis à un numerus clausus ce qui en limite fortement la portée et ne saurait assurer la flexibilité inhérente au trust.

Le droit de propriété sur les biens du trust se divise entre le legal title du trustee et l’equitable ownership des bénéficiaires4. Le trustee est protégé en vertu des règles de la common law alors que les bénéficiaires sont protégés par l’equity5. Le trustee dispose des pouvoirs d’un plein propriétaire mais il exerce ces pouvoirs dans l’intérêt des bénéficiaires, les règles de l’equity le soumettant à des obligations fiduciaires qui l’oblige à agir dans le meilleur intérêt des bénéficiaires6. Lorsque tel n’est pas le cas, les règles de l’equity attribuent aux bénéficiaires des droits qui peuvent être de nature personnelle ou réelle7. Lorsque le trustee dispose des biens du trust sans droit, le droit de suite permet aux bénéficiaires d’aller rechercher le bien en mains des tiers, à moins que ces derniers

2 PEYROT, Le trust de common law, p. 23.

3 PEYROT, Le trust de common law, p. 24.

4 VIRGO, p. 13, 47 ; HAYTON, p. 10 ; PANNATIER KESSLER, Trust et immeubles, p. 66.

5 VIRGO, p. 13-14.

6 VIRGO, p. 13, 47.

7 VIRGO, p. 16 ; HAYTON, p. 3, 11.

soient de bonne foi et aient acquis le bien à titre onéreux8. Le trust permet ainsi de faire coïncider des droits simultanés sur le même objet9.

S’agissant du régime de responsabilité aux dettes, lorsque le trustee contracte des dettes dans le cadre de l’administration du trust, il en répond personnellement sur ses biens mais dispose toutefois d’une créance en remboursement contre le fonds du trust10. Lorsqu’il agit à titre privé, ses créanciers personnels n’ont pas accès au fonds du trust, ce dernier appartenant in equity aux bénéficiaires11. Cette division du droit de propriété constitue un aspect fondamental du droit des trusts puisqu’en cas de faillite du trustee, ses créanciers personnels n’y ont pas accès.

b) Droit suisse

Si les pays de common law connaissent des possibilités de démembrement de leur droit de propriété plus flexibles, tel n’est pas le cas dans les pays de tradition civiliste pour lesquels le droit de propriété est indivisible12. Les ordres juridiques civilistes permettent certes la création de droits réels limités mais ils sont soumis à un numerus clausus qui contraste avec la flexibilité inhérente au trust (II, A, a). Le trustee est plein propriétaire des biens du trust qu’il administre dans l’intérêt des bénéficiaires qui disposent, en cas de faillite, de la protection consacrée à l’art. 284b LP. L’art. 11 al. 2 et 3 let. a CLHT exige que les biens du trust constituent un patrimoine séparé de celui du trustee ce qui implique notamment que ces derniers soient soustraits à la mainmise des créanciers personnels du trustee en cas de faillite de ce dernier13. Le législateur suisse a ancré cet effet ring-fencing à l’art. 284b LP.

En matière du droit des poursuites, il convient de distinguer entre deux types de dettes en lien avec un trust et pour lesquelles le législateur a aménagé deux procédures distinctes : celles dont le trustee répond sur son patrimoine personnel et celles qui grèvent le patrimoine du trust14. Dans le premier cas, soit lorsque le trustee contracte des dettes sans lien avec le trust, les règles ordinaires en matière de poursuite prévues dans la LP sont

8 VIRGO, p. 49, 651 ss. ; HAYTON, p. 11 ; PANNATIER KESSLER, Trust, droit de suite, p. 150 ; THÉVENOZ, Trusts en Suisse, p. 119 ; GRISEL, p. 168.

9 VIRGO, p. 10 ; PEYROT, Le trust de common law, p. 24-25.

10 VIRGO, p. 589 ; Trust Law Committee, N 2. 2, 2. 3, 2. 4.

11 VIRGO, p. 49, 51.

12 PANNATIER KESSLER, Trust et immeubles, p. 66.

13 THÉVENOZ, Avant-projet, p. 97.

14 MAYER, p. 674 ; FF 2006, p. 608 ; PEYROT, Les défis, p. 960 ; PEYROT/BARMES, p. 132.

applicables, le trustee est donc poursuivi comme un débiteur est poursuivi pour ses dettes privées15, avec toutefois une spécificité puisque conformément à l’art. 284b LP les biens du trust sont automatiquement distraits de la faillite du trustee16. Dans le second cas, la poursuite est soumise à une règlementation spéciale et la procédure d’exécution forcée se poursuit par voie de faillite, celle-ci se limitant au patrimoine du trust conformément à l’art. 284a LP17. Toutefois, dans la mesure où le trust n’a pas de personnalité juridique, la poursuite sera formellement dirigée contre le trustee en sa qualité de “représentant” du trust18. La formulation employée par le législateur est toutefois maladroite puisque le trustee est propriétaire des biens du trust et non pas son représentant19. Il s’agit toutefois uniquement de signaler que c’est le patrimoine du trust qui est recherché pour ses dettes et non le trustee à titre personnel20. La poursuite sera donc formellement dirigée contre le trustee, mais portera matériellement sur le patrimoine du trust, ce dernier n’ayant pas la capacité d’être partie21. Tous les biens du trust forment ainsi au moment de son prononcé une seule masse et seront réalisés au profit des créanciers du trust22. Le choix de la faillite est toutefois critiquable à plusieurs égards23. D’abord parce qu’il est rare que le trust se trouve confronté à une pluralité de créanciers, on ne saurait donc l’assimiler à une entité juridique comme le prétend le Conseil fédéral dans son Message24. Ensuite, se pose la question du sort du trust en cas de faillite puisque lorsqu’une entité juridique fait l’objet d’une faillite elle est ensuite liquidée25. La saisie aurait donc été préférable, celle-ci permettant au trust de « mieux conserver sa substance »26.

B) Caractéristiques des patrimoines séparés

En tant qu’« ensemble des droits pécuniaires appartenant à une personne »27, le patrimoine constitue une universalité de droit, c’est-à-dire « un ensemble de choses et de droits assujettis à un but et formant de ce fait une certaine unité »28. Un patrimoine séparé

constitue une masse distincte, détachée du patrimoine général d’un sujet de droit et soumis à un régime juridique propre, différent de celui auquel est soumis le patrimoine général29. Son régime juridique relève de la liberté conventionnelle entre les parties, il ne lie donc pas les tiers et ne leur est pas opposable, en particulier aux créanciers30. Or, pour qu’un patrimoine séparé soit soumis à une administration ou à un régime de responsabilité aux dettes distinct du patrimoine général de son titulaire, cela nécessite une concrétisation dans la loi afin de rendre ces régimes opposables aux tiers31. En principe, une administration séparée entraîne un régime de responsabilité aux dettes dissocié, mais nous verrons que tel n’est pas toujours le cas.

Les patrimoines séparés présentent des caractéristiques communes32. Tout d’abord, celle de la subrogation patrimoniale qui est sans doute la caractéristique la plus importante des patrimoines spéciaux. Elle résulte directement de la reconnaissance par la loi de certains patrimoines séparés opposables aux tiers, elle n’a donc pas besoin de consécration législative33. La subrogation patrimoniale consiste en « la capacité d’un patrimoine de se modifier continuellement »34 tout en ayant pour objectif de conserver la valeur de ce patrimoine35. En d’autres termes, cela signifie que lorsqu’un bien sort du patrimoine de son titulaire, il est substitué par le bien acquis en remplacement ou par son produit sans que cela n’affecte l’autre masse36. La subrogation patrimoniale permet ainsi de conserver la valeur du patrimoine spécial37. Certains patrimoines spéciaux se caractérisent également par une absence de confusion au sens de l’art. 118 al. 2 CO. L’absence de confusion suppose que les dettes qui grèvent chacun des patrimoines séparés ne se confondent pas, de sorte que chaque masse patrimoniale ne répond que de ses propres dettes38. Le titulaire de deux patrimoines ne pourra ainsi pas compenser la créance appartenant à un patrimoine pour éteindre la dette dont doit répondre l’autre patrimoine39. Lorsque le même sujet de droit est créancier et débiteur en même temps envers les masses,

sa créance subsiste en tant qu’ « obligation unipersonnelle »40. Toutefois, si une des masses est amenée à supporter une dette appartenant à l’autre masse, la première, en vertu du système des récompenses, bénéficie d’une créance en remboursement contre la seconde41. Ce régime des récompenses est expressément prévu par la loi à l’art. 209 al. 1 CC en ce qui concerne le régime des acquêts et à l’art. 239 CC pour celui de la communauté des biens42. Il n’a en revanche pas fait l’objet d’une réglementation pour d’autres patrimoines spéciaux43, mais vaut pour tous les patrimoines séparés qu’ils impliquent uniquement une administration séparée ou également un régime de responsabilité dissociée à l’égard des créanciers44.

En matière de trust, l’art. 11 al. 2 CLHT fait de la reconnaissance d’un patrimoine séparé un effet minimal qu’un État doit reconnaître afin de pouvoir ratifier la convention.

L’art. 11 al. 3 let. a CLHT exige que les biens du trust échappent à la mainmise des créanciers personnels du trustee et a été concrétisé par notre législateur à l’art. 284b LP qui prévoit une distraction d’office des biens du trust lorsque le trustee est poursuivi pour les dettes qu’il a contractées à titre privé45. Le trust forme ainsi un patrimoine séparé en mains du trustee que ce dernier est tenu de maintenir séparé de son patrimoine personnel46. Il se caractérise par le fait que des biens sont affectés au trust dans un but particulier et doivent être administrés par le trustee en faveur des bénéficiaires. Par ailleurs, les biens dont le trustee dispose conformément à ses pouvoirs sont remplacés par le produit de leur réalisation, obéissant ainsi au principe de la subrogation47. En matière de responsabilité pour dettes, un des traits les plus significatifs de la notion de patrimoine séparé consiste en la « désolidarisation du patrimoine général »48 pour les dettes du patrimoine spécial49. En cas de responsabilité du patrimoine séparé, ce dernier répondant seul de ses dettes, le patrimoine général de son titulaire ne tombe pas en faillite50. Le législateur a, en matière de trust, codifié cette règle aux arts. 284a et b LP. Ainsi, en cas de faillite personnelle du trustee, le fonds du trust est automatiquement distrait de la masse en faillite conformément à l’art. 284b LP. La séparation du patrimoine du trust du

40 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 17 ; PIOTET, Les effets, p. 573-574.

41 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 23 ; PEYROT, Le trust de common law, p. 40-41 ;

42 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 353 ; PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 23-24.

43 Ibidem.

patrimoine personnel du trustee influe directement sur le régime de responsabilité patrimoniale, le trustee ne répondant de ses dettes personnelles que sur son patrimoine, le fonds du trust ne répond pas des dettes du trustee51.

C) Séparation du patrimoine vs. unité du patrimoine : impossible coexistence ? a) Les patrimoines séparés dans l’exécution forcée : régime juridique

GILLIÉRON définit le patrimoine comme « l’ensemble des droits et obligations d’une personne (...) susceptibles d’être évalués en argent (...) et formant une unité juridique, une universalité de droits, en raison de leur appartenance à une même personne »52. Le droit des poursuites pour dettes et faillite est régi par le principe de l’unité du patrimoine qui veut que le débiteur réponde de ses dettes sur l’ensemble de ses biens. Bien que ce principe n’ait pas été érigé en dogme dans notre ordre juridique53, il constitue néanmoins un principe essentiel du droit suisse de la responsabilité pour dettes54. Or, le trust constitue un patrimoine « distinct et autonome »55 du patrimoine du trustee, il est ainsi soustrait à la mainmise des créanciers personnels du trustee au sens de l’art. 11 al. 3 let. a CLHT.

Ces deux principes semblent a priori incompatibles, cependant le droit suisse connaît diverses exceptions au principe de l’unité du patrimoine56. En effet, notre ordre juridique consacre certains patrimoines séparés. Toutefois, ces derniers n’ont pas fait l’objet d’une systématisation que ce soit quant à la question de leur administration séparée ou de leur responsabilité à l’égard des tiers57. Dans la mesure où le régime juridique des patrimoines séparés relève en premier lieu de la liberté conventionnelle et comme un contrat ne déploie d’effets qu’inter partes, c’est à la loi que revient la fonction d’assurer « les effets externes des patrimoines séparés »58. Parfois, la loi se contente de reconnaître des patrimoines spéciaux sans toutefois leur attribuer un quelconque effet à l’égard des tiers59. C’est le cas dans le cadre des régimes matrimoniaux, lorsque les époux sont mariés sous le régime légal des acquêts, la loi ne rattache aucun effet aux acquêts et aux biens propres

51 PEYROT, La mention du trust, p. 367.

52 GILLIÉRON, N 23.

53 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 346 ; PEYROT, Les défis, p. 942.

54 PEYROT, Les défis, p. 942.

55 FF 2006, p. 569.

56 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 346.

57 PIOTET, Les effets, p. 566 ; THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 346.

58 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 14.

59 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 14.

de chaque époux, elle se limite uniquement à reconnaître des patrimoines séparés60. En effet, chacun des époux est titulaire de ses biens propres et des acquêts, ainsi deux masses de biens se forment dans leur patrimoine, mais celles-ci ne déploieront d’effets que lors de la liquidation du régime matrimonial61 et, même à ce moment, le seul effet que ces masses produisent à l’égard des tiers concerne la question des libéralités sujettes à réunion62. Le législateur ne leur a accordé aucun privilège de faillite63. En revanche, lorsque les époux sont mariés sous le régime de la communauté de biens, chacun des époux étant titulaire de biens propres et des biens communs, lorsque l’un d’eux contracte une dette propre au sens de l’art. 234 al. 1 CC, il en répond sur ses biens propres et sur la part des biens communs qui lui revient64. La loi prévoit ainsi une responsabilité patrimoniale distincte pour les dettes propres de chaque époux65. Donc contrairement au régime des acquêts, le régime de la communauté de biens entraîne à la fois une représentation spécifique et une responsabilité distincte du patrimoine spécial à l’égard des tiers66.

Dans le cadre d’une société simple, la loi prévoit une administration séparée du patrimoine social de celle du patrimoine personnel des associés, mais cette administration séparée n’a pas pour effet d’entraîner une responsabilité aux dettes dissociée de ces patrimoines67. Bien que la quote-part du patrimoine social de chaque associé fasse l’objet d’une administration séparée de leur patrimoine général, en cas de faillite d’un associé les créanciers personnels et sociaux de ce dernier peuvent décider de se désintéresser aussi bien sur la part de liquidation qui lui revient que sur son patrimoine personnel68. La même solution s’applique à l’hoirie, les créanciers peuvent se désintéresser tant sur la part de liquidation qui revient à l’héritier comme à ses biens personnels69.

Dans le domaine du droit des successions, la séparation des patrimoines est opposable aux tiers en cas de liquidation de la succession par la voie de la faillite au sens de l’art. 597 CC, dans le cadre du bénéfice d’inventaire ainsi que dans le cas de la liquidation

60 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 14-15 ; art. 234 al. 1 CC.

61 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 351 ; PIOTET, Les effets, p. 566.

62 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 351.

63 Ibidem.

64 PIOTET, Les effets, p. 566.

65 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 14-15 ; art. 234 al. 1 CC ; THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 351.

66 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 14.

67 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 15.

68 Ibidem.

69 Ibidem.

officielle70. La succession liquidée par voie de faillite entraîne un patrimoine séparé opposable aux tiers que ce soit quant à l’administration séparée comme quant à la responsabilité pour dettes, les créanciers du défunt ne peuvent ainsi s’en prendre qu’à la part de liquidation qui revient aux héritiers mais pas à leur patrimoine personnel71. La même solution s’applique au cas de la liquidation officielle72. En ce qui concerne l’exécution testamentaire, il s’agit d’une question controversée. Nous nous limiterons à souligner qu’elle ne constitue pas selon PIOTET un patrimoine séparé quant à la responsabilité aux dettes, mais uniquement quant à son administration, les créanciers ne peuvent donc pas s’en prendre aux biens propres de l’héritier73. S’agissant du patrimoine successoral sous administration officielle, ce dernier constitue un patrimoine séparé qui empêche les créanciers de se désintéresser sur le patrimoine personnel de l’héritier74.

b) Fonds de placement contractuels et fiducie bancaire

Si en matière d’exécution forcée la loi est lacunaire quant à la responsabilité aux dettes de certains patrimoines séparés, elle a prévu pour les fonds de placement et la fiducie bancaire un droit de distraction qui permet la ségrégation des fonds et des avoirs bancaires en cas de faillite de la direction de fonds ou de la banque.

Le régime des fonds de placement repose sur le modèle de la fiducie75. La fiducie de droit commun ne crée toutefois pas un patrimoine spécial76. La responsabilité pour dettes est donc soumise à l’unité du patrimoine, les biens transférés par le fiduciant au fiduciaire répondent de la faillite de ce dernier à l’égard de ses créanciers personnels77. Même si l’art. 401 CO accorde au fiduciant un droit de distraction, la protection offerte à ce dernier reste faible puisque cette disposition ne s’applique qu’aux créances et aux choses mobilières que le fiduciaire a acquises dans l’exercice du mandat78. L’arrêt Feras Anstalt c/ Banque Vallugano de 197379 est venu atténuer le principe de l’unité du patrimoine en appliquant à la fiducie ordinaire le régime de l’art. 401 al. 2 et 3 CO, reconnaissant dans

70 PIOTET, Les effets, p. 567 ; PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 28-29.

71 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 28-29.

72 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 29.

73 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 30.

74 PIOTET, Le patrimoine séparé, p. 32 ; PIOTET, Les effets, p. 567-568.

75 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 355 ; THÉVENOZ, Cendrillon, p. 22. ; PEYROT, Les défis, p. 945 ; PEYROT, Le trust de common law, p. 46.

76 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 354.

77 PEYROT, Le trust de common law, p. 43 ; THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 354.

78 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 354-355 ; ATF 102 II 103 c. I. 1.

79 ATF 99 II 393, JdT 1974 I 588.

le cadre de la faillite du fiduciaire un droit de distraction au fiduciant80. La distraction n’opère toutefois pas automatiquement, le fiduciant doit revendiquer les biens fiduciaires conformément aux art. 106 ss LP ou 242 LP81.

Si dans le cadre de la fiducie de droit commun, malgré l’atténuation du principe de l’unité du patrimoine opérée par la jurisprudence, une séparation des patrimoines n’est pas à l’ordre du jour, le législateur a prévu dans le cadre des opérations fiduciaires des banques et des fonds de placement un véritable droit de distraction qui concrétise la séparation des patrimoines. S’agissant des fonds de placement, la société qui gère les fonds, titulaire juridique des biens, bénéficie de toutes les prérogatives reconnues à un plein propriétaire, elle peut donc disposer des biens ou constituer des sûretés sur ces biens82. Par ailleurs, les porteurs de parts n’ont aucune prétention de nature réelle mais uniquement personnelle à l’encontre de la direction83. Ils bénéficient toutefois d’un droit de distraction à l’art. 35 LPCC sans lequel, en cas de faillite de la direction, leurs parts seraient soumises à la mainmise des créanciers personnels de cette dernière84. Bien que la société soit

Si dans le cadre de la fiducie de droit commun, malgré l’atténuation du principe de l’unité du patrimoine opérée par la jurisprudence, une séparation des patrimoines n’est pas à l’ordre du jour, le législateur a prévu dans le cadre des opérations fiduciaires des banques et des fonds de placement un véritable droit de distraction qui concrétise la séparation des patrimoines. S’agissant des fonds de placement, la société qui gère les fonds, titulaire juridique des biens, bénéficie de toutes les prérogatives reconnues à un plein propriétaire, elle peut donc disposer des biens ou constituer des sûretés sur ces biens82. Par ailleurs, les porteurs de parts n’ont aucune prétention de nature réelle mais uniquement personnelle à l’encontre de la direction83. Ils bénéficient toutefois d’un droit de distraction à l’art. 35 LPCC sans lequel, en cas de faillite de la direction, leurs parts seraient soumises à la mainmise des créanciers personnels de cette dernière84. Bien que la société soit

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