• Aucun résultat trouvé

Les effets de l’absence de mention au registre foncier

B) Mention du rapport juridique de trust au registre foncier : entre confidentialité et

IV. Les effets de l’absence de mention au registre foncier

À défaut d’avoir la personnalité juridique, le trust ne peut pas être inscrit en tant que propriétaire d’un immeuble au registre foncier. C’est donc le trustee qui doit y figurer (art. 2 al. 2 let. b CLHT)179. L’art. 12 CLHT permet au trustee de faire apparaître dans un registre public que l’immeuble fait partie d’un trust. Le législateur suisse a concrétisé cette disposition à l’art. 149d al. 1 LDIP qui met en œuvre le principe de publicité en matière de trusts180. Comme nous l’avons mentionné plus haut (III, B), bien que facultative, l’absence de mention a pour effet de rendre le rapport de trust inopposable aux tiers de bonne foi. S’il n’est pas contesté que les acquéreurs de bonne foi sont des tiers au sens de l’art. 149d al. 3 LDIP, tel n’est pas le cas pour les créanciers181. Lorsqu’un immeuble faisant partie d’un trust ne fait pas l’objet d’une mention au registre foncier et que le trustee aliène l’immeuble en violation des devoirs que lui impose le trust deed, les acquéreurs de bonne foi sont protégés contre l’exercice du tracing par les bénéficiaires182. En cas de mention, le rapport de trust leur est en revanche opposable. Ils ne pourront ainsi pas invoquer le fait de ne pas avoir eu connaissance de l’existence du trust pour empêcher

176 PEYROT,Les défis, p. 950 ; GUILLAUME, p. 44.

177 THÉVENOZ, Trusts en Suisse, p. 121.

178 PEYROT, Les défis, p. 951.

179 PEYROT, Les défis, p. 949 ; PANNATIER KESSLER,Trust et immeubles, p. 66 ; FOËX, Trust et registre foncier, p. 260 ; WILSON, p. 131-132.

180 FF 2006, p. 586 ; GRISEL, p. 164 ; PEYROT, Les défis, p. 948.

181 PEYROT, Les défis, p. 952.

182 GRISEL, p. 165 ; FOËX, La mention, p. 86.

les bénéficiaires d’exercer leur droit de suite183. Il faut toutefois relever que l’absence de mention ne remet pas en cause l’existence du trust184. Ce dernier existe indépendamment de mention dans la mesure où on reconnaît aux mentions un effet purement informatif185. La doctrine est toutefois partagée quant à la question de savoir si les créanciers de bonne foi sont également compris dans la notion de tiers. Lorsque l’existence du rapport de trust fait l’objet d’une mention, nul ne peut se prévaloir du fait qu’il n’a pas eu connaissance de la mention, cette dernière détruit la bonne foi des tiers. En revanche, à défaut de mention, les solutions divergent en fonction de la conception défendue.

Le Conseil fédéral, qui est suivi par la doctrine dominante, considère que l’art. 149d al. 3 LDIP a pour but de protéger tant les acquéreurs de bonne foi que les créanciers qui font crédit au trustee en se fondant de bonne foi sur son inscription en tant que propriétaire au registre foncier186. Le Conseil fédéral considère que l’art. 149d LDIP correspond à l’art. 973 CC mais va plus loin que ce dernier dans la mesure où il ne se limite pas à protéger le cas où un tiers a acquis l’immeuble à titre onéreux, mais également celui où les créanciers ont octroyé un crédit au trustee en se fondant de bonne foi sur l’absence de mention du rapport juridique de trust au registre foncier187. Si l’on suit cette conception, l’immeuble dont l’appartenance à un trust n’a pas fait l’objet d’une mention au registre foncier sera réalisé au profit des créanciers personnels du trustee en cas d’insolvabilité de ce dernier.

Tout en admettant que la conception défendue dans le Message poserait des problèmes pratiques en cas de faillite188, FOËX se rallie à la conception défendue dans le Message189. Cet auteur se fonde sur le fait que l’art. 970 al. 4 CC appliqué par analogie aux mentions exclut que les tiers, dont les créanciers font partie, invoquent ne pas avoir eu connaissance d’une inscription figurant au registre foncier190. Ainsi, la mention, qui ne produit qu’un effet informatif, a pour effet de conserver l’immeuble dans le patrimoine du trust. À défaut de mention, l’immeuble sera réalisé au profit des créanciers personnels du trustee, privant les bénéficiaires du droit de distraction prévu à l’art. 284b LP191. Cet auteur

183 PEYROT, Les défis, p. 951 ; PEYROT, La mention du trust, p. 368.

184 PEYROT, Les défis, p. 951.

185 STEINAUER, N 839 ; FOËX, La mention, p. 85.

186 FF 2006, p. 606.

187 FF 2006, p. 607.

188 FOËX, La mention, p. 87.

189 FOËX, La mention, p. 86 ; FOËX, Trust et registre foncier, p. 264.

190 Ibidem.

191 FOËX, Trust et registre foncier, p. 264-265.

considère qu’il n’y a là « rien de choquant »192 dans la mesure où dans la fiducie ordinaire le fiduciant ne peut pas faire valoir les prétentions dont il dispose envers le fiduciaire à l’encontre des créanciers de ce dernier193. Toutefois, le trust se distingue de la fiducie ordinaire à maints égards, notamment par le fait que le trust constitue un patrimoine distinct, ce que cet auteur reconnaît également194, alors que dans le régime de la fiducie ordinaire il n’y a pas de séparation entre le patrimoine fiduciaire et le patrimoine personnel du fiduciaire195. Certes, le fiduciaire dispose d’un droit de distraction, mais ce dernier ne lui accorde qu’une faible protection (II, C, b). En revanche, pour le trust, le législateur a prévu une distraction d’office qui concrétise la séparation des patrimoines.

Par ailleurs, le fiduciant n’a pas de prétentions de nature réelle alors que les bénéficiaires disposent d’un droit de suite en cas d’aliénation de l’immeuble sans droit par le trustee.

PEYROT considère que la conception du Message est critiquable à plusieurs égards. Cette auteure considère que l’art. 149d al. 3 LDIP ne vise pas protéger les créanciers personnels du trustee lorsque ces derniers lui font crédit en se fondant sur l’inscription au registre foncier196. En effet, le registre foncier, tout comme les registres publics en général, n’a pas pour but de protéger les créanciers en leur garantissant la surface financière de leur débiteur, seuls sont visés l’acquisition ou la constitution de droits réels sur les immeubles197. Il s’ensuit qu’en l’absence d’une référence expresse de l’art. 149d al. 3 LDIP à la bonne foi des créanciers, on ne peut pas fonder une protection des créanciers sur la seule interprétation que fait le Message de cette disposition198. Par ailleurs, elle considère qu’il faudrait interpréter cette disposition en se fondant sur l’art. 973 CC qui utilise également l’expression de « tiers de bonne foi » mais ne vise en réalité que les acquéreurs de bonne foi et, par conséquent, on ne saurait lui attribuer une interprétation plus large199. Si tel était le cas, cela reviendrait à créer une différence de traitement dans la mesure où l’acquisition d’une créance de bonne foi ne serait pas protégée par l’art. 973 CC mais elle le serait dans le cadre d’un trust200. Ensuite, le Message laisse entendre

« que l’absence de publicité a pour conséquence directe et inéluctable la réalisation des

192 FOËX, Trust et registre foncier, p. 265.

193 Ibidem.

194 FOËX, Trust et registre foncier, p. 260.

195 THÉVENOZ, Patrimoines fiduciaires, p. 354.

196 PEYROT, La mention du trust, p. 372-373 ; PEYROT, Le trust de common law, p. 105.

197 PEYROT, La mention du trust, p. 371 ; PEYROT, Les défis, p. 954.

198 Ibidem.

199 PEYROT, Le trust de common law, p. 103.

200 PEYROT, Les défis, p. 955 ; PEYROT, Le trust de common law, p. 105.

biens du trust au profit des créanciers personnels du trustee »201, alors que la LP prévoit précisément une procédure en revendication afin de permettre aux tiers qui ont des droits sur l’immeuble de le soustraire à la procédure d’exécution forcée ce qui démontre que la LP ne fait pas de la mention au registre foncier une condition pour réaliser l’immeuble sans autre202. De plus, la solution retenue par le Message aurait pour conséquence d’introduire une inégalité de traitement dans le cas de la faillite du débiteur-trustee puisqu’il faudrait distinguer entre les créanciers de bonne et de mauvaise foi. Les premiers seraient désintéressés mais pas les seconds, ce qui rendrait la tâche à l’office des poursuites extrêmement délicate au vu du nombre important de créanciers dans certaines faillites et de la nature diversifiée des créances203. Elle rappelle par ailleurs que la CLHT ne fait pas de la publicité du rapport de trust une condition de la séparation du patrimoine du trust204. En l’absence de mention, la conséquence serait que le rapport de trust reste opposable aux créanciers personnels du trustee, sans que cela n’exclut toutefois une procédure en revendication.

THÉVENOZ soutient également que les créanciers de bonne foi ne sont pas visés par la notion de tiers205. En effet, lorsque les créanciers veulent s’assurer d’être désintéressés en cas d’insolvabilité de leur débiteur il leur appartient de constituer des gages sur les actifs de ce dernier206. La bonne foi des créanciers n’est alors prise en compte que lorsqu’ils ont constitué un gage207. Dans ce cas, si l’immeuble n’apparaît pas comme appartenant à un trust ils pourront le faire réaliser à leur profit, autrement, ils n’ont qu’un droit personnel et ne sont pas protégés.

PANNATIER KESSLER considère également que la notion de tiers ne doit pas comprendre les créanciers de bonne foi208. Selon cette auteure, le Conseil fédéral crée une bonne foi générale en élargissant le concept de bonne foi au-delà de son champ d’application209. Le droit suisse ne connaissant pas de cas où des créanciers seraient protégés dans leur bonne foi du fait qu’ils aient octroyé un crédit en se fondant sur un registre, il n’est pas possible

201 PEYROT, La mention du trust, p. 370.

202 Ibidem.

203 PEYROT, La mention du trust, p. 371 ; PEYROT, Les défis, p. 955 ; PEYROT,Le trust de common law, p.

108.

204 PEYROT, Le trust de common law, p. 106.

205 THÉVENOZ, Trusts en Suisse, p. 121-122.

206 THÉVENOZ, Trusts en Suisse, p. 121-122 ; PEYROT, Les défis, p. 954.

207 THÉVENOZ, Trusts en Suisse, p. 122.

208 PANNATIER KESSLER, Droit de suite, p. 157, 160.

209 PANNATIER KESSLER, Droit de suite, p. 158.

d’inclure dans cette notion les créanciers210. Ensuite, le registre foncier ne vise pas la protection des créanciers mais uniquement des titulaires de droits réels et, à défaut de base légale, il n’est pas possible que la mention prévue à l’art. 149d LDIP soit utilisée pour « attribuer une fonction nouvelle au Registre foncier »211, fonction qui consisterait à protéger les créanciers212. Par ailleurs, elle rejette l’argument du Conseil fédéral qui estime que l’art. 149d al. 3 LDIP va plus loin que l’art. 933 CC en s’appuyant sur l’art. 973 CC qui contient dans sa note marginale également l’expression de « tiers de bonne foi » mais qui ne vise en réalité que les acquéreurs de bonne foi213. Selon elle, dans la mesure où l’art. 149d al. 3 LDIP utilise la même expression que l’art. 973 CC, il doit être compris comme ne visant également que les acquéreurs de bonne foi214. Elle défend, en outre, qu’inclure les créanciers dans la protection offerte par l’art. 149d al. 3 LDIP entraînerait de lourdes conséquences et violerait l’art. 11 al. 2 et 3 let. a et b CLHT puisqu’elle n’est pas conciliable avec la séparation des patrimoines et cela rendrait « floue la frontière entre le patrimoine du trustee et celui séparé du trust »215. Enfin, elle souligne que l’interprétation défendue par le Message entraînerait des complications en cas de faillite du trustee puisqu’il faudrait distinguer entre les créanciers de bonne et de mauvaise foi216.

B) Rôle de la bonne foi a) En général

Nous avons vu que les tiers de bonne foi peuvent se fier aux apparences de droit résultant du registre foncier en vertu de l’art. 973 al. 1 CC. Le registre foncier produit un effet de foi publique217. Lorsque l’aliénateur n’est pas propriétaire du bien qu’il transfère ou lorsqu’il en est le propriétaire mais n’a pas le droit d’en disposer, la loi protège l’acquéreur de bonne foi en le maintenant dans son acquisition218. La bonne foi est présumée conformément à l’art. 3 al. 1 CC. Elle suppose toutefois l’ignorance de la part

210 PANNATIER KESSLER, Droit de suite, p. 157.

211 PANNATIER KESSLER, Droit de suite, p. 158.

212 Ibidem.

213 Ibidem.

214 PANNATIER KESSLER, Droit de suite, p. 159.

215 Ibidem.

216 Ibidem.

217 PEYROT, Le trust de common law, p. 96.

218 STEINAUER, N 411, 413, 415 ; TF, 5A_76/2017 du 20 juin 2017, c. 6. 1. 2.

du tiers acquéreur du « caractère indu de l’inscription »219 ainsi que « l’absence de raisons d’en douter »220. Autrement dit, sera considéré comme étant de bonne foi le tiers qui ne savait pas et ne pouvait pas savoir que l’immeuble faisait partie d’un trust même en faisant preuve de « l’attention commandée par les circonstances »221.

b) Dans la LP : impératif de protection des créanciers vs. foi publique du registre foncier

La LP fait référence à la bonne foi dans diverses dispositions. Il convient néanmoins d’analyser dans quelles situations et si la bonne foi constitue un critère de protection des créanciers.

En cas de faillite, il existe un besoin de protection des créanciers puisque ces derniers ne seront par définition pas tous désintéressés, il faut donc éviter de péjorer leur situation en permettant au débiteur de disposer de ses biens. Il s’ensuit que dès l’ouverture de la faillite, le débiteur n’est plus autorisé à disposer de ses biens conformément à l’art. 204 al. 1 LP222. Le dessaisissement du failli est opposable même aux tiers de bonne foi223. L’art. 176 LP protège les créanciers en imposant au juge la publication de la faillite dans les registres du commerce et foncier. Lorsque le débiteur dispose de ses biens en violation de l’art. 204 al. 1 LP, ces actes sont inopposables aux créanciers224, ce qui signifie que la masse peut simplement ignorer les actes effectués par le failli225. Ainsi, malgré l’acte de disposition, le bien continue à faire partie de la masse en faillite et pourra être réalisé au profit des créanciers. Lorsque le débiteur en transfère la possession à un tiers la masse pourra revendiquer le bien en mains du tiers acquéreur226. La loi prévoit toutefois deux exceptions à l’inopposabilité des actes de disposition effectués par le failli227. D’abord, celle prévue à l’art. 204 al. 2 LP qui réserve le cas où le failli paie à l’échéance en mains du créancier un billet ou une lettre de change. Dans ce cas, le paiement reste valable tant qu’il a été effectué entre le moment de l’ouverture de la faillite et celui de sa publication

219 STEINAUER, N 922.

220 PEYROT, Le trust de common law, p. 96.

221 GRISEL, p. 165 ; PEYROT, Les défis, p. 951.

222 STOFFEL/CHABLOZ, p. 319 ; GILLIÉRON, N 1658, 1667.

223 GILLIÉRON, N 1659 ; ATF 115 III 111, c. 4.

224 GILLIÉRON, N 1664, 1668 ; STOFFEL/CHABLOZ, p. 320.

225 STOFFEL/CHABLOZ, p. 320 ; GILLIÉRON, N 1668.

226 GILLIÉRON, N 1668.

227 GILLIÉRON, N 1671 ; STOFFEL/CHABLOZ, p. 321.

et à condition que le porteur n’ait pas eu connaissance de la faillite228. Ensuite, la jurisprudence a introduit une seconde exception au principe du dessaisissement en ce qui concerne les biens immobiliers. Lorsque le failli dispose d’un immeuble avant la publication de la faillite au registre foncier, l’acquéreur est maintenu dans son acquisition en vertu des art. 973 et 975 al. 2 CC229. Ainsi, tant que la mention de la faillite n’a pas été portée au registre foncier l’acquéreur de l’immeuble est protégé dans sa bonne foi. La foi publique l’emporte sur la protection des créanciers230.

L’art. 203 al. 2 LP fait également primer la foi publique sur la protection des créanciers en privant le vendeur de son droit de revendiquer le bien si la faillite n’a pas fait l’objet d’une publication.

La faillite provoque également l’incapacité du failli à recevoir des paiements231. En principe, le failli qui dispose de créances envers des tiers ne peut plus recevoir de paiements concernant ces créances. Dans ce cas, à moins que le débiteur du failli n’ait su ou pu savoir que le failli faisait l’objet d’une poursuite par voie de faillite, il est protégé faute de publication de la faillite. Cette dernière ne lui est pas opposable232. La bonne foi du débiteur qui paie en mains du failli, alors qu’il n’aurait pas dû, est protégée. Si le failli contrevient à l’art. 205 al. 1 LP et accepte le paiement de la part de son débiteur, la masse peut considérer que ce dernier n’est pas libéré et il peut être amené à payer une deuxième fois en mains de la masse en faillite233. Cette disposition n’accorde donc qu’une protection au débiteur du failli.

En cas de saisie, l’art. 96 al. 1 LP accorde une protection au créancier saisissant en interdisant au débiteur de disposer du bien faisant l’objet d’une saisie. Lorsque ce dernier contrevient à cette disposition l’acte est nul (art. 96 al. 2 LP). Il n’est toutefois pas nul de plein droit contrairement à la nullité de l’art. 204 al. 1 LP, mais uniquement dans la mesure où il lèse les droits des créanciers. Il s’agit toutefois d’une faible protection puisque l’art. 96 al. 2 LP en limite la portée en prévoyant que l’acte ne sera nul que si des tiers acquéreurs de bonne foi n’ont pas acquis de droit sur le bien. Cette disposition mentionne les tiers de bonne foi et lorsqu’on se réfère aux art. 933 à 936 CC auxquels la

228 Ibidem.

229 GILLIÉRON, N 1671 ; ATF 115 III 111, c. 3, 4.

230 STOFFEL/CHABLOZ, p. 321 ; ATF 115 III 111, c. 3, 4.

231 GILLIÉRON, N 1664, 1673.

232 GILLIÉRON, N 1676.

233 STOFFEL/CHABLOZ, p. 321.

disposition renvoie234, nous pouvons constater que ces dispositions visent uniquement les acquéreurs de bonne foi et non les créanciers. L’art. 96 al. 2 LP ne prévoit ainsi une protection à l’égard des titulaires d’un droit réel235. Contrairement à l’art. 204 al. 1 LP, l’art. 96 LP protège les acquéreurs de droits réels au détriment des créanciers236.

On constate que la bonne foi n’offre qu’une protection très limitée des créanciers dans la LP. L’art. 204 LP protège les créanciers de la masse contre les actes de disposition du débiteur lorsque la faillite à fait l’objet d’une mention dans le registre pertinent, mais cette protection ne repose pas sur leur bonne foi, elle découle uniquement du principe du dessaisissement du failli. Lorsque la faillite n’est pas portée à la connaissance des tiers, ces derniers sont maintenus dans leur acquisition, la foi publique l’emporte sur la protection des créanciers. Quant à l’art. 96 LP, ce dernier protège également les créanciers mais uniquement tant qu’un tiers acquéreur n’a pas acquis un droit réel sur le bien saisi. On peut donc conclure que la bonne foi des créanciers ne constitue pas un critère de protection.

C) Les effets de la mention sur le droit de distraction

En fonction de la conception défendue, les solutions seront distinctes quant aux effets de la mention sur le droit de distraction. Lorsque l’appartenance d’un immeuble au fonds d’un trust fait l’objet d’une mention, celle-ci signale aux créanciers personnels du trustee que l’immeuble fait partie d’un patrimoine séparé, administré dans l’intérêt de bénéficiaires, de sorte qu’ils ne peuvent pas compter dessus pour les désintéresser237. En revanche, lorsque la mention ne figure pas au registre foncier, il convient de déterminer si cela empêche la distraction de l’immeuble du trust, autrement dit, si la mention est une condition de la distraction prévue par l’art. 284b LP238.

La conception défendue par le Message ainsi que par la doctrine qui s’y réfère, dans la mesure où ils interprètent l’art. 149d al. 3 LDIP comme comprenant également les créanciers dans la notion de « tiers », a pour conséquence de faire de la mention une condition de la distraction de l’immeuble du trust. À défaut de mention, les créanciers

234 GILLIÉRON, N 1062.

235 Ibidem.

236 ATF 115 III 111, c. 4.

237 PEYROT,Les défis, p. 952.

238 Ibidem.

personnels du trustee sont protégés et les bénéficiaires se voient privés de leur droit de distraction239. Selon cette conception, l’intérêt des créanciers, simples titulaires d’un droit personnel, prime celui des bénéficiaires qui sont titulaires d’un droit réel. Si l’on suit cette logique, les créanciers peuvent donc s’opposer à la distraction de l’immeuble en invoquant leur bonne foi240. Même si le droit suisse ne reconnait pas de façon évidente aux bénéficiaires un droit de nature réelle sur le patrimoine d’un trust en raison du

personnels du trustee sont protégés et les bénéficiaires se voient privés de leur droit de distraction239. Selon cette conception, l’intérêt des créanciers, simples titulaires d’un droit personnel, prime celui des bénéficiaires qui sont titulaires d’un droit réel. Si l’on suit cette logique, les créanciers peuvent donc s’opposer à la distraction de l’immeuble en invoquant leur bonne foi240. Même si le droit suisse ne reconnait pas de façon évidente aux bénéficiaires un droit de nature réelle sur le patrimoine d’un trust en raison du

Documents relatifs