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L ES PARCOURS SCOLAIRES

1. Les parcours scolaires

* Les formations dans les pays d’origine

Certains migrants viennent de pays ou les systèmes éducatifs étaient peu développés à l’époque où ils étaient censés être scolarisés. Aussi, la plupart ont reçu une éducation minimale, voir pas d’éducation du tout.

On remarque une forte similitude dans les parcours scolaires des Italiens. Les parents des témoins ont en général reçu une formation minimale. Dans leur pays d’origine, ils ont rapidement commencé à travailler, dans des fermes (cas des pères de Bernardo A. et d’Angèle Santoro) ou comme maçon (cas du mari de Rosa Carbone et du père d’Angela Marciano). Ils ont accédé à des postes de manœuvres, de maçon ou dans des industries, c’est à dire des emplois qui ne demandent pas de qualification particulière mais une forte motivation et endurance physique.

Les Arméniens ont tous suivi les mêmes formations, comme nous l’apprend Arthur Derderian : « Pour la génération de mon père il y avait trois métiers, c’était tailleur, coiffeur

et cordonnier. Mon père était cordonnier et mon oncle était coiffeur. C’est vraiment les métiers qui étaient appris dans les orphelinats ». En effet, quelques métiers seulement étaient

enseignés dans les orphelinats américains en Grèce. Cependant, ils ne correspondent pas aux attentes de la France, qui cherchaient de la main-d’œuvre peur qualifiée chez les migrants. Aussi, le père d’Arthur Derderian a exercé plusieurs emplois en France avant de revenir à sa formation d’origine. Il n’a cependant pas reçu de formation spécifique.

En Algérie aussi les formations scolaires étaient minimales. L’époux d’Habiba M. n’a jamais pu aller à l’école. A son arrivée en France, il a donc travaillé en usine. Habiba M. a, quant à elle, un diplôme de dactylographe. Cependant, elle n’a pas continué à exercer sa profession à son arrivée en France. Elle n’a pas travaillé pendant plusieurs années puis à fait des ménages et garde actuellement des enfants. On voit dans son parcours la difficulté pour les émigrés de faire reconnaître leur diplôme dans le pays d’accueil.

Le cas d’Ihor Ivantsiv est un peu particulier. Il a suivi une formation de vétérinaire en Ukraine et a exercé ce métier pendant deux ans. Il a ensuite choisi d’entrer au séminaire et a suivi pendant six ans des études de théologie. Il est actuellement prêtre en France.

* La reprise de cours à l’arrivée en France

À leur arrivée en France, il faut se demander si les témoins ou leur entourage ont pu reprendre une formation scolaire et plus généralement s’ils ont suivi des cours, de langue notamment. Il est important tout d’abord de constater que la plupart des arrivants ne parlaient pas la langue ou avaient seulement des notions de base en français. C’est le cas de Bernardo A. qui est né en France mais a quitté le pays à 7 ans à peine. Il a donc perdu presque entièrement ce qu’il avait appris et à son retour en France en 1949 a dû réapprendre la langue. Seul Habiba M. avait appris à l’école à parler français avant d’arrivée : « C : Et quand vous

êtes arrivée, est-ce que vous parliez français ? – H : Oui, oui, j’étais à l’école en Algérie. A l’école de la France. On parlait le plus français parce que j’étais à l’école au temps de la France là-bas. »

De plus, la plupart du temps, les migrants expliquent qu’ils ont dû se débrouiller seuls pour apprendre la langue, qu’ils n’ont pas eu accès à des cours, notamment pour les plus anciens émigrés comme les parents d’Arthur Derderian : « Ils l’ont appris comme ça, il n’y

avait pas des écoles comme on trouve maintenant dans les mairies. Ils ont appris comme ça, sur le tas. » Les mères de nos témoins n’ont souvent pas appris le français comme celle

d’Angèle Santoro et d’Angela Marciano. Les autres ont appris au travail, au contact des collègues. Rosa Corbone remercie ainsi ses partenaires de travail: « R.T : Et comment avez-

vous appris le Français ? - R.C : Difficilement. Ca a été difficile mais je n’ai qu’à remercier tous les Français qui ont travaillé avec moi. » Cependant, certains ont pu suivre des cours

comme le père de Pio Gaveglia : « Mon père avait pris des cours du soir, pour parler

français, mais c’était une question de volonté quoi. » Habiba M. également mentionne ces

n’ayant jamais reçu aucune éducation. De même, Ihor Ivantsiv, qui est venu beaucoup plus tardivement, en 2000, a étudié la langue française à l’université catholique à son arrivée à Lyon : « [....] j’étais dans l’Institut de langue et de culture françaises à la Catho, à

l’Université catholique. »

La mise en place des cours du soir de langue est tardive cependant, de nombreux émigrés y ont eu accès. Pour cette question, ces témoignages nous permettent difficilement de chiffrer combien d’immigrés ont réellement eu accès à ces cours. Aussi, il faudrait faire appel à d’autres sources, comme le préconisent la plupart des historiens et sociologue qui se sont intéressés aux témoignages oraux et invitent à croiser les sources pour plus d’exactitude23.

En plus des cours de français, certains migrants ont pu suivre des formations. C’est le cas de Bernardo A. . Il est né en France en 1932 puis reparti en Italie en 1939. Il est revenu à 17 ans, en 1949, et a choisi de suivre des cours dans une école professionnelle, pour devenir coloriste. Les cours avaient lieu le soir après le travail. Cette situation a duré huit à neuf années. En journée, il travaillait dans une usine de textile, Furet, avec son père. Ihor Ivantsiv également a dû reprendre ses études de théologie en France. Les disciplines pour lesquelles il est diplômé en Ukraine ne sont pas valables en France. Ainsi, il continue à suivre des cours à l’université catholique et à passer des examens.