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Les opérations de financement fondées sur

Dans le document La création d'un droit bancaire islamique (Page 105-118)

BANCAIRES MUSULMANES

Section 2- Les opérations de financement fondées sur

lʼapport en capital

Les opérations de financements en capital (equity) que nous allons étudier

maintenant peuvent se décliner à deux niveaux : les mécanismes de prêt fondés

sur lʼassociation (§1) et le financement de projet (§2) qui combine plusieurs

mécanismes de financement.

§1- Les mécanismes de prêts fondés sur lʼassociation

Par leur fidélité principielle aux enseignements de la Shariʼa, ces

instruments juridiques classiques sont les plus représentatifs de la doctrine

économique islamique. Ils jettent à partir dʼelle les bases dʼun modèle bancaire

islamique alternatif et innovant402. En effet, les mécanismes proposés, la

mousharakah (A) et la moudharabah (B), correspondent aux valeurs de solidarité

402 Nous ne sommes à ce propos pas seuls à regretter lʼorientation du modèle bancaire islamique principalement tourné vers les opérations commerciales, au détriment des opérations de participation. Cf. notamment ALGABID Hamid, Op. cit., p. 228 et GUERANGUER François, Op. cit., p. 95.

et dʼéquité véhiculées par le dogme musulman que nous avons déjà abordées en

partie préliminaire403.

Nous le verrons, les aspects collaboratifs et de participation aux bénéfices,

encouragés par ces formes islamiques dʼassociation, permettent de rapprocher404,

par la similitude essentielle des perspectives, la vision islamique originelle du rôle

de banquier405 et le capital-risque406. En effet, lʼactivité du capital-risqueur est de

prendre des participations dans le capital social de jeunes sociétés qui reçoivent ainsi les fonds propres nécessaires à leurs développements futurs. Le

capital-risqueur joue également un rôle dʼintermédiaire en mettant en relation les

investisseurs et les entreprises. De plus, son expertise dans la conduite du développement des entreprises lui permet de vendre un savoir-faire qualitatif

influençant très largement la réussite du projet407. Enfin, le capital-risqueur est

associé au succès du projet puisquʼune partie des profits lui revient, ce qui lʼincite

à fournir lʼeffort maximal.

Ainsi, est-il permis de penser que, en sʼappuyant sur des outils juridiques

favorisant la coopération, les banques islamiques puissent jouer un rôle dans le développement économique des pays musulmans sur une base correspondant à sa vocation primaire. Néanmoins, les difficultés de mise en œuvre pratiques rencontrées par ces instruments juridiques, les contraintes auxquelles ils sont exposés, en terme de compétitivité notamment, souligneront à nouveau la faiblesse du modèle de droit bancaire islamique envisagé actuellement.

A- La mousharakah

Lʼévolution de cette notion est très représentative des problématiques

auxquelles est confronté le droit bancaire islamique émergent : respecter les

403 Cf. supra p. 25 et Qorʼan et S.XXIV, V.37 et ce hadith rapporté par Abu Dawud « Le Prophète a dit : Aussi longtemps que les deux partenaires restent honnêtes lʼun envers lʼautre, je suis le troisième ».

404 Sur le rapprochement du capital-risque et de la finance islamique voir Introduction aux techniques islamiques de financement, Jeddah, IRTI, Actes de séminaire N°97, 1996, disponible sur www.irtipms.org www.irtipms.org, p. 72-83.

405 Sur les nombreuses traces de moudharabah et mousharakah dans lʼhistoire du monde musulman dès les premiers siècles cf. CHAPELLIERE Isabelle, Op. cit., p. 104.

406 Pour une étude détaillée du capital-risque se reporter à DUBOCAGE Emmanuelle, RIVAUD-DANSET Dorothée, Le capital-risque, Paris, La découverte, « Collection Repères Gestion », 2006, 121 p.

407 Notamment sur la conduite du développement, la fixation et la manière dʼatteindre les objectifs, en matière de recrutement, par la connaissance du secteur dʼactivité et le réseau de contacts dont ils disposent.

valeurs fondamentales du droit musulman tout en développant des produits adaptés aux conditions économiques contemporaines. Cʼest pourquoi nous proposons de partir de la mousharakah (1) en droit classique avant de nous interroger sur sa pratique contemporaine (2).

1- La mousharakah en droit musulman classique

Une étude préliminaire des concepts dʼassociation et de personnalité morale (a) est nécessaire afin de développer ensuite la règle essentielle de la

mousharakah : le principe de partage des pertes et des profits (b).

a- Association et personnalité morale

Le concept classique, à la base du contrat de mousharakah pratiqué dans les banques islamiques est la sharikat al ʻinan, « lʼassociation limitée », qui permet à plusieurs partenaires de sʼassocier en participant chacun au capital du projet dans des proportions différentes408. En droit islamique classique, il nʼexiste pas de concept de société tel quʼentendu aujourdʼhui, doté dʼune personnalité morale, limitant la responsabilité des actionnaires. Outre les implications juridiques que cela soulève en matière de recherche éventuelle des responsabilités des associés, cela induit également la dissolution automatique de la société à la mort dʼun des associés. En outre, la jurisprudence classique, à lʼexception notable des

malikites, jugeait que les contrats dʼassociations nʼétaient pas contraignants et,

partant, pouvaient être dissous unilatéralement409. Aujourdʼhui, la personnalité morale est admise dans les pays musulmans, les règles de formation des sociétés étant le plus généralement issues du droit des sociétés des pays occidentaux410.

b- La règle essentielle de la mousharakah : le principe de partage des pertes et des profits

Dans la mousharakah, le principe essentiel, auquel il est intredit de contrevenir, est le partage des profits et des pertes entre les associés411. Si la

408 EL-GAMAL Mahmoud A., Op. cit., p. 118. 409Ibid., p.119.

410 JAHEL Selim, « Droit des affaires et religions », Op. cit., p. 17 et AAOIFI, 2004-5A, Standard on mousharakah.

détermination des profits est librement négociable par les associés, mais doit nécessairement être proportionnelle (interdiction dʼune somme forfaitaire)412, le support des pertes est par contre obligatoirement proportionnel à la part du capital investi par chaque associé413.

Le capital social de la mousharakah peut, de lʼavis unanime des écoles, être apporté en numéraire ou sous forme de biens ou de marchandises414. Lʼapport en capital peut encore se faire par lʼémission de titres, la responsabilité des souscripteurs étant limitée au prorata de leur part du capital. Ces titres sont négociables et tout associé peut en disposer librement. Toutefois, dans la mesure où la Shariʼa nʼautorise la vente de créances dʼargent quʼà leur valeur nominale, il est nécessaire si le capital est composé dʼactifs tangibles et dʼactifs liquides, que la proportion dʼactifs tangibles soit supérieure à 50% nous reviendrons sur la légitimation de ce point de vue415.

2- La mousharakah dans les banques islamiques

Si les praticiens bancaires ont développé plusieurs mécanismes juridiques à partir de la notion de mousharakah (a), nous montrerons que sa fidélité aux principes du droit musulman lʼexpose à plusieurs contraintes commerciales dans lʼenvironnement économique contemporain (b).

a- Les différents types de mousharakah

La mousharakah permet le financement de tout type de projets, à condition

quʼils soient conformes à lʼéthique islamique. Dans une mousharakah, le banquier en tant quʼapporteur au capital de la société participe pleinement de sa gestion, lʼexpertise quʼil fournit peut par ailleurs justifier que sa part de profit soit supérieure à son apport capitalistique.

412 Al Kasani cité par AYUB Muhammad, Op. cit., p. 317.

413 Basé sur une parole du quatrième khalife et gendre du Prophète, ʻAli ibn Abu Taleb « Le profit est basé sur le consentement des parties, mais la perte est toujours sujette à la part dans lʼinvestissement ».

414 Voir notamment Ibid., p. 314. 415 Cf. infra p. 131, note 476.

Dans le cadre dʼune association permanente, le banquier et son client, entrepreneur, restent liés jusquʼà lʼachèvement du projet, la dissolution de la société ou la revente des parts sociales par la banque416.

Schéma du mécanisme contractuel de la mousharakah permanente :

A côté de cette forme simple dʼassociation, les juristes contemporains (principalement des hanbalites) ont créé une forme originale de mousharakah, la

mousharakah moutanakissa (dégressive). Cet instrument juridique met en place

deux ou trois contrats (contrats de mousharakah, de vente et leasing), obligatoirement distincts à peine de nullité. La mousharakah moutanakissa417 est utilisée dans le cadre de financement de projets comme la construction ou la rénovation de logements par exemple.

Cf. page suivante pour le schéma du mécanisme contractuel de la

mousharakah dégressive :

416 CAUSSE-BROQUET Geneviève, Op. cit., p. 58 sur les détails financiers.

417 Sur la mousharakah dégressive cf. BENDJILALI Boualem, KHAN Tariqullah, Economics of diminishing mousharakah, Jeddah, IRTI, 1995, disponible sur www.irtipms.org, 57 p.

Schéma du mécanisme contractuel de la mousharakah dégressive :

La création de ce type de mousharakah est révélatrice de la difficulté quʼont les banques islamiques à développer un modèle basé sur lʼassociation stricte. Elle soulève de plus de nombreuses interrogations au regard du droit classique. Ainsi, en entrant dans une relation de mousharakah dégressive, la banque et son client ne désirent pas lʼassociation en tant que telle, mais simplement un moyen licite dʼemprunter à crédit. Ceci est suffisamment éclairé par la nécessaire fixation préalable des revenus dégagés par le projet, revenus dont le partage servira à désintéresser les deux partenaires et le fait que le projet ne puisse pas dégager de perte autre que le non-paiement du leasing par le client. Le schéma ci-dessus expose les modalités de remboursement du crédit ainsi synthétisé dans lesquelles interviennent trois contrats différents. Nous lʼavons vu, au regard de la prohibition

du gharar, ces trois contrats doivent nécessairement être distincts. De plus, il faut

que la banque puisse sʼassurer du caractère contraignant du leasing et de la vente des parts, qui seront donc matérialisées par des promesses dʼachat et de vente dont nous avons vu comment la doctrine contemporaine admet, par talfiq, le caractère contraignant. Enfin, le résultat de cette création est un nouveau contrat, sortant du cadre traditionnel en droit musulman des contrats nommés.

b- Les contraintes de la mousharakah

La mousharakah418 souffre en pratique419 des nombreuses contraintes

quʼinduit son fonctionnement. Les banques en tant quʼassociées au projet, doivent

procéder à une étude précise du projet, suivre son déroulement, bref être totalement impliquées, que ce soit au niveau financier ou au niveau des ressources humaines. Or, en pratique, mis à part le cas spécifique des banques

dʼinvestissement traitant des projets dʼenvergure, les banques ne disposent pas

du savoir-faire requis pour multiplier les prises de participation de faible envergure. Le surcoût que nécessiterait la mise en place de procédures et de personnels

dédiés, remet en cause le fonctionnement classique dʼune banque420. Modèle dont

les banques islamiques ne cherchent pas à sʼécarter. Nous avons pu constater

également que, dans la pratique, de nombreux clients ne désirent pas sʼassocier

avec la banque dans la gestion courante de lʼentreprise et préfèrent conserver une

relation prêteur-emprunteur classique alors même quʼils peuvent être informés de

la plus stricte conformité à la Shariʼa de la mousharakah. De plus, le principe de ce

type dʼassociation met en lumière la difficulté pour les banques de sʼy engager au

regard de lʼasymétrie dʼinformation421 quʼelle induit, et sur laquelle il convient de

sʼarrêter un instant.

Dans le cadre de lʼintermédiation financière, la banque fournit des capitaux

à sa clientèle et revend ces créances sur les marchés financiers. La relation

quʼelle entretient avec sa clientèle et les moyens dʼinformation dont elle dispose

légitiment sa fonction dʼintermédiaire financier puisquʼelle est la mieux armée pour

déterminer la qualité des créances dont elle dispose et en permettre ainsi

lʼéchange. Toutefois, à un certain point de vue, les intérêts du banquier et de son

client sont opposés422. Le banquier souhaite prêter de lʼargent contre un juste prix.

Il doit pour cela sʼassurer de la viabilité du projet envisagé, de la capacité de

remboursement de lʼemprunteur, de sa compétence dans la conduite dʼune

418 Nous distinguons la mousharakah dégressive dont nous avons vu quʼelle nʼest finalement quʼune forme de crédit conventionnel où les mécanismes participatifs sont détournés de leur fonction première.

419 Voir le graphique infra p. 116.

420 Ou comme le disent Emmanuelle Dubocage et Dorothée Rivaud-Danset in, Le capital-risque, Paris, La découverte, « Collection Repères Gestion », 2006, p. 31-32 : « en définitive, ces deux métiers [de banquier et de capital-risqueur] sʼopposent. Dans lʼidéal, le capital risque associe une expertise forte, la confiance dans son jugement et la prise de risque. Symétriquement, le banquier conjugue un manque de savoir-faire face aux nouvelles technologies, une faible conviction dans sa capacité de juger des projets innovants et une prise de risque limitée. »

421 Pour des développements sur la théorie de lʼagence et lʼasymétrie dʼinformation dans la relation banquier/client cf. Ibid., p. 37 et ss. et SCIALOM Laurence, Op. cit., p. 50 et ss.

422 Selon la théorie de lʼagence qui met lʼaccent sur les divergences dʼintérêts dans la relation principal-agent (ici banquier-client).

entreprise par exemple et fixer un prix en conséquence des éléments dont il a

connaissance. Lʼemprunteur souhaite lui emprunter au coût le plus faible et aura

tendance dans la mesure du possible à dissimuler un certain nombre

dʼinformations423 dont il dispose et qui seraient susceptibles de majorer le prix du

crédit. Les nombreux travaux menés en pratique montrent que les clients qui sont disposés à emprunter à des taux élevés sont en moyenne ceux dont les projets sont les plus risqués car ils savent que leur probabilité de rembourser le prêt est

faible424. Or, dans le cadre de la mousharakah, nous avons vu que le client et la

banque partagent les profits et les pertes alors que le crédit conventionnel ou ses

équivalents islamiques impliquent un remboursement fixe425. Le client a donc en

principe lʼopportunité de choisir entre payer une somme fixe et partager ses gains

ou pertes à venir. Sʼil suppose, par les informations quʼil détient, que le projet quʼil

entend mener va réussir, il préfèrera opter pour un crédit non affecté classique

plutôt que pour une mousharakah, par laquelle il reversera un pourcentage de son

bénéfice. A lʼinverse, sʼil estime que son projet est risqué, il préfèrera chercher

lʼassistance dʼun associé, la banque en lʼoccurrence, qui partagera avec lui les

pertes éventuelles. Il est donc à craindre que les banques qui commercialisent la

mousharakah se retrouvent dans un cas typique de sélection adverse426, ce qui

explique aussi pourquoi elles ne le proposent que peu à leur clientèle.

Le fait que la banque islamique soit fondée sur des principes religieux et

quʼà ce titre sa clientèle privilégie ce qui est le plus conforme à ses devoirs

religieux pourrait permettre de relativiser cette démonstration427. La mousharakah

présentant une plus grande conformité à lʼIslam que la mourabaha, par exemple,

de lʼaveu des juristes des banques islamiques, on pourrait supposer que la

clientèle la privilégiera à ce titre. Nous verrons par la suite que la relation entre le

client et sa banque ne diffère en réalité quʼà la marge malgré le cadre islamique

mis en avant.

423 Il peut ainsi déformer la situation comptable, la capacité des banques à établir avec certitude la conformité du bilan comptable avec lʼactivité réelle de lʼentreprise est difficile en pratique dans de nombreux pays musulmans en raison de la part de lʼactivité informelle dans lʼéconomie de ces pays.

424 Notamment le prix Nobel dʼéconomie Joseph Stiglitz cité in Ibid., p. 50.

425 Au sens de non-proportionnel.

426 Les projets les plus sûrs étant financés par un équivalent crédit du type istisnaʼ, mourabaha ou

salam, les projets les plus risqués, par la mousharakah. Sur ce point cf. SAADALLAH Ridha, Financing trade in an Islamic economy, Jeddah, IRTI, 1999, disponible sur www.irtipms.org, p. 57-58.

427 Dans lʼabsolu, comme le relève justement le Professeur Dhafer Saïdane, les principes de partage des pertes et des profits, dʼhonnêteté et de transparence dans les transactions « conduisent à une symétrie dʼinformation et à une parfaite transparence des actes entre la banque islamique et ses clients » : SAÏDANE Dhafer, La finance islamique à lʼheure de la mondialisation, Paris, revue Banque Edition, « Collection Les essentiels de la banque », 2009, p. 90-91.

B- La moudharabah

Second mécanisme de prêt fondé sur lʼassociation : la moudharabah. Afin de permettre une comparaison au plus juste entre cet instrument juridique et celui que lʼon vient de voir, nous suggérons de progresser de la même manière. Ainsi, proposons-nous de rechercher la nature du contrat classique de moudharabah (1) avant dʼen analyser la pratique dans les banques islamiques (2).

1- Nature de la moudharabah

Nous étudierons ici la légitimité de la moudharabah (a) ainsi que ses conditons de mise en oeuvre (b).

a- Légitimité

La moudharabah est un contrat hérité de la période préislamique qui se

nommait le qirad428. Elle est légitimée par lʼexemple du Prophète, qui en aurait usé, avant de recevoir la révélation, quand il travaillait pour sa première épouse

Khadija en tant que caravanier429. Ce contrat était notamment utilisé au VIIe siècle

pour envoyer dʼIraq à Médine le revenu des impôts430. Il fut ensuite communément pratiqué tout au long du Moyen Age431.

Le caractère participatif de ce contrat basé sur la fidélité et la confiance432

et son utilisation constante depuis les premiers temps de lʼIslam en fait un pilier majeur du système économique et idéologique des banques islamiques433.

428 PARIGI Stéphanie, Op. cit., p. 74.

429 Al AMIN Hassan, La moudharabah et ses applications contemporaines, Jeddah, Arabie Saoudite, BID, IIRF, 1994, p. 29.

430 Sur ce point se référer à CIZAKCA Murat, « Islamic Banks and Venture Capital : Origins, Evolution and Reform Proposals », Système bancaire turc et réseaux financiers internationaux, Paris, LʼHarmattan, 1995, 384 p.

431 Cf. supra p. 52 pour le rapport entre la moudharabah et la commanda au Moyen Age. 432 OBEIDI Zouheir, Op. cit., p. 80.

433 Cʼest précisément sur la moudharabah et la mousharakah que le concept de banque islamique est né, en réaction au caractère jugé anti-islamique des banques conventionnelles.

b- Conditions de mise en oeuvre

Selon le célèbre juriste malikite ibn Rushd (Averroès) la moudarabah

concerne « une personne donnant à une autre personne une somme dʼargent pour faire le commerce et la rétribuant sur une partie du gain ». Plus précisémment, la moudharabah est un contrat de commandite qui repose sur la fourniture du capital par lʼune des parties (lʼassocié en capital dénommé le commanditaire, rab al mal) et celle du travail par lʼautre partie (le commandité,

moudharib). Le commandité place et investit le capital dans les secteurs qui ont

été convenus avec le commanditaire, pourvu que ces secteurs soient licites. Les profits sont répartis selon la proportion établie lors de la conclusion du contrat. Les pertes sont à la charge du commanditaire sauf sʼil commet une faute appréciée au regard des conditions fixées dans le contrat. Dans ce cas il sera tenu responsable des pertes, qui seront donc à sa charge434. Ainsi, dans la moudharabah, en cas de perte, le moudharib ne perd que son travail et la possibilité de gain, il ne participe pas aux pertes comme dans la mousharakah.

Schéma du mécanisme de la moudharabah :

La moudharabah peut être de deux types : générale (moudharabah

mutlaqa), dans laquelle le moudharib dispose dʼun domaine général de

compétence, ou limitée (moudharabah muqaiyada) à un projet déterminé435.

Dans la jurisprudence classique il est admis que lʼentrepreneur (moudharib) chargé de faire fructifier les fonds, ne peut garantir à lʼinvestisseur (rab al mal) une

434 RYCX Jean-François, Islam et dérégulation financière, Op. cit., p. 98. 435 A lʼorigine, seuls les hanafites et les hanbalites autorisaient cette possibilité.

rémunération fixe436. Il faut nécessairement un accord préalable sur une répartition proportionnelle des gains. Les pertes restent à la charge exclusive de lʼinvestisseur sauf faute de lʼentrepreneur, le support des risques étant le seul moyen pour lʼinvestisseur de justifier ses gains du point de vue de la Shariʼa.

Ainsi la moudharabah est un instrument financier participatif par lequel une partie confère à une autre le soin de faire fructifier lʼargent quʼelle lui confie.

2- La moudharabah dans les banques islamiques

Lʼétude de la pratique contemporaine de la moudharabah implique que

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