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Dans la présente section, une description des aspects principaux des mécanismes de régulation des HIF-α est apportée. Ceci permet de mettre en évidence la complexité de la régulation de ces protéines, mais également comment une dérégulation de ces mécanismes peut avoir des impacts importants sur leur activité. Le potentiel de cibler ces régulateurs peut donc être envisagé dans certains contextes pathologiques.

Le niveau d’activation des facteurs HIF, leur spécificité et leur sélectivité sont modulés par une panoplie de facteurs. Non seulement leur stabilité est sous le contrôle des niveaux d’O2, mais

également leur potentiel de transactivation. Les HIF sont ciblés par des modulateurs de leur dégradation, de leur expression, de leur localisation et de leur activation. Ces protéines régulatrices peuvent à leur tour être modulées par l’hypoxie, par divers stimuli ou par les HIF elles-mêmes. Tout ceci, résultant en une signalisation complexe et précise, assurant le bon contrôle de ces facteurs essentiels au maintien de l’homéostasie cellulaire.

La régulation post-traductionnelle dépendante de l’O

2

: hydroxylation

Le mécanisme principal de régulation des HIF-α, et surement le mieux caractérisé, est l’hydroxylation dépendante du niveau d’O2 [241-243]. L’hydroxylation est une modification

protéique relativement peu fréquente et fut initialement observée au sein du collagène, servant à sa conformation en triple hélice [244]. Deux conséquences découlent des évènements d’hydroxylation des HIF-α, catalysés par des dioxygénases dépendantes du Fe2+ et du 2-OG.

Premièrement, les HIF-α sont modifiées sur des résidus prolines hautement conservés au sein de leur domaine ODD (Pro402 et Pro564 chez HIF-1α humaine, Pro405 et Pro531 chez HIF-2α, Pro492 chez HIF-3α) [245-248]. Ces modifications sont catalysées par les enzymes PHD, possédant un domaine prolyl-hydroxylase (PHD ; prolyl hydroxylase domain-containing proteins) [249, 250]. L’hydroxylation de l’un ou l’autre de ces résidus proline est directement associée à la régulation de la stabilité des HIF-α. En effet, la modification de ces sites permet l’interaction avec le produit du gène suppresseur de tumeur von Hippel-Lidau (pVHL), via des liens hydrogènes stables (Figure 1.11) [251]. Étant le facteur de reconnaissance de substrat du complexe E3 ubiquitine-ligase VCB- CR (pVHL, Élongines B/C, Culline 2 et RBX1 (ring box protein 1), pVHL entraine la polyubiquitination des HIF-α et leur dégradation protéosomale dépendamment des niveaux d’O2

[170, 252-254].

Le second mécanisme de régulation des protéines HIF-α dépendant de l’O2 fait plutôt

intervenir une protéine à activité asparagine-hydroxylase. Celle-ci est connue sous le nom de FIH, pour facteur inhibant HIF (factor inhibiting HIF), et catalyse l’hydroxylation de HIF-1α et HIF-2α

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sur un résidu asparagine localisé au sein de leur domaine de transactivation C-TAD (Asn803 chez HIF-1α humaine, Asn851 chez HIF-2α) [241, 255]. La modification de ce résidu interfère avec l’interaction des coactivateurs transcriptionnels p300 et la protéine liant CEBP (CBP ; CEBP-binding protein), inhibant directement la transactivation par les HIF (Figure 1.11) [256-259]. Les coactivateurs p300 et CBP sont des acétyltransférases apparentées, possédant des similarités structurelles et des fonctions redondantes élevées, d’où leur identification fréquente en tant que p300/CBP [260]. L’interaction de HIF-1α et HIF-2α avec ces coactivateurs est essentielle à l’activité dépendante de leur domaine C-TAD et serait nécessaire à environ 35-50 % de leur réponse transcriptionnelle globale, avec une spécificité pour certains gènes [261].

Depuis sa découverte, les particularités entourant l’hydroxylation des HIF-α furent grandement étudiées. La spécificité des hydroxylases, leur expression, leur localisation et leur régulation furent notamment mises en évidence. La compréhension des fonctions et impacts physiologiques de ces enzymes a mené à un intérêt grandissant envers leur potentiel comme cibles thérapeutiques dans divers contextes pathologiques [262, 263].

Figure 1.11: La régulation des HIF-α dépendante de l’O2.

Deux évènements d’hydroxylation dépendants de la molécule d’O2 surviennent sur les sous-unités HIF-α en

conditions d’hypoxie, menant à leur dégradation et leur inactivation. Voir le texte pour plus de détails.

38 1.6.1.1 Les proline-hydroxylases (PHD)

Chez les mammifères, il existe trois isoformes des proline-hydroxylases (PHD) responsables de l’hydroxylation du domaine ODD : PHD1, PHD2, PHD3 [250]. Celles-ci sont aussi connues sous les noms de HIF-prolyl hydroxylases (HPH3, HPH2, HPH1) ou protéines Egg-laying defective nine (EGLN2, EGLN1, EGLN3). Ces enzymes conservées au cours de l’évolution sont des régulatrices majeures de la réponse à l’hypoxie. Leur existence précède même l’apparition d’homologues de HIF- 1α chez les métazoaires [264]. Les PHD ont la particularité de reconnaitre un motif spécifique Leu- XX-Leu-Ala-Pro, tel que présent au sein du domaine ODD.

La réaction d’hydroxylation catalysée par les PHD débute par l’interaction stable du Fe2+ puis

du 2-OG avec le site catalytique des PHD. Il s’ensuit la liaison du substrat protéique, dans ce cas-ci les HIF-α, et finalement la liaison d’une molécule d’O2 au Fe2+ [265]. Une réaction de décarboxylation

oxydative permet alors de transférer un atome d’oxygène au 2-OG, le convertissant en succinate, tout en produisant du CO2. Le second atome d’oxygène est ajouté au résidu proline des HIF-α, dans une

étape d’hydroxylation impliquant l’oxydation du Fe2+ en Fe3+. Ainsi, la liaison de l’O

2 consiste en

l’étape finale et limitante pour la réaction d’hydroxylation.

Les valeurs de Km (constante de Michaelis ou constante d’affinité) des PHD envers l’O2

furent démontrées comme étant plus élevé que les niveaux d’O2 physiologiques des tissus [266-268].

L’activité des PHD est donc en relation stricte avec les niveaux d’O2 cellulaires, ce qui les caractérise

en tant que véritables senseurs de l’O2. Ainsi, une inhibition progressive de l’activité de ces

dioxygénases est observée lors d’une diminution graduelle des concentrations d’O2 cellulaires. Ceci

assure une stabilisation rapide des HIF-α et une induction efficace de la réponse à l’hypoxie.

Tous les membres de la famille des PHD ont la capacité d’hydroxyler les sous-unités HIF-α. Leurs caractéristiques respectives sont résumées au Tableau 1.1. PHD2, le membre ancestral de cette famille, est dominant dans la régulation de HIF-1α [269, 270]. En effet, la répression de PHD2 en conditions oxygénées est suffisante pour provoquer la stabilisation de HIF-1α, tandis que la répression PHD1 ou PHD3 n’a qu’un impact mineur. La prédominance de PHD2 est également soulignée par la létalité embryonnaire provoquée par sa délétion chez des modèles murins, tandis que la délétion respective de PHD1 et PHD3 n’entraine que des phénotypes légers [271]. Néanmoins, PHD1 et PHD3 sont décrites en tant qu’enzymes principales pour la régulation de la sous-unité HIF-2α [272]. Bien que les trois enzymes démontrent des profils d’expression presque ubiquitaires, leurs niveaux respectifs varient d’un type cellulaire à l’autre. PHD1 et PHD3 sont respectivement prédominante au sein des testicules et du cœur, alors que PHD2 l’est dans la majorité des autres tissus [273].

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Tableau 1.1: Les caractéristiques des hydroxylases ciblant les HIFα.

Hydroxylase HIF-α principale ciblée Résidus modifiés Expression régulée par HIF-1α Localisation intracellulaire principale Phénotypes d’inactivation génique (souris)

PHD1 HIF-2α 1α : P564/402 2α : P531/405 Non Nucléaire Reprogrammation métabolique

PHD2 HIF-1α 1α : P564/402 2α : P531/405 Oui Cytoplasmique Létalité embryonnaire : défauts cardiaques

PHD3 HIF-2α HIF-1α : P564 HIF-2α : P531 Oui Cytoplasmique et nucléaire Défauts du système sympathoadrénale

FIH HIF-1α HIF-1α : N803 HIF-2α : N851 Non Cytoplasmique Reprogrammation métabolique

Ces observations sous-entendent des différences de fonctions entre les PHD. Effectivement, des distinctions sont à souligner au niveau de leurs domaines fonctionnels et dans leur affinité pour certains sites (Tableau 1.1). Les PHD possèdent toutes un domaine catalytique conservé en leur extrémité C-terminale. PHD2 est toutefois distincte grâce à son domaine N-terminal à doigt de zinc de type MYND (MYND (myeloid, Nervy, DEAF1)-type zinc finger domain) [269]. Ce domaine apparait comme inhibiteur de son activité catalytique et pourrait être impliqué dans la spécificité de substrat [274]. De plus, PHD1 et PHD2 peuvent modifier les deux résidus prolines de HIF-1α et HIF- 2α, tandis que PHD3 semble cibler seulement les prolines en C-terminal, soit la Pro564 de HIF-1α et la Pro531 de HIF-2α (Tableau 1.1) [249, 268]. Des analyses directes de ces sites démontrent également une modification globalement plus efficace des prolines C-terminales de HIF-1α et HIF- 2α par les PHD [275-278]. Des questions demeurent quant aux particularités dirigeant ces différences d’affinité, mais leur élucidation permettrait de mieux comprendre la dynamique d’hydroxylation des HIF-α.

Finalement, des études de localisation intracellulaire révèlent d’autres différences précises entre les PHD. Alors que PHD3 est retrouvée au cytoplasme et au noyau, PHD1 est principalement nucléaire et PHD2 est majoritairement cytoplasmique [279]. Ceci illustre encore la non-redondance de ces enzymes et sous-entend que l’hydroxylation des HIF-α n’est pas restreinte à un seul compartiment cellulaire.

1.6.1.2 L’asparagine-hydroxylase FIH

FIH, est une autre dioxygénase dépendante du Fe2+ et du 2-OG. Elle est aussi connue sous le

nom de HIF1AN (hypoxia-inducible factor-1α inhibitor). FIH fonctionne en dimère et fait partie de la famille des enzymes à domaine JmjC, une sous-famille des dioxygénases impliquées dans la déméthylation de lysines par hydroxylation (voir section 1.4.2.1). Elle est exprimée de manière

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ubiquitaire et est majoritairement cytoplasmique [279]. L’inactivation génique de FIH chez des souris est associée à des défauts métaboliques et ventilatoires, ce qui contraste avec les phénotypes associés à une délétion des PHD (Tableau 1.1) [280]. Ceci souligne les fonctions physiologiques distinctes entre ces dioxygénases dans la régulation des HIF.

L’hydroxylation des HIF-α par FIH est considérée comme un second niveau de régulation dépendant de l’O2. Lors de la déplétion de FIH en condition oxygénée, une augmentation de

l’expression de gènes cibles des HIF est observée, ce qui indique le potentiel d’activité des HIF même en présence d’O2 [281]. Ceci, en raison de la présence de protéines HIF-α échappant au mécanisme

de dégradation dépendant des PHD. Ainsi, une inhibition complète de l’activité des HIF en présence d’O2 requiert les actions complémentaires des PHD et de FIH.

La réaction d’hydroxylation catalysée par FIH est la même que celle décrite plus haut pour les PHD, mais FIH a une affinité relativement plus élevée pour l’O2, le Fe2+ et le 2-OG [282].

Conséquemment, l’hydroxylation d’asparagine serait plus persistante que l’hydroxylation des prolines lors d’une diminution des niveaux d’oxygène [276]. Ceci signifie que FIH n’inhibe pas seulement l’activité des HIF-α présentes en conditions oxygénées, ayant échappé à la dégradation protéosomale, mais qu’elle agit aussi en conditions réduites d’O2 [281, 283].

Comme mentionné précédemment (voir section 1.5.1.2), des réponses transcriptionnelles distinctes sont associées à chacun des domaines de transactivation (C-TAD et N-TAD) des HIF-α. Du fait que FIH cible exclusivement le C-TAD, il a été proposé que FIH serait associée à la régulation spécifique de certains gènes cibles des HIF [281, 284, 285]. Ainsi, en condition d’hypoxie faible ou modérée, l’activité des PHD est largement inhibée, mais l’activité persistante de FIH permettrait de maintenir la répression d’un sous-groupe de gènes cibles (Figure 1.12). En condition d’hypoxie sévère ou prolongée, l’inhibition additionnelle de FIH assurerait une réponse transcriptionnelle adaptative plus large.

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Figure 1.12: La sensibilité respective des PHD et de FIH face à une diminution de l’O2.

Une réduction modérée du niveau d’O2 inhibe l’hydroxylation dépendante des PHD, menant à la stabilisation

des HIF-α. L’hydroxylation dépendante de FIH est inhibée par une réduction plus prononcée du niveau d’O2,

menant à une activation complète des HIF. Voir le texte pour plus de détails. Illustration par V.N. Lafleur.

1.6.1.3 Une boucle d’autorégulation impliquant l’hydroxylation

Les sous-unités HIF-α sont parmi les protéines les plus instables, avec une demi-vie en conditions oxygénées de seulement quelques minutes [286, 287]. Cette labilité est davantage augmentée par un mécanisme d’autorégulation négatif impliquant l’hydroxylation sur prolines. Effectivement, les gènes PHD2 et PHD3 sont eux-mêmes des cibles des facteurs HIF [288]. L’augmentation graduelle de ces PHD en hypoxie peut donc mener à la dégradation des HIF-α en hypoxie modérée, limitant leur accumulation excessive. Ce mécanisme est d’autant plus impressionnant lors de réoxygénation, où le taux de dégradation des HIF-α est proportionnel à la sévérité ou la durée du stress hypoxique, en raison de l’accumulation accrue des PHD [289].

1.6.1.4 La régulation de l’hydroxylation de manière indépendante de l’oxygène

En plus des changements dans la disponibilité d’O2, plusieurs stimuli et facteurs peuvent

moduler l’hydroxylation des HIF-α. Ces modulateurs permettent de diriger une réponse précise lors de contextes cellulaires différents, principalement par une réduction de l’un ou l’autre des cofacteurs essentiels des dioxygénases PHD et FIH.

Une diminution de la disponibilité en 2-OG ou une accumulation de plusieurs intermédiaires métaboliques entrant en compétition avec celui-ci peuvent interférer avec l’activité des PHD et de FIH. En effet, les métabolites du cycle de Krebs, tels que le succinate, le fumarate, l’oxaloacétate et

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l’isocitrate, de même que des intermédiaires glycolytiques, tels que le lactate et le pyruvate, ont tous été démontrés comme pouvant inhiber l’activité hydroxylase [290]. Conséquemment, les PHD et FIH sont considérées comme des senseurs de métabolites et sont donc non seulement associées à l’homéostasie de l’O2, mais aussi à l’équilibre bioénergétique cellulaire. Des altérations dans ces

métabolites sont associées à une modulation de l’accumulation des HIF, comme il est observé chez les individus porteurs de mutations au sein de la fumarate hydratase ou de la succinate hydrogénase [291-293].

Le fer dans son état réduit (Fe2+) est lié au site actif des PHD et impliqué dans la réaction

d’hydroxylation. Des changements dans les niveaux de Fe2+ peuvent donc empêcher l’hydroxylation

des HIF-α. Ainsi, autant la présence de chélateurs de fer, comme le desferrioxamine (DFO), ou la présence de métaux se substituant au fer, tels que le cobalt (Co2+), le cuivre (Cu2+), le zinc (Zn2+) ou

le nickel (Ni2+), permet la stabilisation des HIF-α [294, 295]. De plus, bien que l’ascorbate (acide

ascorbique ; vitamine C) ne soit pas considéré comme cofacteur des PHD, elle est requise pour une hydroxylation efficace, principalement via la réduction du Fe3+ en Fe2+ [296, 297]. Une déplétion

d’ascorbate cellulaire interfère donc avec l’activité des hydroxylases, entrainant une stabilisation des HIF-α [298-300]. De manière inverse, les ROS ont la capacité d’inhiber l’activité hydroxylase par oxydation du Fe2+ [301]. Toutefois, le rôle précis des ROS reste controversé, puisque d’autres

mécanismes et conséquences opposées peuvent être impliqués, entre autres selon l’état d’oxygénation cellulaire [302, 303]. De manière similaire, le monoxyde d’azote (NO ; ou oxyde nitrique) peut mener à l’accumulation des HIF-α en conditions oxygénées par l’inhibition des PHD [304]. Par contre, en conditions d’hypoxie, le NO est plutôt associé à une activation locale des PHD menant à une répression de l’accumulation des HIF-α, soit par une redistribution de l’O2 intracellulaire, soit par

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Les différentes modifications post-traductionnelles des HIF-α

L’activité des facteurs de transcription HIF nécessite d’être contrôlée de manière très précise. Il n’est pas surprenant qu’en complément à l’hydroxylation, un grand nombre de modifications protéiques soient impliquées dans leur régulation. Les sous-unités HIF-α peuvent être directement modifiées par ubiquitination, acétylation, sumoylation, s-nitrosylation, méthylation et phosphorylation (Figure 1.13). Ces modifications influencent l’activité des HIF via leur liaison à l’ADN, leur stabilité protéique, leur translocation nucléaire ou leur interaction avec des cofacteurs. Plusieurs conséquences pathologiques, notamment sur la croissance et la vascularisation tumorale, ont été associées à une dérégulation de facteurs responsables de la modification post-traductionnelle de HIF-1α, mais ne seront pas abordés dans le contexte de cette thèse.

Figure 1.13: Les diverses modifications post-traductionnelles de HIF-1α et HIF-2α.

Ac : acétylation; Me : méthylation; P : phosphorylation; S : sumoylation; OH : hydroxylation; N : s- nitrosylation. Illustration par V.N. Lafleur.

1.6.2.1 L’ubiquitination des HIF-α

L’ubiquitination consiste en la conjugaison d’une molécule d’ubiquitine (de 76 acides aminés) à des résidus lysines spécifiques et s’effectue en trois étapes sophistiquées [307]. Celles-ci nécessitent une enzyme d’activation E1 (E1 ubiquitin activating enzyme), une enzyme de conjugaison E2 (E2 ubiquitin conjugating enzyme) et une enzyme de ligature E3 (E3 ubiquitin ligase). Une grande variété d’ubiquitine-ligases existent, permettant de cibler divers substrats protéiques de manière spécifique. La polyubiquitination de ces substrats les dirige généralement vers une dégradation protéosomale, tandis que la mono-ubiquitination s’est révélée en tant que marque de signalisation importante et abondante. Plusieurs évidences pointent vers un rôle de l’ubiquitination dans une dégradation des HIF-α indépendante de l’O2 et de pVHL. En effet, dans les dernières années, d’autres

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ubiquitine-ligases, présentées au Tableau 1.2, furent identifiées en tant que régulatrices de la stabilité des HIF-α indépendamment de leur hydroxylation [308]. Une de ces enzymes est le facteur HAF, impliqué dans le changement entre HIF-1α et HIF-2α (voir section 1.5.2.1), qui cible spécifiquement HIF-1α vers une dégradation protéosomale [309].

Tableau 1.2: Les caractéristiques des ubiquitine-ligases ciblant les HIF-α.

Ubiquitine

ligase recrutement Facteur de HIF-α ciblées Sous-unités Contexte de régulation des HIF-α associée DéUb Ref.

Complexe

VCB-CR pVHL HIF-1α HIF-2α Interaction  en hypoxie1 VDU2 [253, 310]

Élongine C RACK1 HIF-1α HIF-2α O2-indépendant - [311]

Complexe

SCF FBW7

HIF-1α (HIF-2α n.d.)

Interaction  en hypoxie aigüe,

 en hypoxie prolongée2 USP28

[312, 313]

CHIP HSP70 HIF-1α Expression de HSP70  en hypoxie - [314]

MDM2 p53 (HIF-2α n.d.) HIF-1α Modulation des niveaux de MDM2 et p53 en hypoxie3 - [315, 316]

HAF - HIF-1α Niveaux de HAF  en hypoxie aigüe,  en hypoxie prolongée - [309]

1. En fonction de l’hydroxylation des HIFα par les PHD; 2. En fonction de la phosphorylation de HIF-1α par GSK3β; 3. Conséquences variant selon le type cellulaire et le niveau de stress hypoxique. SCF :

SKP1/Culline1/F-box protein; CHIP : c-terminus of Hsc70 interacting protein; MDM2 : murine double minute

2; HAF : hypoxia-associated factor; RACK1 : receptor for activated C kinase 1; FBW7 : F-box et WD repeat

domain-containing 7; HSP70 : heat-shock protein 70; VDU2 ; VHL protein-interacting deubiquitinating enzyme 2; USP28 : ubiquitin-specific protease 28.

1.6.2.2 L’acétylation des HIF-α

L’acétylation affecte les fonctions de plusieurs facteurs de transcription par la neutralisation de la charge positive de résidus lysines [317, 318]. Un groupement acétyle est incorporé à une lysine à partir de la molécule d’acétylcoenzyme A (CoA) par des lysine acétyltransférases (KAT), originalement nommées histones acétyltransférases (HAT). À leur tour, les lysines déacétylases (KDAC) (ou histones déacétylases (HDAC)) permettent le retrait du groupe acétyle. Plusieurs paires d’acétyltransférase/déacétylase ciblant les HIF-1α ont été caractérisées et sont présentées au Tableau 1.4. Celles-ci ciblent HIF-1α sur différentes lysines, menant à des conséquences variées sur sa stabilité ou son activité (Figure 1.13 et Tableau 1.4). Plus récemment, l’acétylation de HIF-2α fut aussi observée et associée à une réduction de son activité. Un niveau de complexité est ajouté par le fait qu’une augmentation d’expression de plusieurs déacétylases, d’une manière dépendante de HIF-1 ou HIF-2, est observée en réponse au stress hypoxique (Tableau 1.4) [121, 122, 319-322].

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Tableau 1.3: Les acétyltransférase et déacétylases ciblant HIF-α et leur régulation en hypoxie.

Enzyme Résidus Impact sur HIF-α Régulation hypoxique Ref.

HIF-1α Ac

n.d. K532  Stabilité (par VHL) - [323, 324]

p300 K709  Stabilité  Interaction avec HIF-1α [325]

PCAF K674 ( liaison cofacteur)  Activité - [326]

HIF-1α DéAc

HDAC1 K532  Stabilité (par VHL)  Expression (par HIF-1α) et  Activité [319]

Sirt2 K709  Stabilité - [327]

Sirt1 K674 ( liaison cofacteur)  Activité aigüe,  hypoxie prolongée  Expression hypoxie [328]

HDAC4 K10-12/19/21  Stabilité - [329]

HIF-2α

Ac CBP K741  Activité - [330]

HIF-2α

DéAc Sirt1 K741  Activité

 Expression hypoxie

aigüe,  hypoxie prolongée [330] PCAF : p300/CBP-associated factor; Sirt1/2 : sirtuin1/ 2; Ac : acétyltransférase; DéAc : déacétytransférase.

1.6.2.3 La sumoylation des HIF-α

La sumoylation consiste en l’addition d’une molécule SUMO (small ubiquitin-related modifier) à des résidus lysines [331]. La conjugaison des isoformes SUMO (SUMO1-4) est analogue à la voie d’ubiquitination, impliquant une enzyme d’activation E1 (SAE1/SAE2), une enzyme de conjugaison E2 (Ubc9) et une E3 ligase spécifique [332, 333]. Bien que les E3 ligases ne sont pas essentielles à la sumoylation, elles rehaussent la conjugaison, la préférence d’isoformes SUMO et la spécificité de substrat [334]. La sumoylation est renversée par des protéases SUMO-spécifiques (les Ubl-specific proteases et les SENP) qui possèdent une activité isopeptidase [335].

La sumoylation peut être modulée par différents stress cellulaires, incluant des dommages à l’ADN, un stress thermique aigüe, un stress osmotique ou un stress oxydatif [336-340]. Il n’est donc pas surprenant de constater que la sumoylation augmente de manière globale en réponse au stress hypoxique [341-345]. Plusieurs facteurs impliqués dans la réaction de sumoylation sont aussi directement modulés par l’hypoxie (Tableau 1.5) [342, 346-351].

La conjugaison directe de HIF-1α et HIF-2α à des molécules de SUMO fut largement démontrée [352, 353]). Jusqu’à présent, elle fut confirmée sur des lysines localisées au sein du domaine ODD de HIF-1α et HIF-2α (Figure 1.13) [345, 354, 355]. La sumoylation des HIF-α peut être régulée par diverses SUMO E3 ligases, présentées au Tableau 1.5, ayant des impacts divergents sur l’activité des HIF et la signalisation hypoxique.

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Tableau 1.4 : Les SUMO ligases et protéases ciblant HIF-α et leur régulation en hypoxie.

Enzyme Résidus Impact sur HIF-α Modulation en hypoxie Ref.

HIF-1α Ligase

RSUME ODDD  Stabilité  Expression (par HIF-1α) [342, 347]

Cbx4 K391/477  Liaison à l’ADN - [356]

PIASy -  Stabilité (par VHL)  Interaction avec HIF-1α  Niveau protéique [343]

HIF-1α

Prot. SENP1 -  Stabilité (par VHL)  Expression (par HIF-1α) [356, 357]

HIF-2α

Ligase PIASxα K394  Stabilité (par VHL) - [343] HIF-2α

Prot. SENP1 K394  Stabilité (par VHL)  Expression (par HIF-1α) [345]

Prot. : protéase.

1.6.2.4 La S-nitrosylation des HIF-α

Le monoxyde d’azote (NO ; ou oxyde nitrique) joue un rôle dans la stabilité des HIF-α par

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