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LES FONDEMENTS DE L’APPROCHE ABOLITIONNISTE

Les normes internationales sur le travail de l’enfant s’orientent, pour la plupart d’entre elles, vers l’élimination du travail de l’enfant83. Les organismes internationaux, à l’instar de l’Organisation internationale du travail (OIT), ont tendance à considérer le travail comme une activité nuisible au développement de l’enfant, une activité qu’il faut combattre – en dépit de l’acceptation de certaines activités légères effectuées par les enfants. Cette assertion va à l’encontre de la vision nouvelle véhiculée par la Convention relative aux droits de l’enfant84qui considère l’enfant comme un détenteur de droits au même titre que les adultes85, une approche différente que celle véhiculée par l’approche abolitionniste qui se traduit dans les instruments internationaux adoptés par l’OIT86. Des auteurs partagent également cette vision. Par exemple, pour Tanaquil Burke, le travail de l’enfant est « toute activité économique effectuée par une personne mineure qui compromet ou est susceptible de compromettre son éducation ou qui nuit à sa santé ou à son développement physique, mental, spirituel, moral ou social »87. Cette définition omet de prendre en compte l’existence de certains types de travail qui permettent une socialisation de l’enfant. Pourtant, il existe de travaux qui contribuent au développement de l’enfant, à son apprentissage de l’autonomie et aussi à rehausser son niveau de vie88. Ces autres formes de travail sont porteuses, soit d’éléments de formation (notamment les diverses formes d’apprentissage en ateliers comme la menuiserie par exemple), soit d’un apport en moyens matériels pour la jouissance d’autres droits (il s’agit en l’occurrence les activités génératrices de

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Sur l’aspect abolitionniste du droit international du travail, voir en particulier Creighton, Breen, «Combating child labour: the role of international labour standards », (1997) 18 Comp. Lab. L.J.362, pp. 370-371.

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La Convention relative aux droits de l’enfant est l’une des conventions les plus ratifiées au monde (tous les États des Nations unies en sont parties sauf les États-Unis et la Somalie) et celle qui est entrée le plus rapidement en vigueur (moins d’un an). L’auteur Godrey Odongo souligne le consensus universel ayant entouré l’adoption de la

Convention relative aux droits de l’enfant. Odongo, Godfrey, « Domesticating international children’s rights:

Kenya as a case study », pp. 61-92, dans Lagoutte, Stéphanie et Svaneberg, Nina (dir.), Les droits de la femme et

l’enfant. Reflexions africaines, Women and children’s rights. Africans views, Paris, Karthala, 2011, p. 61.

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L’auteure Katie Sykes affirme que: « The UNCRC reflects the fact that children, who as a basic matter are entitled to the same human rights as all human beings, also have particular needs and circumstances that necessitate a different approach to the protection of their rights ». Sykes, Katie, « Bambi Meets Godzilla: Children's and Parents' rights in Canadian for Children, Youth and the law v. Canada », (2006) 51 R.D.McGILL 131, p. 136.

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La Convention no.138 de l’OIT concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi de 1973 est venue confirmer et consolider cette vision abolitionniste de l’OIT. Son article 1 vise clairement l’objectif d’abolir le travail de l’enfant de façon effective: « Tout Membre pour lequel la présente convention est en vigueur s'engage à poursuivre une politique nationale visant à assurer l'abolition effective du travail des enfants […] », préc., note 40.

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Burke, Tanaquil, « La législation québécoise en matière de travail des enfants : une protection nécessaire et à parfaire », (2005) 65 R. du B., p. 5.

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revenus comme les travaux dans les champs ou dans les petites industries pour pouvoir jouir du droit à l’éducation par exemple). La Convention relative aux droits de l’enfant s’inscrit dans cette optique89. Le travail, s’il est encadré adéquatement, pourrait constituer un outil efficace

pour favoriser le développement de l’enfant. Le travail peut aussi augmenter l’autonomie de l’enfant: « [c]ertain types of work can be actually beneficial in that the help train children for adult life by providing relevant work experience and teaching children accountability and responsibility. By taking up work, children learn their importance in the family and feel that they are true contributors »90.

En outre, la vision prohibitionniste du travail de l’enfant se traduit à travers certains aménagements tels que ceux liés à l’âge pour l’accession à l’emploi. Ces différents aménagements se manifestent notamment par l’établissement des âges minimums d’accès à l’emploi et de scolarité obligatoire, ainsi que ceux liés à la durée, au moment et à la nature des travaux devant être exécutés par les enfants travailleurs. Le but principal visé par ces aménagements demeure le même: la prohibition du travail de l’enfant pour assurer sa protection. Or, le régime spécifique mis en place pour éradiquer le travail de l’enfant (Chapitre 2)91se heurte à une première difficulté, soit la définition même de ce que constitue le travail de l’enfant (Chapitre 1). Au final, ces tentatives d’éradication du travail de l’enfant mènent vers des résultats peu probants (Chapitre 3).

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L’article 32 de la Convention relative aux droits de l’enfant ne prohibe pas le travail de l’enfant, seuls les travaux dangereux sont visés par l’interdiction. À ce propos, voir en particulier Ducheine, Suzie, La protection de l’enfant

contre l’exploitation économique en droit international, Mémoire, UQAM, 2002, p. 66.

90

Celek, Bozena Maria, « The international response to child labor in the developing world: why are we ineffective? », prec., note 16, p. 94.

91

Pertile, Marco, « Introduction: the fights against child labour in a globalized world », 1-14, dans Nesi, Giuseppe, Nogler, Luca et Pertile, Marco (dir.), Child labour in a globalized world. A legal analysis of ILO action, Aldershot, Asgate, 2008, p. 4.