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PARTIE 2 CADRE THEORIQUE

II. T RAVAILLER L ’ ECRIT AVEC UN RESEAU SOCIAL EN CLASSE DE FLE

1. Les dimensions de l’écrit : compréhension, production, interaction

Dans l’enseignement-apprentissage des langues, l’écrit et l’oral sont souvent envisagés de façon distincte, chacun ayant ses spécificités. Dans un document fondateur daté de 2000 et baptisé Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL), le Conseil de l’Europe estime que « [l]a compétence à communiquer langagièrement du sujet apprenant et

19 Lloyd, E. (2012). Language Learners’ « Willingness to Communicate » through Livemocha.com. Alsic, 15(1). doi: 10.4000/alsic.2437.

communiquant est mise en œuvre dans la réalisation d’activités langagières variées pouvant relever de la réception, de la production, de l’interaction, de la médiation (notamment les activités de traduction et d’interprétation), chacun de ces modes d’activités étant susceptible de s’accomplir soit à l’oral, soit à l’écrit, soit à l’oral et à l’écrit » (Conseil de l’Europe, p. 18). Laissant de côté la médiation, peu pertinente dans le cadre de ce travail, nous nous focaliserons ici sur (1) la réception, (2) la production et (3) l’interaction écrites.

1.1. La réception écrite

Les activités de réception écrite correspondent à la lecture et à la compréhension de documents textuels. Selon les termes du CECRL, « [d]ans les activités de réception visuelle (lecture, ou compréhension de l’écrit), l’utilisateur, en tant que lecteur, reçoit et traite des textes écrits produits par un ou plusieurs scripteurs ». Le Cadre recense ensuite plusieurs activités de lecture possibles, parmi lesquelles « lire pour s’orienter », « lire pour information, par exemple en utilisant des ouvrages de référence », « lire et suivre des instructions », « lire pour le plaisir », etc. La lecture et la compréhension peuvent porter sur différents aspects : l’information globale, une information particulière, une information détaillée, l’implicite du discours, etc. (Conseil de l’Europe, 2000, p. 57). Une échelle de niveau est proposée pour la compréhension générale de l’écrit, avec des sous-échelles pour chaque type d’activité (cf. Annexe 13).

1.2. La production écrite

Les activités de production écrite placent l’utilisateur de la langue en position de scripteur, le texte ainsi produit étant destiné à être lu par une ou plusieurs personnes. Le CECRL dresse une liste des activités de production écrite possibles : « remplir des formulaires et des questionnaires », « écrire des articles pour des magazines, des journaux, des bulletins, etc. », « produire des affiches », « rédiger des rapports, des notes de service, etc. », « prendre des notes pour s’y reporter », « prendre des messages sous la dictée, etc. », « écrire des textes libres », « écrire des lettres personnelles ou d’affaires, etc. » (Conseil de l’Europe, 2000, p.51). Là encore, une échelle de niveau de la production écrite générale est proposée (cf. Annexe 13).

1.3. L’interaction écrite

Selon les auteurs du CECRL, « [d]ans l’interaction, au moins deux acteurs participent à un échange oral et/ou écrit et alternent les moments de production et de réception qui peuvent même se chevaucher dans les échanges oraux […]. Ainsi, apprendre à interagir suppose plus que d’apprendre à recevoir et à produire des énoncés. On accorde généralement une grande importance à l’interaction dans l’usage et l’apprentissage de la langue étant donné le rôle central qu’elle joue dans la communication » (p. 18). Si ce passage fait bien mention d’une

interaction à l’oral et à l’écrit, Nissen écrit pourtant dans un article de 2007 que la communication écrite « est généralement oubliée dans les référentiels des compétences et notamment dans le cadre européen commun de référence pour les langues, mais bien présente dans la réalité professionnelle par exemple » (Nissen, 2007, par. 20). La critique peut sembler dure, mais bien que le Cadre propose une échelle de niveau pour l’interaction écrite générale comme pour la réception et la production écrites (cf. Annexe 13), dans le détail il n’accorde effectivement qu’une importance très limitée à la communication écrite par rapport à la communication orale, ne lui consacrant qu’une seule page. Quatre activités pouvant donner lieu à une interaction écrite sont mentionnées : « transmettre et échanger des notes, des mémos, etc., dans les cas où l’interaction orale est impossible et inappropriée », « correspondre par lettres, télécopies, courrier électronique, etc. », « négocier le texte d’accords, de contrats, de communiqués etc. en reformulant et en échangeant des brouillons, des amendements, des corrections, etc. », et « participer à des forums en ligne et hors-ligne » (Conseil de l’Europe, 2000, p. 68). Dans cette liste, l’interaction écrite par messagerie instantanée n’est pas évoquée (alors même que des logiciels de communication de ce type comme ICQ ou MSN existaient déjà à l’époque de la rédaction du document). Etant donné les évolutions technologiques récentes, la vision du CECRL concernant l’interaction écrite parait donc aujourd’hui assez datée, et même si les auteurs ont tenté d’envisager l’avenir20, le cadre de travail qu’ils proposent ne permet pas de tenir pleinement compte des évolutions technologiques récentes et de l’absolue nécessité pour chacun, de nos jours, de savoir interagir à l’écrit (notamment sur le Web) pour s’insérer socialement et professionnellement.

En tant que réseau social intégrant toutes les dimensions et les caractéristiques socio- technologiques de son époque, un site comme le Rézo Lumière présente l’avantage de permettre un travail moderne sur la réception et la production écrites, mais aussi et surtout, justement, sur les compétences interactionnelles à l’écrit. L’outil fait sens par rapport au monde hyper-connecté d’aujourd’hui et se prête particulièrement bien à un entrainement à l’écrit en général et plus spécifiquement à l’écrit en ligne, ce dernier différant quelque peu de l’écrit traditionnel.

20 Conscients que l’évolution des technologies risquait de conduire au développement des outils interactifs écrits, les auteurs du Cadre ont pris la précaution d’écrire que « [c]ompte tenu de la sophistication croissante des logiciels informatiques, la communication interactive entre l’homme et la machine est appelée à jouer un rôle de plus en plus important dans les domaines public, professionnel et éducationnel, voire dans le domaine personnel» (p. 68) ; on note toutefois que seule la communication homme-machine est ici évoquée, et pas la communication entre hommes via la machine, or cette dernière a pris énormément d’ampleur ces dernières années.