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3. Le toucher

3.4. Les différents types de toucher

Les pratiques corporelles du psychomotricien impliquant le toucher sont diverses (contacts de la peau, portages, toucher-relaxation, enveloppements, shiatsu…) et confèrent au toucher différentes qualités. Ainsi, en psychomotricité, il existe différentes approches du toucher que l’on peut utiliser avec les personnes âgées. J’ai choisi de nommer toucher thérapeutique, l’ensemble de ces approches utilisant le toucher comme médiation. Je développe ainsi, dans cette partie, trois approches du toucher thérapeutique qui m’ont accompagnée tout au long de ma pratique auprès des personnes âgées.

3.4.1. Le toucher-massage psychomoteur

Dans ma pratique clinique, j’utilise le terme toucher-massage psychomoteur afin de le différencier de mes autres approches. Il se réalise dans un cadre spatial et temporel défini et se place « dans un contexte spécifique qui comprend un patient particulier […] et une relation propre aux deux personnes qui la partagent […] »73. De plus, lors du toucher- massage, « ce n’est pas « un corps » que nous touchons, mais bien le soi de cette personne,

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qui entre en contact avec notre propre soi. De la sorte, le toucher cesse d’être un simple événement mécanique et devient un processus d’interaction et de communication. »74.

Le toucher-massage psychomoteur prend en compte la globalité du corps de la personne âgée et permet la conscience corporelle et l’intégration des sensations. Il favorise l’unité psychocorporelle du sujet âgé en proposant un contact contenant, enveloppant et structurant. La verbalisation des différentes parties du corps touchées permet une reconnaissance des différents segments corporels et contribue à la reconstruction du schéma corporel. Le toucher-massage permet aussi un relâchement neuromusculaire et l’émergence de sensations nouvelles et agréables.

En gériatrie, j’utilise une huile afin de faciliter les différents mouvements du toucher-massage. Le toucher s’adaptera en fonction de la position de la personne, assis ou en décubitus dorsal, et de ses possibilités ou non de mouvements. Le contact est lent et minutieux et peut s’attarder au niveau des extrémités et des articulations. Il peut s’agir aussi de pressions légères, glissées, accompagnées ou non de quelques mobilisations passives en veillant à protéger les articulations. L’utilisation de cette technique chez la personne âgée demande de prendre en compte ses douleurs, ses réticences et ses ressentis.

3.4.2. Le toucher-relaxation

Il existe de nombreuses techniques de relaxation mais quelle que soit la technique utilisée auprès d’un patient, « il faudra […] décider de changer ou d’adapter la méthode au cours de route parce que la connaissance du patient dans sa singularité s’est approfondie »75 ou bien parce que la méthode, à un moment précis, ne convient plus. Ainsi, les séances de toucher-relaxation ne suivent pas un protocole précis mais elles sont centrées sur la personne et orientées en fonction du projet de soin.

Dans le cadre de ma pratique, j’utilise la méthode de relaxation activo-passive de H. WINTREBERT, notamment les mouvements passifs des membres, en l’adaptant aux possibilités de la personne et à l’objectif thérapeutique. Une séance de toucher-relaxation auprès du sujet âgé peut débuter par une aide à l’installation puis par l’inventaire des points d’appuis du corps et continuer par des contacts en pressions dessinant les limites corporelles. Différentes mobilisations passives effectuées par le psychomotricien, « mobilisations lentes, régulières et monotones »76, peuvent être réalisées au niveau des membres supérieurs et inférieurs. Elles mettent en jeu le mouvement lent et global du corps qui peut éventuellement être synchronisé avec la respiration. Lors des mobilisations passives, le soignant doit être 74 J.KEPNER, 1998, p.92 75 M. GUIOSE, 2007, p.9 76 Ibid. p. 25

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attentif aux variations toniques de la personne âgée ainsi qu’à son propre ajustement tonique afin d’entretenir la dynamique du dialogue tonique. Ainsi, le thérapeute doit avoir une attitude bienveillante afin d’être à l’écoute du patient. Un temps de verbalisation, si celui-ci est possible, clôture la séance.

En outre j’utilise également les massages-relaxant du visage et de la nuque. En effet, les personnes âgées ont souvent des tensions corporelles au niveau de la nuque. En essayant de les diminuer, le massage-relaxant permet progressivement une détente neuromusculaire se propageant le long de l’axe corporel. Suite à un massage-relaxant du visage, les traits de celui- ci se détendent et les manifestations corporelles de la détente apparaissent. Ainsi, « le massage relaxant peut être apaisant. »77, mais également « contenant, enveloppant »78.

Dans le cas de la fin de vie, des massages-relaxant du visage et des mains peuvent être réalisés. Cependant, dans certains moments de douleurs importantes ou d’impossibilité de contact en profondeur, un toucher thérapeutique par simple contact au niveau des mains, associé au regard et parfois à la voix du psychomotricien, est souhaitable.

« Le massage en relaxation enveloppe tout le champ affectif [de la personne]. Le toucher-touchant du massage se place à la marge de l’écriture sensorielle sur la peau. Soutenu par le toucher de la voix, du regard, de la parole, du silence, il favorise dans le même temps le regard intériorisé de ces mêmes images : sons, mots, peau, silence… »79.

Comme tout début de toucher thérapeutique, il s’avère important de prévenir le patient du contact, par la main ou par l’intermédiaire de médiateurs, ainsi que de nommer les différentes parties du corps touchées. De plus, il est nécessaire d’établir un cadre clair et précis avant la séance, le toucher doit être bien explicité lors des mobilisations. Le toucher- relaxation amène progressivement le patient à une prise de conscience de ses tensions corporelles et psychiques grâce à un toucher contenant et enveloppant. Il permet à la personne âgée de ressentir une décontraction neuromusculaire possible grâce aux mouvements passifs ou aux massages-relaxant, et de prendre conscience de son corps, de ses limites.

3.4.3. Le toucher et enveloppement sec

J’ai pu assister et participer à deux séances d’enveloppement sec auprès d’une personne âgée. L’enveloppement sec se différencie de l’enveloppement humide, appelé « packing », où le corps du sujet est serré d’une enveloppe humide et froide. Dans le cas d’une séance d’enveloppement sec, le sujet âgé est allongé et son corps est enveloppé dans des draps secs laissant la tête en dehors. A la suite de l’enveloppement, les deux thérapeutes 77 M. GUIOSE, 2007, p. 39 78 J.SARDA, 2002, p.92 79 Ibid. p.91

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effectuent ensemble, de manière symétrique et coordonnée, un toucher thérapeutique. Il peut s’agir dans un premier temps de frictions corporelles puis de percussions osseuses le long des membres, du thorax et du crâne, et enfin de pressions glissées. Les différentes parties du corps sont nommées. Ces différents touchers permettent de ressentir la solidité de la structure, la surface enveloppante de la peau ainsi que les limites corporelles. Par l'intermédiaire des sensations apportées au sujet sur l'ensemble du corps, le psychomotricien vise à soutenir l’enveloppe psychocorporelle du sujet âgé. D. ANZIEU écrit : « le pack offre des « enveloppes de secours » structurantes, qui prennent la place, pour un temps, [des] enveloppes pathologiques (…) »80. De plus, le toucher, qui est soutenu par la parole et le regard des thérapeutes, va envelopper le sujet à la fois physiquement et psychiquement et poser les limites, celles entre le dedans et le dehors, entre moi et l'Autre.

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PARTIE CLINIQUE