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Caractérisation des géostructures thermiques

I.1. La place des géostructures thermiques dans la ville d’aujourd’hui et de demain

I.1.2. Les différents types de géostructures thermiques

Les géostructures thermiques étant des ouvrages géotechniques équipés de tubes échangeurs de chaleur, à chaque type d’ouvrage géotechnique correspond une forme de géostructure thermique dont les comportements thermiques, hydrauliques et mécaniques vont varier, notamment, à cause de leur géométrie. Cependant, afin de profiter d’une surface d’échange suffisamment importante et de conditions en température stables, les ouvrages géotechniques

équipés ont généralement une profondeur comprise entre 10 m et 60 m. Cela exclut donc, entre autres, les fondations superficielles et les remblais. Les structures métalliques et les ouvrages en milieu marin ne sont également pas considérés.

Les pieux

Les pieux en béton armé sont des ouvrages de fondation profonde circulaire dont le diamètre est compris entre quelques dizaines de centimètres et un ou deux mètres pour les plus larges. Leur profondeur est généralement comprise entre 10 et 60 m. Leur géométrie similaire aux sondes géothermiques (ouvrage circulaire plein et profond équipé de tubes échangeurs en U), a permis un développement technique et économique rapide (Figure I - 4). Ainsi, les pieux énergétiques sont les premiers types de géostructures thermiques qui ont été étudiés et utilisés.

Figure I - 4 : Nombre de pieux énergétiques installés en Autriche par année de 1984 à 2004 (Brandl, 2006) Entre 1984 et 2013, environ 100 000 pieux énergétiques pour des ouvrages individuels ou collectifs ont été installés en Autriche (Brandl, 2013). De même, environ 350 pieux énergétiques de 30 m de profondeur et de diamètre 1,5 m ont été mis en place au dock Midfield à l’aéroport de Zurich dans les années 2000 (Pahud et al, 1999). Ces réalisations montrent le fort engouement pour cette technologie.

Le nombre de tubes en U installés dans les pieux dépend du diamètre Ø de celui-ci. En France, les recommandations sont les suivantes (CFMS et SYNTEC, 2017) :

• Ø < 40 cm = 1 boucle ;

• 40 cm ≤ Ø ≤ 60 cm = 2 boucles ; • 60 cm < Ø ≤ 80 cm = 3 boucles ; • 80 cm < Ø ≤ 100 cm = 4 boucles.

Dans le cas de diamètres supérieurs, une boucle supplémentaire par augmentation de diamètre de 20 cm peut être installée. Les tubes sont généralement liés à l’intrados des cages d’armatures afin de les protéger mécaniquement lors de la mise en place de la cage d’armature mais également afin d’assurer une épaisseur d’enrobage constante le long du fût. Les tubes sont ainsi

situés en périphérie du pieu. La Figure I - 5 présente deux exemples de pieux équipés de tubes échangeurs de chaleur de diamètre différent.

Figure I - 5 : Illustrations de pieux énergétiques : a) en triple-U, b) en double-U (géothermie-professionnelle) Le nombre de tubes en PEHD est limité pour des raisons mécaniques (cf. I.1.3.1) et thermiques (cf. I.1.3.2). Il convient également de noter que le diamètre et la longueur des pieux sont avant tout dimensionnés d’un point de vue mécanique. En effet, augmenter la longueur ou le diamètre d’un pieu afin d’améliorer ses performances thermiques revient à surdimensionner mécaniquement la fondation, augmentant ainsi son prix et, par conséquent, son Temps de Retour sur Investissement (TRI). De plus, l’augmentation des dimensions du pieu a un impact limité sur ses performances énergétiques (cf. I.1.3.3).

L’avantage des pieux énergétiques repose sur leur géométrie permettant, à l’aide d’un certain nombre d’hypothèses, de développer des méthodes analytiques ou semi-analytiques de transfert thermique. De plus, les pieux ont un impact limité sur l’écoulement (cf.I.1.3.3). Cependant, leur inconvénient majeur est leur surface d’échange limitée.

Les murs de soutènement

Le deuxième type de géostructures thermiques aujourd’hui utilisées sont les ouvrages de soutènement thermoactifs et, notamment, les parois moulées thermoactives. Les parois moulées sont des ouvrages de soutènement en béton armé formés d’une multitude de panneaux de même dimension liés entre eux par des joints assurant l’imperméabilité du système (Figure I - 6). En effet, ces ouvrages sont notamment conçus pour permettre de réaliser et de maintenir des fouilles profondes à l’abri des arrivées d’eau contenue dans le terrain. Ces éléments peuvent également être dimensionnés afin de servir de fondations pour l’ouvrage. Leur épaisseur est typiquement comprise entre 80 et 120 cm pour des profondeurs allant de 15 à 70 m pour les fouilles les plus profondes. Ainsi, ces ouvrages sont utilisés pour réaliser des gares, des parkings souterrains, etc.

Figure I - 6 : Schéma de réalisation d’une paroi moulée

(http://www.rer-eole.fr/actualite/travaux-puits-pasquier-travaux-murs-puits/, consulté 31/07/2018) La dimension des ouvrages en parois moulées (e.g. 120 m x 30 m x 50 m pour une gare de métro) implique des surfaces de contact importantes entre le terrain et le soutènement. Par conséquent, d’un point de vue énergétique, ces ouvrages ont un potentiel important. Ainsi, plusieurs ouvrages majeurs ont été équipés en parois moulées thermoactives (Brandl, 2006 ; Adam et Markiewicz, 2009 ; Xia et al, 2012) :

• Uniqa Tower à Vienne (7 800 m² de parois moulées thermoactives) ; • EA General Centre à Vienne (4 200 m² de parois moulées thermoactives) • Columbus Centre à Vienne (12 400 m² de parois moulées thermoactives)

• Station U2/2-Taborstraße du métro de Vienne (1 865 m² de parois moulées thermoactives) ;

• Muséum d’histoire naturelle de Shanghai.

Ces quelques exemples mettent en exergue le fait que les ouvrages équipés sont principalement des ouvrages de très grande dimension. Toutefois, peu de parois moulées thermoactives sont construites, limitant d’autant les possibilités de retour d’expérience et de rétro analyse. Par exemple, en France, aucun ouvrage en parois moulées thermoactives n’est actuellement en service. De plus, la géométrie et la dimension de ces ouvrages imposent d’avoir recours à des méthodes d’analyse plus complexes comme des modélisations numériques en 2D/3D afin de prendre en compte tous les phénomènes associés.

Comme pour les pieux énergétiques, les tubes échangeurs sont directement liés aux cages d’armature des parois moulées. Cependant, il ne s’agit pas d’une géométrie en U mais plutôt d’une géométrie en W avec une entrée et une sortie par cage d’armature de panneau. En effet, chaque panneau est composé de plusieurs cages d’armature indépendantes (Figure I - 7).

Figure I - 7 : Schéma de paroi moulée thermoactive

Ainsi, le nombre de boucles est uniquement fonction de l’espacement entre les tubes échangeurs. Ce dernier est généralement compris entre 30 cm et 50 cm afin de conserver un rapport entre la puissance thermique installée et son coût d’installation convenable (Figure I - 8). De plus, une répartition homogène des tubes est nécessaire afin d’optimiser thermiquement l’ouvrage (Adam et Markiewicz, 2009).

Figure I - 8 : Temps de retour sur investissement en fonction de l’espacement entre les tubes échangeurs dans le cas d’une paroi moulée thermoactive (Adam et Markiewicz, 2009)

Traditionnellement, uniquement l’extrados de la paroi moulée est équipé de tubes échangeurs. Cependant, notamment dans les fiches de la paroi moulée, l’intrados peut également être équipé. De plus, d’autres types d’ouvrages de soutènement comme les parois en pieux sécants sont susceptibles d’être équipées mais leur utilisation est plus occasionnelle (Brandl, 2006).

De la même façon que pour les pieux énergétiques, le dimensionnement de parois moulées thermoactives est avant tout mécanique (cf. I.1.3). L’objectif est bien de valoriser énergétiquement la construction d’un ouvrage sans en modifier ses dimensions.

Les éléments cités précédemment permettent de mettre en avant l’intérêt principal de l’utilisation de ce type d’ouvrage qui est leur grande surface d’échange. Cependant, l’asymétrie des conditions aux limites à l’intrados et à l’extrados, de même que leur interaction avec les écoulements impliquent qu’il n’est pas aisé de formuler les transferts thermiques à l’échelle de l’ouvrage. Par exemple, dans le cas d’une station de métro, la paroi moulée thermoactive ne se comporte pas de la même façon au-dessus du radier où l’intrados est une surface en contact avec l’air intérieur et en-dessous du radier dont l’intrados est en contact avec le terrain.

Les tunnels

Les tunnels sont les derniers ouvrages géotechniques à avoir été convertis en géostructures thermiques. En effet, leur importante surface de contact avec le terrain laisse envisager un potentiel énergétique important (Barla et al, 2016). Cependant, leur géométrie et leur mode de construction complexe rend l’installation d’échangeurs thermiques non triviale. Il existe ainsi deux grandes familles de tunnels :

• tunnel en méthode traditionnelle ; • tunnel au tunnelier.

La première méthode d’excavation consiste, dans un premier temps, à creuser un tunnel à l’aide de diverses méthodes (e.g. machine à attaque ponctuelle, explosif, etc.) puis, dans un deuxième temps, de poser un revêtement provisoire avant, dans un dernier temps, de mettre en place le revêtement définitif. Cette méthode est appliquée habituellement pour les tunnels en milieu rocheux. Dans ce cas, les échangeurs thermiques sont installés dans une couche de revêtement située entre le terrain et le revêtement définitif (Figure I - 9). Les deux avantages principaux reposent sur la maximisation de la surface d’échange avec le terrain et les interactions mécaniques faibles sur le revêtement mécanique.

Figure I - 9 : Exemple de revêtement géothermique pour des tunnels en traditionnel (Adam et Markiewicz, 2009) Cependant, le risque géotechnique principal associé à cette méthode repose sur l’instabilité du front de taille et, par conséquent, sur la vitesse d’exécution du revêtement. Cette méthode a notamment été utilisée pour le métro de Vienne (Adam et Markiewicz, 2009).

La deuxième méthode d’excavation consiste à creuser un tunnel à l’aide d’une machine appelée tunnelier. Dans ce cas-ci, les voussoirs qui composent le revêtement du tunnel sont posés à l’avancement et le front de taille est gardé sous pression par le tunnelier. Dans ce cas, les

échangeurs thermiques sont directement intégrés aux voussoirs dans les usines de préfabrication (Figure I - 10). Ils sont ensuite connectés un à un après la pose.

Figure I - 10 : Exemple de voussoir thermoactif préfabriqué (Frodl et al, 2010)

Comme pour les parois moulées thermoactives, les échangeurs thermiques peuvent être installés à l’extrados mais également à l’intrados. Cette dernière position permet notamment de refroidir le tunnel soumis à de fortes variations de température liées au passage des trains. Cette méthode est notamment utilisée pour le prolongement de la ligne 2 du métro de Turin (Barla et Di Donna, 2018).

Les avantages principaux de cette méthode sont la pose en usine des tubes échangeurs et la possibilité d’installer plusieurs nappes de tubes échangeurs. Cependant, le risque associé est de surcharger le voussoir en élément non mécanique.

Concernant les tunnels en général, la surface d’échange théorique est importante mais la distance entre la ressource et le besoin implique de bien considérer le système dans sa globalité. En effet, les variations de température étant faibles, l’éloignement de l’échangeur et de la pompe à chaleur peut impliquer des pertes non négligeables sur le trajet du fluide caloporteur.