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Les caractéristiques d'une activité ludique d'après Brougère, (2005)

Partie 3 Expérimentation, conception des outils, interprétation des résultats et bilan

3. L E NIVEAU DE LANGUE , UN OUTIL DE SÉLECTION SOCIALE

1.1. Les caractéristiques d'une activité ludique d'après Brougère, (2005)

Il qualifie une situation de ludique lorsqu'elle remplit les caractéristiques suivantes.

• Elle s'inscrit dans le second degré

Le jeu « c'est pour de faux » comme disent les enfants. Prenons l'exemple de la dînette,

41 Article en ligne: Brougere, G. (1997). Jeu et objectifs pédagogiques : une approche comparative de

l'éducation préscolaire. Revue française de pédagogie. Volume 119 Numéro 1

quand les enfants jouent à imiter les adultes en « préparant le repas » ou en jouant à « papa et maman ». Dans ces moments, il est admis par les partenaires de jeu, que l'on ne fait pas réellement l'action, que l'on imite, que l'on reproduit ce que l'on a observé dans la réalité. Pour expliquer ce phénomène, Bateson (1977) (cité par Brougère, 2005) avance qu'il existe une méta-communication, qui se superpose à la communication de base dont l'enjeu est de définir la nature de la communication menée entre les êtres. De la même manière que l'on défini par métalinguistique, l'étude du code utilisé pour communiquer, la méta- communication concerne la relation existant entre les locuteurs et qui conditionne la communication de ces derniers. La méta-communication dans le cadre d'un jeu entre des individus, a donc pour fonction d'indiquer très clairement qu'il s'agit d'un jeu et non de la réalité. Alors, d'après l'auteur le jeu est à considérer comme étant « un phénomène [qui] n'est possible que si les organismes qui s'y livrent sont capables d'un certain degré de méta- communication, c'est à dire si ils sont capables d'échanger des signaux véhiculant le message: « ceci est un jeu ».

• Jouer, c'est prendre des décisions

Jouer rime généralement avec loisir et liberté. Nous jouons pour nous distraire en opposition aux moments de contrainte qu'engendre la vie professionnelle et quotidienne. Il est donc communément admis que nous nous engageons librement dans le jeu, « l'homme

doit avoir au moins l'impression d'être libre de jouer ou de ne pas jouer » Duflos42( 1997,

p.70, cité par Brougère, 2005, p. 50). À l'inverse d'une activité imposée, le jeu suppose l'adhésion préalable de tous les joueurs. La prise de décision dans le jeu se manifeste également au travers de la flexibilité de son cadre (Brougère, 2005). Jouer implique de prendre une série de décisions qui dessinent au fur et à mesure l'issue de l'activité. Ainsi, nous sommes libres d'entrer et sortir du jeu quand bon nous semble et cet élément est primordial pour ne pas basculer du ludique à la contrainte.

• Jouer, c'est adhérer à un système de règles

Pour que le « jouer ensemble » soit possible, il faut que ces décisions soient structurées par des règles. Ainsi, la liberté du joueur est « une liberté produite par les règles du jeu » (Duflos, 1997, p.61). Les notions de règles et de décisions sont indissociables, « elles sont les faces d'une même réalité » (Brougère, 2005, p.54). « Ce qui caractérise la règle du jeu, c'est qu'elle ne s'impose que pour autant que les joueurs l'acceptent de façon implicite ou explicite. Le fait que l'accord soit le plus souvent tacite ne change rien à l'affaire. Jouer

c'est décider d'agir conformément à une règle et c'est dans le même temps décider d'accepter cette règle comme support de mon action. Il n'y a pas d'obligation à la règle au sens où ne pas participer au jeu permet d'échapper à la règle » (Brougère, 2005, p.54).

• Le jeu est frivole, il s'inscrit dans une dimension de non-conséquences

Le caractère de légèreté que l'on attribue au jeu et qui lui a longtemps valu d'être catégorisé dans le non sérieux, l'enfantin, est directement liée à l'idée de non-conséquence. En effet, le « faire semblant » que permet le jeu, en fait un espace de d'expérimentation dans lequel il est permis d'échouer, de recommencer : « le jeu permet d'utiliser des combinaisons de

conduites qui sous des pressions fonctionnelles ne seraient pas tentées »43 (Bruner, 1983,

p.223)

• Le jeu est incertain

L'infini possibilité des décisions à prendre au cours d'un jeu en font une activité incertaine, dont il est impossible de connaître le déroulement.

Cette définition du jeu par critères est assouplie par Lardinois (2000) qui considère que ces caractéristiques s'inscrivent dans une échelle de ludicité et sont comme plus ou moins présentes selon les situations. D'après lui, les jeux ont alors un potentiel ludique qui est plus ou moins élevé mais qui échappe alors à la vision binaire du jeu ou non-jeu.

Définir le jeu est donc complexe. La frontière entre le ludique et le non-ludique est particulièrement poreuse. Pour, Brougère (2005, p.61) cela confirme à quel point « le jeu est affaire de sens donné à la situation ». Nous retenons donc pour nos travaux que les définitions et critères présentés jusqu'à maintenant dans le but d'éclairer la notion de jeu, ne sont pas figés et qu'il est nécessaire d'étudier le jeu en contexte pour en apprécier son caractère ludique et ses impacts quant à l'apprentissage. Les recherches menées par Silva (2008), ont contribué grandement à réduire la distance entre la théorie et les pratiques de terrain. Son analyse du phénomène ludique nous paraît donc précieuse et nous allons dans le prochain paragraphe en définir les principaux concepts.