• Aucun résultat trouvé

Les avantages et les inconvénients de l’hydratation artificielle

CHAPITRE 5 : DISCUSSION

5.1. Synthèse des résultats des articles

5.1.2. Les avantages et les inconvénients de l’hydratation artificielle

Un certain nombre d’études choisies parmi nos articles ont tenté de démontrer l’efficacité ou l’inefficacité de l’hydratation parentérale par rapport à la qualité de vie, au confort et à la survie globale entre autres. Selon Raijmakers et al. (2011), la pratique actuelle consiste donc à administrer une hydratation artificielle aux personnes en fin de vie sans que cette dernière bénéficie pour autant de preuves scientifiques validant ou infirmant son efficacité.

Le volume d’hydratation parentérale

En 2013, Bruera et al. ont réalisé une étude sur la qualité de vie de deux groupes de patients par rapport à quatre symptômes : la fatigue, la sédation, les myoclonies et les hallucinations. Aucune différence significative

n’a pu être mise en évidence entre les patients qui recevaient 1L de solution saline par jour et ceux qui n’en recevaient que 100ml, ce qui était considéré comme une solution placebo.

Le taux de prescription d’une hydratation parentérale dans les hôpitaux varie de 10 à 88%, ce qui correspond aux pourcentages prescrits dans des établissements de soins palliatifs (Raijmakers & al., 2011). La différence réside dans le volume prescrit, qui est significativement plus grand dans les structures non spécialisées (Lanuke, Fainsinger & De Moissac, 2004 ; dans Raijmakers & al, 2011). Le guideline national établi au Japon recommande d’ailleurs une hydratation parentérale inférieure à 1000ml/jour, afin de ne pas induire des signes de rétention hydrique (épanchement pleural, ascite ou encore œdèmes périphériques) chez le patient (Morita, Bito, Koyami, Uchitomi & Adachi, 2007). Cette constatation est par surcroît corrélée avec d’autres études (Morita & al., 2005 ; Nakajima, Hata & Kusumoto, 2013 ; dans Nakajima, Takahashi & Ishitani, 2014).

Les symptômes de fin de vie et l’hydratation parentérale

La liste suivante des signes et symptômes est tirée de l’étude réalisée au Japon en 2007 par Morita et al. pour l’élaboration d’une guideline nationale sur la prescription de l’hydratation artificielle chez des patients en fin de vie. En 2000, Cerchietti et al. n’ont pu mettre en évidence aucune amélioration liée à la pose d’une hydratation artificielle, à l’exception des nausées chroniques, qui avaient significativement diminué après 48h. Or,

Morita et al. apportent quelques nuances à ces conclusions par rapport à leurs résultats de 2007.

 La soif : L’hydratation artificielle ne soulage probablement pas la sensation de soif des patients en phase terminale d’un cancer ; cette dernière résultant de causes multi-étiologiques (Morita & al., 2002). En revanche, des soins infirmiers intensifs sont de la plus grande importance.

 La qualité de vie : l’hydratation artificielle semble inefficace pour garantir une qualité de vie globale optimale. En revanche, elle peut contribuer à l’améliorer en soulageant le délirium causé par les opioïdes ainsi que la déshydratation aigue.

 La rétention hydrique : Une hydratation artificielle peut augmenter le risque de développer de l’ascite et un épanchement pleural, de même qu’il accroît la quantité de sécrétions bronchiques à condition que le volume d’hydratation prescrit se situe aux alentours de 1500-2000ml/jour. De manière générale, il s’agit d’être prudent et attentif aux signes de rétention hydrique dès qu’on dépasse une dose quotidienne de 1000ml.

 Les nausées et les vomissements : une hydratation artificielle adéquate paraît susceptible de contribuer au soulagement des nausées et des vomissements à condition qu’il n’y ait pas d’étiologie sous-jacente comme une occlusion intestinale ou une cachexie.

 Les œdèmes périphériques : une hydratation artificielle de plus de 1000ml/jour augmenterait significativement le risque de développer des œdèmes périphériques.

 Le délirium : certaines études observationnelles suggèrent l'existence d'une corrélation entre déshydratation et délirium (Lawlor, Gagnon, Mancini & al. 2000 ; Mortita, Tei, Tsunoda, Inoue & Chihara, 2001). Morita et al. (2002), concluent qu’une thérapie hydrique peut se révéler utile chez certains patients pour améliorer les signes de délirium induits par les opiacés en combinaison avec une rotation des opiacés. Cela s’explique par amélioration de la clairance et, par conséquent, une meilleure élimination des toxiques métaboliques. Elle semble en revanche inefficace sur le délirium induit par des défaillances organiques.

 La fatigue : l’hydratation artificielle semble totalement inefficace pour améliorer la sensation de fatigue chez des patients mourants. En revanche, elle peut avoir un effet positif chez des personnes dont la survie est estimée à plusieurs mois avec un bon indice de performance.

Les résultats obtenus par rapport à la sécheresse buccale ne concordent pas avec les études précédentes qui concluaient à l’inutilité de l’hydratation artificielle pour soulager ce symptôme (Cerchietti & al., 2000 ; Musgrave, Bartal & Opstad, 1995). Les auteurs indiquent cependant que la

population de ces deux études avait un pronostic vital de 4 à 10 jours maximum par rapport à leur propre échantillon qui avait une espérance de vie d’une vingtaine de jours, et qu’une hydratation parentérale tend donc à soulager la sécheresse buccale des patients dans la mesure où ils ne sont pas encore au stade d’agonie.

L’hydratation artificielle et la survie

Une étude réalisée aux Etats-Unis en 2013 (Bruera & al.) a essayé de voir s’il était possible d’établir une corrélation entre hydratation artificielle et survie globale des patients par rapport au traitement. Or, hydratés ou non hydratés, la durée de survie médiane des patients était de 17 jours, ce qui correspond exactement aux statistiques du pays concernant la population de patients cancéreux en stade terminal.

De manière générale, on peut donc en conclure que l’hydratation n’influence pas la durée de la période après laquelle survient la mort, ce qui contredit entre autres la croyance selon laquelle le fait d’arrêter une hydratation parentérale provoque la mort de la personne. Les conclusions de l’étude de Yamaguchi et al. réalisée en 2012 au Japon parviennent aux mêmes constatations dans le sens où la survie médiane des patients était de 20 jours et ce, indépendamment du volume d’hydratation prescrit.