• Aucun résultat trouvé

Chapitre 4 : Le criblage des mécanismes moléculaires par les méthodes omiques

III. Approche métabolomique

III.4. Les analyses statistiques

Après la normalisation des données, deux types d’analyses statistiques sont utilisables. En premier les analyses univariées, qui sont couramment utilisées en biologie permettant d’évaluer les variables explicatives en fonction d’un ou plusieurs paramètres sans considérer les interactions entre les variables. Le test statistique à appliquer dépend de la distribution de la probabilité de la variable. Si la distribution obéit à une courbe gaussienne, il faut utiliser des tests paramétriques (Student ou Spearman). Dans le cas contraire, il faut utiliser des tests non paramétriques tel que Wilcoxon ou la corrélation de Pearson.

Le deuxième type d’analyse de statistiques sont les analyses multivariés (Johan Trygg, Elaine Holmes and Torbjörn Lundstedt*, 2006) qui s’intéresse à l’étude simultanée de plusieurs

80 variables et permet de les visualiser dans un espace réduit grâce à la réduction de la dimensionnalité des données. Elles se déclinent en deux types :

• Les analyses multivariées descriptives : Cette analyse permet d’avoir une projection du jeu de données sans à priori. Les sorties se présentent en dendrogramme ou en plans factoriels. L’analyse la plus courante est l’Analyse en composantes principales (ACP). Les composantes sont calculées à partir des combinaisons linéaires des variables d’origine pour en extraire le maximum de variance. Les deux ou trois premiers modèles expliquent, en général, plus de 40% de la variance car le calcul est itératif : les premières composantes absorbent le maximum de variances et les dernières contiennent en générale le bruit aléatoire. Les données sont représentées en individus « score plot » selon les coordonnées calculées et un facteur biologique donnée. Une autre carte est générée aussi représentant la projection des variables explicatives sur les composantes latentes. C’est la carte des poids de variables « Loading plot ». Les variables qui ont contribués à la séparation des groupes d’individus sont représentés de part et d’autre du graphique. Cette approche permet de mettre en évidence les variables discriminantes. • Pour compléter cette première analyse il faudrait réaliser une analyse de statistiques

explicatives ou prédictives. Le but de cette analyse c’est d’identifier les signaux d’intérêt : la matrice contient des réponses (Y) qui sont expliquées par des variables explicatives (X). La méthode de régression aux moindres carrées partiels (Partial least squares, PLS) et la méthode discriminante PLS -DA (Partial least squares Discriminant analysis) sont des modèles largement utilisées en modèle prédictif. Le modèle établi à partir de données initiales peut être utilisé pour d’autres données dans le but de déterminer leur appartenance. Il est primordial de vérifier ces modèles par des méthodes de validation croisées afin d’éviter le risque de surapprentissage.

Cette approche est souvent appliquée en oncométabolomique qui cherche à caractériser le métabolome tumoral dans la description des profils métabolomiques des tumeurs (Cheng et al., 1998; Bathen et al., 2000; Cavill et al., 2011). Le but de notre étude n’est pas de classifier les échantillons mais de comparer les concentrations des métabolites entre les différentes conditions biologiques ainsi nous avons eu recours à des statistiques univariés classiques.

81

IV.

Intérêt des études multi-omiques

Pour clôturer ce chapitre de cette brève présentation des méthodes omiques, nous constatons qu’il parait évident que la capacité de compréhension des systèmes cellulaires et moléculaires s’est agrandie, depuis l’avancée des techniques et le développement des plateformes d’analyse omiques en plus de l’expansion de leurs champs d’applications.

Chacune des méthodes omiques a un rôle unique et intégral et présente aussi des avantages et des inconvénients dans la compréhension d’un processus physiologique.

Il est vrai que la transcriptomique permet de déterminer les différents niveaux d’expression des gènes qu’ils soient activés (up régulés) ou inhibés (down régulés). Cependant, la variation d’expression des gènes n’est pas souvent corrélée aux variations d’expression protéique comme il a été déjà été démontré dans plusieurs études (Ghazalpour et al., 2011). En effet, une surexpression transcriptionnelle du gène n’est pas toujours liée à une surexpression de la protéine relative puisque cette régulation peut intervenir à trois niveaux différents : post transcriptionnel, traductionnel et post-traductionnel comme par exemple : l’épissage alternatif mais aussi la rétention d’introns, la polyadénylation alternative ou encore le trans-épissage. De plus, les microARN interviennent dans la régulation post-transcriptionnelle et sont directement impliqués dans l’inhibition d’une centaine de protéines et interviennent ainsi à la fois au niveau transcriptionnel et traductionnel (Taganov et al., 2006 ; Selbach et al., 2008).

La protéomique identifie et quantifie les protéines et apporte une information des modifications post traductionnelles quel que soit l’organe ou la lignée cellulaire étudiée. Elle permet de mettre en évidence une absence d’une ou plusieurs protéines impliquées dans un mécanisme cellulaire particulier, une augmentation de l’expression d’une protéine ou encore une modification post traductionnelle au niveau peptidique. Néanmoins, cette approche peut manquer de précision en fonction de la méthode d’analyse choisie et de la composition de l’échantillon étudiée. Elle n’apporte pas parfois assez d’éléments dans la détermination des enzymes actives impliquées dans la réponse cellulaire. Ce manque d’informations peut être comblé par une approche métabolomique. En effet, la métabolomique révèle la perturbation ou la présence d’un dysfonctionnement ou anomalie métabolique qui pourrait être la conséquence d’un processus pathologique ou d’une exposition à un agent chimique. Et par conséquence, la combinaison des approches peut mettre en évidence l’activation d’une ou de plusieurs voies de signalisation,

82 potentiellement absente en approche protéomique ou transcriptomique à travers l’augmentation de concentration d’un ou plusieurs métabolites.

De ce fait, contrairement à une approche omique unique où on se base sur une seule méthode, dans une approche multidimensionnelle, aucune méthode omique n’est isolée de l’autre. Une approche globale multi-omique permet d’explorer la réponse à différents niveaux et de tracer avec plus de précision le déclenchement du mécanisme d’action et de mieux caractériser la réponse. Cette optique exploratoire est très largement appliquée dans différents domaines pharmaceutiques, chimiques, et médicaux.

Chaque méthode apporte une ou plusieurs informations inédites la transcriptomique caractérise la structure transcriptionnelle du gène et identifie les sites d’épissage alternatif, à cela s’ajoute la protéomique qui apporte une information sur l’abondance des protéines et les modifications post-traductionnels qui régissent l’activité enzymatique et interviennent dans la signalisation et la métabolomique éclaire sur l’impact sur la perturbation du métabolisme.

Ainsi, contrairement au schéma représentant cette relation ascendante entre les méthodes omiques, avoir recours à la combinaison de ces méthodes, permet d’améliorer la compréhension d’un système biologique où différents acteurs interagissent et s’influencent entre eux.

En conclusion, il est important de s’intéresser à la combinaison des différentes méthodes omiques pour une meilleure caractérisation des mécanismes moléculaires (Villar et al., 2015; Lomate et al., 2018) et pour une amélioration de la compréhension de la réponse biologique.

83

Partie 2 : Résultats et Discussions

84

I. Contexte

Le Wolff-Chaikoff est un processus physiologique qui permet à la thyroïde de se protéger et s’adapter à des excès de l’iode. Il a déjà été démontré que l’administration d’une pastille de KI, avant une exposition, permet de bloquer l’accumulation de l’iode radioactif par la thyroïde permettant ainsi de limiter l’exposition. Ce projet de thèse s’inscrit dans le cadre du projet Prophylaxie Répétée par l’Iode stable et contre-mesures innovantes en situation Accidentelle (PRIODAC), financé par l’Agence Nationale de la Recherche qui s’est intéressé à la compréhension des mécanismes moléculaires de la régulation du métabolisme de l’iode. Par cet apport scientifique et nouvelles connaissances, de nouvelles stratégies de protection contre des expositions répétées aux iodes radioactifs pourraient être développées.