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La section qui suit porte sur l'impact du leadership politique sur la capacité de gouvernance métropolitaine de la CMM en matière d'aménagement du territoire. Selon Heinelt et Kübler (2005), le leadership politique est important pour stimuler la coopération entre les acteurs de la région et faciliter la construction des consensus. Cependant, pour assurer la capacité de gouvernance métropolitaine, le leadership doit obligatoirement être accompagné de la confiance envers la personne ou le groupe qui l'exerce. Cela est particulièrement vrai dans les cas où les décisions ne peuvent pas être imposées par la majorité et donc pour lesquelles le consensus est nécessaire. La CMM se trouve

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dans cette situation. Tel que souligné par une des personnes que nous avons rencontrées: « À la CMM, on est condamné à la conciliation ». En effet, toutes les décisions importantes doivent être prises à la majorité des deux tiers des voix exprimées. Ainsi, la confiance dans le leader joue un rôle particulièrement important pour la capacité de gouvernance métropolitaine de la CMM. D'autre part, les auteurs soulignent que le leadership est important, non seulement pour faciliter la construction du consensus, mais également à l’échelle verticale (Heinelt et Kübler, 2005). Cela signifie qu'il est important que le leader soit en mesure de défendre les intérêts de la région face aux paliers supérieurs de gouvernement, d'obtenir leur support ou encore de prévenir leurs actions. Enfin, un leader peut influencer la conjoncture de façon significative afin de briser le statu quo, par exemple, en organisant de grands évènements, créant ainsi de nouvelles opportunités pour la gouvernance métropolitaine dans la région (Heinelt et Kübler, 2005).

Il importe de souligner que dans le cadre de ce travail, l'influence du leadership politique sur la capacité de gouvernance métropolitaine de la CMM a été plus difficile à évaluer que celle des autres facteurs. Cela s'explique par le fait que notre schéma d'entretiens ne comportait pas de questions portant directement sur le leadership politique. Néanmoins, certains interviewés nous en ont parlé et quelques constats peuvent tout de même être dégagés.

Tout d'abord, en ce qui concerne le schéma métropolitain d'aménagement et de développement, il apparaît clairement que le président de la CMM n'a pas été en mesure de rallier les acteurs de la région autour du rôle de la CMM en aménagement tel qu'il était défini, ni autour du PSMAD proposé. Cependant, lors de nos entrevues, de nombreux autres éléments sont ressortis comme ayant nui à l'adoption du schéma métropolitain et à la capacité de gouvernance métropolitaine de la CMM en matière d'aménagement du territoire, mais il n'a jamais été question du leadership politique. Ainsi, nous ne sommes pas en mesure d'affirmer dans le cadre de ce travail que cela a eu un impact. En fait, lorsque les personnes interviewées nous ont fait mention du leadership du président de la CMM, ils ont plutôt souligné le fait que l'ouverture qu’il a démontrée concernant la reconnaissance du rôle des MRC en aménagement a été un des éléments ayant permis l'élaboration et la conclusion de l'entente. De plus, plusieurs personnes ont souligné le fait que, malgré qu'il soit maire de Montréal, le président de la CMM a une vision métropolitaine, qu'il joue son rôle de président de la CMM et non pas de maire de Montréal lorsqu'il siège à l'institution et qu'il démontre habituellement une attitude qui favorise la coopération.

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Malgré tout, le leadership de la CMM dans la région métropolitaine est loin d'être évident. Bien qu’elle ait plusieurs réalisations appréciables à son actif (plan de développement économique, logement social, environnement, etc.), la CMM n'a pas été en mesure de rallier les différents acteurs autour de l'élaboration d'un consensus en matière d'aménagement du territoire. En fait, selon ce que de nombreuses personnes nous ont indiqué, il semblerait que ce soit le Caucus des municipalités de la métropole de l'Union des municipalités du Québec (UMQ) qui a constitué le principal leader dans l'élaboration de l'entente sur le nouveau partage des compétences. En effet, suite à la manifestation d'ouverture de la part du gouvernement provincial à revoir le partage des compétences entre la CMM et les MRC, le Caucus des municipalités de la métropole de l'UMQ aurait entamé l'élaboration d'une proposition pour le nouveau partage. Celle-ci a été publiée dans le cadre d’un mémoire déposé par le Caucus en 2007 (voir Annexe IV). Comme on peut le constater, cette proposition de l’UMQ correspond presque entièrement à celle adoptée par la CMM un an plus tard, en juin 2008 (voir Annexe V). Ne faisant plus partie de l’UMQ, la Ville de Montréal se serait par la suite ralliée aux principaux éléments de cette proposition et ce, par pragmatisme selon certains interviewés.

Il apparaît clairement que le Caucus des municipalités de la métropole a profité du retrait de la Ville de Montréal pour élaborer une proposition et rallier toutes les autres municipalités autour de celle-ci. Comme certaines personnes nous l’ont indiqué, le Caucus des municipalités de la métropole de l’UMQ sert d’assise institutionnelle aux municipalités qui s’opposent à Montréal à la CMM. Cela signifie que pour certains dossiers plus litigieux dont l'aménagement du territoire, une grande partie des municipalités autres que Montréal développent ensemble des positions communes via le Caucus des municipalités de la métropole de l'UMQ et les défendent ensuite à la CMM. Ainsi, on constate, et cela nous a été confirmé lors de nos entretiens, qu'une sorte de contre-pouvoir s'est constitué parallèlement à la CMM.

Néanmoins, selon certains interviewés, la situation n'a pas toujours été ainsi et elle pourrait bien changer si la CMM en venait à assumer son leadership selon d’autres. Pour notre part, nous croyons que le rôle exercé par le caucus des municipalités de la métropole de l'UMQ est en grande partie lié au fait que la confiance n'est pas encore tout à fait établie entre les acteurs de la région. Comme nous l'avons vu précédemment, malgré qu'il y ait eu une grande amélioration depuis le départ, il subsiste encore une importante méfiance entre les différents acteurs de la CMM. Même si presque toutes les personnes que nous avons rencontrées mentionnent qu'il y a une grande amélioration au niveau de la confiance, surtout depuis l'entente, le sentiment de méfiance demeure. Comme nous l'avons vu, plusieurs appréhendent la suite des choses et n'ont pas la certitude que tout ira pour le mieux ni que le consensus perdurera.

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D'autre part, on peut se demander s'il est vraiment réaliste de penser que la question de la confiance pourra éventuellement être réglée avec un président élu localement. Comme le soulignent Heinelt et Kübler (2005), pour permettre la confiance dans le leader, il est important que celui-ci ne soit pas là pour défendre les intérêts provenant de son organisation d'origine. Ainsi, malgré la vision métropolitaine dont il peut faire preuve et l'attitude d'ouverture qu'il peut démontrer, le président actuel de la CMM demeure le maire de Montréal, ce qui, à la base, engendre un sentiment de méfiance de la part des autres municipalités. D'autant plus que celles-ci ont associé dès le départ la CMM à la Ville de Montréal. Quelques personnes que nous avons rencontrées nous ont indiqué que la confiance était une question de temps et d'accumulation d'expériences communes. Il serait sans doute pertinent de se reposer la question dans quelques années.

En ce qui concerne le leadership vertical de la CMM, soit sa capacité à défendre les intérêts de la région face au gouvernement supérieur, la grande majorité des personnes que nous avons rencontrées nous ont mentionné que celle-ci faisait beaucoup de revendications auprès du gouvernement provincial et ce, dans tous ses domaines de compétences. Nous avons d'ailleurs déjà fait ce constat dans le cadre du chapitre précédent. Cependant, la plupart des interviewés ont également déploré le peu d'écoute de la part du gouvernement provincial envers la CMM et plus particulièrement, envers la Ville de Montréal. La question du « swing vote »82