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Le « School based management » comme une forme d’« empowerment »

LA REGULATION DES ETABLISSEMENTS SCOLAIRES

3.2. Perspective « Tight Coupling » (L’établissement scolaire comme système de relations fortes)

3.2.1.2. Le « School based management » comme une forme d’« empowerment »

Depuis les années 1960, le school based management (SBM) est une réforme populaire adoptée par des districts à travers le pays comme solution pour améliorer les établissements scolaires. Le SBM est utilisé par des Etats pour augmenter l’« accountability » scolaire; par les conseils de l'établissement scolaire locale pour augmenter l'accomplissement des élèves; par des bureaux centraux pour améliorer l’efficience administrative; par des unions d'enseignants pour l’« empower » des enseignants; et par des groupes de communauté pour impliquer les parents. Dans une revue de la littérature concernant le SBM, les chercheurs ont conclu que SBM était "un terme générique pour des activités diverses" (Malen, Ogawa et Kranz, 1990, cite par Briggs et Wohlstetter, 2003).

Le SBM était fréquemment adopté comme une réforme politique qui a changé l'équilibre des pouvoirs du bureau central vers la communauté scolaire. Selon cette perspective, le SBM a aidé à produire la propriété et l'engagement à la réforme scolaire de la communauté locale, reflétant l'idée qu'une redistribution de pouvoir augmenterait l'énergie pour l'amélioration scolaire (Bryk, 1.993; Malen et al, 1990). Dans un sens semblable, beaucoup de districts ont adopté le SBM comme un mécanisme pour rendre les enseignants plus efficaces. Alternativement, le SBM a été vu comme une réforme pour améliorer l'efficience administrative (Murphy et Beck, 1995).

Tandis qu'il y a beaucoup de situations dans lesquelles le SBM peut être pratiqué, toutes les formes sont basées sur le principe que le site scolaire devienne le lieu central de

contrôle dans le processus de prise de décision. Selon Summers et Johnson (1996) le raisonnement du SBM repose sur le fait que ceux qui sont les plus proches des élèves prendront les meilleures décisions. Le but essentiel de la prise de décisions est d’augmenter l'autonomie des acteurs pour améliorer le processus d'instruction et les résultats des élèves. Le SBM est fréquemment préconisé en raison du fait qu'il augmente l’« accountability» du personnel de l’établissement scolaire, soit le sentiment qu’il a de sa responsabilité Les établissements scolaires sont forcées de devenir plus sensibles aux besoins locaux par l'inclusion des parents et des membres communautaires dans les conseils qui prennent les décisions (Summers et Johnson, 1996).

Le SBM a été défini de différentes façons. Clune et White (1988) et Lindelow (1981) soulignent le transfert d'autorité à l’établissement scolaire; Malen et ses collègues incluent la question de changement dans des structures de direction (Murphy, 1991):

Le SBM est un système conçu pour améliorer l'éducation en augmentant l'autorité des acteurs dans l’établissement scolaire. (Clune et White, 1988)

Le SBM est un système d'administration éducative dans lequel l'établissement scolaire est l'unité primaire du processus décisionnel éducatif. (Lindelow, 1981)

Le SBM peut être vu conceptuellement comme un changement formel des structures de direction, comme une forme de décentralisation qui identifie l'établissement scolaire individuelle comme l'unité primaire d'amélioration et compte sur la redistribution d'autorité du processus de prise de décision comme les moyens primaires par lesquels les améliorations pourraient être stimulées et soutenues (Malen et al 1989).

Selon Murphy (1995) il y a de nombreuses définitions du SBM, et en analysant de ces définitions, on peut faire ressortir deux principes fondamentaux: “L’autonomie au niveau de l’établissement” et “La prise de décision coopérative”. Pour Wohlstetter et Odden (1992), le SBM est une directive rectificative pour appliquer une sorte de contrôle décentralisé, et donner à chacun des établissements scolaires l’occasion de prendre des décisions.

Wohlestetter (1995) au début de son rapport de recherche sur les causes de l’échec et du succès du SBM dans les établissements scolaires réalisé dans trois pays (les Etats- unis, le Canada et l’Australie) s’exprime ainsi « En bref, nous avons trouvé que, pour la réalisation d’un programme efficace du SBM, il faut redessiner toute l’organisation de l’établissement, de sorte que ce dessin puisse dépasser un changement dans la direction de l’établissement scolaire. Les gens doivent avoir un pouvoir réel, au niveau de l’établissement, sur le budget, le personnel et le programme. De même, si le SBM s’applique pour aider à l’amélioration de la performance de l’établissement, il faut utiliser ce pouvoir afin de créer un changement sur la production de l’établissement, de manière à ce qu’il puisse montrer ses effets réels sur la pédagogie et l’apprentissage (Wohlstetter, 1995).

Le transfert du pouvoir et la décentralisation en SBM exige que les systèmes et les processus soient redessinés. Le pouvoir, la connaissance et les renseignements proviennent du niveau opérationnel et par conséquent les récompenses proviennent des performances (Mohrman et Wohlstetter, 1994). Rowan (1990) observe que la mise en oeuvre du « site based management » a exigé certains réajustements des rôles du personnel d’éducation, bien que cela soit plus souvent vrai pour les administrateurs que pour les enseignants (Rowan, 1990).

Leithwood et Menzises (1998) notent que les principaux ont un rôle particulièrement crucial à jouer dans la détermination des conséquences du SBM dans leurs établissements scolaires ainsi que sur les formes que celui-ci va prendre. Particulièrement concernant les formes de contrôle de la communauté professionnelle du SBM, les principaux sont contraints de redistribuer le pouvoir traditionnellement exercé par eux. Cependant, ils sont capables de s’opposer à cette redistribution du pouvoir (Leithwood et Menzies, 1998).

D’après Lindelow (1981), si les chefs doivent adapter les programmes pédagogiques de leur établissement selon les besoins et les demandes de leur communauté, il faut qu’ils puissent accéder au contrôle des acteurs les plus importants, les enseignants ( cité par Murphy, 1995).

Les points de vue différent quant à la faisabilité et à l’efficacité du « school based management » :

Selon Leithwood et Menzies (1998) les jugements sur la valeur du SBM comme stratégie de réforme dépendent en grande partie des aspirations plus spécifiques lors de son adoption. Le SBM n’a pas encore fait la preuve de sa valeur dans l'amélioration des expériences éducatives des élèves. Cependant, il se présente comme un moyen de réduire les dépenses administratives centrales, de la démocratisation du lieu de travail scolaire, de la création plus fréquente d'occasions pour l'exercice et le développement des capacités des enseignants et l’augmentation de la responsabilité (accountability ) des établissements scolaires vis-à-vis de leurs communautés locales (Leithwood et Menzies, 1998).

D’après Cotton (1997), les études montrent que les difficultés concernant la réalisation du SBM peuvent être résumées ainsi :

- Le manque du temps suffisant pour réaliser plus d’activités déterminées dans ce système (SBM).

- Les exigences non réalistes (L’intention de réaliser trop de changements dans un laps de temps trop court).

-Le manque de protection suffisante des associations actives dans les établissements. - Le manque de connaissances et de savoir faire liés aux activités scolaires.

- Le manque de savoir –faire en matière de travail collectif. - La non transparence du rôle des personnes et des groupes.

- La différence entre les décisions que les établissements ont le droit de prendre, ou pour lesquelles ils possèdent une forte influence et les décisions qu’ils ont envie de prendre (surtout pour les professeurs, parce que les professeurs ont de plus en plus envie de prendre des décisions sur les programmes pédagogiques et les « districts » n’ont pas tendance à concéder ce pouvoir).

- Le manque de ressources financières.

Noble et ses collègues (1996) présentent les faits suivants comme les difficultés de la réalisation du système de SBM :

- L’habitude des individus aux normes et aux méthodes précédentes et la difficulté de remettre ces normes et ces méthodes en question.

- Le manque de données nécessaires afin de prendre les décisions essentielles. - L’augmentation du travail des participants.

- Le manque de compétences adéquates pour les personnes actives dans ce système.

Selon Oswald (1995) les problèmes tels que l’ambiguïté des rôles, les nouvelles responsabilités et les difficultés de coordination, la nécessité du développement du personnel, le travail important que doit fournir le personnel et la performance inégale des établissements scolaires, sont les éléments qui font obstacle à la réalisation du système de SBM (Oswald ,1995). Prasch (1990) note que la responsabilité (accountability ) des décisions, est un autre problème qui n’a pas été résolu. Selon Abu-Duhou (1999), certains auteurs évoquent que la décentralisation du pouvoir en direction des établissements, ne peut garantir que ces derniers puissent effectivement utiliser ce pouvoir effectivement pour l’amélioration de la qualité pédagogique (Abu-Duhou,1999).

Murphy (1995), dans son livre, présente de nombreuses idées sur le SBM. Par exemple : - Bogotch & Taylor et Weiss (1993) considèrent qu’il y a peu de différences concernant les programmes pédagogiques entre les établissements SBM et les autres établissements. - Ovando (1993) évoque que la concession du pouvoir et la création de la responsabilité pour « la ligne de la production », d’une manière générale n’avaient pas d’effet sur la pédagogie et l’apprentissage et ne semblent pas avoir d’influence sur le contexte principal du programme pédagogique.

- Collins & Hanson (1991) évoquent qu’il est possible de dire que les élèves scolarisés en SBM n’ont presque pas de différences avec ceux qui n’y sont pas. (d’après l’évaluation des élèves de l’état).

- Watt (1989) note que l’inégalité est une partie indissociable de la reconstruction. Il observe que les établissements scolaires autonomes ferment les yeux sur la situation des élèves défavorisés.

- Sharp (1996) considère qu’il y a peu d’indices montrant l’effet positif de SBM sur la performance scolaire des élèves. Au total, le transfert du pouvoir peut se produire, mais il

ne garantit pas les prises de décisions opportunes. Summers et Johnson (1995), en analysant les problèmes de la décentralisation et ceux des établissements autonomes, arrivent au constat qu’il n’y a pratiquement pas d’évaluation qui montre que l’autonomie peut être la cause de l’amélioration de la performance des élèves.

Selon Murphy (1995) les origines des systèmes de SBM sont nombreuses et ne permettent pas d’analyser les effets de la politique de décentralisation. En effet les cas analysés sont différents et hétérogènes. Les orientations du SBM et les outils de réalisation choisis pour cela, dépendent des états et des établissements. Il est à noter également que la généralisation des résultats des recherches réalisées sur ce sujet est difficile et que les recherches expérimentales et systématiques sont très rares. (Murphy 1995).

L’étude de Elmore, Peterson et McCarthy (1996) concernant l'impact de la restructuration de l’établissement scolaire sur les pratiques d'instruction des enseignants révèle que la liaison est "faible, problématique et indirecte"(Goldring et Ogwa, 2002).

Les recherches sur le « school based management » et le « shared decision making » révèlent des résultats décevants concernant le succès de ces réformes (Weise, 1995; Mirel, 1994). Les données quantitatives significatives suggérant un rapport positif entre le « shared decision making » et l'amélioration de différents critères scolaires (comme l’apprentissage des élèves, le climat scolaire, et la satisfaction des enseignants) manquent. Beaucoup de nouvelles structures de prise de décision n’ont pas atteint les résultats escomptés. (Beadie, 1996, cités par Creighton, 1997).

Pour quelques chefs d’établissement, le SBM semble signifier le début d’une menace sur leur rôle (Oswald, 1995). En effet, ils commencent à éclipser leur domaine traditionnel d'autorité administrative (Lutz et Iden, 1994; Terry, 1994). En permettant aux membres intéressés moins qualifiés ou expérimentés de participer au processus de prise des

décisions cruciales, les principaux déplorent le fait qu’ils soient laissés seuls pour rendre compte des résultats de certaines décisions (Holloway, 2000 cité par Jack Lam 2005).

Walker(1993) déclare que dans les SBM les chefs d’établissement sont obligés de abandonner une partie de leur pouvoir et une grande partie de leur rôle traditionnel afin d’améliorer ceux des comités de l’établissement. Malgré les problèmes de répartition du pouvoir, qui est responsable vis-à-vis de qui, et qui doit rendre des comptes par exemple, doit être clair. Et qui doit légalement rendre des comptes (Walker,1993). Selon Steinberger (1990), si le chef d’établissement considère les enseignants comme les responsables par l’intermédiaire des décisions qu’ils prennent, et les maintient de ce fait vulnérables face aux résultats des décisions, est-ce que ces enseignants auront envie de participer à des décisions qui seront susceptibles de constituer des risques pour eux ? Bien que le système de SBM cherche à utiliser les enseignants comme bouclier, ils préfèrent être responsables de leur performance individuelle plutôt que de la performance de l’établissement. Non seulement ils ne souhaitent pas participer aux décisions, mais aussi résistent face à la participation (Cité par Walker, 1993).

Les recherches sur le « site based management » indiquent que la diffusion d'autorité varie largement et fournit rarement aux acteurs locaux, y compris aux enseignants, assez de pouvoir sur les questions de programme, de personnel ou de finances (Malen, Ogawa et Kranz, 1990). Cependant, la recherche sur le leadership des enseignants, suggère qu'en présence de certaines conditions, les enseignants peuvent changer leurs relations avec les administrateurs et augmenter leur influence au sein de l’établissement scolaire (Smylie et Brownlee-Conyers, 1992, cité par Goldring et Ogwa, 2002).