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COMME ORGANISATION ET SA REGULATION

2.3. Approche Institutionnaliste

2.3.2. Contrôle au sein de l’organisation éducative

Meyer et Rowan (1978) soutiennent que beaucoup d’activités sociales sont passées sous le contrôle politique et bureaucratique des sociétés modernes. Pour structurer ces activités efficacement, lorsque que l'échelle de ces activités augmente, de plus hauts degrés de coordination et de contrôle sont exigés. Cependant, ce processus n’existe pas dans l'organisation éducative. Beaucoup de signes montrent que les organisations éducatives manquent de coordination interne, particulièrement au niveau du contenu et des méthodes de leur activité principale : l’instruction. L'instruction a tendance à être séparée du contrôle de la structure organisationnelle, dans ses aspects bureaucratiques davantage que dans ses aspects collégiaux. Cette caractéristique des organisations éducatives, parmi d'autres, a mené March et Olsen (1976) et Weick (1976) à appliquer le terme « loosly coupled » aux organisations éducatives exprimant ainsi la tendance des organisations éducatives à séparer

les politiques des résultats, les moyens des fins et les structures des règles des activités réelles.

Selon cette approche, dans les organisations éducatives, le haut degré d’activité administrative ou la gestion organisationnelle sont déconnectées des activités réelles des établissements scolaires. Cependant, ils sont étroitement connectés avec les structures politiques et institutionnelles de l’environnement. Donc, dans les systèmes organisationnels institutionnalisés comme l'éducation, les fonctions administratives impliquent généralement moins la gestion du travail technique que la gestion des relations avec l'environnement. Il semble aussi que les administrateurs éducatifs ont peu d'autorité directe sur le travail d'instruction. Tandis que les administrateurs ont la responsabilité générale de planifier et de coordonner le contenu et les méthodes d'instruction, leur autorité pour effectuer ces activités est en fait évanescente. La littérature sur les organisations éducatives manifeste une contradiction particulière. D'une part, il y a les descriptions du système éducatif comme fortement coordonné et contrôlé - au point de limiter l'innovation locale. D'autre part, des discussions sociologiques montrent à ce que le travail éducatif réel et l’instruction, ont lieu dans une salle de classe isolée, loin de la coordination et du contrôle organisationnel. De ce point de vue, des innovations locales échouent, non parce que le système est rigide, mais parce que le système manque de liens internes (Meyer et al,1981 ; Meyer et Rowan, 1977).

Ni l'enseignement, ni la socialisation des élèves qu’il produit, ne sont sujet à une évaluation et à une inspection organisationnelle sérieuse (Dornbusch et Scott, 1975). Cet aspect se retrouve dans une enquête de 1972 concernant des écoles primaires du secteur de la région de San Francisco conduite par l'Environnement pour l'Enseignement du Programme (Cohen et al, 1976). Les données de l’enquête ont été obtenues de 34 responsables administratifs de districts « district superintendents », 188 principaux des établissements scolaires de ces « districts » et 231 enseignants de 16 établissements scolaires. Les données montrent que l'inspection des activités d'instruction est déléguée à l'école locale (local school) et a lieu rarement. Par exemple, seulement 1 « superintendent » sur les 34 interrogés a annoncé que le « district » évalue directement les enseignants (cité par Meyer et Rowan, 1977).

Selon cette approche, il y a peu d’études concernant les interactions entre les enseignants : une majorité des principaux disent qu'il n'y a aucune relation professionnelle quotidienne entre les enseignants d’une même classe (grade level) et 83 pour cent d’entre eux n'annoncent aucune relation professionnelle quotidienne parmi les enseignants d’une même discipline (grades). Les enseignants confirment l’hypothèse d’un enseignement segmenté. Deux tiers d’entre-eux rapportent que leur enseignement est observé rarement par d'autres enseignants (une fois par mois voire moins). La moitié rapporte également que les principaux ne les observent que très rarement. Les données de réussite des élèves sont rarement utilisées pour évaluer la performance des enseignants ou des écoles. Par exemple, seulement 1 « superintendent » sur 34 dans l'enquête de « Environnement for Teaching », a utilisé des données de réussite standardisées pour évaluer les établissements scolaires du « district ».

Selon ces auteurs, il y a un manque de coordination et de contrôle des interdépendances techniques. Les établissements scolaires semblent réduire au minimum les problèmes de coordination qui pourraient résulter des pratiques d'instruction. Pour passer au niveau supérieur, les élèves devraient posséder les compétences du niveau inférieur. Cependant, il s’avère qu’on n’évalue pas réellement ce que les élèves ont appris. De cette façon les établissements scolaires réduisent au minimum les interdépendances séquentielles inhérentes à leur cœur (core) d'instruction. Les enseignants s'adaptent ainsi d'une façon informelle aux variabilités des élèves, et les établissements scolaires réduisent aussi au minimum l'interdépendance entre les programmes d'instruction.

Selon Meyer et Rowan (1978) il est possible de soutenir que l'instruction éducative n'est pas contrôlée par des administrateurs centraux, mais plutôt par la profession enseignante. De ce point de vue, les établissements scolaires sont simplement des organisations faiblement couplées dans lesquelles des enseignants professionnels exercent leur métier et dans lesquelles les administrateurs fournissent et entretiennent simplement les équipements dans lesquels les enseignants travaillent. (de la même façon que les administrateurs hospitaliers entretiennent les docteurs). Les enseignants eux-mêmes affirment ne pas croire à ce mythe du professionnalisme. Dornbusch et Scott (1975) montrent que les enseignants estiment que leur formation a peu en commun avec leur capacité d’effectuer leur travail efficacement avec un contraste important avec des

infirmières, par exemple. Dans l'enquête du secteur de la région de San Francisco, parmi les enseignants élémentaires interrogés, 77 pour cent d’entre-eux estiment que les caractéristiques de la personnalité de l'enseignant jouaient un rôle plus important dans la performance de l'enseignement que n'importe quelle connaissance particulière ou compétences professionnelle qu’un enseignant pourrait posséder. L'appui des collègues et des systèmes de contrôle par un pair semble être également pratiquement inexistant (Meyer et Rowan, 1978).

Meyer et Rowan (1978) considèrent que les enseignants sont rarement observés ou évalués; il en est de même pour les principaux. Bien que les données sur la réussite des élèves soient par habitude rassemblées et utilisées pour contrôler leur progrès et analyser leur capacité ou non à passer dans le niveau supérieur, les mêmes données ne sont pas utilisées afin de fournir une base pour évaluer la performance des enseignants, des établissements scolaires, ou des « districts ». Selon Meyer et al (1981), dans la plupart des interprétations, cette situation serait considérée comme une preuve de la faiblesse structurelle des organisations scolaires. Les efforts d’inspecter les productions (outputs) éducatives augmenteraient immanquablement les conflits avec les parents et les élèves, causeraient le mécontentement parmi les enseignants et augmenteraient énormément le fardeau des administrateurs (Meyer et al, 1981).