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Le profil de la communauté autochtone de Montréal

Chapitre préliminaire : Considérations théoriques et méthodologiques

Chapitre 2 Le défi de la gouvernance autochtone en milieu urbain à Montréal

2.3 Le cas de Montréal

2.3.1 Le profil de la communauté autochtone de Montréal

Lors du Recensement, Statistique Canada a dénombré 17 870 résidants autochtones à Montréal, représentant 0,5 % de la population de la communauté urbaine618. Cette proportion peut sembler négligeable, surtout relativement à Winnipeg et Regina, où les Autochtones

618 StatistiqueCANADA, Peuples autochtones du Canada en 2006 : Inuits, Métis et Premières nations,

compte pour respectivement 10 % et 9 % de la population. Il faut cependant noter que plusieurs chercheurs et intervenants estiment le nombre de Montréalais autochtones à entre 25 000 et 30 000619. La disparité entre ces deux chiffres serait attribuable au caractère temporaire et transitoire de la présence de nombreux Autochtones à Montréal, dont certains alternent entre la ville et leur communauté d’origine, ainsi qu’au fait que plusieurs sont sans abri. Le recensement de cette frange de la population autochtone montréalaise est difficile620, une situation exacerbée par le taux de participation qui, selon les analyses détaillées du Recensement, serait inférieur pour les Autochtones, comparativement à la population canadienne en général, causant un sous-dénombrement de la population autochtone621. Malgré tout, le Recensement demeure un outil des plus fiables et complets pour analyser les populations autochtones en milieu urbain et effectuer des comparaisons entre les différents groupes622.

La population autochtone à Montréal est caractérisée par son hétérogénéité. Nous y trouvons des membres montréalais d’origine, mais la majorité de cette population est originaire des communautés autochtones de la province, du pays et même des Amériques623. Selon Statistique Canada, plus de la moitié de la population autochtone montréalaise est composée de membres des Premières nations (57 %), dont un tiers seraient sans statut ou non- bénéficiaires de traités. Il y aurait aussi une notable présence métisse (34 %), alors que les Inuits seraient plus faiblement représentés (3 %)624. Selon les chercheurs et les intervenants autochtones, une grande diversité existerait au sein même des membres des Premières nations625, mais aucune cueillette de données démographiques reliées à l’origine ethnoculturelle des membres des Premières nations dans les régions métropolitaines n’a eu lieu depuis 1991. Il est donc difficile de faire un découpage plus précis de la population

619 M.E. MACDONALD, préc., note 58, à la page 382.

620 REGROUPEMENT DES CENTRES DAMITIE AUTOCHTONES DU QUEBEC, Évaluation des besoins des autochtones

qui composent avec la réalité urbaine de Montréal, préc., note 52, p. 45.

621 StatistiqueCANADA, Peuples autochtones du Canada en 2006 : Inuits, Métis et Premières nations,

Recensement de 2006, préc., note 377.

622 C.HANSELMANN, Urban Aboriginal People in Western Canada: Realities and Policies, préc., note 380, p. 3. 623 M.E. MACDONALD, préc., note 58, à la page 382.

624 STATISTIQUE CANADA, Profil de la population autochtone de 2006 pour Montréal, préc., note 51 p. 6. 625 REGROUPEMENT DES CENTRES DAMITIE AUTOCHTONES DU QUEBEC, Évaluation des besoins des autochtones

autochtone montréalaise autre que selon les trois classifications historiques —Premières nations, Métis ou Inuits626.

Les Autochtones représentent au total une infime proportion de la population montréalaise, entre 0,5 et 1% de la population totale. Ils manquent de visibilité au sein des instances politiques locales et régionales comparativement à leurs confrères des autres villes canadiennes627. Certains individus ont intégré la société allochtone628. Les initiatives politiques municipales visant la population autochtone montréalaise se concentrent sur ses membres les plus marginaux, soit les sans-abris et ceux vivant sous le seuil de la pauvreté629. Cependant, les Autochtones sont présents sur la scène culturelle montréalaise et organisent divers événements, tel un Pow wow annuel dans la communauté avoisinante de Kahnawake et le Festival Présence autochtone qui se déroule en plein centre-ville630.

Le contexte linguistique particulier à Montréal a également un effet sur les Autochtones qui s’y établissent. Outre leur langue maternelle, les Inuits, les Algonquins, les Cris, les Micmacs et les Mohawks apprennent l’anglais comme langue seconde, tandis que les Innus, Malécites, Abénakis et Huron-Wendat parlent le français631. Habituellement, la connaissance de l’autre langue officielle par ces communautés est limitée, ce qui peut rendre difficile l’utilisation des services à Montréal, puisque souvent la connaissance du français et de l’anglais peut s’y avérer nécessaire ou, du moins, avantageuse632.

L’âge médian des Autochtones de Montréal est légèrement plus bas que celui des Allochtones (37 contre 39 ans)633. Les Autochtones montréalais sont davantage scolarisés comparativement à l’ensemble de la population autochtone canadienne. La majorité des Autochtones montréalais de 25 à 64 ans détiennent un diplôme d’études postsecondaire (58 % pour les

626 Supra, note 58

627 M.E. MACDONALD, préc., note 58, à la page 382.

628 REGROUPEMENT DES CENTRES DAMITIE AUTOCHTONES DU QUEBEC, Évaluation des besoins des autochtones

qui composent avec la réalité urbaine de Montréal, préc., note 52, p. 33.

629 M.E. MACDONALD, préc., note 58, p. 385.

630 REGROUPEMENT DES CENTRES DAMITIE AUTOCHTONES DU QUEBEC, Évaluation des besoins des autochtones

qui composent avec la réalité urbaine de Montréal, préc., note 52, p. 33.

631 Id., p. 12. 632 Id., p. 12.

hommes et 56 % pour les femmes), contre 44 % pour les Autochtones à l’échelle du pays634, des statistiques peu surprenantes lorsqu’on considère qu’un grand nombre de déménagements dans la métropole sont liés à des fins d’éducation635. Aux fins de comparaison, 60 % des Allochtones détiennent un diplôme d’études postsecondaire636. La situation financière de la population autochtone du grand Montréal cependant est plus précaire que celle des Allochtones - 31 % des Autochtones vivent sous le seuil de pauvreté, soit 10 % de plus que les Allochtones - et le revenu moyen du travailleur autochtone montréalais ne représente que 83 % de son homologue allochtone637. Toutefois, leur situation financière est plus enviable que dans les villes de l’Ouest canadien, où les Autochtones comptent pour 5 à 29 % des résidents des quartiers très pauvres, alors que la proportion n’est que de 1 % pour Montréal638.

Les Autochtones montréalais sont aussi très mobiles. Le Recensement dénombre que 27% d’entre eux ont déménagé au moins une fois dans les cinq années précédentes à l’intérieur de Montréal et 22 % sont retournés dans leurs communautés d’origine durant la même période. Cette mobilité est avant tout reliée à des raisons familiales ou au travail639. Grâce à son statut de métropole provinciale, Montréal est un centre économique important pour les Autochtones. La ville compte plusieurs sièges sociaux d’organisations autochtones, sans compter les nombreuses institutions d’enseignement postsecondaire et de centres de services de santé fréquentés par les Autochtones de partout dans la province640. Ces déplacements fréquents reflètent le caractère distinctif de la mobilité des Autochtones en milieu urbain, qui ne considèrent pas ces déplacements exceptionnels, mais bien comme un moyen de maintenir leurs liens avec leur communauté d’origine641. Il existe aussi cinq communautés autochtones à

634 StatistiqueCANADA, Recensement de 2006: Portrait de la scolarité au Canada, Recensement de 2006:

population autochtone Ottawa, 2010, en ligne: http://www12.statcan.gc.ca/census-recensement/2006/as-sa/97-

560/p16-fra.cfm (site consulté le 26 août 2012).

635 REGROUPEMENT DES CENTRES DAMITIE AUTOCHTONES DU QUEBEC, Évaluation des besoins des autochtones

qui composent avec la réalité urbaine de Montréal, en consulté le., préc., note 52, p. 30.

636 STATISTIQUE CANADA, Profil de la population autochtone de 2006 pour Montréal, préc., note 51, p. 10. 637 Id., p. 12-13.

638 JohnRICHARDS, Neighbors Matter: Poor Neighbourhood and Urban Aboriginal Policy, coll. «Commentary», Toronto, C.D. Howe Institute, 2001, p. 12.

639 STATISTIQUE CANADA, Profil de la population autochtone de 2006 pour Montréal, préc., note 51, p. 13. 640 REGROUPEMENT DES CENTRES DAMITIE AUTOCHTONES DU QUEBEC, Évaluation des besoins des autochtones

qui composent avec la réalité urbaine de Montréal, préc., note 52, p. 12-13.

641 CaroleLÉVESQUE, «La présence des Autochtones dans les villes du Québec : mouvements pluriels, enjeux diversifiés» dans D.NEWHOUSE et E.PETERS (dir.), Les gens d'ici - Les Autochtones en milieu urbain, Ottawa, Projet de recherche sur les politiques, 2003, p. 25-37, aux pages 27-28.

proximité de Montréal, soit Kahnawake, Kanesatake et Akwasasne (Mohawk), ainsi qu’Odanak et Wolinak (Abénakis). Ceci permet aux membres de ces Premières nations de transiter plus facilement vers et hors de la métropole. Aussi, les membres de la communauté urbaine se sont établis de façon dispersée à travers le territoire de la ville642.

* * *

La population autochtone à Montréal a connu une croissance fulgurante : entre 2001 et 2006, elle a augmenté de près de 60%643, entraînant une plus grande demande pour des services culturellement adaptés. Le développement d’organismes et d’institutions propres à cette population peut rendre possible l’instauration d’une gouvernance autochtone en milieu urbain pour Montréal.