• Aucun résultat trouvé

Le pastoralisme dans le postsocialisme : la privatisation des negdel

Les conséquences du changement politico-économique sur le système pastoral

1. Le pastoralisme de la fin du XVIIe jusqu’à la fin XXIe siècle

1.3. Le pastoralisme dans le postsocialisme : la privatisation des negdel

Après 70 années de communisme, son idéologie, son pouvoir autoritaire et son économie planifiée a brusquement pris fin. Désormais le pays adopte une nouvelle direction sociopolitique et économique : c‟est le modèle capitaliste qui devient dominant. Au début des années 1990, avec l‟effondrement du bloc communiste, la Mongolie a procédé à une série de réformes afin de créer de la compétitivité dans la nouvelle économie de marché basée sur la propriété privée et la libéralisation des prix. Certaines élites mongoles ont joué un rôle particulièrement ardent pour l‟adaptation de la nouvelle économie. D‟ailleurs Rossabi (2000 : 18) écrit « The Western advisers sought to develop a market economy as rapidly as possible and promoted a policy of shock therapy as the best and most expeditious means of creating such an economy ». Il accuse

le modèle de « policy of shock therapy » qui est appliqué dans les sociétés sédentaires agricoles et industrielles de ne pas être adapté à la société pastorale. A cet effet, l‟économie rurale passe brutalement d‟une planification centralisée à une libéralisation totale. Les coopératives sont dissoutes. Le troupeau devient privé à partir du démantèlement des coopératives. En 1993 les biens de coopérative sont totalement privatisés. D‟ailleurs la Mongolie se glorifie que le processus de la privatisation est réalisé aussi rapidement que les autres pays dans le monde. Le processus de privatisation des biens de l‟Etat et des coopératives ressemble fortement à celui des anciens pays communistes comme la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Roumanie, et trois quart de la privatisation des biens sont rapidement effectués.

Plusieurs auteurs concluent unanimement à la « destruction » du negdel. Les coopératives ont éclaté en petites exploitations familiales. Actuellement 90 % du troupeau total est privé et familial, « atomisé » selon l‟expression de Humphrey (Humphrey et Sneath, 2006). «Atomisé » signifie que l‟élevage redevient un élevage familial de subsistance avec des troupeaux. Nous nous intéressons plus en détail au processus de la privatisation, ainsi qu‟à la nouvelle ère de l‟économie du marché.

Le domaine de l‟élevage après la fin de negdel est défini comme un retour vers le passé, du moins comme un pas en arrière. L‟abolition de l‟organisation du travail, c‟est-à-dire des ateliers de reproduction des races sélectives, de production de cachemire, de viande ou de lait a fait place à la privatisation de l‟infrastructure, notamment de l‟atelier de la préparation du foin et du fourrage, les services vétérinaires. Il n‟y a plus de travail collectif des éleveurs. La destruction, l‟abolition, sans planification de l‟élevage qualifient le pastoralisme de la fin du communisme. L‟élevage individuel règne. Au niveau social, la pauvreté domine les ruraux (Erdenebaatar, 2004). Plus de régulation du parcours des éleveurs ni d‟exploitation de nouveaux parcours. L‟abandon de la gestion des puits auparavant entretenus par la coopérative, tombent en panne petit à petit faute d‟entretien. Ainsi la crise du pâturage surgit quelques années après la privatisation, comme nous le verrons plus loin.

1.3.1. Le chaos de la privatisation des negdel

La Mongolie a commencé un grand programme de privatisation des entreprises collectives et étatiques dès 1991, par la distribution des coupons34. Dans des districts ruraux, les réformes ont mené la dissolution des unions coopératives des éleveurs et la plupart des fermes d‟état. L‟Union Démocratique mongole, alors au pouvoir, a contribué beaucoup à la privatisation, notamment à travers son action appelé « le mouvement pour les éleveurs », (malchdyn tölöö khödölgöön). Le président du comité de soutien des éleveurs, Elbegdorj Ts, (actuel président du pays) a déclaré lors de cette action : « dès lors il y a la possibilité de mener l‟élevage privé et sédentaire ; le pastoralisme est comparable à une grande famille »35

.Ce Parti a décidé qu‟il fallait restituer tout le cheptel aux membres des coopératives puisque, pour lui, la collectivisation du bétail avait été faite sous la contrainte politique de l‟ancien régime. Ainsi la loi du 31 mai 1991 appelée La loi de la privatisation des biens de la RPM, dont l‟article n°5 concernait particulièrement la privatisation des propriétés des coopératives fut adoptée (Bulletin des ordres de RPM, 1991 : 24). Désormais, l‟application de la privatisation dut prendre en compte l‟opinion des membres des coopératives qui décidèrent des modalités de restitution pour montrer qu‟il n‟y a pas la force politique. Le gouvernement, se retirant de la gestion directe, se contenta seulement d‟aider par ses conseils, à l‟organisation de la méthode d‟action (Idem, 1991 :24).

Idéalement, les biens du negdel furent profitables à tous les ex-membres des coopératives, sans oublier leurs enfants. La modalité de la distribution est basée sur un calcul de la valeur monétaire totale de tous les moyens de production de la coopérative (infrastructures, véhicules, bâtiments…). Cela doit être distribué selon l‟ancienneté, le poste occupé et la taille de la famille de chaque membre. Mais la valeur des biens des coopératives variait. Le negdel comportait deux types de bien : le troupeau collectif et les biens immobiliers. Quant aux biens immobiliers ainsi que les équipements collectifs (véhicules, machines agricoles, outils…) les leaders du Parti Démocratique n‟avaient pas prévu de moyens à mettre en œuvre pour réaliser ce

34

« 44%, soit 22 milliards de T, de la propriété d‟état sont destinés en 1991 à la privatisation. Il a fallu diviser la somme par nombre de la population totale, ce qui fait 10000 T par personne. Ainsi chaque individu a eu le droit à un coupon équivalent à 10000 T, distribué gratuitement». Cf. l‟article intitulé « la première période de la privatisation » in http://www.dnn.mn/?vfile=6&vmet_id=6876&vmet_main=21&vdate=&vl=archive

35

processus de partage pendant ce temps. Ainsi les anciens leaders locaux des negdels ont pris le contrôle sur la répartition de ces équipements, de manière plus ou moins obscure et, de ce fait, de nombreuses malversations vinrent entacher le processus.

Dès l‟année 1991, les troupeaux collectifs de moutons, chèvres, vaches, chevaux et chameaux sont divisés parmi les ex-membres. Le gouvernement a tenté d‟imposer une norme limitative du nombre des animaux à diviser par éleveur, mais cela n‟est pas été pris en considération dans l‟action. En principe, la distribution du troupeau variait selon la richesse de la coopérative. Pour la répartition du cheptel on commença, en premier lieu, par évaluer le nombre de bétail ensuite le diviser par le nombre d‟habitants de la commune. Le nombre de têtes de bétail obtenu par personne variait selon les biens de coopératives. Par exemple, le chef d‟une commune de Dashbalbar de la province de Dornod présente la procédure de la privatisation : « L‟ensemble du troupeau était évalué à 34.200.000 T36 qu‟il fallait partager équitablement entre les ex-membres des coopératives. Chaque personne a eu droit à 37 têtes de bétail (1 chameau, 5 vaches, 5 chevaux, 20 moutons et 6 chèvres)» (Humphrey & Sneath, 2006 : 65). Selon mon interlocuteur, dans la commune de Bayantsagaan, 31 têtes de bétail ont été distribuées par personne dont 12 moutons, 10 chèvres, 5 chameaux, 3 vaches et 1 cheval.

Cependant l‟action de la privatisation avait fait couler beaucoup d‟encre dans tous les domaines. On ne tolérait plus la moindre intervention de l‟Etat, mais dans le même temps, beaucoup de critiques “shudarga bus” (malhonnêteté, tromperie, illégalité) étaient formulées quant aux malversations issues du processus de privatisation. Les médias publiaient toutes sortes d‟informations, de documents, d‟articles, de statistiques, de déclarations,… de valeur très inégale. D‟un journal à l‟autre, les contradictions abondaient. Dans le cas des coopératives, des liens se sont en outre formés entre des administrateurs, leurs proches et leurs amis afin de se partager les biens. Les élites de l‟Etat et les administrateurs ont eu le privilège d‟amasser le grand nombre d‟animaux. En effet, le député Gankhuyag a souligné que 62 % à 70 % des familles d‟éleveur ont obtenu moins de 100 animaux (Rossabi, 2005 : 287). Par exemple, notre famille de Buural a eu 62 têtes de cinq espèces de bétail. D‟après lui, grâce au principe de la répartition par membre, les familles nombreuses avait l‟avantage d‟obtenir un cheptel plus

36

important. Il est mécontent du fait que seulement deux sur les six membres de sa famille ont bénéficié de la distribution du negdel. Pourtant tous les membres de sa famille participaient aux activités de l‟élevage au temps du negdel. Pour lui, le partage est injuste. De plus, les membres de l‟administration, le personnel des services de la coopérative et des personnes originaires de commune voisines, reçoivent non seulement une dizaine de bêtes, mais bénéficient en plus de coupons permettant d‟acquérir des biens de consommation courante et des actions dans des usines locales. Cependant indépendamment du mécontentement de Buural, le nombre de bêtes est insuffisant pour subvenir aux besoins de la famille. C‟est le même nombre que celui autorisé précédemment au negdel, mais cette fois sans salaire, sans assurance de santé, sans aide d‟Etat. La plupart des éleveurs ont eu à peine un nombre suffisant d‟animaux pour subvenir à leurs besoins et survivre dans la nouvelle ère de la société.

De plus, la dotation en espèces différentes est souvent inadaptée à l‟expérience des éleveurs ce qui engendre des soucis de garde. Par exemple, les anciens éleveurs de gros bétail se sont retrouvés en possession d‟un grand nombre de petit bétail dont ils ne savent pas s‟occuper pendant la saison froide. Ils les confient à des parents qui passent l‟hiver en montagne, ou bien ils envoient là-haut un de leurs fils. De la même façon, les éleveurs de yacks doivent envoyer un de leurs familles en automne dans les plaines avec leur petit bétail (Finke, 2004 : 256).

Cependant la veille de la privatisation des troupeaux de negdel l‟Etat communiste avait permis aux éleveurs d‟avoir du bétail privé. En effet, certains éleveurs ont eu même près de 300 bêtes ; ce qui leur faisait un capital de base solide pour augmenter le nombre de leurs troupeaux durant la période du marché libéral. Cela était particulièrement bénéfique aux familles de peu nombreuses puisque avec le nombre de bétail qu‟elles pouvaient recevoir par la privatisation ne leur permettait pas de se constituer un capital. En même temps, ces éleveurs ont montré leur capacité à faire face à l‟avènement de la libéralisation. Bien que les familles nombreuses aient reçu un capital intéressant de bétail par la privatisation elles n‟ont pas toutes réussi à le gérer à la suite ; tous les éleveurs n‟ayant pas le même niveau de qualification et de compétences.

Beaucoup de critiques comme ceux formulés par Chagdaa concernent la privatisation des biens mobiliers et immobiliers de negdel, qui sont vendus et même volés. En effet lors

catastrophes naturelles il n‟y a plus de fonds pour pallier au plus pressé. Tout ce qui était tenu par le negdel, notamment la construction des puits, des enclos sont abandonnés et la préparation du foin n‟est plus continuée ; ce qui fait que la dépendance à la nature est renforcée. Et les animaux ne sont plus contrôlés médicalement et n‟ont plus de vaccination (Chagdaa, 2002 : 51). Dans le même sens, l‟anthropologue danois, Bruun (1996 : 67), a conduit une recherche à la campagne et écrit ainsi : « the final privatization process was frequently reported to be chaotic… enabling negdel leaders to maintain control over key assets ». En réalité, la réalisation trop rapide de la privatisation a laissé beaucoup d‟éleveurs avec à peine un nombre minimum nécessaire d‟animaux pour survivre. La privatisation entraine des conséquences désastreuses quant à la dégradation des biens, surtout quand il s‟agissait des biens immobiliers et du matériel, qui ne furent plus entretenus ou qui ne furent plus gérés par des professionnels. Les 238 coopératives du secteur de l‟Agriculture se sont ainsi retrouvées divisés en 224 sociétés d‟actionnaires (fondé sur les membres de famille) et 14 sociétés privées. Les troupeaux, les biens immobiliers et tout le matériel technique sont devenus la propriété de ces sociétés (Ganbold, 1992 : 5). Aucune commune n‟a échappé à ce phénomène de déchéance multiple des bâtiments et des ateliers.

Cependant la majorité des gens à la campagne hésitèrent à abandonner la sécurité du système antérieur. Selon certains sondages réalisés parmi les éleveurs durantcette période, entre 85 et 90 % des membres de certaines coopératives étaient opposés à cette décollectivatisation (Gürsed, 1996). Les politiciens de la capitale voulaient des réformes rapides. L‟opinion était en tout cas partagée entre travailler pour soi et la crainte de l‟insécurité et de l‟individualisme. En même temps, désormais, les éleveurs ne devaient plus compter que sur eux-mêmes pour conserver leurs biens et réduire au minimum le risque de perte. La privatisation signifiait la reconnaissance légale de biens privés tout en devenant le moteur de la nouvelle économie en même temps que la perte de services publics indispensables à l‟activité de l‟élevage. Par exemple, nos interlocuteurs partagent différents avis concernant le negdel :

Buural dit : « Notre negdel nous transportait en voiture ou en camion quand nous changions les camps. Il distribuait durant l‟hiver et le début de printemps le foin et le fourrage préparés grâce aux outils de la coopérative. Le negdel nous envoyait de la main-d‟œuvre durant la mise-bas ».

Dendegmaa se souvient : « Il était difficile de réaliser les quotas des produits laitiers : lait, fromage, crème… Nous n‟avions pas le temps de nous occuper de nos enfants ».

Naran dit : « Avant des éleveurs étaient soignés gratuitement. J‟aimais les activités culturelles, les danses…. organisées par le negdel ».

A la question « que pensez-vous d‟aujourd‟hui de la vie des pasteurs ? » :

Ichig répond : « On est plus libre de la gestion des troupeaux car avant les chefs donnaient les instructions ; pas de possibilité d‟être libre ».

Naran : « A la nouvelle ère du marché économique les gens rusés prennent les avantages et deviennent riches et ceux qui ne le sont pas, deviennent pauvres. Les gens sont plus habiles aux managements ; ils sont contents du système pastoral d‟aujourd‟hui, de la gestion des troupeaux et de la vente ».

Ces réponses expriment à la fois un certain regret de la dissolution du negdel, de ses services et de ses prises en charge d‟une part et mêlé à un sentiment de liberté, face à la soumission antérieure à l‟autorité des dirigeants sur le quota du travail, et la concentration du pouvoir de l‟Etat.

Depuis la privatisation du troupeau, les biens immobiliers se sont complètement dégradés : pas d‟entretien des infrastructures existantes, pas de nouvelle construction de puits et d‟abris. Les ateliers de préparation du foin et stockage de fourrage, les services vétérinaires sont abolis ainsi que l‟organisation du travail collectif, les ateliers de reproduction, de sélection des races, les unités de production de cachemire, de viande ou de lait. L‟élevage individuel, que l‟on pourrait qualifier « de survie » règne. Au niveau social, la pauvreté domine les ruraux (Erdenebaatar, 2004). Le domaine de l‟élevage après la fin des coopératives est perçu comme une régression, un retour en arrière. Plusieurs auteurs parlent même de « destruction » de l‟élevage (Sodnoi, 2005 ; Erdenebaatar, 2004 ; Shagdarsüren O., 2006). En particulier, la dérégulation des parcours des éleveurs, l‟abandon des puits vont provoquer une crise grave qui surgit seulement quelques années après la privatisation, ce que nous abordons dans le chapitre suivant.

Le fait que le matériel automobile comme les tracteurs, les camions sont privatisées, la distribution de foin et fourrage n‟est plus assurée. Plus de vaccination, ni de service de traitement contre les vermines, ni de soin vétérinaire. De même, le camion, prêté par la coopérative pour le déplacement des camps des éleveurs, est abandonné. La main d‟œuvre supplémentaire garantie par la coopérative lors des périodes de travail ponctuel saisonnier comme la mise bas ou la tonte n‟existe plus, les éleveurs doivent alors ne compter que sur eux-mêmes, c‟est-à-dire l‟aide

familiale. D‟ailleurs Sneath souligne la renaissance de l‟entraide familiale après la privatisation (Humphrey & Sneath, 2006). De plus, l‟encadrement technique à l‟organisation des filières de distribution des produits animaux assurés par les coopératives disparaît. Les éleveurs ne sont pas en mesure d‟organiser eux-mêmes les filières de distribution de ces produits qui, de plus, n‟ont plus de débouchés à l‟international dans l‟immédiat (Blanc & Oriol, 2009 : 41). C‟est dans ce contexte que l‟opération de privatisation s‟est clôturée vers la fin de 1992. De même, les puits restent propriété de l‟Etat mais les familles d‟éleveurs doivent les prendre en charge totalement.

Ni le pâturage ni les puits ne sont privatisés ; l‟Etat en reste propriétaire. La littérature concernant la dissolution de negdel traite très peu des camps et des enclos. Pourtant c‟est un sujet bien important. En effet, les abris et les enclos des camps sont distribués comme les autres biens du negdel. La privatisation des camps est réalisée sur la logique de l‟évaluation du coût de la construction des abris et des enclos afin de les diviser aux ex-membres. Les camps d‟hiver sont répartis entre plusieurs familles. Cela posait plusieurs problèmes. D‟abord les familles qui n‟ont jamais campé ensemble précédemment devaient partager le même camp avec une famille inconnue. D‟ailleurs ce problème est souligné par Kazato (2005) qui a écrit que les éleveurs n‟étaient pas très satisfaits de leur camp, alors ils abandonnaient ou démontaient les bois de l‟enclos pour les vendre. De cette manière, beaucoup d‟abris et des enclos ont été détruits. En second lieu, pour la la distribution du camp on accordait la priorité aux familles qui utilisaient ces camps précédemment, pour en devenir propriétaires. Cela posait problème aux nouveaux éleveurs. Comme tout a été réparti, les nouveaux couples n‟ont plus de camp d‟hiver (Erdenebaatar & Batjargal, 2001).

La régression du développement du secteur d‟élevage en Mongolie est une opinion partagée parmi la plupart des scientifiques de ce domaine. Ils définissent le pastoralisme mongol comme « individualiste » ou « l‟élevage au jour le jour » et encore « juste pour subvenir aux besoins familiaux », comme un élevage pour la survie (Gombosüren, 2004). C‟est pourquoi les anciens responsables de negdel affirment qu‟il faut développer le travail en collaboration entre les éleveurs (Sodnoi, 2005 : 7 et Rossabi, 2000). L‟élevage redevient un élevage familial de subsistance avec des troupeaux polyspécifiques (Blanc & Oriol, 2009).

1.3.2. L’économie du marché libre

Nommée zakh zeeliin üye, « l‟économie du marché libre » débute en 1990, suite à l‟effondrement du système communiste, et a entrainé une forte croissance de toutes les cinq espèces de bétail. Selon l‟étude de Humphrey et Sneath (2006), le nombre du cheptel en Mongolie a augmenté par rapport à aux pays voisins, la Bouriatie et la Mongolie Intérieure. Selon Chagdaa (2002: 50-51) après la privatisation en 1992-1993 le nombre du bétail a atteint 33,6 millions en 1999, soit une augmentation de 17,5 %. Le résultat n‟est pas seulement lié à la privatisation, mais à la réunion de plusieurs facteurs. D‟abord les éleveurs ont une plus grande motivation à faire prospérer leur troupeau, qui est devenu privé. Ensuite entre les années 1993 et 1999 les conditions climatiques étaient favorables, avec une rigueur atténuée de l‟hiver. Enfin on enregistre une forte baisse de l‟exportation de viande.

Ci-dessous un tableau récapitulatif de l‟augmentation du cheptel permet de mieux saisir les détails de l‟évolution des chiffres selon les espèces et les trois différentes périodes : l‟ère communiste 1926-1992 ; l‟ère de transition 1993-2003 et l‟économie de la nouvelle ère 2004- 2010. Les deux dernières colonnes représentent le pourcentage d‟augmentation du bétail entre la période communiste et celle du libre marché, postcommuniste, qui montrent une augmentation de près de 158 % du cheptel. Espèce de bétail 1926/1992 (moyenne/ année) 1993/2003 (moyenne/ année) 2004/2010 (moyenne/ année) %d’augmentation entre 1926/1992 et 1993/2003 % d’augmentation entre 1926/1992 et 2004/2010 Camélidé 647 900 331 300 262 600 51.1 40.5 Équin 2 146 500 2 540 400 2 102 500 118.3 98.0 Bovin 2 197 200 2 957 900 2 239 600 134.6 101.9 Ovin 13 391 800 13 282 100 15 499 100 99.2 115.7 Caprin 4 556 800 9 364 900 16 115 600 205.5 353.7 Total 22 940 200 28 476 500 36 219 300 124.1 157.9

Figure 8: Evolution du nombre moyen du cheptel entre 1926-2010 (Les statistiques de l‟année