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1.4 Objectif et modèles d’étude

1.4.2 Le cacaoyer

Le cacaoyer, Theobroma cacao, est un arbre originaire du bassin amazonien (Figure 3). D’abord classé dans la famille des Sterculiaceae (Cronquist, 1981), il est actuellement classé dans la famille des Malvaceae (APG III 2009). La durée de vie du cacaoyer peut aller jusqu’à 80 ans, voire davantage (Montgomery, 1981). Les plants issus de semis déve- loppent une tige orthotrope à croissance rythmique. Cette croissance est interrompue vers

Figure 4 – Croissance du cacaoyer. A) L’ouverture des deux cotylédons d’une jeune plantule de cacaoyer, B) un bourgeon terminal situé au sommet du jeune plant de cacaoyer et C) Vers l’âge de 18 mois, le bourgeon terminal cesse toute activité et est remplacé par un “massif" de 5 bourgeons environ donnant chacun naissance à un rameau plus ou moins horizontal appelé “axe plagiotrope" : une couronne va ainsi se développer.

l’âge de dix-huit mois. L’extrémité de la tige présente alors l’aspect caractéristique d’un massif d’environ cinq bourgeons axillaires disposés en verticille et dont le développement donne naissance aux branches formant la couronne (Figure 4) ; le bourgeon terminal dis- paraît à ce stade. Les branches et les ramifications secondaires ont un port sub-horizontal (plagiotropie). Les bourgeons axillaires du tronc peuvent donner des rejets orthotropes. La croissance des branches de la couronne, indéfinie et discontinue, se fait par des poussées foliaires successives, appelées “flushes" (Figure 3B), en général au nombre de quatre à cinq par an, séparées par des périodes de dormance des bourgeons terminaux (Mossu, 1990). Le cacaoyer est cauliflore, c’est-à-dire que ses fleurs poussent directement sur le tronc et les branches de l’arbre (Figure 3C). Par conséquent, ses fruits sont situés à la fois sur le tronc et sur les branches (Figure 3D et E). Son fruit est une baie dont la production est soumise à un processus d’autorégulation physiologique appelé wilt physiologique. Le wilt physiologique intervient au cours des dix premières semaines de croissance du fruit et peut entraîner le flétrissement de 20 à 90% des jeunes fruits (Braudeau, 1969). Ce phénomène de flétrissement n’intéresse que les jeunes fruits jusqu’à dix semaines après la pollinisation. Après dix semaines de croissance, le fruit fait environ 10 cm de long et n’est plus soumis au wilt physiologique. Le seuil de 10 cm a donc été considéré ici pour distinguer les jeunes fruits soumis au wilt physiologique et appelés chérelles (Figure 3D), des fruits “adultes" qui devraient arriver à maturité après un total de cinq à six mois de croissance, ces fruits sont appelés “cabosses" (Figure 3E). Les cabosses contiennent généralement entre 30 et 40 fèves (Figure 5). Ces fèves de cacao subiront les deux opérations successives que sont la fermentation et le séchage avant exportation pour être utilisées dans la fabrication du chocolat (Mossu 1990, cf. Figure 6).

De nombreux facteurs microclimatiques interviennent dans la croissance du cacaoyer. Une pluviométrie de 1500 à 2000 mm par an est généralement considérée comme la plus favorable à l’installation du cacaoyer, à condition toutefois qu’il n’y ait pas plus de trois

Figure 6 – Séchage de fèves de cacao sur une bâche dans le département de la Lékié au Cameroun.

mois de saison sèche, i.e. avec moins de 100 mm de pluie par mois. C’est pourquoi le cacaoyer est exclusivement cultivé en climat équatorial et tropical humide en Amérique, Afrique et Asie. Le cacaoyer est un arbuste de sous-bois originaire de la forêt amazo- nienne si bien que sa culture traditionnelle a souvent été réalisée sous ombrage (Mossu, 1990). Un ombrage est indispensable pendant les premières années de culture des jeunes cacaoyers. Cet ombrage doit être relativement dense, ne laissant filtrer que 50% de la lumière totale au moins pendant les deux premières années. Le cacaoyer atteint sa taille adulte vers l’âge de 10 ans mais la production de fruits démarre vers l’âge de 3 ans. Lorsque le cacaoyer est productif, l’ombrage constitue un facteur limitant à sa production mais uniquement lorsque tous les autres facteurs de l’environnement sont favorables : la température (moyennes annuelles situées entre 30 et 32◦C), l’humidité (100% la nuit et

vers 70-80% en journée), un sol riche en humus. L’ombrage en cacaoculture permet prin- cipalement de limiter les besoins du cacaoyer et assure ainsi une durabilité de production et un moindre recours aux intrants (engrais et pesticides)(Braudeau, 1969; Mossu, 1990; Johns, 1999).

La première culture du cacaoyer date d’il y a plus de 1500 ans et a été réalisée par la civilisation Maya (Motamayor et al., 2002). Bien que pendant des siècles la cacaocul- ture était exclusivement américaine, elle est depuis le milieu de XXème siècle devenue principalement africaine (Ploetz, 2007), notamment à cause des bioagresseurs entraînant de nombreuses pertes en Amérique. Aujourd’hui le cacaoyer est donc cultivé en Afrique (Côte d’Ivoire, Ghana, Nigeria, Cameroun, Togo, Ouganda, Guinée, Sierra Léone, etc.), mais aussi en Amérique (Brésil, Équateur, Pérou, République dominicaine, Colombie, Mexique, Vénézuela, Guatemala, Costa Rica, etc.) et en Asie (Indonésie, Papouasie- Nouvelle-Guinée, Malaisie, Vietnam, Inde, etc.). Traditionnellement, les deux principaux groupes génétiques de cacaoyers, basés sur des caractères morphologiques et des origines géographiques, sont les “Criollos" et les “Forasteros" (Cheesman, 1944). Un troisième groupe, appelé “Trinitario", a été reconnu et se compose des hybrides de “Criollo" x “Fo- rastero". Cependant, une étude récente propose une nouvelle classification dans 10 grands groupes sur la base de critères morpho-géographiques et génomiques. Ces dix groupes ont été retenus et nommés en fonction de leur origine géographique ou du nom du cultivar traditionnel, ils se nomment : Marañon, Curaray, Criollo, Iquitos, Nanay, Contamana, Amelonado, Purús, Nacional and Guiana (Motamayor et al., 2008). Les petits exploitants sont responsables d’environ 70% de la production mondiale et on estime que le cacao est la principale source de revenus de 5 à 6 millions de petits exploitants à travers le monde (Franzen and Mulder, 2007). La plupart de ces petits exploitants cultivent le cacaoyer au sein de systèmes agroforestiers (Franzen and Mulder, 2007). Ainsi, le cacaoyer est l’une des rares cultures encore produites au sein de systèmes traditionnels agroforestiers, les agroforêts, dans la majorité des pays producteurs. La culture du cacaoyer au Costa Rica (encadré 1) ou au Cameroun (encadré 2) est par exemple réalisée presque exclusivement en systèmes agroforestiers.

(Dahlquist et al., 2007). Les Bribris et Cabécars buvaient une boisson cérémoniale à base de cacao bien avant l’arrivée des colons espagnols et certains indigènes continuent à considérer le cacaoyer comme sacré et lui donne le nom de Tsiru (chez les Bribris), déesse et femme du dieu Sibu (Hidalgo Herrera, 2007). Dans la région de Talamanca, les Bribris cultivent le cacaoyer au sein d’agroforêts. Les deux pics de production du cacaoyer dans cette région sont liés aux deux pics de pluviométrie. Le premier pic de production et donc de récolte se situe entre mai et juin et le second pic de production, le plus important en termes de quantité de cabosses produites, se situe entre octobre et décembre (Deheuvels, 2011). Ces deux pics correspondent aux mois les plus pluvieux entre deux saisons sèches, l’une en février mars et l’autre en septembre-octobre.