• Aucun résultat trouvé

6.1.1 Qualitatif

6.1.1.1 Montage expérimental

Nous utilisons de fines lamelles de bois incluses dans l’hydrogel. Le protocole associé est présenté au chapitre (2) et les lamelles de bois ont été coupées par É. Badel, du laboratoire Piaf(INRA, Clermont-Ferrand). Leur transparence permet de réaliser une observation en microscopie classique. Ces échantillons peuvent ensuite être utilisés de la même manière que les réseaux artificiels : la cavitation peut être naturelle

Figure 6.1 – Axe et coupes du bois. En jaune la coupe transversale (CR), en orange deux coupes longi-tudinale radiale (CLR) et en vert une coupe longilongi-tudinale tangentielle (CLT).

ou déclenchée par une impulsion laser, le séchage peut être réalisé à l’air libre ou contrôlé par l’utilisation d’une enceinte hygrométrique et des solutions salées.

6.1.1.2 Découpe du bois

L’utilisation de lamelles de bois nécessite de choisir un plan de coupe du xylème afin d’obtenir des canaux entiers.

On distingue plusieurs plans, indiqués figure 6.1. Le plan transversal est perpendiculaire à l’axe longi-tudinal du bois (en jaune), on y observe les cernes du bois causé par l’alternance de bois de printemps, aux éléments conducteurs larges et de bois d’été, aux éléments conducteurs étroits. Le plan longitudinal radial contient l’axe longitudinal du bois : il comprend des éléments conducteurs formés à des temps différents. Le plan longitudinal tangentiel est parallèle à l’axe longitudinal sans le contenir. C’est celui que nous utiliserons : au centre, les trachéides ont le même âge.

6.1.2 Déroulé de l’embolie

Si l’invasion d’air semble être le mécanisme de l’embolie dans les feuilles, les observations dans les lamelles de bois (Ponomarenko et al., 2014 [60]) montrent qu’il y a à peu près autant d’événements de cavitation, c’est-à-dire la nucléation d’une bulle dans une zone entièrement remplie d’eau, que d’évène-ments d’invasion d’air, définis comme l’apparition d’une bulle dans une trachéide voisine d’une autre déjà embolisée.

La figure 6.2 montre deux événements de ce type, une première invasion (b) coordonnée avec le ré-trécissement d’une autre bulle (e-d) dans une trachéide communiquant. Lors de la seconde (g), les bulles croissent dans les deux trachéides, orange et violette, après le passage par la ponctuation. Cette dernière ne semble pas offrir de résistance au passage de la bulle : contrairement à la première invasion, il n’y a pas de pause, correspondant à une augmentation de la tension, avant l’invasion de la trachéide violette. Ces événements d’invasion d’air entre deux canaux constituent une des premières observations aussi détaillée de ce mécanisme de l’embolie. Elles ont été réalisées dans le cadre d’une collaboration avec C.D. Ohl

(NTU, Singapour) où nous avons utilisé le dispositif associant caméra rapide et tirs lasers (voir chapitre 2, figure 2.7) développé par son équipe.

6.1.3 En hygrométrie contrôlée

Nous utilisons le dispositif de contrôle des conditions thermodynamiques présenté au chapitre 2, figure 2.5. Le taux d’humidité est contrôlé à l’aide de solutions salées. La solution est changée au plus une fois par jour sans ouvrir l’enceinte à l’aide d’un assemblage de tuyaux et seringues. C’est donc, si l’on veut un nombre suffisant de paliers, une expérience longue. Celle que nous présentons ici a duré 16 jours et a été réalisée par V. Marchand lors de son stage au LIPhy.

6.1.3.1 Résultats

La figure 6.3 présente l’évolution de la lamelle de bois lors d’un séchage contrôlé. 50% de l’aire des canaux est embolisée à la pressionP50=−0,2MPa. Cette valeur est bien plus faible que celle de -3,16 MPa, mesurée par Cochard et al., 2005 [19] en utilisant le Cavitron.

Le temps entre deux changements de solution est d’une journée, ce qui est très supérieur au temps nécessaire à l’équilibre entre l’atmosphère et l’échantillon, moins de 4 h. Nous observons d’ailleurs que l’aire embolisée atteint un pallier avant le changement de solution, à l’exception des pressions 0 MPa et -0,8 MPa.

Cependant, si l’on attend plus longtemps pour changer la solution, comme lors de la pression imposée -0,4 MPa, des événements de cavitations peuvent se produire, conduisant à une progression de l’embolie notable, par exemple à t = 250h. Dans ces conditions, la progression de l’embolie est à la fois liée à la résistance des ponctuations mais aussi au caractère aléatoire des nucléations. Définir une pression correspondant à un pourcentage d’éléments conducteurs embolisés n’est donc pas possible puisque ce pourcentage dépend d’une probabilité de nucléation. On peut imaginer qu’un tel échantillon soumis à une faible différence de pression puisse s’emboliser intégralement pour peu que l’on attende suffisamment longtemps.

6.1.3.2 Perspectives

Contrairement aux feuilles, cette observation optique ne permet pas de déterminer la pression corres-pondant à un certain pourcentage d’aire embolisée. Cependant, cette utilisation combinée du contrôle de l’hygrométrie et des lamelles de bois incluses dans l’hydrogel pourrait s’avérer utile dans d’autres circons-tances.

La possibilité d’une nucléation sur une large gamme de pression peut permettre d’étudier la croissance de la bulle en fonction de la pression. Par conséquent, on pourrait décorréler la pression initiale P0 du module de compressibilité effectifKeff grâce à la formule :

Req/Rc= (−P0/2Keff)1/3 (6.1)

Figure 6.2 – Invasion d’air dans une trachéide. La cavitation a été déclenchée par impulsion laser (croix visible en (b) ). (a) Schéma des différentes trachéides dans lesquelles se propage la bulle. (b-c) Expansion de la bulle après la nucléation dont l’origine est indiquée par la croix rouge Les trachéides vertes et bleues semblent communiquer. (d) La bulle remplit la partie visible des trachéides verte et bleue. (d) Invasion d’air de la trachéide verte vers la trachéide orange (flèche rouge). (e-g) Croissance de la bulle dans la trachéide orange. La bulle semble se rétracter dans la trachéide bleue, les flèches bleues indiquant l’extrémité de la bulle. (h) Invasion d’air de la trachéide orange vers la trachéide violette (i-j) Croissance de la bulle dans les trachéides orange et violette.

(a)

(b)

Figure 6.3 – Embolie dans une lamelle de bois incluse dans l’hydrogel sous humidité contrôlée. (a) Progression de l’embolie au cours du temps, chaque zone de couleur correspond à une pression différente. À la fin de l’expérience, nous ouvrons la boîte : le séchage n’est plus contrôlé (zone grise). (b) Carte de l’embolie en fonction de la pression imposée.

Figure6.4 – Principe de la tomographie X. Figure par Carmona, 2009 [13].

On peut aussi soumettre un échantillon préalablement réhydraté à une ou plusieurs déshydratations. D’après Vincent, 2012 [89], le déroulement des embolies diffère : le processus est homogène dans l’espace et beaucoup plus rapide. Cela suggère que l’embolie occasionne des dégâts dans le bois. En utilisant une atmosphère contrôlée autour de l’échantillon, nous pourrions réaliser une embolie à faible pression négative, peut-être moins destructive que celles de Vincent, 2012 [89], où le séchage s’effectue à l’air libre. Cela peut permettre de déterminer les raisons de ce caractère destructif : est-ce le nombre de trachéides embolisées ou à l’exposition à une forte pression négative qui importe ? Notons que l’utilisation de techniques telles que la microscopie à balayage électronique apporterait un éclairage supplémentaire sur l’état des ponctuations dans l’échantillon.