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2 La traduction automatique

2.5 La traduction automatique dans les jeux vidéo

2.5 La traduction automatique dans les jeux vidéo

Afin de pouvoir nous rendre compte du développement de la TA dans le domaine

vidéoludique, il nous faut d’abord tenir compte de l’état de la question à l’heure actuelle.

Comme notre travail s’inscrit dans les recherches visant à évaluer la qualité de

traduction automatique dans un contexte demandant un jargon spécifique qui est le jeu vidéo, nous inclurons également les recherches faites sur la traduction de jeu vidéo et l’état actuel de l’intégration de la traduction automatique dans le jeu vidéo.

2.5.1 La traduction du jeu vidéo

Il y a peu de temps encore, la localisation de jeux vidéo était une pratique encore peu reconnue dans le domaine de la traduction. Entre 2006 et 2012, on trouve seulement dix articles qui s’attardent sur le sujet de la traduction de jeu vidéo et, bien qu’O’Hagan et Mangiron (2013) expliquent que ce chiffre n’est pas à prendre au pied de la lettre car certaines conférences et recherches ne sont pas toujours publiées ou référencées en ligne, ce chiffre reste néanmoins très bas. Ce n’est qu’avec les recherches et études faites par Minako O’Hagan, Carme Mangiron et Miguel Bernal-Marino que les jeux vidéo ont pu se créer une place parmi les études de la traduction (Bushouse, 2015, p. 2), avec leurs premières recherches publiées dans la fin des années 90 et début des années 2000 (Mangiron, 2018, p. 123).

Communément, on considère la traduction de jeux vidéo comme une traduction hybride.

Entre sous-titres, voix off, traduction de poèmes ou même terminologie technique, la traduction de contenu vidéoludique relève autant de la traduction audiovisuelle,

littéraire, technique et requiert en plus d’autres types de compétences. Cependant, bien que nous venions d’énumérer de nombreuses dimensions qu’offre la traduction de contenu vidéoludique et qu’il existe une quantité importante de littérature portant sur la localisation de jeu vidéo, peu de cas d’études ont été publiés (Mangiron, 2018). En effet, le nombre d’études dédiées à des recherches sur la terminologie, des études de corpus, des études de sociologie ou d’idéologie, ainsi que des études sur la censure dans le cadre de la localisation de jeux vidéo reste maigre (ibid).

Parmi les recherches existantes, on trouve souvent des auteurs qui pratiquent eux-mêmes la localisation de jeux vidéo. Ils ont l’avantage d’avoir de l’expérience dans ce

26 domaine, car l’industrie du jeu vidéo reste très privative quant au partage des

informations et des données (O’Hagan et Mangiron, 2013).

2.5.2 La traduction automatique dans les messageries instantanées

Les recherches faites sur la traduction automatique en général sont nombreuses et connaissent souvent des résultats fructueux. Cependant, tout comme les recherches concernant la traduction de jeu vidéo, il semble que celles concernant l’efficacité de la traduction automatique dans des conversations instantanées se font encore rares (Sahin et Duman, 2013). À notre connaissance, une des premières études a été conduite en 2002 par Aiken et al. (2002, cité dans Aiken et al., 2009). Le but était d’évaluer la

précision et l’intelligibilité du système SYSTRAN avec quatre locuteurs parlant l’anglais, le français et l’allemand. En 2009, Aiken et Ghosh ont publié une recherche sur

l’utilisation de Google Translate lors de conférences professionnelles, recherche qui visait à mesurer la précision du système. Une année plus tard, une recherche établissant une comparaison entre le système Google Translate et Apertium5 dans un contexte de messagerie instantanée est publiée par Calefato, Lanubile et Minervini (2010). Les chercheurs se demandaient si la traduction automatique permettait de lever les barrières de culture et langue en analysant des messages échangés lors de la

distribution de tâches liées à l’ingénierie. Leurs résultats penchaient en faveur de Google Translate, mais précisaient que les deux systèmes pouvaient être utilisés lors de la messagerie instantanée, car ceux-ci n’interrompaient pas l’interaction en temps réel. En 2011, Pennel et Liu publient leurs résultats positifs quant à l’élaboration d’un système de traduction automatique visant à normaliser des abréviations SMS qui peuvent avoir lieu lors d’échanges de messages informels comme les emails, les SMS ou les

conversations dans des chat rooms.

Une autre recherche qui utilisait Google Translate comme système de traduction était celle de Sahin et Duman, publiée en 2013. Celle-ci visait à mesurer l’intelligibilité et l’exactitude grammaticale des messages de chat traduits instantanément par Google Translate, en utilisant le système de messagerie instantanée Google Talk, un système qui n’est plus disponible aujourd’hui. Dans l’ensemble, les trois quarts des messages

5 https://www.apertium.org/index.deu.html#?dir=fra-epo&q=

27 échangés entre les participants russes et anglophones de leur étude se sont révélés intelligibles et exacts (Sahin et Duman, 2013).

L’étude publiée par les chercheurs Gao et al. en 2014 visait quant à elle à améliorer un système de traduction automatique en proposant une interface qui montrait à l’écran deux traductions générées par deux traducteurs différents, plutôt que d’avoir une seule traduction. En récoltant les avis des utilisateurs de cette nouvelle interface, les

chercheurs ont pu déterminer que cette dernière pouvait aider à l’amélioration des communications interlinguistiques, car cette disposition permettait de mettre en avant les erreurs freinant une bonne communication.

L’une des études les plus récentes concernant la TA de chats est celle de Farajian et al.

(2020) qui rapporte les résultats des scores BLEU et TER pour évaluer les traductions automatiques à la suite de discussions traduites entre un client germanophone et d’un intermédiaire anglophone.

2.5.3 L’introduction des systèmes de traduction automatique dans les jeux vidéo Malgré nos recherches étendues, nous n’avons pas trouvé d’études publiées en français ou en anglais concernant l’intégration de la traduction automatique dans les jeux vidéo.

Jusqu’à maintenant, l’intégration de la TA dans les médias vidéoludiques et son impact sur ceux-ci semble être un aspect encore peu recherché. Nous avons cependant trouvé un article publié en 2020 concernant l’introduction de la traduction automatique neuronale dans la localisation de jeux vidéo ainsi que les différents défis qui

accompagnent une telle association entre les deux supports (Anselmi et Rubio, 2020).

D’après Anselmi et Rubio (ibid), les trois défis principaux de la localisation sont de respecter la terminologie, les variables et tags ainsi que la créativité de la langue.

Il semblerait donc que les nombreux progrès liés à la TA et le succès de la qualité des systèmes de traductions neuronaux encouragent une possible association entre le monde prudent du jeu vidéo et la traduction automatique. Anselmi et Rubio (2020) expliquent que cette prudence à l’égard de l´introduction de la TA provient du fait que la localisation est une partie essentielle pour le joueur car elle permet plus que la simple compréhension des mécanismes du jeu et de ses règles ; la localisation leur permet d’apprécier le gameplay et de se sentir impliqué dans le jeu.

28 D’ailleurs, cette prudence provenant de l’industrie vidéoludique s’illustre parfaitement avec un exemple mentionné par Chandler et Derming (2011, p. 19), qui expliquent comment en 2002, le jeu de combat Kabuto Chojin qui était prédestiné à rentrer dans la série des jeux à bonne réputation de la console Xbox, s’est vu détrôné de sa place dû à l’ajout erroné d’une piste audio dans le jeu. Cette brève piste contenait des extraits du Coran. Cette erreur avait entraîné le bannissement total du jeu en Arabie Saoudite et dans d’autres pays musulmans, causant par la suite le rappel des jeux en magasin ainsi que l’interruption totale de sa vente. Le choc culturel est une matière très délicate à traiter et à ne pas prendre à la légère lors de la localisation de tels supports, et ce problème nous laisse comprendre l’hésitation de l’industrie du jeu vidéo à automatiser certains aspects du développement.