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La théorie de la fonctionnelle de la densité

Chapitre 2 : Théorie et méthodes

2.1 La théorie de la fonctionnelle de la densité

Toute utilisation de la chimie quantique repose sur l'équation fondamentale posée par E. Schrödinger [11]. En théorie, la résolution de cette équation permettrait de déterminer la fonction d'onde Ψ et l'énergie E exactes d'une molécule dans un état électronique donné. Sous sa forme indépendante du temps, pour un état stationnaire, cette équation s'écrit:

𝐻�𝜓(𝒓, 𝑹) = 𝐸𝑠𝑠𝑠𝑠𝜓(𝒓, 𝑹)

r et R sont des vecteurs qui représentent respectivement la position de chaque électron (r1,

r2, …, rn) et de chaque noyau (R1, R2, …, RN) d'une molécule contenant donc n électrons et N noyaux. Ĥ est l'Hamiltonien du système et Esyst est l'énergie du système. Cet opérateur mathématique prend en compte la somme de toutes les interactions existant au sein d'une molécule. L’Hamiltonien moléculaire se décompose de la manière suivante :

𝐻� = 𝑇�𝑁+ 𝑉�𝑁𝑁+ 𝑇�𝑒+ 𝑉�𝑒𝑒+ 𝑉�𝑁𝑒

avec 𝑇�𝑁 et 𝑇�𝑒 les énergies cinétiques des noyaux et des électrons, 𝑉�𝑁𝑁 le terme d’interaction noyau-noyau, 𝑉�𝑒𝑒 le terme d’interaction électron-électron et l’opérateur 𝑉�𝑁𝑒 l'énergie d'interaction entre les noyaux et les électrons. En unité atomique, on pose :

𝐻� = − �2𝑀A2 𝐴 𝑁 𝐴=1 + � �𝑍𝒓𝐴𝑍𝐵 𝐴𝐵 𝑁 𝐵>𝐴 𝑁 𝐴=1 − �2𝑖2 𝑛 𝑖=1 + � �𝒓1 𝑖𝑖 𝑛 𝑖>𝑖 𝑛 𝑖=1 − � �𝒓𝑍𝐴 𝑖𝐴 𝑛 𝑖=1 𝑁 𝐴=1

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avec ZN le numéro atomique du noyau de l'atome N, rij la distance séparant deux électrons i et j, riN, celle séparant un électron i d’un noyau N, rAB la distance entre deux noyaux A et B et MN la masse du noyau N. Dans l’approximation de Born-Oppenheimer [12] et à une géométrie donnée, le second terme est constant. L’Hamiltonien ne dépend que du nombre d’électrons ainsi que de la charge et des positions des noyaux dont émerge le potentiel noyau-électron.

Contrairement aux méthodes de type Hartree-Fock pour lesquelles l’énergie d’un système est déterminée à partir de sa fonction d’onde, la DFT propose de s’appuyer uniquement sur la densité électronique. Les premiers modèles de théorie basés sur cette quantité ont été proposés dès les années 1920 par Thomas, Fermi et Dirac mais leurs tentatives ont conduits à des résultats mitigés [13]. Ces types de modèles ont donc été éclipsés par les succès rencontrés par la suite par les méthodes basées sur la fonction d’onde. Pourtant, de manière formelle, lorsque la taille du système augmente, une méthode ayant pour objet central la densité électronique plutôt que la fonction d’onde possède un atout considérable, le nombre de ses variables augmentant moins rapidement que celui de la fonction d’onde. Il a fallu attendre la DFT pour finalement obtenir le succès escompté. Cette théorie trouve ses fondements dans deux théorèmes établis par Hohenberg et Kohn qui ont montré que l’énergie de l’état d’un système peut être calculée à partir de la seule connaissance de sa densité électronique [14].

Le premier théorème est basé sur une démonstration par l’absurde et prouve que : « à une densité électronique ρ(r) donnée correspond un potentiel externe Vext unique ». Pour un état donné, une densité électronique est associée à un potentiel externe unique. Ainsi, Wilson observa que [15] : (i) on obtient le nombre d’électrons en intégrant la densité électronique (ii) la position d’un noyau est définie par une zone dépourvue de densité électronique (iii) la taille de cette zone permet de remonter à la charge du noyau. Il en résulte qu’à partir de la connaissance de la densité électronique, on peut retrouver l’Hamiltonien et la fonction d’onde du système.

De manière analogue à la méthode Hartree-Fock, on peut, pour une densité électronique ρ(r) donnée, approcher l’énergie exacte E0 de l’état du système par un principe variationnel :

� 𝜓𝐻� 𝜓𝜓𝒓 = 𝐸 ≥ 𝐸0

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approche la densité exacte de l’état. Le second théorème d’Hohenberg et Kohn a ainsi été posé : « Il existe une fonctionnelle universelle exprimant l’énergie en fonction de la densité électronique, valide pour tout potentiel externe. Pour chaque potentiel externe particulier, l’énergie de l’état fondamental du système est la valeur qui minimise cette fonctionnelle et la densité qui lui est associée correspond à la densité exacte de l’état fondamental. » [14].

En restant dans l’approximation de Born-Oppenheimer, l’énergie est divisée en trois composantes qui sont l’énergie cinétique des électrons, l’interaction noyaux-électrons et la répulsion électron-électron. Cependant, la détermination de l’énergie cinétique dans un formalisme libre de toutes considérations orbitalaires n’a conduit qu’à des résultats insatisfaisants. Kohn et Sham ont proposé de réintroduire les orbitales pour parvenir à une meilleure description de l’énergie cinétique [16]. Dans ce formalisme, la fonctionnelle E[ρ(r)]

exprimant l’énergie en fonction de la densité se décompose de la manière suivante :

𝐸[𝜌(𝒓)] = 𝑇[𝜌(𝒓)] + 𝑉[𝜌(𝒓)] + 𝐽[𝜌(𝒓)] + 𝐸𝑥𝑥[𝜌(𝒓)]

avec T[ρ(r)] l’énergie cinétique des électrons qui n’interagissent pas. V[ρ(r)] est composé de l’énergie potentielle d’interaction électron-noyau et du potentiel de répulsion entre les noyaux. J[ρ(r)] est la répulsion électronique qui englobe l’interaction coulombienne de la densité électronique. On l’exprime par :

𝐽[𝜌(𝒓)] =12 � 𝜌(𝒓)|𝒓 − 𝒓1 | 𝜌(𝒓′)𝜓𝒓𝜓𝒓′

Exc[ρ(r)] est l’énergie d’échange corrélation. Ce terme prend en compte l’énergie cinétique des électrons interagissant, l’énergie d’échange et la corrélation dynamique du mouvement des électrons.

Ces éléments sont les piliers de la DFT qui jusqu’à ce point est une théorie exacte. Toutefois, nous ne sommes pas en mesure de connaître la forme exacte de la fonctionnelle d’échange-corrélation et c’est ce qui introduit une approximation dans la DFT. Aujourd’hui, les développements de la DFT reposent notamment autour de la recherche de fonctionnelles d’échange-corrélation [17] qui vont améliorer les résultats. On distingue quatre grandes familles de fonctionnelles.

Tout d’abord, on trouve les fonctionnelles basées sur l’approximation de la densité locale (LDA) dans lesquelles l’énergie d’échange-corrélation est exprimée comme l’intégrale d’une fonction de la densité électronique. Cette densité électronique est considérée comme constante autour du point considéré et définie comme un gaz uniforme d’électrons.

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Contrairement aux fonctionnelles de type LDA qui supposent une densité électronique constante autour du point que l’on considère, les fonctionnelles basées sur l’approximation du gradient généralisé (GGA) introduisent un gradient de la densité, c'est-à-dire l’analyse des fluctuations de la densité locale. On distingue parmi ces fonctionnelles celles de type semi-empiriques comme BLYP [18] ajustées de sorte à reproduire certains résultats expérimentaux et celles purement théoriques comme PBE [19].

Les fonctionnelles hybrides sont aujourd’hui largement utilisées par la communauté des chimistes et en particulier la fonctionnelle d’échange-corrélation B3LYP [18, 20]. L’origine de ces fonctionnelles provient de l’idée de connexion adiabatique qui permet de lier l’énergie d’échange-corrélation à l’énergie cinétique négligée en considérant des électrons non-interagissant. Pour rectifier l’erreur induite par cette approximation, on fixe à l’aide d’un opérateur une échelle de répulsion inter-électron. Cette échelle est fixée entre 0 et 1. Ces chiffres indiquent respectivement une absence d’interaction inter-électron ou bien un système où les électrons sont totalement corrélés. On peut ainsi agir sur l’énergie de corrélation électronique. On peut améliorer les résultats en introduisant un certain pourcentage de l’échange non local Hartree-Fock pour décrire l’énergie d’échange.

Les fonctionnelles méta-GGA sont issues des trois types de fonctionnelles que nous venons de présenter auxquelles on ajoute en plus la dérivée seconde de la densité électronique. Elles sont de la forme F(ρ, Δρ, Δ²ρ, HF).