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de bien-être

Section 2. Une transition entrepreneuriale vecteur de bien- bien-être

I. La satisfaction au travail des entrepreneurs

La satisfaction au travail a fait l’objet de nombreuses recherches depuis ces vingt dernières

années. Bien qu’elle soit de nature subjective (Millan et al, 2013), une tendance ressort

cependant de la littérature. L’entrepreneuriat est une occupation professionnelle capable d’apporter de la satisfaction aux personnes qui ont choisi cette voie professionnelle

(Blanchflower 2000 ; 2004). Cependant, n’étant pas de nature linéaire et constante,

l’entrepreneuriat peut, dans certaines conditions également réduire la satisfaction à l’égard de

la vie (Wolfe et Patel, 2018).

La prédominance de la satisfaction au travail 1.

De manière générale, la première affirmation que l’on peut noter, malgré une activité

professionnelle plus stressante, est que les travailleurs non-salariés affichent une plus grande satisfaction au travail que les salariés (Blanchflower et Oswald, 1998 ; Blanchflower, 2000 ; Blanchflower, 2004 ; Taylor 2004 ; Millan et al, 2013). Cette satisfaction au travail des

indépendants peut s’expliquer par la nature même du métier d’entrepreneur et les aspects

bénéfiques que les travailleurs indépendants peuvent retirer de cette carrière professionnelle.

Ainsi, l’autonomie et l’indépendance que leur offre l’entrepreneuriat (Hundley, 2001 ; Benz et

Andersson, 2007 ; Binder et Coad, 2013 ; Binder et Coad, 2016), la libre gestion du temps de travail (Andersson, 2007) apparaissent comme autant de facteurs favorisant une grande satisfaction au travail des indépendants.

De même, la sécurité de l’emploi affecte tout aussi positivement cette satisfaction au travail (Hundley, 2001). Lorsque cette sécurité n’est plus assurée, la satisfaction au travail peut en

être ébranlée (Millan et al, 2013). Afin de lutter contre cette possible source d’insatisfaction,

les entrepreneurs peuvent modifier leur rapport aux temps de travail. Ainsi, les longues heures de travail perçues pourtant comme un fardeau, peuvent également être perçues comme un challenge et renforcer la motivation au travail (Andersson, 2007). Cette perception positive des heures accrues de travail peut favoriser la satisfaction au travail, elle peut contribuer à la

réduction de l’insécurité d’emploi et opérer un changement au sein même de l’entrepreneur. Les entrepreneurs travaillant énormément plus que la normale peuvent devenir, ce que l’on

appelle des bourreaux de travail (Ajayi-Obe et Parker, 2005 ; Andersson, 2007 ; Millan et al,

2013 ; Wolfe et Patel, 2018), l’accroissement du volume horaire de travail devenant ainsi un

choix personnel à l’entrepreneur. Cependant, tout est affaire de dosage et il est vital que les

entrepreneurs prêtent une attention particulière à leur volume horaire de travail puisque cela

pourrait opérer l’effet inverse que celui-ci souhaité de prime abord et, dans une certaine mesure, diminuer le taux de satisfaction (Wolfe et Patel, 2018).

De fait, être son propre patron et être autonome permet de compenser la nature ardue du

métier d’entrepreneur (Binder et Coad, 2013). Selon Blanchflower, dans ses travaux de 2000

et 2004, il note que les entrepreneurs sont plus susceptibles de penser qu’ils vont retrouver

rapidement un emploi chez un autre employeur avec une rémunération équivalente, ce qui contribue à maintenir leur satisfaction au travail. Dans la même veine, Millan et al (2013) notent également que le taux de chômage est de nature à influer sur la satisfaction au travail. Lorsque le taux de chômage est élevé, les employés et les entrepreneurs éprouvent une

satisfaction concernant leur travail. Dans le quotidien de l’entrepreneur, Millan et al. (2013)

notent cependant que le fait d’être un autoentrepreneur sans salariés impacte négativement le sentiment de satisfaction au travail en comparaison aux entrepreneurs qui ont des salariés.

Une satisfaction plus mitigée dans les autres domaines de la vie 2.

Lorsque l’on étudie la satisfaction des entrepreneurs, trois domaines ressortent systématiquement de la littérature : la satisfaction à l’égard de la vie en générale, la satisfaction à l’égard du temps libre, des loisirs et la satisfaction à l’égard de la vie

professionnelle.

Nous venons d’étudier la satisfaction au travail des entrepreneurs et avons constaté qu’elle est

positive. Cependant, lorsqu’on lacompare avec la satisfaction à l’égard de leur vie en général

et à l’égard de leur temps de loisir, le constat est que, dans ces deux domaines, la tendance est à l’impact négatif de l’entrepreneuriat. En effet, la transition entrepreneuriale, si elle impacte

positivement la satisfaction au travail immédiatement après ladite transition (Van der Zwan et al, 2018), les entrepreneurs révèlent que, dans le même temps, ils constatent une diminution de leur satisfaction dans les autres domaines (vie, loisir) (Binder et Coad, 2016). Van der Zwan et al. (2018) précisent même que la satisfaction à l'égard des loisirs est plus faible chez

les entrepreneurs dans l’année qui suit la transition entrepreneuriale en comparaison avec la

satisfaction ressentie par ceux n’ayant opéré aucune transition entrepreneuriale.

Ainsi, la transition entrepreneuriale n’a pas d’impact significativement positif sur la satisfaction à l’égard de la vie en général. Binder et Coad (2016) apportent un élément de compréhension de cette tendance en expliquant que les entrepreneurs satisfaits de leur travail

d’indépendant peuvent avoir tendance à ignorer les autres domaines de leur vie. Pleinement satisfait de leur choix de carrière, les autres domaines de satisfaction semblent, de fait, devenir

secondaires. Ainsi, la transition vers l’entrepreneuriat pose des défis aux personnes qui changent de voie professionnelle et augmente dans le même temps, la difficulté à combiner la vie professionnelle et les loisirs (Van der Zwan, 2018).

S’agissant de la population handicapée, Banens et al (2007) ont cherché à comprendre l’accès à la vie de couple pour les personnes handicapées. Ainsi, il ressort que la présence d’un

problème de santé et plus encore la survenance dudit problème de santé semble de nature à retarder la mise en couple des personnes handicapées. Ainsi plus le problème de santé avant la

plus les chances d’accéder à la vie de couple pour la personne handicapée sont faibles (de 22% pour un simple problème de santé à 55% pour un problème de santé nécessitant une

dépendance à l’aide humaine). De fait, dès lors que la personne est en situation de handicap,

elle ne sera plus considérée comme un partenaire amoureux ou sexuel potentiel (Ribes et

Bourden, 2017), l’apparence physique d’un futur conjoint étant un critère important de

sélection (Bozon, 1991). Cependant, lorsque la personne handicapée parvient à se mettre en couple, Banens et al (2007) se montrent optimistes en affirmant que le handicap pourrait avoir un effet protecteur sur la durée de la vie de couple.

De fait, dans le contexte des personnes handicapées célibataires ayant procédées à une transition entrepreneuriale, le conflit qui peut exister entre la vie professionnelle et la vie personnelle a moins de chance de constituer une source de conflits pouvant générer des effets

négatifs sur la vie de l’entrepreneur en situation de handicap. Pour l’exprimer autrement, là

où, postérieurement à la transition entrepreneuriale, la satisfaction de la vie diminue pour un

entrepreneur non handicapé, s’agissant d’un entrepreneur handicapé célibataire, la satisfaction

au travail et la vie professionnelle aura tendance à être privilégiées par rapport à sa vie privée.

La littérature s’est également employée à étudier la différence d’appréciation de la satisfaction au travail pour chaque catégorie traditionnelle d’entrepreneurs : les entrepreneurs

d’opportunités et les entrepreneurs de nécessité.

La satisfaction des entrepreneurs d’opportunités et des entrepreneurs de

3.

nécessité

Les travaux sur la satisfaction au travail des indépendants a également chercher à comprendre si une différence pouvait être perçue entre la satisfaction au travail ressentie par les

entrepreneurs qui ont choisi l’entrepreneuriat et ceux qui ont subi cette transition

entrepreneuriale. Ainsi, Blanchflower (2000, 2004) affirme-t-il dans ses travaux sur la

satisfaction des indépendants qu’une personne heureuse ne cherchera pas forcément à devenir

indépendant et que l’entrepreneuriat n’est pas une activité professionnelle qui convient

Si nous pouvons noter un même taux de satisfaction à l’égard du temps de loisirs chez les

entrepreneurs de nécessité et chez les entrepreneurs d’opportunité (Binder et Coad, 2016 ;

Wolfe et Patel, 2018), une différence importante sépare la satisfaction au travail entre ces

deux catégories d’entrepreneurs. Premièrement, les entrepreneurs qui ont librement choisi

l’entrepreneuriat éprouvent une très grande satisfaction dans leur choix de carrière professionnelle (Binder et Coad, 2013). Dans leurs travaux de 2016, Binder et Coad précisent

même que les entrepreneurs qui ont opté librement pour l’entrepreneuriat sont les seuls à

pouvoir pleinement apprécier le style de vie entrepreneuriale.

En effet, deuxièmement, les entrepreneurs qui optent pour l’entrepreneuriat comme activité

professionnelle suite à une période de chômage, ne connaissent pas de telles améliorations de

leur qualité de vie. L’entrepreneuriat de nécessité ne semble ne pas être autant porteur de

satisfaction que l’entrepreneuriat choisi. Binder et Coad (2016) expliquent cette différence par

la nature même de la motivation à l’origine de la transition entrepreneuriale. L’entrepreneuriat

n’étant pas un choix délibéré, les entrepreneurs contraints peuvent éprouver des difficultés à

s’identifier à ce style de vie.

Cependant, Millan et al. (2013) viennent apporter une nuance à ces propos en expliquant que les entrepreneurs de nécessité peuvent ressentir davantage de satisfaction au travail en raison

de leurs attentes moins élevées à l’égard de cette activité professionnelle. Les entrepreneurs d’opportunités pouvant porter de grands espoirs sur leur indépendance et les bienfaits qu’ils peuvent en retirer, les entrepreneurs contraints peuvent avoir des attentes moins élevées et, de

fait, leur satisfaction peut en être meilleure si l’entrepreneuriat s’avère une réussite.

Le lien entre entrepreneuriat, satisfaction au travail et santé 4.

Ce travail de recherche cherchant à comprendre l’impact sur la santé de la transition

entrepreneuriale des personnes handicapées, une attention doit également être portée sur les

liens qui peuvent exister entre l’état de santé des entrepreneurs, leur engagement dans la vie entrepreneuriale et la satisfaction au travail. Ainsi, Andersson (2007) dresse le constat

la santé des entrepreneurs. Elle affirme même que les travailleurs indépendants sont moins susceptibles de subir une détérioration de leur santé prise dans sa globalité.

Cependant, lorsque la littérature cherche à comprendre l’impact de l’entrepreneuriat sur la

santé, il ressort dans le même temps que la santé mentale des indépendants est moins bonne que celle des salariés (Blanchflower, 2000, 2004 ; Andersson, 2007). Cette population est plus susceptible de ressentir plus de fatigue. Les longues heures de travail peuvent causer des problèmes de sommeil (Guiliani, 2017a, 2017b ; Guiliani & Torrès, 2018) et, de fait, impacter

négativement la récupération physiologique de l’entrepreneur ce qui peut entraîner dans le

même temps, une immunité réduite (Van der Hulst, 2003).

Ainsi, bien que plus satisfait de leur travail, le bien-être est un sujet éminemment subjectif et

la satisfaction de l’entrepreneur devient un bénéfice non pécuniaire pour les entrepreneurs

(Wolfe et Patel, 2018). Etre satisfait de sa vie professionnelle est primordial, tout comme l’est

la nécessité d’être en bonne santé.