II. SYNDROME METABOLIQUE (MetS) II.2. MetS et risques cardiovasculaires II.2.4. Physiopathologie du MetS II.2.4.7. La résistance à l’insuline La résistance à l’insuline décrit l’incapacité de régulation du glucose par l’insuline, avec baisse de l’utilisation tissulaire, inhibition de la lipolyse, et de la gluconéogenèse. Elle résulte souvent d’une hyperinsulinémie (cf : résistance du tissu musculaire), entraîne des conséquences différentes selon le tissu dans lequel elle est présente. En ce qui a trait au métabolisme glucidique, la résistance à l’insuline est associée avec des anomalies du transport transmembranaire de glucose au muscle squelettique.125,126 Au niveau du foie, elle se manifeste par l’augmentation de la gluconéogenèse et de la glycogénolyse.127,128 La résistance à l’insuline de ces tissus engendre une hyperglycémie et une hyperinsulinémie compensatoire. A l’instar de l’obésité viscérale, la résistance à l’insuline influence aussi le métabolisme lipidique. En temps normal, l’insuline inhibe la lipolyse du tissu adipeux.129 Au contraire, en état de résistance à l’insuline, la concentration plasmatique d’acides gras libres peut être augmentée en raison d’une lipolyse accélérée.129,130 FIGURE II.13. Mécanismes physiopathologiques de l’insulino-résistance ou d’hyperinsulinémie sous forme de « parapluie » qui aboutissent au développement des morbidités cardiovasculaires. L’insulino-résistance est principalement influencée par les facteurs génétiques et environnementaux. HDL-c : cholesterol high-density lipoprotein; LDL-c : cholesterol low-density lipoprotein ; PAI-1 : plasminogen-activator inhibitor–1 ; SNS : sympathetic nervous system. D’après Zavaroni et collègues, 1992.131 Le premier, Randle132 a proposé dès 1963, l’existence d’un « cycle glucose–acides gras ». Ce modèle souligne l’existence d’une compétition au niveau cellulaire des différents substrats, glucose d’une part, acides gras d’autre part ; qui explique l’étroite dépendance des métabolismes des deux principaux substrats énergétiques du système oxydatif. L’augmentation des acides gras libres plasmatiques s’accompagne d’une diminution de l’utilisation cellulaire du glucose. Il faut noter qu’à l’inverse, l’élévation des concentrations de glucose exerce un effet inhibiteur sur l’oxydation des acides gras libres. Les effets inhibiteurs des substrats lipidiques (acides gras et corps cétoniques) sur la disponibilité et l’oxydation du Facteurs génétiques Facteurs environnementaux Obésité Style de vie sédentaire Autres Insulino-résistance Hyperinsulinémie Hyperfibrinogénémie PAI-1 Hypertriglycéridémie HDL-c LDL-c (faibles et denses) Lipidémie postprandiale Intolérance au glucose Hypertension Acide urique Réabsorption du sodium rénal L’activité du SNS Fréquence cardiaque Inflammation Dysfonction endothéliale Maladies cardiovasculaires induisant ainsi une insulino-résistance, sont moins clairs. Randle a suggéré que l’augmentation de l’oxydation lipidique, liée à un afflux plus important d’acides gras libres, était à l’origine d’une augmentation de l’acétyl-coA et du NADH-oxydases intra-mitochondrial conduisant à une inhibition de la phosphofructokinase et de l’hexokinase II, et de façon ultime à une diminution de la captation de glucose, qui explique que le métabolisme non oxydatif du glucose soit également diminué. Si l’effet des acides gras libres sur le métabolisme musculaire du glucose n’est pas remis en cause, d’autres mécanismes expliquant l’effet des acides gras libres sur le transport du glucose ont depuis été évoqués. L’augmentation de la concentration intracellulaire en acides gras pourrait activer les cascades sérine kinase induisant une diminution de la forme phosphorylée de l’IRS-1 (insulin receptor substrat-1) et donc de l’activité de la PI3-kinase (phosphatidylinositol-3 kinase) puis de la cascade de réactions initiée par l’insuline.133,134 Les acides gras libres pourraient également inhiber directement la transcription, l’incorporation dans les membranes cellulaires et l’expression du GLUT4, principal transporteur du glucose. Des études ont également montré que l’hyperinsulinémie était associée à une augmentation de la lipogenèse de novo,135 suggérant ainsi un mécanisme par lequel l’hyperinsulinémie chronique observée en état de résistance à l’insuline pourrait contribuer à la surproduction de triglycérides et de VLDL-cholestérol. Finalement, la résistance à l’insuline serait aussi accompagnée d’un catabolisme ralenti des lipoprotéines riches en triglycérides, en raison d’une diminution des concentrations de lipases lipoprotéiques dans les tissus périphériques, particulièrement au niveau du tissu adipeux.136 Ensemble, ces altérations métaboliques favorisent l’augmentation des concentrations plasmatiques de triglycérides, mais également la diminution des concentrations plasmatiques de HDL-c et la formation de lipoprotéines de faibles densités (LDL-c ) athérogènes petites et denses. La présence de l’insulino-résistance au niveau du foie, du muscle et du tissu adipeux est également associée à une augmentation de la production de cytokines pro-inflammatoires et à une déficience en cytokines anti-inflammatoires.137 D’autre part, certaines cytokines, notamment le TNF-α, peuvent causer la résistance à l’insuline en modifiant l’activité enzymatique nécessaire au bon fonctionnement de la signalisation intracellulaire de l’insuline.138 Une autre cytokine, l’adiponectine aurait plutôt un rôle insulinosensibilisateur.139 Quel est donc l’élément déclencheur du lien causal entre la résistance à l’insuline et l’inflammation ? L’état actuel des connaissances suggère que la présence d’obésité, et plus particulièrement l’accumulation excessive du tissu adipeux viscéral qui est associée à une augmentation de la sécrétion de cytokines pro-inflammatoires, pourrait être en grande partie responsable de cette association.48 Or l’hypothèse selon laquelle un état de surconsommation énergétique constant ou des habitudes alimentaires de piètre qualité représenteraient la cause commune sous-jacente au développement de l’insulino-résistance, de l’obésité et d’un état pro-inflammatoire chez des individus génétiquement prédisposés, pourrait constituer une piste de recherche intéressante. Finalement il existe également un lien entre l’insulino-résistance et l’hypertension. L’effet vasodilatateur de l’insuline serait inhibé. Tel que mentionné précédemment pour l’obésité, l’augmentation des concentrations plasmatiques d’acides gras libres en état de résistance à l’insuline aurait un effet vasoconstricteur contribuant à favoriser la réabsorption de sodium, la stimulation de l’activité du système nerveux sympathique et donc l’hypertension artérielle.140 Certains auteurs suggèrent toutefois que la contribution de la résistance à l’insuline au développement de l’hypertension liée au MetS serait relativement mineure comparativement à celle de l’obésité.141 Dans le document Syndrome métabolique chez le sujet âgé : relations avec la dysrégulation du système nerveux autonome, l'inflammation et le syndrome d'apnées du sommeil. (Page 66-69)