• Aucun résultat trouvé

LA PROTECTION DES HABITATS

Stade Alevin

H. Les espèces compétitrices

2. LA PROTECTION DES HABITATS

La protection des habitats du poisson repose principalement sur les mesures législatives réglementant les activités susceptibles d'affecter de diverses façons l'intégrité de l'environnement aquatique dont dépend la survie et la perpétuation des populations de poissons. De ce fait, la responsabilité première de la protection des habitats incombe aux gouvernements qui ont le devoir de mettre en place les législations appropriées et de veiller à l'application uniforme des règlements. En dehors de mesures législatives qui s'appliquent aux habitats de façon générale, les habitats jugés essentiels peuvent également être protégés par leur acquisition.

L'habitat du poisson est protégé par plusieurs dispositions législatives fédérales et provinciales. Parmi les diverses lois en vigueur ou sur le point de l'être, certaines visent spécifiquement la conservation de l'habitat de la faune; d'autres par contre, bien qu'elles n'aient pas comme objectif premier la protection de l'habitat, concernent certains éléments particuliers de l'environnement et de ce fait en assurent indirectement la conservation.

La Loi sur les Pêches du Canada, par les articles 20, 35 et 36, protège sous divers aspects l'habitat du poisson. Elle définit l'habitat des poissons comme étant les frayères, les réserves de nourriture et aires d'alevinage et de migration dont dépend directement ou indirectement la survie des poissons. L'article 20 s'applique à la construction d'ouvrages faisant obstacle à la circulation du poisson et exige en compensation la construction de passes migratoires, leur entretien et leur exploitation. Les dispositions de l'article 35 touchent les activités effectuées en milieu aquatique empêchant de façon générale de

perturber ou de détruire l'habitat du poisson. Enfin l'article 36 interdit le déversement de substance nuisibles et délétères dans les eaux habitées par le poisson.

Les dispositions de cette loi touchent les aspects fondamentaux de l'habitat et sont d'application très large. Au Québec, la Loi sur les pêches du Canada est difficile d'application du fait que la délégation de pouvoir du gouvernement fédéral n'est que partielle, le Québec ne pouvant appliquer toutes les dispositions de la loi permettant de protéger l'habitat du poisson. En effet, si le gouvernement du Québec est habilité à intervenir en vertu de cette loi sur le constat légal d'infraction, la cessation des travaux, la saisie d'équipements et la poursuite judiciaire des contrevenants (articles 5.3, 5.4 et 6), le recours à certaines dispositions de la loi demeure réservé au Procureur général du Canada et au Ministre fédéral des Pêches et des Océans; il en est ainsi de la demande de plans et devis et la délivrance du certificat d'autorisation (article 37.1) et l'injonction temporaire ou permanente et l'ordonnance ministérielle (articles 37.2 et 41.1. et 38.2 à 38.13).

Au Québec, aucune loi ni règlement n'avaient été adopté jusqu'à ce jour dans le but de protéger spécifiquement les habitats de la faune. Quelques textes législatifs cependant, bien qu'ils ne visaient pas spécifiquement les habitats fauniques, permettaient d'en protéger au moins certaines composantes. Parmi ces législations accordant une certaine protection de l'habitat du poisson, citons principalement:

La Loi sur la qualité de l'environnement dont certaines dispositions assurent la sauvegarde des espèces vivantes et prohibent l'émission, le dépôt, le dégagement et le rejet des contaminants et réglementent la gestion des eaux usées et des déchets.

La Loi sur le régime des eaux interdit l'aliénation du lit et des rives des cours d'eau et de la mer et réglemente l'utilisation des cours d'eau.

La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme dont certaines dispositions relatives à l'élaboration des schémas d'aménagement des municipalités régionales de comtés (MRC) requièrent l'identification de territoires présentant pour la MRC un intérêt d'ordre historique, culturel, esthétique ou écologique. De plus, les articles 158 et 159 de cette même loi stipulent que le gouvernement peut déclarer toute partie du territoire québécois zone d'intervention spéciale dans le but d'assurer d'une part la protection des sites

présentant pour la collectivité une valeur particulière (incluant une valeur écologique) et, d'autre part, la protection, l'amélioration, le renouvellement et l'exploitation des ressources naturelles présentant un intérêt exceptionnel pour la collectivité.

La Loi sur les réserves écologiques assure la conservation à l'état naturel de territoires dans le but de sauvegarder des espèces animales et végétales menacées de disparition ou d'extinction.

La Loi sur les parcs, réserve des terres publiques pour fin de parc de conservation et de récréation ce qui assure dans ces lieux la protection de l'environnement naturel et des habitats.

Le chapitre IV. 1 de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, adopté en juin 1988, vient corriger l'absence d'une législation québécoise orientée sur la conservation des habitats. Dans ses grandes lignes, les dispositions de cette loi stipulent qu'il est interdit de faire une activité qui modifie un habitat faunique sauf dans le cas de celles exclues par règlement et des situations d'urgence nécessitant une intervention. Les habitats fauniques protégés en vertu de ce projet de loi sont ceux déterminés par règlement et, au besoin identifiés par un plan; dans le cas du poisson, la proposition réglementaire définirait comme habitat du poisson "un lac, un marais, un marécage, une plaine d'inondations dont les limites correspondent au niveau atteint par les plus haute eaux selon une moyenne établie par la récurrence de deux ans ou un cours d'eau fréquenté par le poisson". Dans son cadre général, la loi interdira toute activité susceptible de modifier un quelconque élément essentiel de l'habitat. Elle retiend cependant quatre catégories d'exceptions permettant de maintenir et d'encadrer certaines activités pouvant avoir un impact sur les habitats fauniques. En premier lieu, elle exclura par règlement un certain nombre d'activités ayant peu d'impact sur les habitats (le jalonnement minier, les levés géologiques et géochimiques, la fertilisation sylvicole). En second lieu, l'interdiction ne s'applique pas aux activités effectuées conformément à des normes et conditions déterminées par règlement; les secteurs d'activité concernés par ces normes sont les activités récréatives, l'exploitation forestière, l'exploration minière, gazière et pétrolière ainsi que la construction et l'entretien des lignes hydroélectriques. Elle exclue en outre toutes les activités qui, après évaluation de leur impact sur l'habitat ainsi que des possibilités de mitigation, auront été autorisées par le ministre. En dernier lieu, la loi

permettra la réalisation dans un habitat faunique des activités destinées à réparer un dommage causé par une catastrophe ou à prévenir un tel dommage.

Le nouveau chapitre de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune est une mesure légale attendue depuis longtemps au Québec. En effet, le MLCP pourra dorénavant assurer efficacement la protection des habitats sans avoir nécessairement recours à la Loi sur les pêcheries fédérales. De plus, la loi québécoise offre l'avantage d'être plus souple d'application car, comme il a été signalé précédemment, elle prévoit des exceptions pour certains projets réglementés et donne au gouvernement le pouvoir d'autoriser certaines activités.

L'adoption récente (juin 1989) de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables et modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune est une autre mesure législative qui viendra protéger les espèces menacées ou vulnérables désignées, ainsi que leurs habitats. Ce texte législatif prévoit la désignation des espèces menacées ou vulnérables et l'identification de leurs habitats. La liste des poissons dulcicoles ou marins du Québec susceptibles d'être désignées, menacés ou vulnérables englobe une douzaine d'espèces ou de populations géographiquement isolées.

Dans l'attente de l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, les biologistes de la faune interviennent en vertu de la loi sur les pêcheries pour assurer la protection des habitats du poisson. C'est dans la région de Montréal où les multiples projets de développement industriels et urbains constituent autant de facteurs d'agression que les efforts de protection de l'habitat sont les plus nombreux.

Dans cette région, 15% des ressources sont consacrées à l'émission d'avis fauniques et aux démarches légales touchant la réglementation sur les habitats. Les démarches nécessaires à la préparation des procédures judiciaires et ordonnances de restauration mobilisent beaucoup d'énergie et requièrent une formation adéquate au déroulement des procédures légales, souvent complexes. Les biologistes de la faune estiment à juste titre que la mise en force de la nouvelle loi nécessitera l'affectation d'un surcroît de ressource et la formation adéquate du personnel impliqué dans ce domaine d'intervention.

C'est également dans la région de Montréal que sont réalisés la plupart des projets d'acquisition d'habitats aquatiques jugés essentiels grâce à la participation financière de la

Fondation de la Faune du Québec (FFQ) et de Héritage Faune Canada (HFC).

Dans cette région par exemple, on prépare les plans directeurs nécessaires à l'acquisition et à l'aménagement de plusieurs sites comme la baie Brazeau dans le Haut-Richelieu et l'embouchure de la rivière aux Brochets dans la Baie Missisquoi (P. Dumont, comm.

personnelle).