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II. Facteurs de virulence de C. difficile

II.1. Les facteurs de colonisation

II.1.1. Les adhésines

II.1.1.5. La protéine de liaison à la fibronectine Fbp

entre deux séquences inversées répétées de 21 pb chacune et qui sont situées à 57 pb en amont du gène cwpV. Le promoteur du gène cwpV est, lui, situé à 36-37 pb en amont de la séquence inversée (figure 8) [128, 129].

Au moment de la sécrétion de la protéine CwpV au travers de la membrane cellulaire, probablement via le système de translocation SecA2 [130], la protéine CwpV subit un premier clivage permettant la libération du peptide signal. Puis, la protéine subit un deuxième clivage auto-protéolytique au niveau de la thréonine 413 générant deux sous-unités de 40 kDa et 120 kDa. Les deux sous-unités se réassocient par la suite pour former un complexe à la surface de la cellule bactérienne où la liaison est assurée par la partie N-terminale de la protéine (figure 9) [129, 131]. Ce mécanisme est conservé entre les différents types de CwpV et il semblerait qu’il soit aussi conservé pour toutes les protéines CWPs [129].

CwpV fait partie des 28 paralogues de la protéine HMW-SLP qui sont regroupés dans la famille des CWPs (Cell Wall Proteins) [132]. Chez C. difficile, quelques-unes de ces protéines, notamment la protéine Cwp66 et la protéase Cwp84, ont été associées au phénomène d’adhésion de la bactérie aux cellules hôtes [126, 133 ]. Les protéines HMW-SLP montrent aussi une forte adhésion aux cellules épithéliales humaines et murines et leur adhésion est inhibée par des anticorps anti- HMW-SLP [123]. Les homologies constatées entre ces protéines et CwpV laissent supposer l’existence d’homologies fonctionnelles. L’expression de CwpV ne semble cependant pas modifier la capacité d’adhésion de C. difficile aux cellules Caco-2. Il a été en revanche démontré que CwpV est capable d’induire l’agrégation des cellules bactériennes [129].

L’utilisation du système de variation de phase par certains pathogènes pour - à priori - échapper à la réponse immunitaire de l’hôte et pour mieux s’adapter aux conditions hostiles de leurs environnements, laisse supposer que la protéine CwpV joue un rôle dans la pathogénicité de C.

difficile.

 

II.1.1.5. La protéine de liaison à la fibronectine Fbp

La protéine Fbp (annotée Fbp68 pour la souche 79 685 de C. difficile et FbpA pour la souche 630) est une protéine de surface capable de fixer la fibronectine. Elle est également capable de se lier, dans une moindre mesure, à d’autres molécules de la matrice extracellulaire

(fibrinogène et vitronectine). Des essais d’immunofluorescence indirecte et des tests ELISA montrent l’aptitude de C. difficile à se lier à la fibronectine soluble ou immobilisée. Des anticorps dirigés contre la protéine Fbp68 purifiée inhibent partiellement l’adhésion de C.

difficile à la fibronectine et aux cellules Véro, ce qui suggère l’implication de cette protéine dans

le processus de colonisation de C. difficile aux cellules hôtes [134].

La protéine Fbp68 serait formée de deux domaines distincts compris entre les acides aminés 1-300 et 480-570, avec une région intermédiaire présentant une conformation en super-hélice (figure 10). Fbp68 ne possède pas de peptide signal. La protéine est codée par le gène fbp68 de 1773 pb qui est présent en une seule copie dans le génome. Le gène est hautement conservé entres les souches [134].

Une étude biochimique a permis d’identifier les domaines de liaison entre la fibronectine et la protéine Fbp68. Celle-ci se lierait au domaine N-terminal de la fibronectine grâce à 194 résidus d’acides aminés localisés à sa partie C-terminale. L’étude a également souligné l’importance du manganèse dans le processus de liaison de la protéine à la fibronectine [135].

De façon générale, les protéines de liaison à la fibronectine appartiennent à la famille MSCRAMMs (Microbial Surface Components Recognizing Adhesive Matrix Molecules) regroupant les protéines qui se lient aux différents composés de la matrice extracellulaire comme le collagène, le fibrinogène, l’élastine, la vitronectine, la laminine et bien évidemment la fibronectine. Ces protéines interagissent donc spécifiquement avec la fibronectine, une glycoprotéine formée de deux sous-unités de 230-270 kDa chacune et qui sont liées, à leurs extrémités C-terminales, par deux ponts disulfures. La fibronectine est codée par un seul gène qui est par la suite épissé en trois sites différents pour générer les deux sous-unités majeures de la fibronectine. Chaque sous-unité comporte trois types de modules répétés de structures différentes (types I, II et III) (figure 11). Ces modules sont impliqués dans les interactions avec les autres composants de la matrice extracellulaire, dans la liaison avec les récepteurs cellulaires (les intégrines) et avec la fibronectine elle-même [136]. La fibronectine peut être secrétée par les hépatocytes et se trouver à l’état soluble au niveau du plasma ou être secrétée par des fibroblastes et s’associer à une matrice fibrillaire à la surface cellulaire. La fibronectine contribue à l’organisation de la matrice extracellulaire et à l’adhésion cellulaire. En plus de son rôle de molécule majeure de l’adhérence cellulaire avec le tissu conjonctif, elle intervient dans la

Facteurs de virulence de C. difficile  

communication cellulaire. La liaison fibronectine-intégrines membranaires peut activer des voies de transduction du signal (via des protéines kinases ou des protéines du cytosquelette) modifiant le comportement cellulaire (par exemple prolifération, différenciation, mobilité). Ainsi, la fibronectine joue un rôle fondamental au cours de l’embryogénèse et dans de multiples processus physiologiques (cicatrisation, hémostase, angiogénèse) ou pathologiques (inflammation, cancérogénèse) [136].

Les protéines de liaison à la fibronectine ont été largement étudiées chez certaines espèces bactériennes et plus particulièrement chez des pathogènes à Gram positif. Ces bactéries peuvent contenir une ou plusieurs protéines de liaison à la fibronectine avec des rôles plus ou moins définis. La plupart de ces protéines ont été néanmoins associées au pouvoir adhésif de certaines bactéries, ainsi qu’à leur capacité d’internalisation. Il a été en effet montré que certaines protéines de liaison à la fibronectine de Streptococcus pyogenes sont capables de médier leur adhésion à des cellules épithéliales buccales, respiratoires ou cutanées [137, 138, 139, 140, 141], et qu’elles sont aussi impliquées dans le processus d’internalisation dans les cellules épithéliales [142, 143, 144, 145]. Des mutants dépourvus de certaines de ces protéines induisent également une plus faible mortalité chez les souris [146, 147]. Chez Staphylococcus aureus, les protéines de liaison à la fibronectine ont été associées à l’adhésion de S. aureus aux cellules endothéliales, aux plaquettes, ainsi qu’à leur adhésion ex vivo à des biomatériaux restés longuement au contact de l’hôte [148, 149, 150, 151, 152]. Ces protéines ont été également incriminées dans le pouvoir invasif de S. aureus [153, 154, 155, 156, 157, 158]. Les protéines de liaison à la fibronectine seraient également impliquées dans le processus d’adhésion et de virulence d’autres espèces bactériennes comme S. pneumoniae, S. gordonii ou encore Listeria monocytogenes [159, 160, 161, 162, 163].

Très peu d’études ont été, cependant, réalisées chez les clostridies et encore moins chez

C. difficile, chez qui la protéine Fbp a été simplement identifiée et son rôle dans l’adhésion

cellulaire a été tout juste suggéré. Des études supplémentaires sont donc indispensables pour mieux comprendre l’implication de cette protéine dans le mécanisme d’adhésion de C. difficile et dans sa virulence de façon générale. La construction d’un mutant ne produisant plus cette protéine est donc une alternative importante et nécessaire pour espérer répondre à cette question.

Une partie du travail expérimental présenté dans ce manuscrit concerne cet aspect du rôle de FbpA chez C. difficile.

II.1.2. Les enzymes à activité protéolytique