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La notion de sensibilité mammaire aux hormones

Dans le document THESE POUR LE DOCTORAT EN MEDECINE (Page 53-58)

2. CANCEROGENESE HORMONALE

2.2. Estrogènes et carcinogenèse

2.2.2. La notion de sensibilité mammaire aux hormones

Elle repose à la fois sur la source de production des hormones, mais aussi sur leur réceptivité tissulaire [39].

2.2.2.1. Source de production des hormones

Avant la ménopause, 90 % des estrogènes (estrone et estradiol) proviennent des ovaires et 10 % sont d‟origine périphérique.

Après la ménopause, la stéroïdogenèse ovarienne s‟arrête et seuls les androgènes surrénaliens continuent à être sécrétés, dont la DHEA représente la principale source en temps que précurseur androgénique.

Les androgènes deviennent les précurseurs des estrogènes par aromatisation grâce à une aromatase située principalement dans les graisses périphériques (graisses abdominales surtout, graisses sous-cutanées), la graisse intramammaire, ainsi que les muscles.

L‟aromatisation des androgènes en estrogènes produit de l‟estrone (E1) qui circule sous forme sulfoconjuguée (E1S) grâce à une sulfotransférase, voie enzymatique protectrice qui convertit les estrogènes actifs dans leurs formes sulfatées inactives. L'expression du gène contrôlant cette enzyme est très polymorphe, expliquant la grande variabilité de protection.

Après la ménopause, E1S produite circule en quantité très importante (10 à 50 fois plus que E2).

Elle est biologiquement inactive, mais constitue un très important réservoir de conversion.

La sulfatase, enzyme d‟exposition ubiquitaire (graisse, muscle, sein …) désulfate E1S en E1 actif.

Les niveaux d‟activité de l‟aromatase et de la sulfatase sont corrélés à l‟importance de la prolifération cellulaire.

Une production excessive de E1 en postménopause est un facteur de risque hormonal. Ainsi l‟obésité tardive qui s‟accompagne d‟une surexpression de l‟aromatase entraînant des niveaux circulants en estrogènes constamment élevés, est un facteur de risque de cancer du sein [39].

2.2.2.2. Biosynthèse locale des estrogènes

La cellule mammaire est capable de produire localement des estrogènes et des androgènes selon 2 voies (estrogénique et androgénique), chacune sous la dépendance d‟enzymes spécifiques. (Figure 1)

Figure 1

BIOSYNTHESE LOCALE DES ESTROGENES DANS LA CELLULE MAMMAIRE : VOIES ANDROGENIQUE ET ESTROGENIQUE [39].

VOIE ANDROGENIQUE VOIE ESTROGENIQUE

DHEA-S E1-S circulant

(circulant, d'origine surrénale) - origine ovarienne avant la ménopause - venant des adipocytes périphériques en post ménopause

SULFATASE

DHEA actif SULFATASE

3β HDS Androstènedione E1 actif 17β HSD1 17β HSD1 Testostérone E2 AROMATASE 5α REDUCTASE DHT

Récepteurs androgéniques Récepteurs estrogéniques

freination stimulation

Régulation de la prolifération des cellules mammaires cancéreuses hormonodépendantes

Dans la voie des androgènes, après conversion de la testostérone, la 5α réductase permet la biosynthèse locale de DHT qui freine la prolifération épithéliale.

Dans la voie des estrogènes, E1 provient d‟E1S désulfatée produite après aromatisation des androgènes. La 17β-hydroxystéroïde déshydrogénase permet la conversion de E1 en E2. E2 intracellulaire agit sur son récepteur RE et stimule la voie nucléaire de la prolifération et la réceptivité hormonale.

Ainsi, la voie androgénique est un modulateur de la prolifération de la cellule épithéliale induite par les estrogènes.

Cependant, la voie des androgènes peut être déviée vers celle des estrogènes par l‟aromatase.

L‟aromatase et la sulfatase contribuent donc à la synthèse locale in situ de E2 à partir des précurseurs androgéniques surrénaliens et des estrogènes sulfoconjugués circulants. Ces deux voies enzymatiques contribuent à la stimulation de la prolifération cellulaire induite par les estrogènes produits par la cellule et agissant dans celle-ci [39].

L'expression et le niveau d'activité de ces enzymes déterminent la concentration intramammaire d'androgènes et d'estrogènes selon le concept d'intracrinologie. Ce concept est basé sur le fait qu‟une hormone agit dans le tissu même où elle est produite.

Le polymorphisme des gènes, contrôlant ces différentes voies enzymatiques et leur niveau d'expression, explique les importantes variations individuelles dans la protection ou l'exposition au risque, selon les niveaux circulants des hormones et leur concentration intramammaire impliquée dans la genèse et l'évolution tumorale.

2.2.2.3. Concentration intramammaire d'estrogènes

Les estrogènes se concentrent dans le tissu mammaire normal après la ménopause ainsi que dans le tissu cancéreux.

Deux mécanismes de concentration intramammaire d'estrogènes peuvent survenir individuellement ou conjointement dans la cellule épithéliale [39] :

 celui de la captation où les estrogènes s'accumulent dans le tissu mammaire à

partir de taux circulants élevés ; ces estrogènes peuvent être d'origine endogène (E1S provenant de l'aromatisation en excès des androgènes dans le tissu adipeux des obèses) ou exogène (THS) ;

 celui de la biosynthèse in situ (intracrine) d'estradiol à partir des 2 voies estrogénique et androgénique, chacune sous la dépendance d'enzymes spécifiques.

Le pourcentage de contribution respective entre la captation et la synthèse in situ varie d‟une femme à l‟autre.

2.2.2.4. Réceptivité tissulaire aux hormones

Siège des récepteurs

Les RE et RP se situent surtout dans les cellules épithéliales de l'unité ductulo- lobulaire (UTDL), comportant les petits canaux, les canalicules et les ascini formant le lobule [39].

C‟est précisément à ce niveau où se concentrent les récepteurs, que naissent les cancers du sein hormonodépendants. Ils sont alors de types « canalaire » ou bien « lobulaire ». Les cellules lorsqu'elles deviennent malignes surexpriment l'un, l'autre ou bien les deux récepteurs, du fait d'altérations moléculaires des récepteurs nucléaires [39].

Variations de la concentration en récepteurs

La concentration des récepteurs et leurs fonctionnalités sont variables selon les tranches d‟âge [39].

En postpuberté et chez la femme jeune, la concentration en RE et RP est faible, alors que les niveaux hormonaux circulants du cycle ovulatoire (E+P) sont les plus élevés au cours de la vie génitale. L'effet des estrogènes sur RE est donc limité, ce qui permet le contrôle de la prolifération cellulaire (homéostasie).

En postménopause à l'inverse, la concentration cellulaire des RE dans les cellules épithéliales augmente progressivement alors que les niveaux circulants de E2 chutent de façon importante. La prolifération épithéliale reste faible (processus d'involution ménopausique) si les récepteurs ne sont pas stimulés.

Dans la cancérogenèse mammaire, nous verrons que l'expression des RE est croissante [39].

2.2.3. Hypersensibilité des cellules mammaires aux

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