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2.3 Sources et méthodologie

2.3.3 La méthodologie

Au niveau méthodologique, nous avons fait appe l à l’ analyse critique de sources, méthode privilégiée par la discipline historique. Plus spécifiquement, le traite ment de ces sources s’est fait selon quatre axes.

Premièrement, nous avons fait appel à l a recherche existante pour, d’une part, avoir un aperçu de ce que révèle l’ étude d’autres banlieues bourgeoises nord-américaines et , d’autre part, élaborer de brèves monographies historiques générales sur nos trois cas d’étude. Deuxièmement, nous nous somme s attaqué aux archives municipales en ciblant les ensembles cités plus haut. L’analyse critique de ces s ources d’information a pris la for me de fiches et de fichiers créés à l’ aide du logiciel FileMaker, et facilitant le traitem ent et l e croisement des données obtenues. Troisièmement, nous avons repéré les prin cipaux acteurs politiques pour chacun des cas étudiés et nous avons produit de brèves biographies de ces personnages, qui ont aussi été traitées à l’aide de fiches informatiques pour obtenir un portrait plus général de ce groupe. Enfin, nous a vons procédé à un dépouillem ent sélectif d es principaux journaux métropolitains et à un dépouillement exhaustif des journaux locaux. Les informations ainsi colligées sont allées rejoindre les autres par l’entrem ise du même outi l informatique.

Conclusion

Une revue critique de l’historiographie traitant de la banlieue canadienne permet de constater que le processus de suburbanisation et la recherche qui en traite sont assez peu marqués par la frontière canado-étatsunienne. Dans l’ensemble, l’historiographie canadienne s’inscrit dans la matrice nord-américaine et, en ce qui a trait aux banlieues bourgeoises, repro duit certaines des lacunes observées dans le chapitre précédent. Des chercheurs canadiens, comme Richard Harris et Ro bert Lewis, ont joué un rô le important dans le déve loppement d’une nouvelle histoire suburbaine, plus attentive au rôle j oué par les banlieues ouvrières, immigrantes et industrielles, mais ils n’ont pas plus été en mesure que les chercheurs américains de revoir le cas des banlieues bourgeoises à la lumière de ces nouvelles interprétations.

À Montréal, les recherches traitant de s banlieues bourgeoises dem eurent d’ailleurs peu nombreuses, surtout par rapport à la productio n plus abondante portant sur les banlieues populaires. Cette situation est renforcée par l’ importante présence, dans les banlieues cossues, de membres de la co mmunauté anglophone de Mon tréal qui, malgré le rôle important qu’elle a jo ué dans l’histoire du Québec, demeure sous-étudiée. Un survol des recherches qui en traitent permet néanmoins de constater que le lien entre ces municipalités et la communauté anglophone ne doit pas être surestimé. D’une part, la bourgeoisie, même prise au sens large, ne dem eure qu’une fraction de cette communauté de langue angl aise. D’autre part, la co mmunauté anglo-montréalaise d’avant-guerre et majoritairement d’origine britannique est à distinguer de celle qui, dans les décennies qui suivent, vient à inclure cette communauté, mais également l’ ensemble des résiden ts de langue anglaise de la ville, quel que soit leur pays d’origine.

Ce Montréal d’avant- guerre se distingue d’ ailleurs lui aussi dans l’historiogr aphie, car la période que nous étudions (1880-1939) c orrespond, à quelques années de cri se économique près, à son âge d’or. Sur le plan économique, mais également démographique et géographique, la ville connaît sa plus im portante période de croissance et s’impose comme métropole du Canada. Les études qui en traitent prennent peu à peu acte de son expansion territoriale et de l’ém ergence, puis de la c onsolidation d’un Grand Montréal. Nous avons

d’ailleurs expliqué comment, au cours de la période étudiée, cette structuration du territoir e montréalais est dictée par l’activité des promoteurs, mais aussi par l’expansion du réseau de transport ferroviaire dont dépend en partie l’extraordinaire vitalité économique de la ville.

Nous avons décrit le m ilieu suburbain ri che et divers qui se développe durant ces décennies dans les princ ipaux axes de développement de l’agglom ération : banlieues ouvrières et bourgeo ises, francophones et anglophones, résidentielles et industrielles, développées à la pièce et planifiées, autonom es et annexées. Les trois banlie ues que nous avons choisi d’étudier s’inscrivent dans ce milieu dynamique et y illustrent la diversité qui existe au sein m ême de la catégorie « banlieues bourgeoises ». Westmount, la plus ancienne des trois, est également la plus homogène sur les plans ethnolinguistique et socioéconomique. Elle incarne la banlieue dans la ville, une municipalité rapidement enserrée dans le tissu urbain de la ville centrale. Pointe-Claire, au contraire, est à bonne distance de Montréal, mais doit composer avec un développem ent dispersé et inégal, ain si qu’avec une pop ulation beaucoup plus hétérogène. Elle est une ba nlieue ferroviaire, comme Mont-Ro yal. Le développement de cette dernière est toutefois pl us tardif et difficile, mais, contrairement aux deux autres, la municipalité bénéficie, du m oins initialement, d’une planification beaucoup plus poussée.

Enfin, nous avons décrit les sources et la méthodologie que no us allons emplo yer pour étudier ces trois cas. Nous favori sons une méthode employée de longue date par les historiens – l’analyse critique de source –, tout en favorisant les outils informatiques qui permettent d’interroger et de croiser ces données avec efficacité. Les documents en question sont surtout d’origine publique, provenant des gouvernements étudiés, mais sont com plétés par des sources imprimées permettant non seulement de suivre, de l’extérieur, les activités de ces municipalités, mais égalem ent des autres acteurs de la gouvernance locale. Si les journaux locaux suburbains ont été utilisés à quelques occasions par des chercheurs, ils n’ont pas été dépouillés systématiquement jusqu’ici.

CULTURE ET PRATIQUES POLITIQUES

There is no doubt that municipal government is the dead end, the blind alley of democracy.

Stephen Leacock (1948 : 226)

Le gouvernement municipal comme assise dé mocratique d’une co mmunauté? Comme le suggère Stephen Leacock, la chose ne va pas de soi. C’ est vrai aujourd’ hui, alors qu’on continue à déplorer le faible taux de participation aux élections municipales; c’était vrai hier, alors que s’affrontaient dans l’arène politique montréalaise les partis réformiste et populiste, avec pour enjeu l ’assainissement d’une culture politique m unicipale jugée inefficace et corrompue par le premier.

Ce troisième chapitre nous donne l ’occasion d’étudier les régimes qui se mettent en place à Westm ount, Pointe-Claire et Mont-Royal à la fin du XIXe siècle et au début du

suivant, et la culture polit ique qui y prend forme. Nous nous arrêtons d’abord au contexte dans lequel prennent for me ces institutions et au rapport qu’ elles entretiennent à l a démocratie. Nous nous i nterrogeons ensuite sur ceux qui y œuvrent et sur le processus électoral qui leur donne accès au pouvoir. Enfin, le gouvernement municipal étant également un carrefour politique, nous portons attention aux acteurs avec qui les élus doivent partager la gouvernance des banlieues étudiées.