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5. La pratique des curateurs

5.1 La méthodologie

5.1.1 La méthode de récolte de données

L’objectif de cette recherche n’est pas de mener une étude exhaustive sur l’exécution de cette mesure mais de fournir des pistes de réflexion sur la place attribuée à l’enfant dans le cadre de cette exécution. Pour cela, nous avons décidé d’interroger les personnes chargées de gérer cette curatelle, soit les curateurs, c’est-à-dire les travailleurs sociaux ou assistants sociaux travaillant dans les services de protection de l’enfant. De par leur fonction au sein de cette mesure, les curateurs occupent une position centrale par rapport aux parents et aux enfants, et ont une vision globale et neutre de la situation. De ce fait, ils nous semblaient être les plus qualifiés pour fournir des réponses pertinentes à nos questions sur l’enfant et ses droits dans la curatelle de droit de visite. Comme nous l’avons vu précédemment, les parents et les enfants sont aussi concernés par cette mesure. Cependant, nous avons volontairement renoncé à interroger des membres de ces deux catégories. En effet, cette curatelle intervient généralement dans un contexte où les pères et mères sont en conflit et où l’enfant se retrouve tiraillé entre les deux. À notre avis, notre intervention aurait pu être utilisée par les parents pour alimenter leurs désaccords et elle aurait, de ce fait, accentué les tensions gravitant autour de l’enfant. Nous avons donc décidé de nous concentrer uniquement sur le point de vue des curateurs et en particulier sur leur manière de percevoir et d’exécuter ce mandat, d’envisager et d’appliquer les droits de l’enfant dans cette mesure et de concevoir la place de l’enfant dans cette curatelle. Cette recherche se fonde sur les expériences professionnelles, les perceptions et les conceptions des curateurs par rapport à la thématique de notre mémoire. C’est pourquoi, nous avons opté pour une méthode de type qualitatif et plus précisément des entretiens individuels semi-directifs. Cette méthode permet à l’interviewé de s’exprimer plus librement que dans un entretien directif tout en assurant à l’enquêteur d’obtenir les informations nécessaires pour infirmer ou confirmer ses hypothèses. Afin de mener correctement ces entretiens, nous avons établi un guide d’entretien (cf. annexes). Il contient des questions principales posées à toutes les personnes interrogées ainsi que des questions subsidiaires utilisées comme relance lorsqu’il était nécessaire de recadrer les participants ou de rebondir sur des questions mal comprises. Nous avons interviewé les curateurs sur le lieu de travail, soit dans leur bureau soit dans des salles de conférence. Avant de débuter l’entretien, nous leur avons précisé le cadre de ce travail de fin d’études, son but ainsi que le fait que leur nom

n’apparaîtrait pas dans notre mémoire pour garantir leur anonymat. Avec leur accord, ces entretiens ont été enregistrés sur un dictaphone. Cependant, des requêtes concernant la transcription de ces entretiens ont émané de certains interviewés. Il a été demandé d’une part, pour leur permettre de s’exprimer plus librement que les « euh » et autres tiques de langages ne soient pas notés et d’autre part que ces transcriptions puissent être relues et complétées si nécessaire par les personnes interrogées. Nous avons transcrit les enregistrements conformément à ces demandes et nous avons, ensuite, envoyé par e-mail aux interviewés, ces transcriptions pour relecture, éventuellement compléments, et validation. Dans cet e-mail, nous leur avons aussi demandé de confirmer qu’ils acceptaient que ces transcriptions soient annexées à notre mémoire et publiées. Afin d’uniformiser notre méthode de recherche, nous avons appliqué cette procédure à tous les entretiens même à ceux pour lesquels aucune demande particulière n’avait été faite. Certains participants ont validé les entretiens tels quels, d’autres ont opéré des modifications de forme ou ont explicité de manière plus précise leur pensée. Tous ces ajouts ont été effectués sous notre contrôle méthodologique grâce aux enregistrements effectués sur le dictaphone et n’ont pas modifié le sens des propos qui y figuraient. Quant à la publication des entretiens, tous les participants ont donné leur accord.

Cependant, il faut signaler que l’une des transcriptions a été amputée d’une partie de son contenu. Suite à la demande de la hiérarchie d’une des personnes interrogées et pour des raisons de confidentialité, les éléments précis se rapportant à la seule situation de curatelle de droit de visite que cette personne suivait ont dû être enlevés et seules les réponses générales ont pu figurer dans le document accessible au public. Ces transcriptions se trouvent en annexe de ce travail (cf. annexes).

5.1.2 Le choix de la population interrogée

Nous avons donc décidé de réaliser des entretiens avec les curateurs chargés d’exécuter cette mesure, soit les travailleurs sociaux des services de protection des mineurs. Nous avons délimité la situation géographique de notre recherche à trois cantons : Valais, Vaud et Genève. Différents facteurs nous ont conduits à ce choix. Tout d’abord, il est ressorti de nos discussions informelles avec des membres des directions de ces services qu’en raison de la surcharge de travail des assistants sociaux et du nombre de requêtes provenant d’étudiants réalisant des travaux de fin d’études, il serait difficile d’avoir un échantillon suffisamment grand dans un seul canton et qu’il serait préférable d’élargir notre recherche à plusieurs cantons. Puis, tout en précisant que notre but n’est pas de faire une étude comparative intercantonale, il nous semblait intéressant de ne pas nous limiter à un seul canton car ce

choix permettait d’avoir un aperçu plus large des pratiques en matière de curatelle de droit de visite. En effet, si cette mesure est une notion de droit fédéral, les autorités qui la prononcent ainsi que les modalités formelles qui sont liées à sa mise en œuvre peuvent varier en fonction des cantons et donc influencer la manière des curateurs de l’appréhender et de l’exécuter.

Comme nous l’exposerons ci-dessous (cf. chap. 5.2), les trois cantons choisis présentent quelques différences à ce niveau.

Après avoir délimité géographiquement l’étendue de notre recherche, nous avons contacté l’Office pour la protection de l’enfant (OPE) en Valais, le Service de protection de la jeunesse (SPJ) dans le canton de Vaud et le Service de protection des mineurs (SPMi) dans le canton de Genève. Nous leur avons présenté le but de notre travail et demandé de pouvoir nous entretenir avec trois personnes ayant de l’expérience en matière de curatelle de droit de visite. Concernant les cantons du Valais et de Vaud, l’OPE et le SPJ étant divisés en plusieurs entités régionales, il a été demandé que chacune des personnes travaille dans une entité différente afin d’avoir un panel plus large. En Valais, nous avons rapidement obtenu les noms de trois personnes acceptant de participer à notre recherche. Pour les deux autres cantons, nous avons dû les relancer. Finalement, trois personnes dans le canton de Vaud et deux dans le canton de Genève ont accepté de répondre à nos questions. Chacun des interviewés nous a accueillie avec le sourire, nous a consacré une partie considérable de leur temps étant donné que les entretiens ont duré entre 40 minutes et 1 heure et ont montré de l’intérêt pour cette recherche. En effet, la majorité d’entre eux était curieuse de connaître les résultats de cette recherche et nous a demandé de recevoir une copie de ce travail. On nous a même proposé de présenter nos conclusions lors d’un colloque interne. Cet ensemble d’éléments indique l’intérêt des services de protection de l’enfant et de ses collaborateurs pour la curatelle de droit de visite.

5.1.3 La méthode d’analyse de données

Pour l’analyse des données recueillies, nous avons décidé de prendre les différents axes qui ressortent de notre guide d’entretien et de procéder à une analyse thématique. Nous avons regroupé les réponses des huit curateurs interrogés de la manière suivante. Après quelques informations générales, une première partie regroupe les définitions données par les personnes interrogées sur les notions de « droit aux relations personnelles », de « curatelle de droit de visite », d’« enfant » et de « droits de l’enfant ». Dans une deuxième partie, nous nous intéressons à la relation entre le curateur et les parents dans l’exécution de la curatelle de droit

de visite, ainsi qu’à l’intérêt de l’enfant omniprésent dans cette relation. Un troisième chapitre est consacré de la relation du curateur et de l’enfant et au droit d’être entendu de ce dernier.

Cela permettra de voir concrètement si, dans l’exécution de cette mesure, l’enfant, son intérêt et son droit d’être entendu ont une place prépondérante.

Afin de garantir l’anonymat des personnes interrogées et de faciliter la compréhension de notre analyse, nous avons décidé de nommer les sujets de notre recherche par les lettres A à I en excluant la lettre E utilisée dans les transcriptions (cf. annexe) pour définir l’enquêteur. Les conclusions de cette étude de terrain tout comme les données obtenues lors des entretiens ne seront pas généralisables à tous les curateurs de ces trois cantons étant donné qu’il s’agit d’une recherche qualitative mais elles apporteront des éléments de réflexion. Avant de passer à l’analyse thématique, il est nécessaire de présenter brièvement l’organisation des cantons en matière de protection de l’enfant.