• Aucun résultat trouvé

5. La pratique des curateurs

5.3 L’analyse thématique

5.3.1 Les notions du point de vue des curateurs

5.3.1.3 Les droits de l’enfant

Pour débuter, nous avons demandé aux assistants sociaux : « Pour vous, que signifient les droits de l’enfant ? ». Pour G., les droits de l’enfant sont les mêmes que les droits humains.

La majorité des curateurs (A. ; B. ; F. ; H. ; I.) considère qu’il s’agit de l’ensemble des droits ou des règles s’appliquant aux enfants et prévus dans les lois. A titre d’exemple, sont mentionnés la CDE (A. ; I.), le Code Civil (A.) ou la CEDH (I.). D’après H. et I., ils ont pour objectif de protéger l’enfant. Pour F., ces droits impliquent que les conventions signées à ce sujet, l’enfant, ses droits et en particulier son droit d’être entendu soient respectés. I. relève que les droits de l’enfant ne sont pas qu’une notion juridique mais aussi une « notion très large qui englobe [le] bien-être [de l’enfant] ». Partant d’un point de vue moins juridique, ils sont aussi décrits comme quelque chose « qui est indispensable pour assurer le développement de l’enfant » (C.) ou « qui permet de donner un sens à l’enfant » (B.), à savoir qui permet de

le reconnaître « en tant que personne » (B. ; I.), « sujet de droits » (H.) et de ne plus le considérer comme un « objet » (B. ; H.). Selon B., les lois mentionnées ci-dessus sont la concrétisation de cette évolution d’« objet » à « sujet ». Cela ne peut que nous évoquer la CDE. Pour sa part, D. estime que ces droits impliquent de respecter les droits fondamentaux découlant de la pyramide de Maslow et aussi d’expliquer à l’enfant quels sont ses besoins,

« que ce sont des besoins légitimes et […] comment il peut les satisfaire ». D’après C., ces droits prennent « de plus en plus de place » et constituent un sujet « qui est de plus en plus sensible ». G. rappelle qu’avec les droits, il y a aussi des devoirs qu’il ne faut pas oublier.

Cela nous rappelle toutes les polémiques sur les droits de l’enfant qui existent depuis leur consécration.

Figure 2 : Pyramide de Maslow

Nous avons poursuivi, en leur demandant : « Selon vous, quels sont les droits fondamentaux de l’enfant ? ». Tout d’abord, si D. déclare que les droits fondamentaux sont

« ceux des besoins fondamentaux selon la pyramide de Maslow », pour G., il s’agit « des droits universels qui sont définis par la Charte des Nations Unies ou la Convention sur les droits de l’enfant ». Ensuite, les curateurs citent : le droit à l’éducation (C. ; F. ; G. ; I.), le droit au logement (C. ; G. ; I.), le droit d’être avec sa famille (C.) et avec ses deux parents (B. ; H.), le droit à l’alimentation (G. ; I.), le droit à la protection (F. ; I.) et le droit d’être entendu (A. ; F.). A. définit ce dernier droit de la manière suivante : « Le droit à exprimer ce

qu’il pense, le droit à faire valoir son opinion qui sera prise en compte en fonction de son âge ». En plus, de cette liste, C. ajoute le droit « à prendre place dans notre société » et le définit comme « le droit d’être préparé à devenir adulte et à s’adapter à sa vie d’adulte » dans une société de plus en plus mobile. H. mentionne encore « le droit à ce qu’on lui donne le maximum de bien-être, la capacité de grandir dans les meilleures conditions possibles, d’avoir une éducation la plus stable possible ainsi que l’affection de ses parents ». Finalement, le droit

« d’exister » (B.) et d’« être respecté » (A.) en tant que personne est aussi cité. Selon A., ce dernier droit est englobé par le droit d’être entendu. En conclusion, G. estime que la notion de

« respect » comprend tous ces droits, car si « on respecte l’enfant, inévitablement on va respecter tous les droits qui en découlent ».

Pour terminer, nous leur avons posé la question suivante : « Pouvez-vous me citer des droits de l’enfant qui, selon vous, concernent la curatelle de surveillance des relations personnelles? ». Tout d’abord, la réponse la plus donnée est le droit d’avoir des relations avec ses deux parents. (C. ; D. ; F. ; G. ; H. ; I.). G. précise qu’il s’agit d’un « droit d’avoir des liens égaux tant avec son père qu’avec sa mère » et cela « dans de bonnes conditions » notamment quant aux conditions d’accueil. Ensuite, le droit à la protection est mentionné à plusieurs reprises (B. ; C. ; D. ; I.). Il concerne la protection de l’intégrité physique (B.) et psychique (B. ; C.), notamment si l’enfant est utilisé dans le conflit d’adultes. Mais il comprend aussi « la sécurité du logement, […] le droit à être protégé contre l’enlèvement » (B.). Selon I., « la protection de l’enfant vient de ses deux parents ». Le droit aux relations personnelles est donc d’autant plus important. Puis, en troisième position, nous retrouvons le droit d’être entendu (A. ; F. ; H.). Toutefois, il faut préciser que ce droit semble connaître quelques difficultés d’application dans le cadre de cette curatelle, du fait que l’opinion de l’enfant ne reflète pas toujours la pensée de ce dernier mais celle du parent qui le manipule (F.). C’est pourquoi, pour éviter ou diminuer cette instrumentalisation, il est important que

« l’enfant puisse se faire une idée de ses deux parents par lui-même » en ayant « des contacts réguliers » (F.) avec chacun. A nouveau, un lien est établi avec le droit aux relations personnelles.

Pour répondre à cette question, D. se réfère, à nouveau, à la pyramide de Maslow. Il met en lien les besoins qui y sont mentionnés et ceux de l’enfant dans la curatelle de droit de visite :

D’abord, si on prend les plus basiques, il y a les besoins physiques. Je pense que si un enfant va en visite chez son parent non gardien, ce serait bien qu’il ait à boire et à manger, qu’il puisse dormir, etc. Et ce n’est pas qu’une vision théorique car ces besoins ne sont pas toujours satisfaits. Ensuite, il faut que ses besoins de protection soient assurés, ne serait-ce que, par exemple, que le parent gardien mette dans le sac ou la valise de l’enfant des habits correspondant à la saison. A nouveau, ces besoins ne sont pas toujours satisfaits. Il y a bien évidemment des besoins de relations avec le parent chez qui l’enfant va en visite. Ensuite, il y a des besoins de réalisation à travers suffisamment de stimulation selon l’âge, par le jeu, la participation, etc. Et finalement, aussi ce qu’on appelle les besoins spirituels ; en effet, il me semble que ça fait partie de la responsabilité du parent qui accueille l’enfant de lui expliquer ce qu’est sa vie, ce qu’il aime, ce qu’il trouve beau, des choses qui touchent aux valeurs telles que l’éthique, la beauté, etc. (D.) A partir de ces éléments, nous pouvons faire différentes constatations. Premièrement, la conception qu’ont les assistants sociaux des droits de l’enfant correspond à celle de la CDE.

Deuxièmement, les droits fondamentaux mentionnés par les curateurs sont tous prévus dans la CDE, même si ce n’est pas sous les mêmes termes. Ils touchent principalement les besoins élémentaires de l’enfant. Troisièmement, les réponses, par rapport aux droits de l’enfant en lien avec la curatelle de droit de visite, font ressortir uniquement trois droits. Le droit aux relations personnelles qui est à la base de cette curatelle, le droit de protection qui constitue légalement le motif de l’instauration des mesures protectrices et finalement le droit d’être entendu qui est prévu dans le Code civil avant d’ordonner une mesure et dans la CDE lors de prises de décisions concernant l’enfant. Il ne manque que l’intérêt de l’enfant pour avoir tous les éléments essentiels de cette curatelle. Nous pouvons donc conclure que, globalement, les droits de l’enfant ont une place dans l’esprit des assistants sociaux lors de l’exécution de cette curatelle. Maintenant, il s’agit de voir concrètement comment l’intérêt de l’enfant et le droit d’être entendu sont appliqués.