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La Convention de sécurité sociale Suisse-Japon (2010)

4. LES CONVENTIONS DE SECURITE SOCIALE CONCLUES

4.2 La Convention de sécurité sociale Suisse-Japon (2010)

130. Le contexte est économique et social. La Suisse et le Japon étaient également135 en train de négocier un accord de libre échange. Dans ce cadre, la question des doubles assujettissements et des travailleurs détachés a été évoquée : il s’agissait d’éviter un obstacle aux échanges économiques entre les deux pays136. Sur le plan social, le Conseil fédéral a relevé la difficulté pour les Suisses établis au Japon d’accéder à une pension de vieillesse japonaise, car 25 années de cotisations sont exigées. Ainsi, la Convention a été conclue le 22 octobre 2010 ; elle a été approuvée par l’Assemblée fédérale le 13 septembre 2011 et elle est entrée en vigueur par échange de notes le 1er mars 2012137.

131. Dans son Message, le Conseil fédéral relève les points suivants :

 « 1500 Suisses vivent aujourd’hui au Japon. Après la Chine, ce pays est le principal partenaire commercial de la Suisse en Asie et on peut s’attendre à ce que le nombre de Suisses s’y installant augmente fortement dans les années à venir. Une convention de sécurité sociale leur serait fort utile »138 ;

 « Les relations bilatérales entre la Suisse et le Japon se sont intensifiées et diversifiées ces dernières années : les relations économiques se sont considérablement développées de même que la circulation des personnes »139 ;

 « Le registre des assurés de l’assurance-vieillesse et survivants (AVS) et de l’assurance-invalidité (AI) compte quelque 9200 ressortissants japonais qui, malgré les périodes de cotisation accomplies en Suisse, n’ont actuellement qu’un droit limité à des prestations de l’AVS/AI. Ils ne peuvent en particulier bénéficier d’une rente que s’ils résident en Suisse. Dans le cas contraire, ils n’ont droit qu’au remboursement des cotisations AVS. D’après le Registre central des étrangers, 4600 Japonais sont actuellement domiciliés en Suisse »140.

133 Voir ci-dessus les Nos 65 sv.

134 Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud.

135 Voir ci-dessus le N° 122.

136 Message concernant la Convention Suisse-Japon, p. 2400.

137 RO 2012 1579.

138 Message concernant la Convention Suisse-Japon, p. 2400.

139 Idem, p. 2400.

140 Idem, p. 2400 in fine.

4.2.2 Les buts

132. La Convention de sécurité sociale Suisse-Japon est un instrument développé de coordination, qui porte sur ses cinq principes directeurs : égalité de traitement, désignation du droit/système applicable, maintien des droits en cours d’acquisition (par la totalisation), maintien des droits acquis, coopération administrative.

133. L’égalité de traitement141 est prévue à l’art. 4 de la Convention. Le Conseil fédéral relève que : « Conformément aux principes généralement appliqués entre Etats142, la Convention prévoit dans une très large mesure l’égalité de traitement entre les ressortissants des deux Etats contractants dans les branches d’assurance [sociale] sur lesquelles elle porte. »143. Quelques exceptions sont prévues, par exemple du côté suisse, il n’y a pas d’accès des Japonais à l’AVS/AI facultative ni d’adhésion à l’AVS/AI pour les fonctionnaires internationaux japonais144.

134. La désignation du droit/système applicable145 s’effectue selon la règle habituelle : affiliation dans l’Etat contractant où l’activité salariée ou indépendante est exercée. Ce rattachement fait l’objet des dérogations usuelles concernant : les personnes détachées temporairement par leur employeur ; les indépendants exerçant temporairement une activité non salariée dans l’Etat contractant ; les conjoints et enfants accompagnants ; le personnel diplomatique, consulaire, des services publics ; les équipages de navires ; les dérogations d’un commun accord (art. 6 à 12).

135. Le maintien des droits en cours d’acquisition146, effectué par la totalisation, est utilisé dans les deux Etats. Il est particulièrement utile pour l’accès aux pensions de retraite japonaises, lequel requiert 25 années de cotisations : selon l’art. 13 §1 de la Convention, si nécessaire, l’institution compétente japonaise tient compte des périodes légales suisses. Du côté suisse, il n’y a pas de totalisation pour l’AVS, vu l’ouverture de la rente dès un an de cotisation ; en revanche cela peut être le cas pour les rentes AI (nécessitant trois ans de cotisations). Hors totalisation, certaines dispositions portent sur la qualité d’assuré nécessaire pour recevoir des prestations.

136. Le maintien des droits acquis147permet le service des prestations hors de l’Etat compétent. C’est important pour les rentes AVS/AI, la législation imposant aux non-Suisses le domicile et la résidence habituelle en Suisse ; cette exigence discriminatoire148 est ainsi levée par la Convention Suisse-Japon et il y a réciproquement exportation de la part de l’Etat contractant (art. 5). Pour des prestations très réduites, une indemnité

141 Voir ci-dessus les Nos 8 sv, 72 sv.

142 Référence est faite à la coordination.

143 Message concernant la Convention Suisse-Japon, p. 2404.

144 Respectivement art. 2 LAVS, art. 1a al. 4 let. b LAVS.

145 Voir ci-dessus les Nos 18 sv, 79 sv.

146 Voir ci-dessus les Nos 27 sv, 87 sv.

147 Voir ci-dessus les Nos 35 sv, 98 sv.

148 Voir ci-dessus les Nos 11 sv.

forfaitaire remplace ou peut remplacer le versement de la rente (art. 18). La réadaptation AI reste cependant liée à un domicile ou un séjour en Suisse (art. 16).

137. Le dernier principe de coordination, celui de la coopération administrative149 est réglé aux art. 20 à 26 de la Convention. Il a déjà été évoqué à titre d’exemple ci-dessus150.

4.2.3 Autres éléments importants

138. La Convention Suisse-Japon est développée sur le plan des principes de coordination. Il suffit ainsi d’ajouter les compléments suivants :

 le champ d’application personnel comprend essentiellement les Japonais, les personnes ayant une autorisation de séjour permanent, qui sont des Coréens151, les Suisses, les membres de leur famille ou leurs survivants fondant leurs droits sur les précédents ;

 le champ d’application matériel porte, du côté japonais, sur cinq régimes de pensions – dont le National Pension – et sept régimes d’assurance-maladie ; du côté suisse, sur les régimes AVS/AI et LAMal ;

 le Conseil fédéral estime que : « La présente Convention a été rédigée en grande partie sur le modèle d’autres conventions bilatérales conclues récemment par la Suisse. Elle contient des dispositions qui correspondent largement au droit européen et international des assurances sociales »152.

139. Tout à fait d’accord avec la première évaluation, la Convention Suisse-Japon réalise une coordination bilatérale déjà pratiquée ; l’on peut ajouter qu’elle est développée. J’ai plus de peine à approuver la deuxième estimation : le droit européen (Conseil de l’Europe) et le droit international (singulièrement les Conventions OIT Nos 118 et 157) vont sensiblement plus loin : les champs d’application personnel et matériel (toute la sécurité sociale) sont beaucoup plus vastes. Quant au droit européen UE, il est encore plus performant, ceci sur tous les plans : principes directeurs, champs d’application153.

140. L’on peut conclure de manière analogue qu’à propos de l’instrument nous liant avec l’Inde154. La conclusion d’une convention de sécurité sociale avec le Japon (c’est aussi la première avec cet Etat) est un événement vu l’importance notamment économique de ce pays, au troisième rang mondial.

149 Voir ci-dessus les Nos 42-43, 105 sv.

150 Voir ci-dessus les Nos 106-107.

151 Message concernant la Convention Suisse-Japon, p. 2404.

152 Idem, p. 2408.

153 Voir ci-dessus les Nos 53-54, 62-63, 70, 75-77, 84-85, 95-96, 101-102, 110-112. – Pierre-Yves GREBER : Droit international et européen de la sécurité sociale, pp. 286-302.

154 Voir ci-dessus le N° 129.

4.3 La Convention de sécurité sociale Suisse-Etats-Unis (2012)