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La conception psychanalytique de l'inconscient

Dans le document Cours de philosophie Séries technologiques (Page 83-88)

9. La conscience

9.5 La vie psychique se limite-t-elle à la conscience ?

9.5.2 La conception psychanalytique de l'inconscient

Comme nous venons de l'évoquer la question du rapport entre vie psychologique et conscience peut se poser d'une manière encore plus radicale : y-a-t-il une vie psychologique inconsciente tota-lement séparée de la vie consciente ?

Existe-t-il une pensée inconsciente à laquelle la conscience n'aurait pas accès ?

Cette thèse est celle défendue par Freud, pour qui il n'y a pas continuité entre inconscient et conscience, mais rupture, séparation.

9.5.2.1 Le parcours de Freud : origines et signification de sa démarche.

Freud (1856 - 1939) est un médecin psychiatre autrichien dont les recherches ont été essentiel-lement orientée vers un but thérapeutique et non philosophique, c'est avant tout avec ce souci d'efficacité qu'il conçoit les fondements théoriques de la psychanalyse. Son objectif principal est la guérison des névroses, qui sont des affections psychiques pouvant entraîner des troubles du comportement et des troubles somatiques sans lésion organique, ces troubles s'accompagnent en général d'un sentiment d'angoisse, d'un malaise lié à une conscience douloureuse de la maladie.

Par exemple dans un ouvrage intitulé Les cinq leçons sur la psychanalyse, Freud décrit le cas d'une jeune fille qu'il nomme Anna O., Cette jeune fille traitée par le docteur Josef Breuer, avec qui Freud travailla tout d'abord, présentait de nombreux symptômes physiques et comportemen-taux (toux nerveuse, paralysie de certains membres, troubles visuels, impossibilité de manger et de boire normalement), mais sans aucune lésion organique.

Breuer et Freud vont voir dans ces symptômes l'expression de conflits psychologiques et affec-tifs de nature inconsciente.

Puisque la conscience ne peut expliquer certains comportements, il faut donc se référer à des causes inconscientes.

Ce raisonnement est celui que suivront Freud et Breuer dans l'élaboration de l'hypothèse selon laquelle existerait un inconscient psychologique. C'est d'ailleurs cette thèse que défend Freud dans le texte que nous allons maintenant étudier.

9.5.2.2 Étude d'un texte de Freud

``

La psychanalyse se refuse à considérer la conscience comme formant l'essence même de la vie psychique, mais voit dans la conscience une simple qualité de celle-ci, pouvant coexister avec d'autres qualités ou faire défaut (...).

« Être conscient » est avant tout une expression purement descriptive et se rapporte à la perception la plus immédiate et la plus certaine. Mais l'expérience nous montre qu'un élément psychique, une représentation par exemple, n'est jamais conscient d'une façon permanente. Ce qui caractérise plutôt les éléments psychiques, c'est la disparition rapide de leur état conscient. Une représentation consciente à un moment donné, ne l'est plus au moment suivant, mais peut le redevenir dans certaines conditions faciles à réaliser. Dans l'intervalle nous ignorons ce qu'elle est ; nous pouvons dire qu'elle est latente, entendant par là qu'elle est capable à tout instant de devenir consciente. En disant qu'une représentation est restée, dans l'intervalle, inconsciente, nous formulons encore une définition correcte, cet état inconscient coïncidant avec l'état latent et l'aptitude à revenir à la conscience (...).

Mais nous avons obtenu le terme ou la notion de l'inconscient en suivant une autre voie et notamment en utilisant des expériences dans lesquelles intervient le dynamisme psychique.

Nous avons appris ou, plutôt, nous avons été obligés d'admettre, qu'il existe d'intenses processus psychiques, ou représentations capables de se manifester par des effets semblables à ceux produits par d'autres représentations, voire par des effets qui, prenant à leur tour la forme de représentations, sont susceptibles de devenir conscients sans que les processus

eux-mêmes qui les ont produits le deviennent (...). C'est en ce point qu'intervient la théorie psychanalytique, pour déclarer que si certaines représentations sont incapables de devenir conscientes, c'est à cause d'une certaine force qui s'y oppose; que sans cette force elles pourraient bien devenir conscientes, ce qui nous permettrait de constater combien peu elles diffèrent d'autres éléments psychiques, officiellement reconnus comme tels. Ce qui rend cette théorie irréfutable, c'est qu'elle a trouvé dans la technique psychanalytique un moyen qui permet de vaincre la force d'opposition et d'amener à la conscience ces représentations inconscientes. A l'état dans lequel se trouvent ces représentations avant qu'elles soient amenées à la conscience nous avons donné le nom de refoulement; et quant à la force qui produit et maintient le refoulement, nous disons que nous la ressentons, pendant le travail analytique, sous la forme d'une résistance.

Notre notion de l'inconscient se trouve ainsi déduite de la théorie du refoulement. Ce qui est refoulé est pour nous le prototype de l'inconscient. Nous savons cependant qu'il existe deux variétés d'inconscient : les faits psychiques latents, mais susceptibles de devenir conscients, et les faits psychiques refoulés qui comme tels et livrés à eux-mêmes, sont incapables d'arriver à la conscience (...). Les faits psychiques latents, c'est-à-dire inconscients au sens descriptif, mais non dynamique, du mot sont des faits préconscients, et nous réservons le nom d'inconscients aux faits psychiques refoulés c'est-à-dire dynamiquement inconscients.

Nous sommes ainsi en possession de trois termes : conscient, préconscient et inconscient, dont la signification n'est plus purement descriptive (...).''

FREUD, Essais de psychanalyse, 3° partie, traduction S. Jankélévitch.

Petite Bibliothèque Payot. pp. 178-179.

9.5.2.2.1 Idée essentielle du texte:

9.5.2.2.1.1 Thème :

Affirmation de l'existence d'un inconscient psychologique.

9.5.2.2.1.2 Thèse :

Ce qui justifie l'existence de l'inconscient réside à la fois dans le caractère lacunaire de la conscience qui ne peut rendre compte de tous les événements de la vie psychique et dans l'existence de forces psychiques qui rejettent hors de la conscience certaines représentations que la conscience ne peut tolérer.

9.5.2.2.2 Étude de l'argumentation

9.5.2.2.2.1 1° moment

(Du début à ``...faire défaut.'')

Cette partie du texte traite des limites de la conscience dans la vie psychique. Freud y rejette la thèse selon laquelle la vie psychologique serait en tout point assimilable à celle de la conscience.

Pour Freud la conscience n'est qu'une qualité de la vie psychique, c'est-à-dire une manière pour elle de se manifester ; la conscience ne serait donc pas essentielle à la vie psychique, celle-ci aurait d'autres manières d'être (non-consciente) dans lesquelles la conscience pourrait être présente ou absente. Elle pourrait "coexister avec d'autres qualités ou faire défaut."

9.5.2.2.2.2 Transition

Cette affirmation demande à être justifiée.

9.5.2.2.2.3 2° moment

(De ``Être conscient...'' à ``...revenir à la conscience'')

Freud justifie ici l'affirmation précédente par une approche de l'expérience la plus immédiate de la conscience.

``

"être conscient" est avant tout une expression purement descriptive''

Par cette formule Freud nous fait comprendre que selon lui la conscience n'est que l'apparence de la vie psychologique.

Mais qu'y-a-t-il au-delà de cette apparence ?

Que nous apprend une observation réfléchie et approfondie de notre vie psychique quoti-dienne ?

Que la conscience est inconstante, lacunaire :

``Mais l'expérience nous montre qu'un élément psychique, une représentation par exemple, n'est jamais conscient d'une façon permanente. Ce qui caractérise plutôt les éléments psychiques, c'est la disparition rapide de leur état conscient.``

Et, en effet, toutes mes représentations, souvenirs, images, idées, ne sont pas en permanence présentes à ma conscience, il y a des représentations latentes, cachées, non consciente durant l'intervalle qui sépare deux moments durant lequel elles étaient conscientes.

Mais nous ne sommes pas encore là, dans les profondeurs quasi insondables de l'inconscient dont Freud pense qu'il est le cœ ur de la vie psychologiques, car nous n'avons parlé jusqu'à pré-sent que de reprépré-sentations toujours susceptibles de devenir conscientes.

9.5.2.2.2.4 Transition

N'y-a-t-il pas des représentations qui seraient dans l'impossibilité de redevenir consciente, et si c'est le cas, comment expliquer cette impossibilité d'accéder à la conscience ?

9.5.2.2.2.5 3° moment:

(de ``Mais nous..'' à ``...le deviennent'')

Freud veut nous conduire ici vers ``l'autre voie'' qui mène à l'inconscient.

Il ne suffit pas de décrire la vie psychique sous sa forme la plus élémentaire pour accéder aux profondeurs de l'inconscient.

Il est nécessaire pour cela de s'interroger au sujet des processus, des causes, des forces qui ex-pliquent le mouvement des représentations entre la conscience et l'inconscient, c'est pourquoi Freud parle ici de ``dynamisme psychique'' (dynamisme = mouvement).

En effet, si certaines représentations deviennent inconscientes, redeviennent conscientes ou produisent des effets sur la conscience, il y a bien une cause à tous ces mouvements.

Freud fait d'ailleurs référence à tous ces phénomènes dans la dernière phrase de cette partie du texte :

``

Nous avons appris ou, plutôt, nous avons été obligés d'admettre, qu'il existe d'intenses processus psychiques, ou représentations capables de se manifester par des effets semblables à ceux produits par d'autres représentations, voire par des effets qui, prenant à leur tour la forme de représentations, sont susceptibles de devenir conscients sans que les processus eux-mêmes qui les ont produits le deviennent''

9.5.2.2.3 Transition

Quelle est la nature de cette force qui rend possible ce dynamisme psychique ? 9.5.2.2.4 4° moment

(de ``C'est en ce point...'' à ``...résistance.")

9.5.2.2.4.1 Refoulement et résistance

Ces termes désignent la nature des forces qui empêchent certaines représentations de devenir conscientes, il existe en effet des conflits à l'intérieur du psychisme opposant la force du ``devenir conscient`` à une autre force qui empêche certaines représentations d'accéder à la conscience. Ces représentations sont des images, des souvenirs, qui sont chargés d'une signification et d'une éner-gie affective qui les repousse hors de la conscience.

Quelle est la preuve de cette hypothèse selon Freud ? Son efficacité.

``

Ce qui rend cette théorie irréfutable, c'est qu'elle a trouvé dans la technique psychanalytique un moyen qui permet de vaincre la force d'opposition et d'amener à la conscience ces représentations inconscientes.''

Cette preuve est d'ailleurs discutable, car une technique efficace ne repose pas nécessairement sur des fondement théoriques certains et assurés.

Cependant cette pratique entraîne une distinction théorique définissant l'état de ces représenta-tions et la force qui les empêche de devenir conscientes.

État des représentations = le refoulement qui caractérise toutes les représentations in-conscientes que la conscience ne peut tolérer en raison des principes moraux qui lui ont été inculqués durant l'enfance (ex : les désirs œ dipiens sont très vite refoulés dans l'in-conscient, mais il y a des manifestations détournées de l'inconscient dans les symptômes comme le rêve les actes manqués ou les symptômes névrotiques).

Force produisant le refoulement = la notion de résistance désigne cette force empêchant les éléments psychiques inconscients de devenir conscients et pouvant s'opposer à la dé-marche du psychanalyste lors de la cure.

Transition

Comment définir l'inconscient à partir de ces deux notions ? 9.5.2.2.5 5° moment

(de ``Notre notion...'' à la fin du texte)

L'inconscient se définit donc comme le siège du refoulé :

``

Ce qui est refoulé est pour nous le prototype de l'inconscient."

Il s'agit alors de l'inconscient au sens strict du terme, cependant tous les faits psychiques non-conscients n'appartiennent pas au domaine du refoulé ; c'est pourquoi Freud parle de ``deux varié-tés d'inconscient'' :

1° ``Les faits psychiques latents'' (cachés), mais prêts à resurgir, ``susceptible de devenir conscients''. ex : les souvenirs pouvant faire l'objet de réminiscence.

2° ``Les faits psychiques refoulés'', rejetés au plus profond de l'inconscient, ils se trouvent confrontés à une force de résistance qui les empêchent de devenir conscients.

Cette distinction en entraîne une seconde.

1) Préconscient : les faits latents qui d'un point de vue descriptif se situent hors de la conscience mais sont toujours susceptibles de le devenir.

2) Inconscient : siège du refoulé soumis à une force de résistance.

9.5.2.2.6 Conclusion

L'appareil psychique peut donc se comprendre en étant structuré de la manière suivante selon la Première topique élaborée par Freud :

Inconscient (ICS) : Siège du refoulé, ce qui ne peut accéder à la conscience et qui subit la force de la résistance.

Préconscient (PCS) : Ce qui est hors de la conscience, mais peut toujours devenir conscient.

Conscient (CS) : Ce que le sujet perçoit de lui-même et qui se trouve protégé par les forces de résistance.

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