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L’ESPACE OASIEN :

D. L’URBANISATION DANS L’ESPACE OASIEN

L’occasion que donne la présence de l’eau dans un espace désertique, à l’homme pour s’installer, est une occasion de survivance. Tel est l’oasis dans le grand Sahara. Cet atout faisait appel à la sédentarisation de la population nomade et à leur concentration. Habiter prés de sa palmeraie, y travailler et y exercer des activités de services divers donnaient naissance à plusieurs formes d’urbanisation.

a) Habitat rural

Ce type d’habitat est fortement lié à l’activité agricole. Dans un premier temps on construisait dans les oasis pour des fins d’utilité ayant une relation avec la palmeraie. On habitait prés des palmiers pour les irriguer, les entretenir, cueillir et stocker la récolte (Fig 101). Ces activités déterminaient une morphologie urbaine très remarquable par sa ponctualité et sa forme éparse. C’est un habitat d’accompagnement. Il est au nombre des exploitations et à la taille de la famille propriétaire des terres plantées.

L’habitat rural concrétisait spatialement les liens fonctionnels entre les habitants et leurs exploitations :

 Une petite résidence contenant généralement des cours centraux, des chambres, coin cuisine et des sanitaires.

 Un espace de stockage des dattes

 Une écurie

Fig 101 : Croquis Habitat Rural (Souf-Algerie)

L’ensemble, qui peut être multiplié en fonction des membres de la famille, est construit en terre, tronc de palmiers et palmes sèches (Fig 102). Ce qui reflète une image d’adaptation, d’homogénéité et d’unité d’une part et la proportionnalité logique qui rigidifie la notion et le sentiment d’appartenance.

b) Les Ksours

Ce sont des cités fondées aux XIème et XIIème siècle (Fig 103), résultat d’un mouvement transsaharien de commerce et d’une sédentarisation auprès des sources d’eau. Ils étaient de vrais établissements de contacts culturels, sociaux et économiques. Qualifiés de vernaculaires et primitifs, les Ksours, dont l’urbanisme était élaboré entre le XIIème et le XVIème siècle, portaient une identité islamique et témoignaient d’une particularité propre à des établissements humains définis dans le temps et dans l’espace.

Des maisons intramuros aux patios, des rues et ruelles étroites et sinueuses, des places et petites placettes organisées autour d’une mosquée à minaret carré, constituaient un tissu à l’image de la ville médiévale. Cette masse compacte issue de la juxtaposition des constructions, façonnée en fonction des conditions climatiques et sculptée en matériaux locaux est une autre image d’une adaptation de la population nomade dans le milieu saharien.

Le ksar, la Medina oasienne, est un autre niveau de mode de vie qui venait concrétiser la complémentarité et le sens du commun. L’ordre social et la culture des traditions ont conduit à l’appropriation convenable et intégrée de l’espace. Ceci avait fait des Ksours l’exemple exceptionnel d’un équilibre échappé entre l’homme et son entourage.

Fig 102 : Logement Rural (Souf-Algerie)

Fig 103 : Ksar Ouardane (Mauritanie)

Fig 104 : Ksar Tichitt (Mauritanie)

La forme, la fonction et le sens construisaient les éléments fondamentaux d’une composition urbaine cohérente qui préservait l’unité sociale et le contact permanent à travers la concertation et la fréquentation des espaces communs, protégeait la population contre les conditions climatiques parfois insupportables, et assurait la durabilité des ressources et la protection des écosystèmes.

Le Ksar et la palmeraie sont deux composantes d’une même vie. La palmeraie embrassait toujours les Ksours et leur favorisait un microclimat de fraicheur et des aires humides dans un milieu sec et terriblement chaud. Les palmiers dattiers sont les garants de l’économie locale et l’unique source des revenus de la population oasienne. D’un autre coté, la présence de l’homme formait une nécessité de développement et d’existence.

Ces critères qui font des Ksours une exception d’espace écologiquement sein, pratiquement vivant et remarquablement durable, s’imposent pour qu’ils soient pris comme références n’en pas pour des objectifs de reproduction mais pour des fins d’inspiration dans la conception et les projections de développement.

c) Villes héritées

L’histoire est un facteur déterminant des villes héritées. Leur configuration initiale est née de la trilogie : ville, jardins périurbains et cadre topographique (M. Cote, 1997) (Fig 105). Le passage de la compacité à l’étalement est, sur le plan morphologique, une explosion des anciens Ksours oasiens.

Les villes héritées, dites aussi intérieures anciennes, ont eu lieu suite à l’existence d’un noyau ancien. Autrement dit, elles démarraient d’un site historique.

Ce dernier, qui formait une force d’attraction, dans un premier temps, perdra cet attribut aux furs et aux mesures que la poussée urbaine prenne beaucoup plus d’espace. Dans la majorité des villes héritées, la croissance urbaine passait par trois grandes phases reconnues à travers la typologie des tissus et la chronologie des cultures: tissu ancien du Ksar (ville arabe), tissu en damier (ville coloniale) et tissu ordonné (ville récente) (Fig 106).

Dans les villes héritées les noyaux anciens ne constituent qu’une très petite proportion. Les étalements successifs, conditionnés par la topographie, qui traduisent une démographie galopante et une diversité culturelle, font naissance d’une autre identité moins originelle et difficilement reconnue.

Fig 105 : Villes intérieures d’origine ancienne (M. Cote)

Fig 106 : Ancien et Nouveau (Néfla - Tunisie)

Aujourd’hui, ces villes qui s’élargissaient et envahissaient progressivement les alentours de l’ancien noyau mettent en question la relation d’interdépendance qui liait les habitants à leurs palmeraies. La multiplication de la population diminue la chance de l’accession à une propriété agricole qui était à l’origine la cause fondamentale d’un fondement socioculturel. Les influences de la modernité, la mondialisation et la technologie réduisaient la production artisanale et attiraient les nouvelles générations vers d’autres activités.

D’un autre coté un grand risque commence déjà à avoir lieu, et menace l’existence même de tout le système oasien. Il s’agit de la conquête du béton et la vieillesse de la palmeraie (Fig 107).

d) Ville-oasis

La ville-oasis, comme le défini les saharologues, est une petite portion d'un arrière pays de palmeraies. L'espace occupé par l'urbanisation est très minime par rapport à l'étendu des surfaces occupées par la palmeraie. Elle n'est pas forcement ancienne. Les villes oasis peuvent être planifiées et nouvelles.

Les villes oasis anciennes prenaient une localisation centrale autour de laquelle se développait la palmeraie qui se propageait jusqu'aux contraintes physiques n'obéissant pas aux conditions de plantation. Bien qu'elles mènent une morphogenèse d'unité avec le palmier dattier, ces villes continuent en croissance et en étalement jusqu'à la saturation de l'espace urbanisable. Etranglées par sa localisation centrale, ces villes avalent, généralement, leurs palmeraies (Fig 108-109).