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L’orientation de l’éducation

Tableau N°7: Compétences à développer en quatrième année

1.8 Nouveaux programmes : leur mise en pratique

1.8.2 L’orientation de l’éducation

Une option fondamentale de la politique éducative est relative à l‟horizon que vise l‟éducateur ou, en termes plus précis, le choix entre le passé, le présent et le futur en ce qui concerne la personne qu‟on éduque et la société qu‟on veut construire. Lorsqu‟il s‟agit du futur, il faut encore savoir si on vise un modèle précis ou bien si on ne fait pas d‟autres hypothèse de société relative au futur que l‟image que peut en donner une vue prospective extrapolée.

Nous pouvons donc distinguer quatre orientations possibles : -le passé et la tradition

-le présent

-un futur non spécifié (bien que basé sur une hypothèse de société) -un futur spécifique par un modèle précis de société.

Contrairement à ce que nous pourrions penser au premier abord, ces quatre orientations ne sont pas mutuellement exclusives car un aspect de l‟éducation peut être orienté vers le passé alors qu‟un autre est dirigé vers le présent ou l‟avenir.

C‟est ainsi que certains pays africains essayent de bâtir une éducation affective et esthétique basée sur la tradition et les valeurs de leur héritage culturel en même temps qu‟ils s‟efforcent de promouvoir une éducation cognitive axée sur le développement, c‟est-à-dire orientée vers un futur spécifique par un modèle économique (capitaliste ou socialiste selon l‟orientation politique du pays). Cette bipolarité de l‟éducation est très évidente dans beaucoup de pays en voie de développement mais elle existe aussi dans une certaine mesure dans la plupart des systèmes éducatifs. Le problème de l‟orientation de l‟éducation est le plus souvent un problème de priorité plutôt que de choix exclusif.

Dans un ordre d‟idées voisin, Skilbeck1

considère que face au changement extérieur, l‟école peut adopter quatre stratégies, suivre le courant, préserver le meilleur, ignorer le changement ou regarder vers l‟avenir. La première stratégie conduit à réclamer l‟ajustement et la pertinence du curriculum au monde tel qu‟il est, la seconde est un conservatisme sélectif qui implique des critères de choix conscients, la troisième n‟est pas une stratégie à proprement parler mais une attitude plus au moins consciente de conservatisme et la

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Skilbeck,M.(1975), School-based curriculum development and the task of in-service education, in E. Adams (ed), in service Education AND teaching centre, Pergamon.

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quatrième implique que l‟école se fixe des objectifs clairs en anticipant les effets futurs de son action d‟aujourd‟hui.

L‟éducation nouvelle devrait se tourner vers l‟avenir et adopter une attitude « prospective » afin de définir aussi bien que possible ce futur auquel elle doit préparer les enfants d‟aujourd‟hui. Voilà ce que nous a fournis Gilles Ferry en parlant du monde de l‟an 20001 :

« Il est difficile d’imaginer ce que sera le monde de l’an 2000. On peut cependant admettre

que certaines tendances qui se manifestent actuellement persisteront ou s’accentueront : - des échanges internationaux concernant toutes les formes de l’activité humaine. -La mobilité sociale et professionnelle ;

-L’avènement d’une culture audio-visuelle ;

-L’accroissement exponentiel des informations disponibles ; -La part croissante des loisirs et des besoins culturels ;

-Les transformations accélérées de l’environnement et des modes de vie ; -L’ère des structures en mouvement.

En conséquence, l’éducation deviendra la fonction sociale primordiale et sera caractérisée par la prolongation généralisée des études d’acquisitions définitives durant la période scolaire, d’où la nécessité d’étaler et de renouveler les acquisitions pendant toute la vie ;

L’articulation étroite de l’enseignement sur les sources extérieures d’information ;

La place privilégiée qui sera celle des langages et des techniques propres à faciliter les communications entre les individus et entre les groupes.

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Mais ce qui parait le plus probable, c’est que les changements de toutes nature iront en s’accélérant, augmentant toujours davantage l’incertitude du futur. Dans la vie professionnelle, dans la vie sociale, dans la vie familiale, chacun devra faire face à des situations imprévisibles, résoudre des problèmes toujours nouveaux, changer périodiquement ses méthodes de travail et ses modes de vies ».

Cette confrontation d‟idées nous permet de prendre du recul et de réfléchir à ce qui devrait se faire et se projeter dans l‟avenir. Car nous remarquons aisément que treize ans après, les prévisions de G Ferry s‟avèrent exactes.

L‟interaction entre la focalisation de l‟éducation vers l‟individu ou la société et son orientation vers le passé, le présent ou le futur conduit à se demander si la finalité de l‟éducation est de préparer l‟individu à s‟insérer dans une société passée, présente ou future non spécifiée ou si elle doit avant tout contribuer à réaliser un modèle de société future en préparant les hommes à s‟insérer dans ce modèle ; ce qui conduit à leur inadaptation au modèle actuel et constitue une stratégie pour le modifier ou le renverser ; en d‟autres termes, il s‟agit de savoir si l‟éducation doit être une fin en soi ou essentiellement un instrument d‟action ou de pression politique.

Le problème est, ici encore, une question de priorité entre la fin éducative en soi et la conception de l‟éducation comme moyen de provoquer des transformations dans la société et, décrite dans ces termes, la question fait bien apparaitre qu‟il n‟y a pas incompatibilité mais hiérarchie car il est bien évident que, pour changer les choses, il faut aussi changer les hommes.

Il existe d‟ailleurs des positions intermédiaires entre la priorité absolue donnée à l‟une ou l‟autre option. Parmi celles-ci, il convient de citer l‟important mouvement du « reconstructionnisme » et plus particulièrement, du « reconstructionnisme social » dont les défenseurs se situent entre les deux extrêmes, avec une marge assez large de variation.

Voici par exemple une déclaration de Metcalf et hunt qui illustre cette position : « On

définit parfois un curriculum pertinent par le fait qu’il concerne les problèmes de la

1 Ferry, Gilles. La liberté d‟apprendre. Revue française de pédagogie. 1968.

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jeunesse. Ce n’est pas assez bien. Il est plus pertinent d’engager les jeunes gens dans une étude des problèmes de la culture plus large dans laquelle leurs problèmes personnels trouvent leur origine […] les études historiques et culturelles sont le plus pertinentes quand elles nous aident à prédire le future ou à faire la transition 1». Nous voulons surtout faire

remarquer que sans nier l‟intérêt des besoins individuels, beaucoup de reconstructionnistes admettent plus au moins explicitement qu‟un des buts de l‟école est de préparer l‟avènement d‟une nouvelle société.